La G@zette Nucléaire sur le Net! 
G@zette N°257
Nucléaire et agressions externes: quels risques?
Commission Nationale d'Evaluation 2

Des recherches et études relatives à la gestion des matières et déchets radioactifs
Instituée par la loi n°2006-739 du 28 juin 2006
Rapport d'évaluation n°4


RESUME ET CONCLUSIONS
Contexte général 
     Au cours de l'année 2009-2010, la Commission a évalué les progrès des études et recherches sur le stockage géologique des déchets de haute et moyenne activité à vie longue, et sur la séparation-transmutation des actinides présents dans le combustible usé des réacteurs nucléaires. 
     Les études sur le stockage géologique entrent dans une phase décisive: l'Andra a proposé une zone d'intérêt pour une reconnaissance approfondie, Zira (pdf) en vue de l'implantation d'un stockage géologique réversible; le Ministre d'État en charge de l'écologie, de l'énergie et du développement durable a validé ce choix. Si cette reconnaissance conduit à des résultats positifs, et après un débat public en 2013, la demande d'autorisation de création du stockage sera déposée par l'Andra fin 2014 pour être instruite en 2015. Le Parlement se prononcera ensuite sur les conditions de réversibilité. Il ne reste donc que 3 ans pour réaliser les études nécessaires et éclairer le débat public. 
     Les études sur la séparation-transmutation se poursuivent maintenant en relation avec celles menées pour la conception du prototype Astrid de réacteur nucléaire à neutrons rapides de 4e génération (pdf). La démonstration complète de la faisabilité de la stratégie de séparation-transmutation passe par une démonstration du multirecyclage du plutonium et des actinides mineurs à l'aide d'Astrid. Cela implique que le plutonium et les actinides mineurs présents dans le combustible usé de ce réacteur puissent être séparés et recyclés. 
     Les études et recherches sont conduites à la fois par les acteurs de la loi, par leurs partenaires et par la communauté académique; elles s'inscrivent dans un cadre international et sont dans leur ensemble d'une très grande qualité.

Entreposages et stockages des déchets radioactifs 
     Les études sur le projet de stockage profond réversible pour les déchets de haute et moyenne activité à vie longue ont été approfondies par l'Andra en 2009-2010. La Commission n'a pas reçu d'information nouvelle sur les déchets de faible activité à vie longue, ni sur leur mode de gestion. 
     Le Modèle d'inventaire de dimensionnement (Mid) permet à l'Andra d'estimer les quantités de déchets à vie longue qui devront être prises en compte dans la conception du stockage. Il sera un élément du débat public en présentant la liste limitative des déchets qui seront destinés au stockage géologique. 
     La Commission demande que l'Andra, en relation avec l'ensemble des acteurs, justifie, en s'appuyant sur des données chiffrées, les marges qu'elle prend pour le dimensionnement (quantités de déchets) du futur stockage. 
     Conformément au Plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs, l'Andra a présenté au Gouvernement à l'automne 2009 une proposition de Zira. Le Ministre d'Etat a demandé un avis à la Commission qui a reconnu l'excellente qualité du dossier scientifique établi par l'Andra. La proposition de Zira satisfaisait pleinement aux critères géologiques retenus pour l'implantation d'un stockage. 
     Les recherches dans le laboratoire souterrain de Meuse/Haute-Marne se poursuivent activement; nombre d'entre elles ont conduit à des publications dans des revues internationales. Les expériences de diffusion de longue durée dans l'argilite du Callovo-Oxfordien ont confirmé les qualités remarquables de cette roche pour le confinement des radionucléides. Néanmoins, la Commission regrette que l'Andra ne dispose pas encore de modèle opérationnel validé du comportement hydro-thermomécanique de la roche. Un tel modèle est indispensable pour prévoir l'évolution des ouvrages et ses conséquences en matière de sûreté et de réversibilité. 
     Depuis 2009, les études sur les technologies de stockage bénéficient de la création du Centre technique expérimental de Saudron en Haute-Marne. Compte tenu de la diversité des colis de déchets de moyenne activité, la Commission recommande une meilleure standardisation des colis de stockage et de la géométrie des alvéoles. 
     Les progrès que l'Andra a réalisés dans la définition d'options de conception réversible du stockage ne doivent pas faire oublier la vocation de ce dernier à être scellé à terme pour que puisse être garantie sa sûreté passive à long terme. Ils ne doivent pas davantage occulter les inconvénients éventuels d'une durée d'ouverture prolongée du stockage sur l'efficacité des scellements. 

suite:
     Les études paraissent confirmer progressivement les bonnes qualités de confinement du Callovo-Oxfordien. Une attention comparable doit maintenant être portée aux conséquences des options de conception des ouvrages souterrains sur la sûreté. Si des contradictions apparaissaient entre la sûreté en exploitation, la réversibilité et la sûreté passive à long terme, alors, la priorité la plus élevée devrait être donnée à la sûreté à long terme. 
     S'agissant d'un ouvrage unique dont certaines options techniques sont encore l'objet de recherches, la demande d'autorisation de création devra concilier la précision requise par la procédure administrative et la flexibilité nécessaire pour satisfaire aux exigences de réversibilité et de prise en compte des progrès techniques. Par ailleurs, à elles seules, ces recherches justifient pleinement la demande de l'Andra de maintenir opérationnel le laboratoire souterrain de Meuse/Haute-Marne jusqu'en 2030. 
     La Commission approuve l'ampleur et la diversité qu'acquiert le programme d'observation-surveillance du stockage. Elle souligne la nécessité d'établir des relations étroites entre ce programme et l'ensemble des activités de modélisation du comportement thermo-hydro-mécanique et chimique du stockage. Concernant la surveillance de l'environnement, la Commission apprécie très favorablement les efforts déployés par l'Andra pour développer un observatoire pérenne en liaison étroite avec les organismes présents localement et des équipes de recherche reconnues. 
     Le coût du stockage dans ses différentes options est un élément essentiel de la discussion qui aura lieu à l'occasion des diverses phases de la préparation et de l'examen de la demande d'autorisation de création. Conformément au Guide de sûreté édité par l'Autorité de sûreté nucléaire, il conviendra de retenir les options qui permettent de "maintenir l'impact radiologique du stockage au niveau le plus faible qu'il est raisonnablement possible d'atteindre, compte tenu [notamment] des facteurs économiques et sociaux". La Commission demande que lui soient fournies régulièrement des données détaillées concernant le niveau, la structure et la méthodologie de calcul du coût d'un stockage profond. 

Séparation et transmutation 
     Les résultats en séparation-transmutation reposent sur une base remarquable d'études de radiochimie pour lesquelles le CEA a une reconnaissance internationale. La mise en service du réacteur à neutrons rapides Astrid est une étape indispensable à l'aboutissement de la stratégie de séparation-transmutation. Ce prototype a pour objectifs, d'une part de préparer le lancement d'une filière industrielle de réacteurs du futur (4e génération), d'autre part de tester la transmutation des actinides mineurs. 
     La Commission considère, sans en sous-estimer la difficulté, que ces deux objectifs doivent être menés de front et que le cahier des charges d'Astrid doit inclure ces deux aspects pour le dossier 2012. Par ailleurs, elle redoute que le calendrier présenté par le CEA, EDF et Areva ne soit pas compatible avec une mise en service en 2020 prévue par la loi du 28 juin 2006. 
     La Commission attire l'attention sur la nécessité de construire un complément indispensable au prototype Astrid, à savoir un pilote de retraitement capable de démontrer en vraie grandeur que le cycle du combustible peut être fermé, le réacteur Astrid étant alimenté par le retraitement de son propre combustible usé. Le retour d'expériences français montre qu'on devrait pouvoir ultérieurement maîtriser toutes les étapes de ce retraitement à l'échelle industrielle, à condition de construire des usines appropriées, prenant en compte des teneurs élevées en plutonium, produits de fission et actinides mineurs. 
     Des études prospectives CEA-EDF-Areva permettent de simuler les conséquences techniques et économiques des différentes options de mise en place de la séparation-transmutation dans le cadre du déploiement d'un parc de réacteurs à neutrons rapides - RNR (pdf) et de systèmes assistés par accélérateur - ADS (pdf). Le CEA doit remettre en 2012 une évaluation des perspectives industrielles des filières à neutrons rapides. La Commission recommande que ce dossier intègre l'ensemble des options envisageables, précise la durée des phases transitoires conduisant à un parc électrogène constitué uniquement de RNR, et identifie les points techniques les plus durs, tant sur les réacteurs que sur les cycles du combustible associés. Ce travail devra expliciter les avantages et inconvénients de la transmutation, en particulier pour le stockage des déchets produits.

p.19


Dimension internationale 
     La France est activement présente dans une vingtaine de nouveaux projets ou actions communes recensés au niveau international, le plus souvent via l'Andra, le CEA, le CNRS et l'IRSN. 
     L'Andra continue à jouer un rôle de premier plan dans les études et recherches européennes sur le stockage géologique. La Finlande, la France et la Suède sont les trois pays européens les plus avancés dans la préparation de la construction d'un stockage géologique. Leurs agences respectives (Posiva, Andra et SKB) pilotent une nouvelle plate-forme technologique européenne. 
     Le CEA coordonne, ou est présent, dans les grands projets internationaux concernant les études et recherches sur la séparation-transmutation. Le CNRS est très actif dans les nouveaux projets concernant les cycles du combustible et les ADS. L'IRSN  participe à de nouveaux projets ayant trait à la sûreté des réacteurs actuels ou futurs et vise à ouvrir le laboratoire de Tournemire à la collaboration européenne. Tous ces organismes contribuent également aux programmes internationaux d'enseignement et de formation. 
     A l'étranger, le fait nouveau le plus marquant est la décision de la nouvelle administration américaine de réduire drastiquement le budget du projet "Yucca Mountain". La demande de licence a été retirée en mars 2010. L'administration a créé une commission constituée de parlementaires, de scientifiques et d'industriels, chargée de proposer des projets alternatifs.

Chapitre 1
STOCKAGES ET ENTREPOSAGES

     Les déchets radioactifs sont classés suivant leur activité, haute, moyenne, faible et très faible suivant les cas, et suivant leur durée de vie, longue ou courte suivant que leur période est supérieure ou non à 30 ans. Pour les déchets de haute et moyenne activité à vie longue (HA-MAVL), l'option retenue par tous les pays concernés est celle du stockage profond, qui doit de plus être réversible dans le cas du projet français. Le projet présenté par l'Andra fait l'objet de ce chapitre. 
     Une approche complémentaire est la séparation - transmutation qui consiste à transformer certains radionucléides à vie longue pour supprimer ou réduire leur nocivité à long terme. Cette approche ne pourrait être efficacement mise en œuvre qu'après 2040, dans une future génération de réacteurs nucléaires qui restent à concevoir et à construire. Elle ne concerne donc pas le projet actuel de stockage dans le Callovo-Oxfordien. Les études et recherches (E&R) pour la séparation-transmutation font l'objet du chapitre 2. La relation entre transmutation et charge thermique est évoquée au § 1.2.3 du présent chapitre. 
     1.1. CONCEPT DE STOCKAGE PROFOND 
     Les déchets radioactifs qui seraient déposés dans un stockage géologique profond résultent pour l'essentiel du traitement des combustibles usés retirés des réacteurs du parc électronucléaire français actuel, y compris un réacteur EPR en cours de construction. 
     1.1.1. Concept de stockage en 2005 
     Le stockage profond, dans la conception présentée par l'Andra à l'occasion du Dossier Argile 2005 (Noté dans la suite du rapport: Dossier 2005), implique des installations de surface qui permettent l'accueil des colis primaires, leur conditionnement en colis de stockage et leur entreposage en attente de leur mise en place au fond. Leurs fonctions doivent être précisées; ce sont des installations classiques, mais, pendant longtemps, elles seront la seule source de préoccupation du point de vue de la sûreté du public. L'accès aux ouvrages souterrains se fait par quatre puits verticaux spécialisés. Dans la conception de 2005, ces puits sont regroupés et excentrés par rapport aux zones souterraines de stockage, conformément à la conception générale "en cul-de-sac" de l'ouvrage. Au fond, depuis la base des puits, quatre galeries primaires parallèles, puis des galeries d'accès, permettent le transfert des colis, des personnels, des matériaux et de l'air de ventilation vers les alvéoles de stockage. Celles-ci sont regroupées en deux zones horizontales nettement séparées, placées à mi-hauteur de la couche d'argilite du Callovo-Oxfordien. 
     Une zone accueille les déchets MAVL dans plusieurs dizaines d'alvéoles parallèles constituées de galeries horizontales de 250 m de long et de 9 à 12 mètres de diamètre soutenues par un revêtement assez épais en béton. Les colis primaires de déchets MAVL sont contenus dans un colis de stockage en béton, muni d'un couvercle, de dimensions maximales 3m par 3m par 3m. Les colis de stockage sont d'une grande variété qui rend difficile une manutention complètement standardisée. Ce point est examiné au § 1.2.1. 
suite:
     La seconde zone accueille les déchets HAVL dans plusieurs centaines d'alvéoles parallèles regroupées en modules. Ces alvéoles ont une longueur de 40 m et un diamètre de 80 cm environ. Un chemisage en acier permet une mise en place et un retrait éventuel aisés des colis de stockage (colis primaires placés dans un surconteneur en acier). Les enveloppes successives protègent une matrice de verre dans laquelle les déchets sont incorporés. Les aménagements récents à la conception des alvéoles et les essais de creusement sont discutés au § 1.2.2. 
     Les déchets HAVL dégagent une quantité appréciable de chaleur.  En les répartissant sur une grande surface horizontale on évite que les températures atteintes par l'argile soient excessives. Ainsi, bien qu'ils aient un volume sensiblement plus réduit que celui des déchets MAVL, ils occupent une surface plus grande (cf. § 1.2.3.). 
     Ce projet se caractérise par sa compacité (le stockage occupe la plus petite surface possible à l'intérieur des limites fixées notamment par le problème de la charge thermique), sa modularité (le stockage est découpé en sous-ensembles relativement indépendants), son architecture arborescente, en "cul-de-sac" et, en comparaison d'autres projets, une utilisation réduite des argiles gonflantes, limitée aux seuls scellements disposés en tête d'alvéole, dans les galeries et les puits. 
     1.1.2. Evolutions du concept depuis 2005 
     Dans la période 2005-2009, le projet a fait l'objet d'un réexamen par l'Andra. Le rail comme moyen de transport au fond a été abandonné. Le nombre et la longueur des galeries ont été réduits pour des raisons de coût et de simplicité, mais cela peut avoir des conséquences pour les situations altérées. 
     Le principe de la conception en "cul-de-sac" a été en partie remis en cause, notamment en rendant les alvéoles MAVL passantes à la ventilation et en envisageant un dégroupage et un recentrement des puits, pour des raisons liées aux risques en exploitation (facilité de ventilation et risque d'incendie). 
     Les questions liées à la ventilation sont discutées au § 1.2.4. 
     Le diamètre des alvéoles MAVL pourrait être réduit pour éviter les chutes de colis de stockage dont 14 types différents sont envisagés pour couvrir l'ensemble de l'inventaire. L'Andra étudie également la possibilité d'utiliser plusieurs types de couvercles pour faciliter la mise en œuvre des colis. Une fonction d'étanchéité est envisagée pour le chemisage des alvéoles HAVL, discutée au § 1.2.4. La conception de la tête d'alvéole et la manutention des déchets ont été repensées dans l'optique de la réversibilité, avec parfois des améliorations en matière de sûreté. Le principe d'un accès par descenderie de 5 km, en plus de puits verticaux, a été retenu pour offrir de la souplesse dans l'implantation des installations de surface. 
 La Commission se prononcera ultérieurement sur ces modifications. 
     1.1.3. Zira 
     En vue de l'implantation d'un stockage, le Dossier 2005 définissait une zone de transposition dans laquelle les propriétés de la couche du Callovo-Oxfordien paraissaient analogues à celles reconnues dans le laboratoire et favorables à l'implantation d'un stockage. Au sein de cette zone le choix d'une zone restreinte dans laquelle une reconnaissance approfondie sera réalisée (Zira) a été effectué en 2009. Ce choix est discuté au § 1.2.5. 
 (…)
     1.2.3.  Charge thermique
     La couche du Callovo-Oxfordien dans laquelle on envisage de stocker des déchets radioactifs n'a connu que des évolutions naturelles très lentes depuis plusieurs dizaines de millions d'années. Un principe implicite du projet français est de minimiser les perturbations apportées par le stockage au milieu naturel. Ces perturbations ont cinq origines principales: le creusement des galeries et alvéoles, leur ventilation pendant que le stockage reste ouvert, l'introduction de matériaux exogènes, la production d'hydrogène par corrosion de l'acier et la chaleur engendrée par les déchets exothermiques.
     Evolution de la température 
     La température naturelle ("géothermique") du massif croît avec la profondeur; à 500 m elle est de l'ordre de 22°C. Elle est très stable à l'échelle de la dizaine de millénaires. Elle sera modifiée par la ventilation des ouvrages mais surtout par la chaleur produite par certains déchets.
p.20


     Dans le voisinage des puits, des galeries secondaires et des galeries principales, l'hygrométrie et la température de l'air de ventilation contribueront au développement de la zone endommagée (EDZ) mais la perturbation de la température de la roche restera modérée. Les déchets MAVL dégagent un peu de chaleur. En revanche, certains déchets HAVL sont fortement exothermiques. La chaleur totale qu'ils dégageront est difficile à préciser en raison de l'incertitude sur l'inventaire des déchets. La Commission n'a pas de données précises sur ce point. L'ordre de grandeur est vraisemblablement de 1016 Joules si tous les combustibles sont retraités et les déchets déposés après 60 ans de refroidissement. Cette chaleur est dégagée progressivement et de plus en plus lentement. La décroissance de la puissance thermique est inégalement rapide suivant les radionucléides concernés; par exemple, elle est lente pour l'américium. Toutefois, après quelques siècles, l'essentiel de la chaleur est produite. A ce moment, elle est encore entièrement contenue dans le massif rocheux, sauf une petite partie évacuée par l'air de ventilation. Ce n'est que bien après la fermeture du stockage que la chaleur produite sera évacuée par la surface du sol.
     La chaleur produite se dissipe essentiellement par conduction au sein du massif (la convection et le rayonnement ne jouent un rôle qu'au voisinage immédiat des colis). L'Andra a mesuré les valeurs des paramètres physiques qui gouvernent la conduction. La diffusivité thermique des argilites est nettement anisotrope et de l'ordre de 30 m2/an, ce qui est un peu plus faible que la moyenne des roches. L'incertitude sur les températures calculées, même à long terme, devrait être réduite. 
     L'accroissement de température est maximal dans les conteneurs. Le choix de l'Andra, commenté plus loin, est de limiter à 90°C le maximum de température à l'interface entre les alvéoles et les argilites, maximum qui est atteint après 10 à 20 ans. Dans une couche de quelques dizaines de mètres d'épaisseur au-dessus et au-dessous du niveau de stockage, la température augmentera progressivement de quelques dizaines de °C, avant de décroître lentement.
     Après 1.000 ans la température maximale sera descendue à 40-45°C. In fine, toute la chaleur produite sera évacuée par la surface du sol. La perturbation thermique y deviendra sensible après 5.000 ans environ; il ne semble pas qu'elle soit suffisante pour y avoir des effets perceptibles.
     C'est donc dans la couche du Callovo-Oxfordien, et surtout au voisinage du plan de stockage des colis de déchets, que l'augmentation de température sera sensible. Elle y sera d'ailleurs inégalement rapide car les colis ne seront mis en place que progressivement. Coexisteront donc avant la fermeture du stockage, des modules chauds et des modules encore peu réchauffés. Il sera plus compliqué de récupérer les colis dans un module chaud. 
     Effets de l'évolution de la température 
     L'augmentation de température a des effets variés dont la Commission a tenté de dresser une liste qui n'est sans doute pas exhaustive: 
     - au plan thermomécanique, l'élévation de température engendre une modification des propriétés mécaniques de la roche (caractéristiques élastiques, viscosité) mais c'est la dilatation thermique de l'acier, du béton, des verres et de l'eau qu'elle contient, qui engendre les effets les plus sensibles, notamment des contraintes mécaniques additionnelles. Ces contraintes peuvent modifier l'étendue et la qualité de l'EDZ. À plus grande échelle, la contrainte moyenne augmentera dans le massif rocheux et des cisaillements importants se développeront sur le pourtour du stockage. Le coefficient de dilatation thermique de l'argilite est assez faible, proche de 10-5/°C ; il n'en reste pas moins qu'une énergie thermique dégagée de 1016 Joules engendre un accroissement de volume de la roche de l'ordre de 150.000 m3. Cet accroissement se résorbe par fermeture des jeux (excavations pratiquées dans le massif ou fracturations) ou soulèvement de la surface du sol, qui restera néanmoins à peine perceptible, car il doit être réparti sur la surface horizontale de la zone de stockage des colis de déchets HAVL qui est de plusieurs millions de m2. Une mention particulière doit être faite de la dilatation différentielle eau/roche; les premiers essais de l'Andra ont montré que les pressions de l'eau porale engendrées par l'échauffement se dissipent difficilement dans l'argilite peu perméable et sont élevées, avec des conséquences possibles pour les mouvements de l'eau vers les alvéoles et les galeries. Sauf pour ce dernier thème, la Commission n'a pas reçu beaucoup d'information sur les progrès réalisés depuis le Dossier 2005. 
     - aux plans chimique, physique et biologique, l'accroissement de température déplace les équilibres et accélère les cinétiques des réactions. L'Andra étudie beaucoup de ces phénomènes qui concernent par exemple les interactions entre béton, acier, roche, en présence ou non d'eau et d'oxygène, la perméabilité de la roche ou les propriétés de diffusion dans l'EDZ et dans la roche saine, les transformations minéralogiques des argiles, possibles si une température supérieure à 70°C est maintenue pendant plusieurs milliers d'années. 
     Certains autres phénomènes ne semblent pas avoir encore été étudiés, par exemple l'effet de la température sur la dissolution de l'hydrogène dans l'eau du massif. Une place spéciale doit être faite au comportement des radionucléides en solution, après que la lixiviation des verres a commencé: au-dessus de 50°C ce comportement est moins bien connu et leur diffusion devient vraisemblablement beaucoup plus rapide. C'est aujourd'hui le phénomène principal d'origine thermique pris en compte pour le dimensionnement du stockage.
     La Commission demande que l'Andra fasse un bilan des effets de l'accroissement de température afin d'en hiérarchiser l'importance, d'en vérifier l'exhaustivité et d'identifier ceux qui requièrent  prioritairement des recherches
suite:
     Température et comportement des verres en présence d'eau 
     C'est le comportement des radionucléides en solution qui, du point de vue des effets thermiques, est le paramètre retenu par l'Andra comme dimensionnant. Le projet de stockage a été conçu pour que la température des verres n'excède pas 50°C au moment où ils pourraient être mis en contact avec l'eau du massif, c'est-à-dire quand la corrosion aura percé les enveloppes métalliques qui les protègent. L'estimation de la vitesse de corrosion de l'acier et le calcul de la décroissance de température ont conduit l'Andra à proposer une épaisseur de 5 cm pour le surconteneur en acier non-allié, de sorte que le premier contact entre verre et eau soit repoussé à plusieurs milliers d'années après la fermeture du stockage. Afin de limiter l'altération des verres en présence d'eau, il faut qu'à ce moment la température à la surface extérieure des verres soit redevenue inférieure à 50°C. 
     Les calculs d'évolution de la température qui sont assez fiables et le seront encore plus quand on disposera d'essais en place assez longs, montrent que, pour vérifier cette condition, il faut limiter à 90°C la température maximale atteinte (une vingtaine d'années après leur mise en place) à l'extrados du chemisage. C'est un choix qui, au vu des options retenues par d'autres pays, apparaît raisonnable. 
En rendant étanche le chemisage des alvéoles, on dispose d'une marge supplémentaire pour le temps d'arrivée de l'eau au contact des conteneurs. 
     Dimensionnement du stockage 
     Pour limiter la température maximale en paroi des alvéoles à 90°C, on peut jouer sur plusieurs paramètres de conception. Le premier est le temps de refroidissement en entreposage des colis primaires exothermiques, avant leur mise en place en stockage. Il est fixé à 60 ans dans le Dossier 2005. Un temps d'attente plus long est envisageable: son doublement permettrait de diviser par deux l'emprise de la zone de stockage HAVL, mais un stockage resté ouvert trop longtemps en attente des colis de déchets risque de voir certaines qualités de ses ouvrages se dégrader avec le temps. 
     Un autre paramètre de conception est l'étalement dans l'espace du stockage qui vise à réduire la puissance moyenne émise par unité de surface horizontale du stockage. Pour les déchets les plus exothermiques, un intercalaire inerte est placé entre deux colis consécutifs dans l'alvéole. Par ailleurs, on laisse une certaine distance entre deux alvéoles parallèles consécutives, puis entre deux modules regroupant quelques centaines d'alvéoles. On pourrait augmenter ces distances. Néanmoins l'étalement du stockage a aussi ses limites, pour des raisons de coût d'excavation mais surtout d'emprise horizontale totale du stockage: un stockage plus compact permet de garder des marges importantes du point de vue de la distance aux accidents géologiques (failles) repérés, ou vis-à-vis de choix politiques en rupture avec ceux qui prévalent aujourd'hui, par exemple l'arrêt du retraitement qui conduirait à stocker des assemblages de combustibles usés plus exothermiques que les déchets du retraitement. Une telle éventualité rendrait nécessaire un refroidissement plus long et/ou un espacement plus important entre les colis. 
     Le troisième paramètre, mais qui ne concerne en pratique qu'un futur deuxième stockage, est la transmutation de tout ou partie des actinides mineurs. En effet, un intérêt de la transmutation est de réduire leur quantité dans les déchets. Longtemps après la décroissance des produits de fission, les actinides mineurs, notamment l'américium, sont les plus forts contributeurs au dégagement de chaleur. Cette stratégie qui ne concerne pas le stockage actuellement envisagé dans la Zira, est discutée dans le chapitre 2. 
     Implication d'une réduction de la charge thermique
     On dispose donc de plusieurs possibilités pour réduire la charge thermique, mais chacune présente des inconvénients en termes de coût ou de sûreté. La difficulté principale actuelle tient à l'absence de critères simples de choix. Pour les diverses options, l'Andra a effectué des calculs ou des estimations des avantages et inconvénients en termes de sûreté pour les scénarios principaux d'évolution ; mais les qualités de confinement du Cox amortissent toute sensibilité des flux calculés aux choix des options de conception. De plus, on peut comparer les diverses possibilités en regard de principes plus généraux (simplicité, redondance, robustesse, prudence). Mais cette comparaison ne semble pas avoir encore été réalisée malgré son importance pour le dimensionnement d'un stockage dans le Callovo-Oxfordien ou pour le choix de l'option de la transmutation. 
     La Commission demande que la réflexion sur les avantages et inconvénients du niveau actuel choisi pour la charge thermique soit conduite rapidement. Cette réflexion sera un élément important lors du débat qui précédera l'examen de la demande d'autorisation de création (DAC) d'un stockage.
(...)
     1.2.5. Recherches menées par l'Andra pour le choix de la Zira 
     Le PNGMDR a chargé l'Andra de proposer au Gouvernement avant fin 2009 "une zone d'intérêt restreinte propice à l'implantation d'un stockage sur laquelle seront mises en œuvre des techniques d'exploration approfondies (Zira)". La Zira dont la superficie est d'une trentaine de km2, concerne au premier chef la zone d'implantation des installations souterraines du stockage; elle sera située au sein de la zone de transposition de 250 km2. A la Zira pourront être associées une ou plusieurs zones d'implantation des installations de surface (ZIIS) dont la localisation sera définie en interaction avec les préoccupations d'aménagement du territoire.
p.21


     Dans son rapport n°3, la Commission avait souligné que le critère déterminant du choix de la Zira devait être la qualité géologique; en mars 2009, l'Andra a exposé à la Commission une revue des contraintes d'ordre géologique qu'elle prendrait en compte pour ce choix. En octobre 2009, à la demande de la Commission, l'Andra a présenté le détail des données géophysiques (sismique 2D) et géologiques (forages, prospection de surface) acquises au sein de la zone de transposition ainsi que sa démarche appliquée au choix de la Zira. L'analyse que la Commission a faite de ces résultats figure à l'annexe 4. 
     L'Andra a transmis au Gouvernement en octobre 2009 une proposition de Zira cherchant à optimiser les critères techniques et les critères liés à l'aménagement du territoire et à l'insertion locale selon les principes suivants: 
     - privilégier une implantation de la Zira dans la zone identifiée comme plus intéressante vis-à-vis des critères liés à la géologie et à la sûreté; 
     - permettre l'implantation dans la Zira de l'architecture souterraine de référence présentée dans les options de conception 2009; 
     - être compatible avec une implantation du débouché au jour, dans la zone frontalière Meuse/Haute-Marne, de la descenderie envisagée pour accéder au milieu profond; 
     - être compatible avec une implantation des puits d'accès dans une zone boisée; 
     - éviter une implantation sous les villages
     Le Ministre d'État notamment chargé de l'écologie, de l'énergie et du développement durable, a consulté la Commission en novembre 2009 sur la proposition faite par l'Andra. 
     La Commission reconnaît l'excellente qualité du dossier scientifique établi par l'Andra et considère que la zone au sein de laquelle une Zira pourrait être choisie est cohérente avec les critères géologiques et techniques nécessaires à l'implantation éventuelle d'un stockage géologique. Sur la base des données acquises, la Commission considère que les investigations approfondies prévues dans la Zira méritent d'être menées à bien au cours des années 2010-2011.
     Parmi les questions auxquelles ces investigations devront répondre la Commission retient particulièrement: 
     - la possibilité d'extrapoler à 600 m de profondeur les observations faites sur le comportement mécanique de galeries creusées à 500 m de profondeur en laboratoire souterrain; 
     - la nécessité de présenter, dans le dossier qui sera établi pour le débat public précédant le dépôt de la DAC, une description précise des installations de surface et de leur objectif technique; 
     - l'opportunité de préciser les conditions géologiques et hydrogéologiques qui prévaudront lors du creusement de la descenderie d'accès au stockage en profondeur et de vérifier que la réalisation de cet ouvrage n'altèrera pas les qualités de la Zira. 
     La Commission a également examiné les conclusions tirées par l'Andra sur les potentialités géothermiques des grès du Trias. Elle considère que cette formation ne représente pas une ressource géothermique attractive (cf. annexe 3).
     1.2.6. Réversibilité – Observation/surveillance 
     Réversibilité du stockage 
     Conformément à l'échéance fixée par le décret de 2008 relatif au PNGMDR, l'Andra a produit fin 2009 un document de synthèse sur les "options de réversibilité du stockage en formation géologique profonde". Ce document intègre dans une contribution globale les derniers résultats des E&R sur le contenu et les moyens d'une gestion réversible du stockage. Il introduit également la phase suivante d'E&R pour la préparation du débat public qui doit précéder la DAC (fin 2014), eux-mêmes préalables à la loi devant définir, en 2016, les conditions de réversibilité sur une durée dont on sait d'ores et déjà qu'elle ne peut être inférieure à cent ans.
     La problématique d'ensemble déjà proposée y est réaffirmée: elle combine récupérabilité des colis et progressivité du processus décisionnel assurant la possibilité d'un retour en arrière sur la gestion initialement décidée (capacité à agir sur le processus de stockage et à faire évoluer sa conception, notamment à la faveur d'évaluations décennales). Elle s'est enrichie de solutions concrètes favorables à la réversibilité (chemisage éventuellement étanche pour les alvéoles HA, patins de glissement au contact surconteneur/chemisage, diminution de la hauteur de gerbage des conteneurs MAVL...) et de la formulation de variantes ouvertes à décisions ultérieures concernant tant l'organisation globale du stockage profond et de l'entreposage de surface associé, que les modalités pratiques de réalisation des différentes opérations de manutention, de mise en place et de récupération, pour les colis et alvéoles HAVL et MAVL.
suite:
     Ces propositions s'appuient sur une analyse plus précise, partiellement quantitative, des phénomènes à l'œuvre dans les différents éléments du système de stockage durant toute sa phase d'exploitation; ceci permet d'étayer différents choix (ou fourchettes) de dimensionnement (colis, conteneurs, chemisage, jeux, alvéoles...) en dégageant quelques temps caractéristiques de phénomènes variés (thermiques, chimiques, mécaniques, diffusifs...) aux différents niveaux de l'échelle de récupérabilité formulée précédemment (voir rapport n°3 de la CNE2, 2009) et d'ébaucher des "chronogrammes glissants" pour chacun de ces niveaux. 
     Les dispositions de construction, de mise en place et de retrait, intègrent et continueront d'intégrer les résultats d'essais de longue durée dans le laboratoire souterrain de Meuse/Haute-Marne (comportement des matériaux, des ouvrages et des capteurs) et d'essais technologiques, y compris sous la forme de démonstrateurs des procédés de mise en place et de retrait. 
     Elles s'accompagnent d'une réflexion méthodologique sur la répartition de l'instrumentation aux fins d'observation-surveillance, de schémas d'implantation de capteurs dans les alvéoles HA et MAVL pour toute la phase d'exploitation, voire au-delà, de la mise au point de procédures de qualification de capteurs et de la définition des besoins spécifiques nécessitant des développements de R&D. 
     En parallèle, l'Andra entretient des échanges nationaux et internationaux, souvent pluridisciplinaires, sur la notion de réversibilité et poursuit son effort de mobilisation des sciences humaines et sociales sur cette question. Une échéance importante dans ce domaine est l'organisation en France fin 2010, sous l'égide de l'OCDE, d'une conférence internationale sur la réversibilité. 
     La Commission apprécie positivement l'engagement de l'Andra sur les différents aspects de la réversibilité, sur la dimension, tant technique que sociétale, nationale qu'internationale, qu'elle donne à cette question et sur l'affinement de son analyse scientifique et technique.
     Elle formule pour sa poursuite les recommandations suivantes: 
     - l'échelle de réversibilité initialement proposée par l'Andra est désormais reprise, après simplification en 5 niveaux, par le groupe d'études international coordonné par l'AEN, sous la forme plus restreinte d'une échelle de récupérabilité des colis. Il est souhaitable que l'Andra n'abandonne pas son approche plus large de la réversibilité qui inclut le caractère progressif du processus décisionnel et précise les jalons associés au franchissement de chaque niveau de cette échelle; 
     - les analyses à la base de l'APSS doivent être approfondies et complétées pour tenir compte des couplages entre phénomènes, intégrer une modélisation mécanique robuste et éprouvée du comportement du massif argileux et parvenir à des prédictions quantitatives fiables de la réponse dans le temps des différents éléments du stockage. Il est indispensable que ces prédictions tiennent pleinement compte des perturbations provoquées par les travaux de stockage eux-mêmes tout au long de la phase d'exploitation (maintien d'une atmosphère oxydante, désaturation de l'argile...) pour que puissent être précisément appréciées  non seulement les latitudes autorisées en matière de durée de réversibilité mais aussi les contreparties pratiques de l'exigence de réversibilité ; c'est en particulier ce qui permettra de trancher de manière fondée la question de savoir quand doit commencer la durée au moins séculaire de la période de réversibilité fixée par la loi; 
     - plus généralement, les études de l'Andra sur la mise en œuvre d'une gestion réversible du stockage géologique ne doivent pas risquer d'occulter la vocation d'un tel stockage à être fermé à terme défini, après quoi la sûreté doit être assurée de manière passive. La fermeture du stockage, rappelons-le, n'implique pas l'arrêt du contrôle et de l'observation ; elle n'empêche pas davantage l'accès aux déchets par travaux miniers. S'il est essentiel, par la mise en place de dispositions assurant une réelle réversibilité, de laisser aux générations futures le choix des rythmes et des modalités de gestion du stockage, il est tout aussi important de leur laisser la possibilité de sa fermeture définitive dans les meilleures conditions le moment venu; 
     - enfin, il est clair que seule une évaluation du "surcoût" de la réversibilité à ses différentes étapes permettra de fonder une véritable gestion réversible du stockage et les choix qui s'y attachent (voir § 1.3.).
p.22


     Observation – surveillance du stockage
     Les E&R de l'Andra concernant l'observation - surveillance des déchets HA-MAVL visent à concevoir, installer, exploiter et maintenir les dispositifs d'auscultation et de mesure utiles à l'exploitation du stockage et sa gestion réversible par étapes ainsi qu'aux analyses de sûreté, en exploitation comme après fermeture. Cette activité est en relation étroite avec la modélisation en permettant la fourniture de données d'entrée et la validation des modèles. 
     Les efforts de l'Andra se focalisent: 
     - sur le choix et la mise au point de systèmes d'auscultation durables (la durée concernée est au moins séculaire), nécessitant redondance et complémentarité; 
     - sur la définition d'une répartition optimale de l'instrumentation in situ, sur la base d'une distinction graduée entre ouvrages "pilotes", "témoins", "courants" et "non instrumentés", dont la densité d'instrumentation va en décroissant; 
     - sur la sélection de dispositifs d'auscultation, incluant analyse du retour d'expérience, interne et externe, qualification des instruments retenus, éventuellement après adaptation aux conditions d'un stockage géologique, et détection de lacunes nécessitant des efforts spécifiques de R&D (notamment pour ce qui concerne le suivi de l'hygrométrie, la détection et l'analyse des gaz et l'analyse chimique des matériaux). 
     L'activité de R&D, soutenue depuis deux ans par les travaux d'un important groupement de laboratoires, couvre l'inventaire des technologies disponibles, la mise en place d'un suivi thermo-hydro-mécano-chimique avec décorrélation des phénomènes fondée sur la différence de leurs temps caractéristiques, le "durcissement" des moyens de mesure en conditions réelles et l'évaluation de leur vieillissement ainsi que la maîtrise des dérives temporelles. On soulignera notamment: 
     - la préparation de deux essais d'instrumentation dans le laboratoire de Meuse/Haute-Marne d'un chemisage d'alvéole HA (en 2010) et d'une section type MAVL (en 2011);
     - la qualification du suivi thermomécanique par mesures réparties sur fibres optiques en rétrodiffusion Brillouin; 
     - l'utilisation du retour d'expériences de 15 ans de mesures de teneur en eau sur la structure expérimentale de couverture au CSFMA; 
     - le suivi localisé des gaz et de l'évolution des matériaux par développements ciblés de capteurs chimiques plus durables et fiables (réalisation d'un spectromètre miniature pour analyse des gaz); 
     - la mise au point d'une démarche de qualification sur le cas des extensomètres à corde vibrante allant progressivement de tests en laboratoire en température contrôlée, à des tests in situ avec réalisation de démonstrateurs puis durcissement pour tenue à l'irradiation. 
     La Commission apprécie positivement l'ampleur et la diversité qu'est en train d'acquérir le programme d'observation-surveillance pour le stockage réversible des déchets HA-MAVL. Elle souligne la nécessité d'établir des interactions étroites avec l'ensemble des activités de modélisation. Ceci doit concerner non seulement la définition et la vérification de critères ponctuels d'acceptabilité mais aussi la validation de modèles d'évolution spatio-temporelle des variables pertinentes dans tout le champ du stockage. Compte tenu de l'importance de ce programme pour la conduite d'une gestion réversible du stockage, de la richesse du retour d'expériences à attendre et de la rapidité des progrès dans ce domaine scientifique et technique, elle souhaite que soit sérieusement considérée et, le moment venu, instruite, la possibilité d'une poursuite du programme pendant toute la phase d'exploitation du stockage.

1.3.  COÛTS DU STOCKAGE
     Dans ses précédents rapports, la Commission a regretté de ne pas disposer de données économiques plus complètes concernant le coût d'un stockage et plus généralement le coût de la gestion à long terme de l'ensemble des déchets radioactifs. Or, la loi du 28 juin 2006 prévoit de façon explicite que de telles données doivent être disponibles et rendues publiques. L'article 14 de cette loi impose à l'Andra de proposer au Ministre chargé de l'énergie "une évaluation des coûts afférents à la mise en œuvre des solutions de gestion à long terme des déchets radioactifs de haute et de moyenne activité à vie longue selon leur nature". Il apparaît en effet  difficile  de porter un jugement pertinent sur des options scientifiques et techniques sans prendre en compte la dimension économique et financière. A partir du moment où l'on entre dans une phase de réalisation concrète du projet, il devient nécessaire de disposer d'une évaluation assez précise des options possibles.

suite:
     L'application du principe dit Alara, internationalement reconnu, conduit à prendre en compte les critères de coût dans le choix de la meilleure des diverses solutions techniquement possibles, sans remettre en cause la priorité attribuée à la sûreté à long terme. Le législateur, en modifiant dans la loi de 2006 la composition de la Commission, considère de façon implicite que les compétences de la Commission doivent s'étendre aux aspects économiques et sociaux des projets qui seront étudiés. Le 22 octobre 2009, en recevant le bureau de la Commission, le Ministre d'État lui a annoncé la mise en place, auprès de la DGEC12, d'un groupe de travail associant les producteurs de déchets, l'Autorité de sûreté nucléaire et l'Andra, en vue de la mise à jour de l'évaluation du coût du stockage.
     En février 2010, une délégation de la Commission a été reçue au ministère par le Directeur de l'industrie nucléaire qui lui a indiqué que ce groupe de travail, mis en place à la DGEC fin 2009 pour procéder à une ré-estimation des chiffres publiés en 2005 par l'Andra, a centré ses travaux sur des problèmes de méthodologie, en particulier pour passer de coûts unitaires à des coûts globaux. De nouvelles estimations devraient être disponibles courant 2011. 
     La Commission prend note de cette décision et souhaite disposer au plus tôt des nouvelles données qui pourraient être disponibles. 
     Les coûts du stockage doivent être supportés par les producteurs de déchets qui ont l'obligation de par la loi de constituer des provisions, en vertu du principe "pollueur-payeur" rappelé par le Code de l'environnement. Au vu des hypothèses faites sur l'inventaire des déchets à stocker (MAVL et HAVL) et conformément au scénario dit "industriellement envisageable", plusieurs chiffres avaient été avancés par l'Andra en 2005. La fourchette se situait entre 13,5 et 16,5 milliards € (€ 2002) et tenait compte d'un facteur d'aléas et d'opportunités liés à des risques divers tant au niveau de la construction qu'à celui de l'exploitation du site. Ils intégraient en principe les mesures dites d'accompagnement qui correspondent aux aides diverses accordées par l'Andra aux communes concernées par le stockage. 
     Ces chiffres (fourchette de 13,5 à 16,5 milliards €) ont été rappelés par l'Andra lors de l'audition du 18 février 2010. L'Andra a expliqué qu'ils ont été obtenus par une approche globale. A noter qu'en proportion des coûts totaux de la filière nucléaire, ce coût du stockage estimé en 2005 représentait de l'ordre de 1% du prix de revient du kWh nucléaire.  Il faut souligner que ces estimations ne prenaient pas en compte les coûts de la réversibilité qui, avant la loi de 2006, n'était qu'une option. Par ailleurs, il s'agit là de montants non actualisés qu'il faut actualiser en tenant compte d'un taux de préférence pour le présent (taux d'actualisation) si l'on veut pouvoir calculer le montant des provisions à constituer. La question est de savoir quel taux retenir: 8% jusqu'à 30 ans (ou 4%?) et 3% au-delà comme cela a été suggéré?
     Si une connaissance, même imparfaite, du coût global du stockage souterrain se révèle très importante aussi bien pour les producteurs de déchets que pour les autorités politiques, ce sont surtout les estimations des coûts unitaires, opération par opération, qui permettront de présenter des évaluations pertinentes. 
     Une nouvelle méthode de calcul est donc maintenant utilisée pour estimer les coûts complets du stockage en s'appuyant sur une approche de type A.C.V. (Analyse du cycle de vie). Elle suit à la trace tous les coûts de la chaîne qui va du producteur de déchets au stockage définitif dans le site retenu. 
     Elle doit tenir compte des coûts directs et des coûts indirects ou "externalités" dont la valorisation est parfois difficile car certains impacts ont une valeur marchande difficile à estimer. 
     Cette méthodologie permet d'obtenir la structure, le niveau et l'évolution du coût de chacune des options qui seront étudiées. 
     Par rapport aux précédents chiffrages, l'approche analytique constitue un progrès puisque: 
     * chaque opération (excavation, soutènement, creusement des alvéoles etc...) est décomposée en tâches élémentaires; 
     * les ressources et les moyens nécessaires à la réalisation de chaque tâche élémentaire sont décrits (effectifs, matériels, matériaux...); 
     * les coûts sont ensuite traduits en unité d'œuvre comme par exemple le mètre linéaire pour la construction des galeries.
p.23


     Ces calculs reposent sur les coûts unitaires fournis par les sous-traitants spécialisés. Certes, certains coûts induits, liés à des aléas par exemple, ne peuvent être estimés qu'à l'aide de ratios établis à partir des coûts directs, et l'évolution des normes en matière de législation environnementale ou sanitaire conduira à faire évoluer les coûts de certaines opérations. Ce sont surtout les cadences de réalisation puis les cadences d'exploitation du stockage qui constituent une source d'incertitudes pour l'évolution de ces coûts. C'est à partir d'une meilleure connaissance de ces coûts unitaires qu'il sera ensuite possible de remonter au coût global et d'orienter les choix. 
     Par ailleurs, le CEA (I-Tésé) lors de son audition a présenté une analyse économique de plusieurs scénarios de transmutation des déchets et a évalué à chaque fois le surcoût engendré par ce choix (cf. chapitre 2 du présent rapport). Cette étude ne concerne pas le stockage souterrain actuellement à l'étude en Meuse/Haute-Marne.
     La Commission prend acte des efforts entrepris par l'Andra, les producteurs de déchets et la DGEC pour améliorer la connaissance du coût global et des coûts unitaires d'un stockage souterrain de déchets radioactifs à haute et moyenne activité et à vie longue. 
     La Commission estime que le chiffrage en cours devra refléter, non seulement le niveau, mais aussi la structure des coûts complets du stockage et l'évolution de cette structure dans les divers scénarios envisagés. Elle souhaite être informée régulièrement des méthodes utilisées pour le calcul des coûts et des résultats des divers chiffrages obtenus. Elle considère qu'une attention particulière doit être apportée à la prise en compte des aléas. Le chiffrage doit évidemment tenir compte des coûts indirects: coûts environnementaux, coûts liés aux mesures d'accompagnement, mais aussi retombées économiques et industrielles pour les régions concernées. 
     Parmi les questions qui méritent une attention particulière la Commission mentionne les points suivants: 
     - quels sont les coûts respectifs des diverses options de la réversibilité prévue dans la loi?
     - quel serait le différentiel de coût entre un stockage des déchets graphites dans des installations dédiées en sub-surface et leur stockage dans le site de stockage profond?
     - quel serait le différentiel de coût si on optait pour un allongement de l'entreposage sur le site de certains déchets à fort dégagement thermique au lieu de les enfouir rapidement?
     - quel est le différentiel de coût des différentes modifications des options de conception envisagées depuis 2005, par exemple le choix d'une descenderie par rapport à une option "tous puits verticaux"?

ANNEXE 1
LES DECHETS RADIOACTIFS ET LES MID DES PROJETS  DE STOCKAGE GEOLOGIQUE

(...)
     1.1.2. Matières 
     Les matières radioactives sont recensées et décrites dans l'inventaire, compte tenu des réserves liées au secret commercial et au secret défense. L'article 13 du décret du 29 août 2008 fait obligation aux propriétaires de justifier que ces matières sont, ou seront à terme, valorisables, sinon elles auraient le statut de déchet. Toutefois, aucune limite de temps n'est avancée pour statuer. Toute valorisation nécessite de pouvoir extraire des matières radioactives leurs parties valorisables (sauf pour certaines qualités d'uranium appauvri) et de pouvoir les utiliser. La commission se place selon ce point de vue lorsqu'elle évalue les E&R qui accompagnent, ou qui sont nécessaires à la valorisation des matières inscrites à l'inventaire 2009.
     Le retraitement du combustible usé UOX est un processus industriel et le monorecyclage du Pu en Mox-REP est pratiqué depuis des dizaines d'années. L'uranium de retraitement (URT: uranium de retraitement) est réutilisable en REP, dans le combustible Ure (Ure: uranium enrichi), après enrichissement (par centrifugation). Toute partie non utilisée à cette fin et l'uranium appauvri de retraitement peuvent être recyclés dans les RNR de 4e génération. A la Hague, entre 2004 et 2008, des campagnes de retraitement ont aussi porté sur du combustible usé Ure et sur 70 tonnes de combustible usé Mox-REP. 
     Plusieurs dizaines de tonnes de Mox-RNR ont aussi été retraitées à Marcoule et à la Hague. La récupération de U et Pu à partir des assemblages de tout type de combustible oxyde est ainsi établie. Ces éléments, tels qu'on les récupère à la Hague, pourront être valorisés dans les combustibles des RNR de 4e génération. Le Mox-REP usé dans les réacteurs électrogènes actuellement en fonctionnement constitue d'ailleurs la réserve de Pu pour le lancement de la filière RNR (vers 2040). L'usine de la Hague est aussi équipée pour dissoudre le combustible métallique (alliage d'uranium) irradié ou usé, déchargé de la plupart des réacteurs de recherche, ce qui laisse peu de combustible usé de ces réacteurs aux déchets (voir Mid). Le retraitement après dissolution de tout type de combustible, à l'usine de la Hague, ne semble pas poser de problème dans la mesure où il peut être conduit de façon à contrôler les conditions de non criticité des solutions renfermant de la matière fissile. 
suite:
     Les stocks d'oxydes d'uranium naturel et enrichi (sous forme U3O8) font partie du marché de l'uranium. L'uranium appauvri provenant de l'enrichissement de Unat (dit Uapp primaire) est utilisé dans les combustibles Mox-REP et Mox-RNR. Il peut aussi être ré-enrichi par centrifugation et laisser alors un Uapp secondaire (contenant 0,2% en 235U). Celui-ci pourrait encore être ré-enrichi par un procédé laser, laissant un Uapp tertiaire (0,1% en 235U). Ces différentes qualités de Uapp (et URT) peuvent alimenter les réacteurs de 4e génération. 
     Les quantités concernées du périmètre CEA, EDF et Areva sont 17.000 t de combustible usé, 30.000 t de Unat, 3.500 t de Uenr (Stock de réserves de matières fissiles), 250.000 t de Uapp naturel, 20.000 t de URT et 70 t de Pu séparé. 
     Le thorium, élément fertile, peut entrer dans une filière électronucléaire à neutrons thermiques ou rapides. Le seul pays qui en étudie aujourd'hui le développement est l'Inde. La valorisation des composés de thorium de l'inventaire des matières 2009 présente donc deux aspects distincts. Areva souhaite consacrer son stock de nitrate de thorium (2.300 tonnes) à l'alpha-immunothérapie. 
     Ainsi plusieurs centaines de kg sont actuellement traitées par Areva pour en extraire 212Pb et 224Ra. Rhodia vise pour ses matières valorisables un éventuel futur marché du thorium. Il s'agit essentiellement de 11.000 t de nitrate et de 21.100 t de ThO2 et 100 t de Unat (et 2.600 t de lanthanides et 200 t de Zr). Une usine devrait être construite pour l'extraire.
     Les E&R à conduire pour multirecycler les matières à base de U et de Pu dans les RNR s'intègrent dans les E&R pour lancer des RNR-Na de 4e génération. Toutefois la date incertaine du développement de cette filière, pouvant aller jusqu'à la fin de ce siècle, pourrait conduire à consommer l'URT de 2e génération dans les EPR. L'utilisation du Th est à un horizon plus lointain pour de multiples raisons. Les E&R conduites en France sur un "cycle thorium" restent modestes. 
     C'est la première fois que l'inventaire des matières radioactives valorisables est publié. La commission examinera plus avant, au regard d'informations complémentaires, dans quelles conditions certaines matières pourront effectivement être valorisées et si des E&R spécifiques doivent être engagées au cas où elles seraient déclassées en déchets. 
     1.1.3. Mid 
     Les Mid sont des inventaires portant sur les caractéristiques des colis primaires de déchets et de colis de stockage (nombre, volumes, poids, activité, etc.) et établis pour étayer la conception des installations de stockage. Ils diffèrent de l'inventaire précédent car ils prennent en compte divers scénarios qui conduisent à des colis primaires de déchets différents et à des quantités différentes. Ils doivent figurer dans les DAC. La Commission a déjà attiré l'attention sur les Mid des projets de stockages. 
     1.1.4. Mid FAVL 
     C'est la catégorie de déchets FAVL qui a le plus augmenté de 2004 à 2007 (70%). Le Mid FAVL, en cours d'élaboration, doit tenir compte du stockage de déchets à vie longue autres que les déchets radifères et graphites, notamment de 40.000 colis de déchets bitumés, de sources radioactives et d'objets au Th et au Ra. La commission n'a pas eu, depuis l'an dernier, d'information complémentaire sur l'avancement du Mid préliminaire concernant le stockage de déchets FAVL (cf. rapport n° 3). 
     1.1.5. Mid MAVL-HAVL 
     Le Mid pour le stockage profond MAVL-HAVL a fait l'objet de commentaires dans les rapports n°2 et 3 de la Commission. L'Andra a mis à jour le Mid fin 2009 (70 documents) qui devrait être figé fin 2012. Cette mise à jour confirme les informations disponibles l'an dernier. Le stockage sera dimensionné pour accepter tous les déchets MAVL et HAVL du parc électronucléaire actuel (58 réacteurs REP et un EPR fonctionnant dès 2012, les installations du cycle), des installations nucléaires de recherche civile (y compris ITER) et de défense, tous les déchets "historiques" du programme militaire et certains assemblages de combustible irradié ou usé particuliers considérés comme matière non valorisable. Il s'agira donc de tous les déchets produits par toutes les installations dites "autorisées" fin 2014. Les déchets de déconstruction des réacteurs et des installations sont comptabilisés. 
     Pour établir le Mid, l'Andra a procédé de la façon suivante: elle a d'abord évalué les quantités de  colis primaires, et donc des colis de stockage à prendre en compte, selon le scénario dans lequel tout le combustible usé du parc est retraité. Elle a ensuite considéré que l'allongement éventuel de la durée de vie du parc et divers aléas (exploitation des installations, déconstruction) augmenteraient, d'un facteur évalué à 50%, les nombres de certains colis de déchets MAVL et HAVL.
p.24


     Pour évaluer le nombre de colis primaires, l'Andra a tenu compte d'hypothèses réalistes: 
     1. sur le fonctionnement du parc considéré: puissance moyenne de 430 TWh/an jusqu'en 2012, 443 TWh/an jusqu'en 2018, décroissant ensuite selon le plan d'arrêt des réacteurs; production totale atteignant 17.000 TWh en 2052, (et conduisant à 50.730 tonnes de combustible usé: 46.300 t de UOX, 1.530 t de Ure, 2.900 t de Mox et les 1.240 t de UOX produits par le premier EPR); 
     2. sur l'évolution des combustibles (de UOX1 à UOX3, enrichissement passant de 3,5 à 4,95% en 235U, taux de combustion passant de 33 à 65 GWj/t; Ure à 4,1% en 235U, taux de combustion de 45 GWjt/t, Mox de 5,3 à 9,54% en Pu, taux de combustion passant de 35 à 48 GWj/t); 
     3. sur l'évolution des conditionnements des déchets et leur gestion optimisée; 
     4. sur l'évolution du retraitement du combustible usé. En particulier, l'Andra inclut 167 t de Mox de Superphénix à retraiter (Mox-RNR à 20% en Pu). 
     Les calculs de l'Andra s'appuient sur les prévisions des producteurs de déchets. En ajoutant les marges conventionnelles aux résultats de son évaluation, le Mid prévoit 240.000 colis MAVL répartis en 11 colis types (80 familles) pour un total de 110.000 m3, et 62.000 colis HAVL répartis en 7 colis type de déchets vitrifiés (11 familles) pour un volume de 12.000 m3. Les colis de stockage sont adaptés pour recevoir les nombreux colis primaires recensés. Il existe un 8ème type de colis HAVL (15 familles) constitué de combustible irradié ou usé. Leur nombre est de 5.500 pour environ 200 m3. Les assemblages de ce combustible ne posent pas de problèmes nouveaux par rapport aux E&R déjà conduites sur l'oxyde d'uranium. Le comportement du combustible métallique en situation de stockage fait l'objet de recherches. Les caractéristiques de chaque colis type sont détaillées dans des fiches (11 rubriques) enveloppes des familles de colis associées. 
     La Commission considère que le Mid de 2009 est bien un inventaire enveloppe des colis de déchets MAVL et HAVL à stocker. Toutefois, il appelle les commentaires suivants: 
     Le Mid MAVL-HAVL est, selon l'Andra, le plus prospectif possible par rapport au scénario de référence dit aussi scénario de base. Celui-ci suppose: 
     a) que les réacteurs REP considérés fonctionneront pendant 40 ans selon le plan de charge d'EDF qui va jusqu'en 2052 et qui comporte une évolution programmée de la nature du combustible, 
     b) que l'on recyclera, dans le parc qui suivra le parc actuel, tous les éléments fissiles séparés qu'aura produit celui-ci, le retraitement du combustible Mox irradié précédant le lancement des RNR. Ce retraitement débuterait vers 2025 à la Hague si les premiers RNR devaient être déployés en 2040. Il contribuerait pour 25.000 colis (5.000 m3) au Mid, soient 40% des colis de déchets vitrifiés. 
     Le scénario de dimensionnement prévoit un allongement de la durée d'exploitation des réacteurs sans préciser de combien (10 à 20 ans?), la déconstruction d'installations futures et d'aléas sur ces déconstructions, mais semble-t-il, en s'en tenant au lancement du RNR en 2040 donc pas d‘aléa. L'incertitude sur cette date pourrait  être d'une à deux décennies. Ses conséquences sur le nombre de colis de retraitement à inscrire au Mid  et sur l'hypothèse de recyclage de matières séparées pourraient bien être aussi importantes que celles considérées pour la déconstruction des installations. De même, la requalification éventuelle de certaines matières valorisables en déchets (Ure de 2e génération) n'est pas envisagée dans le Mid. 
     La Commission considère que l'Andra devrait mieux argumenter l'augmentation de 50% qu'elle applique à une situation de référence déjà prospective du développement de l'électronucléaire, comme l'indique EDF dans ses scénarios d'évolution du parc. Entre ce scénario de dimensionnement et le scénario alternatif d'arrêt du retraitement en 2020 que l'Andra évoque, il y a certainement la place pour des scénarios prenant mieux en compte les incertitudes de l'évolution du parc électronucléaire actuel. Le Mid constitue une information essentielle pour l'ouverture d'un stockage et pour cela il doit être traité avec le maximum de clarté.
     Les hypothèses sur lesquelles repose le Mid sont compatibles avec l'exploitation d'un stockage ouvert en 2025 et exploité pendant une centaine d'années. Même si l'exploitation du parc considéré pour le Mid était prolongée de 20 ans, c'est-à-dire si le dernier réacteur était arrêté en 2072, les derniers déchets de démantèlement MAVL et HAVL seraient conditionnés en 2112 (30 ans après son arrêt), soit une dizaine d'années avant la fin de l'exploitation du stockage.
suite:
     La Commission s'interroge sur un point laissé dans l'ombre à propos de l'exercice de prospective du Mid : celui de la cohérence entre le Mid, la capacité de stockage qu'il va définir et le devenir des déchets qui seront produits par le nouveau parc et ses installations associées (non encore autorisées). En effet, selon EDF, le remplacement des REP prévu à partir de 2012 se fera par des EPR, puis des RNR au plus tôt après 2040. Le nouveau parc EPR produira jusqu'en 2040 des déchets MAVL et HAVL du même type que ceux d'aujourd'hui, au mieux, puis de nouveaux déchets HAVL si la transmutation est mise en place, ce qui suppose d'ailleurs l'installation d'une nouvelle usine à la Hague. Tous ces déchets ne sont pas comptabilisés dans le Mid. Iront-ils aussi au stockage en exploitation à cette époque, qui aura été ouvert en 2025? Ou bien dans une extension de ce stockage? Ou bien encore en entreposage en attendant un nouveau stockage? Dans un souci de clarté et de logique il convient dès maintenant d'aller au-delà de l'hypothèse de travail de l'Andra qui est de ne s'occuper que des déchets du parc actuel (plus ITER et le premier EPR). Il paraît certes raisonnable de considérer un stockage s'adressant aux déchets d'un parc donné, mais on ne peut ignorer les déchets qui seront produits au cours de son fonctionnement. 

1.2. PROJETS DE STOCKAGE ET GESTION DES DÉCHETS 
     1.2.2. Projets de stockage 
     La première tentative pour sélectionner des zones où effectuer des mesures de terrain s'est soldée par un échec; mais la date de 2019 pour ouvrir un stockage de déchets FAVL (radifères, graphite et autres) à faible profondeur n'a pas été remise en question. Celle prévue pour ouvrir un stockage profond de déchets MAVL et HAVL dans le Callovo-Oxfordien, à l'aplomb de la Zira de Meuse / Haute-Marne, est 2025 si l'autorisation est donnée. Ces deux dates permettent à l'Andra de cadrer les E&R à conduire pour déposer les DAC, 2014/2015 pour le premier stockage et 2015 pour le second. L'année 2015 devrait ainsi voir se mettre en place un schéma cohérent et complet de gestion des déchets à vie longue. L'Andra envisage qu'autour de 2025, tous les stockages soient opérationnels. 
     1.2.3. Gestion des déchets 
     Les sites de stockage sont des ressources rares. A la philosophie "des déchets pour un stockage", la Commission constate que se substitue la philosophie "des stockages pour les déchets" qui consiste à adapter les colis de déchets aux capacités des stockages et non l'inverse. Comme entreposage préalable et stockage sont indissociables, cette adaptation vise aussi les entrepôts. Cela conduit à réexaminer la destination initiale des déchets non encore stockés car la classification des déchets par filière (décret du 16 avril 2008) n'est indicative que du déchet et non du colis de déchets. Cette classification n'est pas strictement applicable dans le contexte d'un nombre limité de stockages, aux capacités radiologiques nécessairement limitées et soumis à des règles d'exploitation contraignantes. Elles portent sur chaque colis et l'ensemble des colis, sur certains radionucléides et l'ensemble des radionucléides. Ces contraintes visent à assurer la sûreté en toutes circonstances.
     Un groupe de travail piloté par la DGEC (comportant ASN, Andra, Areva, CEA, EDF, Rhodia) doit réexaminer la destination de déchets non encore conditionnés ou de colis non encore stockés. L'Andra en attend des pistes d'optimisation de la répartition des colis dans les divers stockages et pour les colis eux-mêmes, des pistes de conditionnement permettant de limiter au maximum leur volume (pour une masse de déchet brut donné) ainsi que leur dégazage. Ceci conduit à revoir, au-delà du recyclage des matières qui peuvent l'être, le traitement et le conditionnement de certains types de déchets pour mieux prendre en compte des contraintes de la chaîne déchet- traitement-colis-entreposage-transport-stockage. Les dispositions à prendre doivent s'inscrire dans la perspective de 2025, date de l'ouverture des stockages en projet. 
     Le devenir d'un déchet brut vers un stockage est déterminé par une analyse multicritère, autant que possible fondé sur des données mesurables. L'organigramme dont dispose actuellement l'Andra pour cette gestion opérationnelle des déchets lui permet une décision dans 80% des cas. Tous les autres impliquent des traitements supplémentaires à ceux pratiqués aujourd'hui ou réduisant fortement les volumes (incinération haute température, vitrification par torche à plasma) ou le dégazage (tritium, hydrogène). La reprise de colis primaires de déchets MAVL n'est pas exclue. 
     La commission a souvent attiré l'attention sur le besoin de poursuivre les E&R sur le conditionnement des déchets bruts, notamment MAVL, dans la perspective de réaliser des colis primaires de déchets qui soient robustes à court et long terme (entreposage et stockage). L'optimisation des ressources limitées de stockage conduit maintenant à s'intéresser, au-delà des aspects organisationnels, à d'autres qualités de ces colis.

p.25


1.2.4. Le problème des déchets anciens du retraitement 
     L'exploitation des installations de retraitement de Marcoule (UP1) et de la Hague (UP2-400) et  de conditionnement de Cadarache a conduit à des déchets MAVL et HAVL, conditionnés ou non. La Commission a souvent évoqué les E&R conduites sur leur conditionnement pour les rendre conformes aux critères des filières de gestion. Dans l'esprit des considérations précédentes, le CEA a présenté à la Commission un état des lieux exhaustif des caractéristiques physico-chimiques de ces déchets et les E&R  en cours ou programmés jusqu'en 2030. En particulier, le CEA a montré comment les colis primaires de déchets MAVL et HAVL, réalisés ou en préparation, s'intégreront dans les familles de colis du Mid.  Les colis de déchets MAVL couvrent 33 des 116 familles et 8 colis type (38.600 m3 et 110.000 colis); il n'y a que 3 familles de déchets HAVL d'un seul type de colis (verres de Piver, de l'AVM et de U-Mo). Leur volume est de 700 m3 pour 4.500 colis. La Commission apprécie l'effort de clarification du CEA sur les déchets historiques devant aller en stockage géologique. 
1.2.5. Prise en compte de la diversité des colis primaires dirigés vers le stockage 
     Le nombre de colis primaires de déchets MAVL inscrits dans le Mid est considérable ainsi que leur diversité (116 familles). Pour l'exploitation du stockage, la prise en considération de la taille et du débit de dose compte en premier. Pour standardiser le dépôt de ces colis et pour d'autres raisons (protection mécanique des colis, réversibilité, compaction dans l'alvéole), l'Andra étudie des conteneurs de stockage dans lesquels seraient placés plusieurs colis primaires pour constituer un colis de stockage. Tous les conteneurs auraient la forme de parallélépipèdes ou de cubes, de hauteur limitée à 2m, choisie pour assurer le maximum d'occupation du volume des alvéoles cylindriques. Les colis de stockage seraient associés à des hottes de transfert pour la protection radiologique. Dans les études de manutention, essentielles pour le dépôt des colis, le poids de l'ensemble: colis de stockage (jusqu'à 25 tonnes), hôte et chariot de transfert est déterminant. Il peut aller jusqu'à 100 tonnes. Pour couvrir la diversité des colis primaires de déchets MAVL. L'Andra défini 14 types de conteneurs et 5 hottes de transfert. Par ailleurs, les colis de stockage doivent être regroupés selon leur forme et les propriétés physicochimiques des déchets, qui peuvent s'exclure. L'Andra prévoit ainsi 18 types d'alvéoles pour couvrir les besoins.
     La faible diversité des colis type de déchets HAVL réduit considérablement ces problèmes. 
1.2.6. Mise en stockage 
     La mise en place des colis de déchets MAVL-HAVL du Mid ne pourra se faire, selon l'Andra qu'au rythme de quelques colis de stockage par jour (5 à 6 colis/jour pour 240.000 colis à stocker) et demandera 100 ans ou plus. Ce rythme paraît déterminé par les capacités et la sécurité de la descente au fond; il est compatible avec une période d'exploitation et une réversibilité sur 100 ans. La chronologie de la mise en conteneurs des colis primaires et du dépôt des colis de stockage est essentiellement dictée par leur contraintes d'entreposage (fin des autorisations) pour les déchets MAVL et leur thermicité pour les déchets HAVL. L'Andra étudie comment optimiser la reprise des colis entreposés et le remplissage du stockage en créant le moins possible de nouveaux entreposages ; elle examine aussi la possibilité de mise en colis de stockage des colis primaires sur le site du producteur (colis de Marcoule par exemple). 
     Seules, quelques alvéoles seront ouvertes en début d'exploitation. Ensuite, plusieurs fonctionneront en parallèle. La simulation de la dépose de tous les colis montre la complexité de l'exploitation du stockage. Les premiers colis de verres de la Hague n'iraient en stockage qu'après 2050 et 60 à 70 ans d'entreposage de décroissance pour attendre une décroissance thermique acceptable. Le choix d'entreposer certains colis de verre jusqu'à 100 ans réduirait d'un tiers l'emprise du stockage. Quoi qu'il en soit, de nouvelles capacités d'entreposage des verres seront nécessaires à la Hague. Il en va de même pour des colis de déchets MAVL à la Hague et sur d'autres sites.
     L'exploitation du stockage, de la confection des colis de stockage à leur dépôt dans les alvéoles sera une entreprise industrielle hors du commun, programmée sur plus d'un siècle. Au delà des aspects de logistique, des choix devront être faits au cours de l'exploitation entre entreposage et stockage des colis. Ce point est important. La Commission s'interroge sur l'opportunité d'étudier dès maintenant un scénario qui ne serait pas de minimiser les entreposages mais l'extension du stockage HAVL, en mettant davantage de colis par alvéole. Il faudrait alors construire quelques entreposages supplémentaires pour laisser les déchets refroidir jusqu'à 120 ans, mais on respecterait les contraintes thermiques tout en stockant davantage de colis HAVL dans une même alvéole. Une analyse de faisabilité et un bilan économique sont à faire. 
suite:
ANNEXE 3
EVALUATION DU POTENTIEL GEOTHERMIQUE DU TRIAS

     Selon les recommandations des évaluateurs, l'Andra a procédé à la reconnaissance locale du potentiel géothermique du Trias sur la zone de transposition au moyen du forage profond EST433 de la plateforme C située au centre de la ZT. 
     La longueur forée de 2.000m a permis d'atteindre la base du Trias inférieur où se situent a priori les zones aquifères compte tenu des connaissances géologiques générales. Cette formation du Trias inférieur (Buntsandstein) a été reconnue sur une épaisseur de 125 m grâce à trois passes carottées de 10 m chacune et des diagraphies permettant d'accéder à la porosité du milieu et de mesurer la température. 
     Sur le plan géologique, les trois subdivisions classiques du Trias inférieur ont été identifiées, de haut en bas: 
     * les grès argileux dits Grès à Voltzia (Conifère fossile caractéristique d'une sédimentation en milieu continental); 
     * les Grès vosgiens; 
     * les conglomérats de base. 
     Au toit du Trias inférieur, les formations argileuses, dolomitiques et évaporitiques du Trias moyen et supérieur ont été traversées sur 500m d'épaisseur.
     Les performances hydrauliques du Trias inférieur ont été évaluées par des essais d'injection ou de pompage entre obturateurs dans des chambres de 25 m de long. Deux zones ont été testées dans les Grès à Voltzia et dans les Grès vosgiens en se plaçant dans les secteurs de maximum de porosité selon les indications des diagraphies. Des prélèvements d'eau de la formation pour analyses chimiques ont été effectués au cours des pompages. 
     1.1.RESULTATS ANNONCES ET CONCLUSIONS DE L'ANDRA 
     L'horizon des Grès  à Voltzia montre une température de 66°C et une transmissivité mesurée sur un intervalle de 25 m de 1,1.10-3 m2/s. La productivité observée y est faible puisqu'un débit de seulement 5 m3/h est produit avec un rabattement de près de 30 m. L'horizon sous-jacent des Grès vosgiens montre une transmissivité inférieure de 2,6.10-4 m2/s. L'ensemble de la formation révèle une salinité très élevée de 180 g/L. 
     L'Andra compare ces caractéristiques au cas des installations géothermiques au Dogger du centre du Bassin parisien et conclut à la non-existence d'une ressource géothermique potentielle au Trias dans la région. Les trois arguments essentiels avancés sont: 
     * la valeur modeste de la température rendant la ressource peu attractive; 
     * la très faible productivité de la formation nécessitant des moyens lourds pour obtenir un débit rentable; 
     * la très mauvaise qualité de l'eau laissant présager des phénomènes  de corrosion difficiles à maîtriser et imposant la réinjection de l'eau dans le milieu. 
     L'ensemble de ces résultats fait qu'il n'est pas envisageable de réaliser dans ces conditions une installation géothermique fondée sur la technologie et les conditions de rentabilité actuelles. 
     L'approche méthodologique développée par l'Andra pour caractériser le réservoir est  conforme aux règles de l'art, nous ferons cependant les commentaires suivants à propos des interprétations qui en résultent
     * mesures hydrodynamiques: l'opérateur qui a travaillé pour l'Andra souligne la difficulté d‘opérer des mesures aux profondeurs concernées et rapporte un certain nombre de dysfonctionnements matériels de son appareillage qui sont venus perturber les essais et rendre délicate leur interprétation. A tel point que seulement deux essais sur les trois programmés ont pu être conservés. Pour valoriser néanmoins ses mesures, l'opérateur s'engage d'abord dans des interprétations théoriques complexes qui s'avèrent peu convaincantes. Au final, il fournit un résultat basé sur une méthode très classique d'interprétation de la remontée du niveau de l'eau en fin d'essai, qui a le mérite de la simplicité et de permettre de s'affranchir au mieux des conséquences des perturbations hydrauliques engendrées par des manipulations intempestives de l'appareillage, ainsi que des perturbations dues au forage. Ce sont les valeurs de transmissivités obtenues par cette méthode simple que l'Andra retient pour ses conclusions.
     La productivité obtenue est très inférieure (de l'ordre d'un facteur 10) à ce que l'on pourrait attendre d'une formation possédant les transmissivités mesurées. Ceci est vraisemblablement dû au fait que les essais ont été effectués en trou nu dans une formation de grès argileux sans équipement de captage ni développement du forage à ce stade et qu'ils sont très influencés par les propriétés de l'ouvrage. Un forage réalisé dans les règles de l'art à des fins de captage d'eau permettrait d'atteindre sans aucun doute des performances bien supérieures.

p.26


     On peut regretter qu'un test hydraulique global de la formation du Trias inférieur n'est pas été réalisé. Dans les conditions actuelles des essais, on peut objecter que l'on n'a pas nécessairement testé les horizons les plus perméables. Un tel test global, ne nécessitant qu'un seul obturateur, aurait par ailleurs sans doute été plus facile à réaliser que les tests sous double obturateur dont la manœuvre des vannes a semble-t-il posé beaucoup de difficultés. 
     Enfin, la comparaison des performances hydrauliques du Trias avec celles des installations géothermiques au Dogger en région parisienne n'est pas totalement objective car il est comparé des productivités et mon des transmissivités. D'une part, nous avons vu que la productivité observée lors des tests ne peut être considérée comme représentative de celle d'une installation industrielle réalisée dans les règles de l'art qui capterait le Trias et d'autre part les productivités du Dogger invoquées par l'Andra concernent des installations qui comprennent le plus souvent plusieurs ouvrages de pompage. D'après la littérature, les transmissivités du Dogger relevées dans les forages géothermiques en région parisienne montrent une valeur moyenne de 1010-3 m2/s variant entre 2.10-4 et 2.10-3. Les valeurs obtenues pour le Trias sur la zone de transposition sont bien dans la même gamme.
     * Possibilité de réinjecter l'eau dans la formation: A ce stade des investigations, l'Andra ne fournit pas une argumentation détaillée hormis le fait qu'il serait absolument impossible de rejeter les eaux en surface et donc nécessaire de réinjecter. Si la réinjection ne pose pas de problèmes majeurs dans la formation carbonatée du Dogger, il en serait sûrement autrement dans une formation détritique argilo-gréseuse avec de surcroît une eau très fortement minéralisée. Les études manquent cependant pour pouvoir être plus précis. Une expérience faite à Melleray au nord d'Orléans dans le Trias s'était semble-t-il soldée par un échec dans les années 80. La capacité d'injecter dans le Trias est une question qui devrait cependant revenir prochainement sur le tapis dans la mesure où cette formation paraît être une cible potentielle pour la séquestration du CO2 en profondeur. La faisabilité ou non de la réinjection ne peut donc pas à l'heure actuelle être considérée comme démontrée.

     1.2. CONCLUSIONS 
     La commission adhère, comme l'Andra, à la conclusion que le Trias dans la région de Bure ne représente pas une ressource géothermique potentielle attractive dans les conditions technologiques et économiques actuelles. Cependant cette considération repose plus sur la modestie de la température et l'incertitude qui demeure sur les possibilités de réinjecter l'eau que sur la productivité de l'aquifère du Trias inférieur dont il n'est pas pour l'instant démontré qu'elle soit inférieure à celle constatée dans les installations géothermiques du Dogger existantes dans le centre du Bassin parisien.

p.27a

Retour vers la G@zette N°257