L'EUROPE, L'EUROPE, ...
Maastricht, Sarajevo, Barcelone: le moins que l'on puisse dire, c'est que l' Europe d'aujourd'hui a trois visages différents, voire contradictoires...

Maastricht: le nom de ce chef-lieu néerlandais est désormais sur toutes les lèvres et ce n'est pas fini, en particulier pour les Français, à cause de la préparation du référendum; mais en profiteront-ils pour dépasser ces querelles communément appelées "franco-françaises" ? Pour la "petite histoire", a-t'on a oublié que d'Artagnan est mort sous ses remparts ?!

Sarajevo: le nom de la capitale de la Bosnie-Herzégovine lui, ne nous fera pas oublier l'assassinat de l'archiduc François-Ferdinand d'Autriche le 28 juin 1914 qui a sonné le glas de l'Europe du 19ème siècle; et cette guerre d'aujourd'hui est là pour nous le rappeler: le "vieux continent" n'est à l'abri d'aucune convulsion. Est-il possible cependant de faire remarquer que si ce nom semble hanter à nouveau nos consciences, aucune force européenne (sans aller jusqu'à multinationale) n'est venue "fréquenter" le golfe... de l'Adriatique: malheureusement ce golfe-là n'a pas de reflets d'argent, pardon, de pétrole, ...mais n'est-ce pas la même chose ?! Ceux qui me lisent régulièrement ne seront pas étonnés si je dis encore une fois qu'il ne suffit pas de prendre conscience pour changer de comportement, car cette guerre à nos portes peut pourtant menacer l'Europe toute entière.

Barcelone: ce nom, lui, peut maintenant nous faire oublier qu'il y a 500 ans, Christophe Colomb y a été immensément fêté (par contre les Indiens, eux, ne l'oublieront jamais...); cependant, pendant ces JO, ne repousse-t'il pas surtout un peu plus sa soeur méditéranéenne martyrisée dans les tréfonds de l'actualité, voire les limbes de notre conscience justement ? Et si les jeux vont permettre à Barcelone de "changer de peau", quelle sera celle de Sarajevo à la fin de la guerre ?...

Maastricht, Sarajevo, Barcelone: les hasards de l'actualité font se télescoper une expression plurielle de l'Europe mais ces trois visages sont solidaires: si Maastricht permettait un jour qu'un Sarajevo ne soit plus possible (en Europe en tous cas...), ce qui permettrait vraiment de vivre Barcelone sans mauvaise conscience ?...

Je voudrais pourtant rajouter que nous devrions aussi dépasser nos querelles... "européanno-européennes"; par exemple, comment ne pas s' interroger devant d'inquiétantes affirmations (hélas encore trop partagées) telles que celle-ci: ""La priorité est aujourd'hui à la construction d'un nouveau système de sécurité européenne"", affirmation "bien sûr" entendue récemment aussi dans le Pays de Gex. Voulons nous oublier que tant que le démon intérieur de l'Europe la poussera à dominer, aucun accord, aucune solidarité, aucun dialogue ne sera possible?

Faut-il vraiment encore rappeler que le progrès du développement humain (via la réduction de la pauvreté, la lutte contre la drogue et la pollution, le ralentissement des flux migratoires, etc...) ne passe pas par une amélioration de la défense, qu'elle soit européenne ou mondiale ? Encore une fois, la solution première proposée par l'ONU via le PNUD est la réduction d'au moins 3% par an des dépenses militaires mondiales et excusez du peu, 120 Prix Nobel en 1981 puis 8500 Maires en 1985 et, l'année dernière, la majorité absolue à l'Assemblée Nationale le croient maintenant aussi (voir la loi SURVIE).

Les Maires, les Députés (et les Prix Nobel à un niveau différent), ont été choisis par nous: et bien, qu'attendons nous donc pour leur emboiter le pas ?!

Je sais maintenant que crier les chiffres des 35000 enfants assassinés chaque jour dans le monde par la faim et les maladies curables est dangereux, tant ils ont l'apparence de l'inéluctable. Mais il n'y a fatalité que dans l'indifférence des nantis et... la résignation des affamés; jusqu'à quand ? Jusqu'à où ? Jusqu'au pied du blockhaus de la défense européenne ? Oui, je sais aussi, c'est encore un coup de "l'en-crier": il parait qu'on ne se refait pas...

Yves Renaud