ENERGIES RENOUVELABLES sol(ID)aires!

    Avec près de 3000 membres du personnel titulaires, le CERN regroupe autant de sensibilités qui participent à la richesse des échanges au sein du Laboratoire. Mais comment se retrouver quand on est passionné par un sujet ? La solution passe souvent par la création d’un club en relation avec l’Association du personnel. Et c’est ainsi qu’il y a 13 ans quelques férus d’énergie solaire ont donné naissance au Club Electrosolaire. Depuis, cette petite équipe d’initiés s’est agrandie, ses compétences se sont élargies à toutes les énergies renouvelables. La dénomination du club se transforme en Solar Club en 1998. Une appellation "lisible pour tout le monde" selon le président, Yves Renaud.

photo de Yves Renaud, président du SOLAR Club depuis 1998
De la passion technique …

    Au début de l’aventure, quelques mécaniciens et ingénieurs décident de fabriquer une voiture alimentée par l’énergie solaire. PHOTON 1 puis PHOTON 2 - toujours en service - voient le jour avec l’aide de l’école mécanique de Genève (2 professeurs de l’établissement figurent parmi les pionniers du club). L’expérience est tellement convaincante que PHOTON 2 gagne la course EUROSOL 1989 à Paris. Le véhicule développe 5 CV, atteint une vitesse maximale de 85 km/h et possède une autonomie de 120 km à 40 km/h.
    Pendant plusieurs années, le club s'est satisfait de cette opération mais progressivement ses adhérents s’essaient à d’autres utilisations. Production d’électricité, mini-centrales, stockage ou conversion de l’énergie, participation à une serre (à partir de rejets thermiques), équipement de la "chambre à bulles" de B. Gregory (toujours en place près du restaurant n°1) s’inscrivent au "palmarès" du club.
    Mais n’allez pas croire que les membres du Solar Club sont de gentils "illuminés" qui s’adonnent uniquement à ces réalisations technologiquement avancées. Ils se sont rendus compte, surtout ces dernières années et sous l’impulsion de leur actuel président - "écolo" de la première heure au sens "ici (ndlr, au CERN) péjorativement pensé", que le photovoltaïsme ne pouvait pas répondre SEUL aux besoins de la plus grande partie de la population.

Yves Renaud devant la chambre à bulles Gregory
(cliquez sur la photo pour taille MAXI)

...au débat d’idées

    "A Genève et dans les alentours où niveaux social et financier sont assez élevés, le photovoltaïsme c’est encore du domaine du hobby, du loisir, des petits trucs techniques intéressants. Mais nous ne sommes qu’une petite partie de la planète à avoir ce privilège. Si on veut résoudre le problème d’alimentation en électricité pas seulement de chauffage mais d’accès à l’eau (et l’électricité devient primordiale maintenant parce que l’eau est de plus en plus loin, de plus en plus polluée, …) pour ces pays-là mais aussi pour certaines régions occidentales isolées, l’énergie traditionnelle ne répond pas aux besoins" s’enflamme Y. Renaud. L’éolien, l’hydraulique, la biomasse et toutes les énergies renouvelables ont désormais leur place au Solar Club. C’est ainsi que ses adhérents sont passés d’une idée de loisir à une ouverture sur les besoins en général de la civilisation. "Pas seulement d’une civilisation dite avancée, technologique, mais aussi adaptable à tout le monde. Et les énergies renouvelables sont, contrairement aux autres, adaptables à tout le monde" lance le président avant de reprendre une de ses formules favorites "les énergies renouvelables, c’est ce qui reste quand on a tout épuisé".
    Aujourd’hui, les activités du club s’orientent donc vers la participation à des expositions, les visites d’installations diverses (stations d’épuration, centrales solaires, chez des particuliers ayant des idées novatrices …), les suivis de conférences, les débats d’idées sur la problématique énergétique - non seulement sur le plan local mais à l’échelle de la planète, d'où le récent site sur "Les ER au service du Développement"  -, et la mise à jour du site Internet.

Le site Web, une référence mondiale

    Avec plus de 2850 pages d’informations, le site du Solar Club du CERN devient une base de données mondialement connue qui a eu une critique élogieuse de la part du magazine Euréka, magazine de vulgarisation scientifique. "Je ne me fais pas d’illusion, c’est parce qu’ils pensent que c’est le CERN" relativise Y. Renaud.
    Partant de la "problématique énergétique", la réflexion du club s’est étendue aux impacts sur l’environnement, aux "traces" laissées dans le futur (celles des pollutions et dégradations de toutes sortes, mais souvent seules celles des autres!) et jusqu’aux relations entre tous les hommes. Le site Web présente ainsi une rubrique "controverses" (et non polémiques comme aime à le préciser Y. Renaud) pour intégrer les différentes façons de voir le problème de l’énergie et les avis critiques de sommités vis à vis de toutes les formes d’énergie et de la façon dont notre civilisation technologique les utilise. "Dans le temple de la haute technologie, les gens ont d’autres intérêts, il faut les secouer. On a beaucoup de mal à ce qu’il y ait un lien plus étroit entre les soucis du club et ceux du CERN. Ceux du CERN ne vont pas vers les énergies renouvelables et même pas trop vers les économies d’énergie. Ils ont bien sûr commencé à se sensibiliser, à mettre un peu de cogénération, ils ont modernisé la centrale de chauffage mais ce n’est pas systématique, il n’y a pas un groupe dédié à la maîtrise de l’énergie dans toutes les divisions" déplore Y. Renaud qui se dit choqué de lire encore sur le site web "grand public" du CERN que "le nucléaire va permettre de fournir une énergie illimitée, propre et très bon marché (quasiment gratuite)".
    Pour contrecarrer ce genre d’idées, les membres du Solar Club projettent de réaliser une installation unique, pas trop technique, mais vraiment réprésentative, afin de sensibiliser Cernois et visiteurs aux énergies renouvelables (voir ci-dessous). En guise de conclusion, Y. Renaud, en plus de la "devise" du Club (""Energies renouvelables: pour que le progrès serve mieux l'avenir de l'humanité"") offre à notre réflexion une citation qui lui est chère "le scientifique pense la science comme problème pour l’humanité" (J-P. Maréchal).
Jocelyne Rébillard
Le Pays Gessien
Édition du 22/09/2000