SEITA NOUS VOILA!
(c'est à nous ou c'est assez?)
Quelques réflexions "à bâtons rompus" à partir de la privatisation de la Seita, ce qui va permettre l'accès et ainsi l'influence des particuliers sur la compétitivité de cette société. Compétitivité, que ne fait-on pas en ton nom! Entre autre affirmer que cela va relancer la consommation... Je ne suis pas un spécialiste en économie, mais je vois au moins deux raisons de douter de cela: 1) les démunis, pour ne pas utiliser «exclus» trop médiatisé, sont en augmentation continuelle et ne peuvent donc pas consommer 2) ceux-ci ont été créés par cette société de compétition: comment une société qui les crée saurait-elle les réintégrer? La compétitivité est donc plutôt une forme dépravée de l'économie!

Faisons un peu d'économie... philosophique: le capital recherche la plus-value perpétuelle de l'argent et tant qu'il croit que l'homme est le moyen le moins coûteux de l'obtenir, il utilise l'homme, en particulier celui du tiers monde. Un jour, il a découvert un moyen moins coûteux: les machines; et enfin que l'argent peut suffire à sa propre exploitation: il a fini par se passer de l'étalon or de la personnalité humaine et ce jour là il a cessé de s'intéresser à l'homme et par contrecoup, au travail. La vraie crise n'est donc pas la disparition de l'emploi mais plutôt celle du travail! On était un homme et on devient ressource, un gisement qui, comme chacun sait est un empilement de couches écrasées les unes sur les autres. C'est à se demander comment n'y a-t-il pas plus de révoltes populaires; mais c'est vrai qu'on ne sait plus qui accuser: il est tellement plus simple de dire "responsable mais pas coupable!". Notre indifférence vis à vis de ces démunis n'est que le reflet et la conséquence de notre indifférence vis à vis de notre "humanité": oserions nous en arriver à dire que ces démunis sont moins humains?!

Certes, la situation est nouvelle; mais alors il faut donc répondre par une nouvelle approche et des solutions nouvelles. Pour cela, sortir des ornières, ôter ses oeillères, penser globalement et à long terme, c'est à dire écologiquement au sens original: au delà de notre relation avec la nature, il faut s'occuper des relations sociales et bien sûr de politique; on ne peut pas parler de la façon dont la nature est traitée par l'homme sans parler de la façon dont l'homme traite l'homme, donc des droits de l'homme, donc parler de politique, CQFD. Quand Albert Camus déclare que «nous avons tous et chaque jour rendez-vous avec nous-même», ce n'est pas seulement une belle formule portée par une véritable Idée: elle doit nous entraîner à passer du niveau de cette idée à celui de l'esprit! Niveau que l'on n'aura pas franchi tant qu'on ne fera que de la «peinture verte», que cela soit au niveau économique, social et donc individuel.

Heidegger disait aussi «sortons de la philosophie pour recommencer à penser», alors revenons sur terre. Mr le ministre Alphandéry ayant déclaré que «la recette était bonne pour aider au développement de cette société», je ne peux pas passer sous silence un aspect qui me "chiffonne" et qui en fait, m'habitait quand j'ai choisi le titre: les dégâts causés par le tabagisme sont encore plus élevés que ceux de l'alcoolisme, domaine dans lequel les Français sont hélas déjà "champions". Maintenant, non seulement on va continuer à entretenir cette catastrophe, mais en plus on va l'accélérer: est-ce vraiment une bonne recette pour arrêter le développement des cancers? Et pour ceux qui ne s'arrêtent pas à la seule dimension "franco-française", il faut aussi savoir que le marché occidental étant saturé, nous allons permettre "d'optimiser" - terme tellement à la mode! - l'envahissement de ceux du tiers monde, dévoiement d'une économie prenant réellement tout le sens de la célèbre formule d'«une continuation de la guerre».

Une dernière citation: «Je suis frappé par la contradiction qu'il y a chez beaucoup, entre le désir d'une société conviviale et humaine (avec ses paysans, ses artisans, ses petits commerçants...) et leur soumission quotidienne aux monopoles qui nient et détruisent cette convivialité par leur totalitarisme marchand» (Pierre Rhabi); cette pensée me fait poser les questions suivantes: tout est faisable doit-il donc vraiment entraîner que tout doit être fait? Parce qu'on peut tout demander à un homme doit-il entraîner qu'on lui demande? La volonté de prendre des parts de marché doit-elle vraiment accélérer la destruction de parts de... poumons?!

Pour terminer sur une dernière note d'humour et parce que la culture intensive du tabac est aussi une agriculture très polluante, permettez moi de paraphraser Heidegger: sortons de la culture du tabac pour ne pas... "tabasser" la culture!

Yves Renaud