DES CHIFFRES ET DES... MAUX
Ce n'est pas en assenant simplement les chiffres suivants que nous allons pouvoir lutter contre la véritable "machine de guerre" qu'est la grande pauvreté, mais nous devons bien partir de ce constat, datant pourtant déjà de 6 ans, appelé "Rapport Wrésinski": 2.500.000 personnes sans ressources suffisantes, 400.000 personnes sans Sécurité sociale, 200 à 400.000 personnes sans logement, 7% des jeunes "appelés" sachant à peine lire et écrire. Comment s'étonner que les français aient comme priorité, selon les derniers sondages, des "préoccupations" sociales... Préoccupés, sans doute, mais nous en "occupons" nous vraiment?!

L'abbé Pierre a donné sa définition de la misère: ce qui empêche les hommes d'être humains. Voici un autre critère, d'une valeur universelle (déclaré par l'ONU quand il ne "donnait" pas dans l'humanitaire... militaire!) pour définir la misère: "sont dans la misère toutes les personnes qui vivent avec moins de la moitié du revenu moyen du pays dans lequel ils habitent". A noter en passant que plus un pays est riche, plus il est difficile à certains d'avoir le minimum indispensable pour survivre: le pain, par exemple, est plus cher dans un pays riche que dans un pays pauvre; ce qui a fait dire à l'abbé Pierre: ""Il faudrait ainsi sortir de cet énorme mensonge que nous entretenons: avec nos modèles occidentaux d'abondance qui cachent aux peuples du tiers monde notre propre misère, nous les trompons sur la réalité occidentale. Qui leur parle de nos bidonvilles? Qui a le courage de leur faire voir la misère de chez nous? C'est extrêmement grave car en le leur cachant nous leur faisons miroiter une société idéale et c'est une façon supplémentaire de les pousser, et plus particulièrement leurs élites, à abandonner leur peuple"".

Le commun des mortels se sent-il dépassé, voire impuissant ou même indifférent vis-à-vis de la misère "ici" ou "là-bas"? En fait, l'humanité ne prendra pas conscience de ces réalités avant que... le ciel ne lui tombe sur la tête. Et ce n'est pas parce que je n'ai pas connu la guerre "ici" que je ne peux pas me placer dans l'optique de la guerre d'alors et la comparer à celle de maintenant c'est à dire économique, écologique et sociale: on peut, on doit se demander COMMENT A-T-ON FAIT EN 1939 POUR, DU JOUR AU LENDEMAIN, DEBLOQUER L'ARGENT qui a permis de faire face au transport des hommes, du matériel, à l'achat des munitions, etc... Il n'est plus question de savoir si on pouvait éviter ou non cette guerre, mais il est insupportable d'entendre que prendre les moyens de loger les gens (pour ne prendre que cet exemple!) dans un pays comme la France, ce n'est pas économiquement possible (sous-entendu "RENTABLE"!) si ce n'est sur plusieurs décennies. Et pourtant, si une nouvelle guerre nous "tombait demain sur la tête" (comme s'il s'agissait d'un miracle, alors que nous avons TOUS fait ce qu'il fallait pour...), nous réussirions à la financer: voir la guerre du Golfe qui nous paraissait pourtant si loin... Pourquoi? Entre autres parce que nous faisons face aux défis actuels et a fortiori à ceux de demain avec les idées d'hier et les institutions... d'avant-hier, sans parler des idéologies!

Il ne s'agit pourtant pas seulement de "déclarer la guerre à la misère": nous sommes DEJA attaqués par la misère au plan mondial. Les USA "avouent" 30 millions de gens dans la misère (combien en réalité?!) et l'Europe, future "plus grande puissance commerciale du monde" (J.Delors), compte déjà 44 millions de gens en dessous du seuil de pauvreté. Alors, tant que nous ne nous considérerons pas en état de guerre, on peut toujours chercher des "trucs", çà ne marchera pas. Nous savons tout ou presque, nous sommes même condamnés à tout savoir: personne ne pourra dire "JE NE SAVAIS PAS". Au plan mondial, ON NE PEUT PLUS ETRE HEUREUX SANS LES AUTRES, TOUS les autres, "ici et là-bas".

Au-delà d'une vision, d'une réflexion, d'une politique globale de lutte contre la plus grande pauvreté (action sociale bien sûr, mais aussi sur l'emploi, l'instruction, la formation professionnelle, politique de la culture, de la santé, de la fiscalité, etc...), il faut donc agir localement, chacun dans notre "coin": réagir sur des points précis qui nous touchent de près (le nucléaire par exemple, pour notre région), développer une contre information pour infléchir nos modes de vie et de consommation,etc... Sinon que nous resterait-il à faire, nous retrancher derrière nos frontières? attendre que les contradictions du système engendrent la révolte, ou CROIRE QUE LES PLUS PAUVRES POURRONT INDEFINIMENT SE SATISFAIRE DE MESURES D'URGENCE?

Alors comme assener n'est donc définitivement pas la solution, je me permets, pendant ces vacances scolaires, de vous laisser sur cette piste creusée avec quelques amis de l'été et qui tient en peu de mots très simples:

""ESSAYONS DE NOUS PASSER DE CE QUI EST PRODUIT DANS L'INJUSTICE ET LA SOUFFRANCE (des humains mais aussi de la Nature)"", car

COMMENT VOULOIR QUE LE MONDE CHANGE SI L'ON NE CHANGE PAS SOI-MEME?

Encore une fois, bonnes vacances à ceux qui partent et surtout courage à ceux qui restent!

Yves Renaud