CONTROVERSES NUCLEAIRES !

Suivi des infiltrations de la mine de sel d'Asse
(Allemagne, Basse-Saxe)
2010


octobre ADIT
     Le secrétaire d'Etat Georg Schütte a transmis le 10 septembre 2010 le rapport d'inventaire de la mine d'Asse II [1] au comité de recherche d'Asse (Basse-Saxe) ainsi qu'aux comités fédéraux de l'environnement et de la recherche. Le groupe de projet Jülich du centre Helmholtz de Munich (HMGU) a établi ce rapport à l'instigation du Ministère fédéral de l'enseignement et de la recherche (BMBF), établissant l'estimation actualisée de l'état des déchets radioactifs de la mine d'Asse en prenant en compte l'état de la science et de la technique. Le rapport a également été transmis au ministère fédéral de l'environnement (BMU), responsable de l'assainissement d'Asse.
     Ces vérifications ont été compliquées par le fait que 40 ans se sont écoulés depuis l'entreposage (1967-1978) et que les dates limites de conservation des dossiers sont dépassées depuis longtemps. De plus, les exigences portées à la documentation de telles activités étaient bien moins strictes à cette époque qu'aujourd'hui. L'analyse des documents demeurant à disposition confirme dans l'ensemble les données déjà connues. La nouvelle estimation, si elle n'apporte pas de nouvelle connaissance fondamentale sur l'inventaire global d'Asse, montre aussi qu'une exploitation des dossiers ne peut pas remplacer une vérification des faits sur place.

Voici les principaux résultats du rapport :
     - Parmi les 126.000 fûts transférés à Asse, 14.779 ont été coulés dans du béton et entreposés en tant que déchets à faible radioactivité (FA) selon les prescriptions de l'époque, alors qu'ils contiendraient selon les normes actuelles des déchets de radioactivité moyenne (MA). En effet, les autorisations de stockage fixaient un débit de dose uniquement à l'extérieur des fûts. Aujourd'hui, 30 ans après leur stockage, 8.465 fûts parmi les 14.779 peuvent encore être considérés comme MA.
     - Pendant l'entreposage des déchets radioactifs entre 1967 et 1978, certains fournisseurs auraient livré des déchets en quantité significative, ce qui s'opposait aux conditions d'accueil d'Asse ; ainsi ont été constatés des dépassements de dose limite à l'extérieur des fûts et un entreposage de déchets qui n'auraient pas été dûment agrégés. De tels fûts pouvaient cependant être entreposés si l'autorité de sûreté l'acceptait. Grâce aux documents encore disponibles concernant les fûts stockés à cette époque, et en particulier aux rapports et correspondances encore disponibles sur les échantillons, des réflexions de plausibilité ont été menées et l'inventaire réévalué. Ces réflexions de plausibilité peuvent être validées ou falsifiées uniquement par des prélèvements d'échantillons concrets pendant l'enquête de faits.

suite:
     - Les quantités de plutonium présentes à Asse s'élèvent à 28,1 kg, soit davantage que ce qui avait été annoncé jusqu'à présent.
     Le rapport, qui présente une estimation actualisée de l'inventaire de déchets d'Asse à la disposition de tous, représente une aide déterminante pour toute procédure ultérieure. Les connaissances supplémentaires seront pertinentes pour la question du forage de chambres particulières - ainsi que pour la planification des mesures de sécurité essentielles en cas de récupération des déchets radioactifs.
     L'ancienne mine de sel d'Asse II a été exploitée au cours des années 1970 selon le droit minier, officiellement comme centre de recherche, mais servant également de facto au stockage de déchets FMA entre 1967 et 1978. Depuis janvier 2009, le puits d'Asse II est considéré comme un centre de stockage définitif de déchets radioactifs et dépend du droit nucléaire, sous la responsabilité de l'Office fédéral pour la radioprotection (BfS). Depuis 1995, le site est en cours de démantèlement. L'état géologique de la mine pose des problèmes de taille aux experts : infiltration quotidienne depuis 1988 de 12.000 L d'eau saumâtre dans les galeries menaçant la mine de noyage, danger d'écroulement suite à un remblaiement insatisfaisant de certaines chambres à l'époque de l'évacuation du sel. Le BfS a depuis janvier 2009 examiné 3 solutions pour la fermeture du site [2]. L'option de récupération des déchets envisagée actuellement pourrait garantir une sécurité à long terme, exigée par l'état actuel de la loi nucléaire.
[2] - Déplacement des déchets dans des couches plus profondes de la mine: solution viable à long terme, mais coûteuse, à mise en oeuvre lente, et risque de ne pas trouver de site approprié;
- Remplissage de la mine par du béton et une solution de MaCl: solution rapide et facile à mettre en oeuvre, car évitant un déplacement des déchets radioactifs, mais pas de garantie suffisante de sécurité à long terme, à cause des dégagements radioactifs possibles;
- Récupération des déchets.
juin ADIT
Alerte nucléaire au cœur de l'Allemagne
mardi 29 juin 2010
Nathalie Versieux envoyée spéciale à Asse


Un employé dans la mine. L'entreposage n'était pas parfait. (AFP)

     Les autorités allemandes ont décidé l'évacuation d'un centre de stockage de déchets radioactifs entreposés dans une ancienne mine pour cause d'infiltrations d'eau. La décision relance le débat autour des déchets nucléaires
     Une montagne de fûts jaunes estampillés du sigle du nucléaire. Une couche de sel et de béton par-dessus, et encore du sel pour boucher l'entrée des grottes. Un volume de masse radioactive équivalent à 60 maisons a été entreposé entre 1967 et 1978 dans la mine de sel désaffectée de Asse, au centre de l'Allemagne. 126.000 fûts de déchets radioactifs, certains bien alignés et d'autres pêle-mêle, devaient séjourner là pour l'éternité. Moins de 30 ans plus tard, le site de Asse a pris des allures de quasi-catastrophe écologique et de boulet politique. Le site géologiquement instable souffre d'infiltrations d'eau. Et certains fûts sont rouillés.
     Face à la gravité de la situation, l'office fédéral BfS chargée de la gestion du site optait en janvier dernier pour l'évacuation de Asse. Cette opération inédite, hautement complexe sur le plan technique, prendra près de 20 ans et pourrait coûter 2 à 3 milliards € à l'Etat. La semaine dernière, le gouvernement évoquait pour la première fois la possible instauration d'une taxe nucléaire, qui servirait notamment à financer la décontamination d'Asse.
     A Asse, une colline située à 25 kilomètres au sud de Braunschweig en Basse-Saxe, le contraste est saisissant entre la campagne verte et riante dont les blés encore verts sont agités par le vent et le gris de l'ancienne mine de sel, qui a fait vivre la région entre 1909 et 1964. Quelques minutes suffisent pour atteindre les premiers étages souterrains de la mine, à quelque 500 mètres de profondeur. Un ascenseur pouvant contenir jusqu'à 14 hommes dévale l'étroit boyau vertical, déplaçant un courant d'air formidable. Un demi-kilomètre sous terre, la chaleur est étouffante. Quelques camionnettes attendent sur un vaste terre-plein gris éclairé au néon. Deux portes en lourd métal jaune, formant un sas, mènent vers le dédale des galeries, interminables et plongées dans le noir.
     La visite de la mine met vite en évidence la gravité de la situation: des fissures strient les parois de sel. Depuis 1988, certaines parois de la mine se sont déplacées de six mètres vers le nord. A quelque 700 mètres de profondeur, un filet d'eau sorti de nulle part court sous des bâches pour éviter tout contact entre eau et air potentiellement contaminé. Les gestionnaires du site ont à lutter contre deux fléaux potentiels: un effondrement possible de certaines cavités et l'infiltration d'eau contaminée vers la nappe phréatique.
     L'ancienne mine de sel, édifiée sur 13 étages, s'enfonce jusqu'à 900 mètres sous terre. Neuf cavités ont été creusées à chaque étage. 12 contiennent des déchets faiblement radioactifs. Une autre, à 500 mètres de profondeur, abrite des déchets moyennement radioactifs.

suite:
     60% d'entre eux proviennent des centrales nucléaires allemandes (qui jusqu'en 1975 pouvaient les y déverser sans frais), 23% de la recherche, 8% de l'industrie. Personne ne sait combien de césium, de plutonium ou de tritium se trouvent là, ni quels gaz ont pu se développer dans les cavités dont certaines sont devenues inaccessibles.
     «Un des problèmes auxquels nous sommes confrontés est que nous ne savons pas vraiment ce qui se trouve dans les fûts, explique Wolfram König, Vert et président du BfS, l'office fédéral chargé de la sécurité autour du nucléaire civil. L'étiquetage des années 60 et 70 ne répond pas aux standards actuels. Au cours des dernières années, nous avons ouvert 25 fûts. La moitié ne contenait pas ce qui figurait sur les registres! Nous avions le choix entre construire un centre de déchets à l'intérieur de la mine, tout couler sous le béton, ou remonter les fûts à la surface. Cette solution est apparue comme étant la moins mauvaise. Nous devons prendre une décision valable pour un million d'années! Une décision qui n'ait pas de conséquences pour l'humanité dans 500 ans, au-delà de la mémoire humaine, une fois que les centrales nucléaires auront peut-être disparu de la terre, et que plus personne ne saura rien du danger. Il faut que même à ce moment, nos descendants puissent creuser le sol sans risques
     A ce jour, aucun pays au monde n'a trouvé la solution qui permettrait de résoudre le problème des déchets nucléaires. Aucun centre de stockage à long terme n'a encore vu le jour. «Le stockage sous terre est considéré comme étant la solution la moins pire», explique Marcos Buser, géologue suisse et président de la Commission de suivi pour le projet Mont Terri, près de St-Ursanne, un laboratoire souterrain où les scientifiques étudient quelles couches géologiques pourraient être propices au stockage securisé des déchets nucléaire.
     «Il faut à tout prix éviter que des substances qui ont un cycle de vie extrêmement long restent dans le domaine du vivant, poursuit Marcos Buser. Partout, on a comme en Allemagne été tenté d'utiliser des mines désaffectées pour stocker des déchets, nucléaires ou chimiques. Mais une mine désaffectée est comme un bâtiment. Les bâtiments bougent et se fissurent. Les mines aussi. La roche se fissure. Ces fissures se propagent jusqu'à la surface, de l'eau s'infiltre, le terrain s'affaisse, une partie de la mine s'effondre. C'est ce qui s'est passé à Asse. Enfouir les déchets sous terre suppose la construction d'une installation ad hoc, parfaitement étanche et confinée. La taille optimale pour un centre de stockage dans un pays tel que la Suisse serait de quelques centaines de milliers de mètres cubes pour traiter 8.000 tonnes de déchets. Asse a un volume de trois millions de mètres cubes. Même pour un programme nucléaire plus important, comme le programme allemand, c'est beaucoup trop
     Les autorités allemandes ont finalement opté pour le transfert des déchets d'Asse vers l'ancienne mine de fer Konrad, à quelques dizaines de kilomètres de là. L'installation, pouvant contenir jusqu'à 303.000 mètres cubes de déchets, sera toutefois rapidement trop étroite, si les 100.000 mètres cubes entreposés à Asse y sont un jour transportés.
     A Asse, une course contre la montre et la géologie est engagée. Dans un premier temps, un forage millimétrique doit permettre d'effectuer des prélèvements dans les cavités inaccessibles, enfouies sous le sel et le béton. Personne ne sait encore comment approcher sans danger les fûts endommagés, et encore moins comment les extraire, un jour, de la mine.
mars ADIT
Récupération des déchets radioactifs de la mine d'Asse
BE Allemagne 467

     L'Office fédéral pour la radioprotection et la sûreté nucléaire (BfS), actuel propriétaire de la mine de sel épuisée Asse II (Basse-Saxe), a décidé de ramener à la surface les 126.000 fûts de déchets nucléaires qu'elle contient. La récupération des fûts devrait durer une dizaine d'années, et coûter au moins 2 milliards €, selon une estimation du président du BfS, Wolfram König. Nordbert Röttgen, Ministre fédéral de l'environnement, soutient cette décision.
     Depuis janvier 2009, le puits d'Asse II, officiellement considéré comme un centre de recherche, et ayant servi de facto au stockage de déchets à faible et moyenne activité (FMA) entre 1967 et 1978, est désormais considéré comme un centre de stockage définitif de déchets radioactifs et dépend donc du droit nucléaire (et non plus minier), sous la responsabilité du BfS [1]. L'état géologique de la mine pose des problèmes de taille aux experts. En effet, depuis des années 12.000 litres d'eau saumâtre s'infiltrent quotidiennement dans les galeries. Actuellement, l'eau est collectée et évacuée du puits. Cependant, si la quantité d'eau infiltrée venait à augmenter - hypothèse que les experts n'excluent pas - la mine et ses déchets radioactifs pourraient être noyés. Par ailleurs, certaines chambres n'ont pas été correctement remblayées à l'époque de l'évacuation du sel, et sont menacées par un danger d'écroulement. Ainsi, la fermeture du puits est soumise à une forte pression temporelle : il n'est pas envisageable de tenter une solution, et de vérifier dix ans plus tard si elle est appropriée.
     Le BfS a depuis janvier 2009 examiné 3 solutions pour la fermeture du site [2], aucune n'étant optimale, selon Wolfram König. L'option de récupération des déchets envisagée actuellement pourrait garantir une sécurité à long terme, exigée par l'état actuel de la loi atomique. Les autres options consisteraient en un déplacement des déchets dans des couches plus profondes de la mine (solution viable à long terme, mais plus coûteuse, longue à appliquer et comportant le risque de ne pas trouver de site approprié) ou un remplissage de la mine par du béton et une solution basique de chlorure de magnésium (solution plus rapide et facile à mettre en oeuvre, car évitant un déplacement des déchets radioactifs, mais ne garantissant pas une sécurité suffisante à long terme, à cause des dégagements radioactifs possibles).
     Cependant, les risques liés à l'option de récupération des fûts ne sont pas nuls: dans un premier temps, il faut vérifier que les déchets radioactifs stockés dans des chambres scellées à 511 et 750 m de profondeur dans des conditions extrêmement douteuses [3] peuvent être effectivement entièrement récupérés. La fermeture du site est compliquée par 2 facteurs inconnus: le contenu des fûts et leur état. Il est en effet impossible d'estimer exactement quels déchets sont contenus dans la mine et dans quelle quantité : à côté des déchets liés à l'activité des centres de recherche nucléaire (Karlsruhe, Jülich) et des centrales nucléaires, les chambres contiendraient 28 kg de plutonium, ainsi que de l'arsenic, du plomb, des pesticides et même des cadavres d'animaux. Lors de la fermeture du site, les cavités vidées de leurs fûts devraient être remplies de béton, afin de stabiliser la mine. Par ailleurs, l'état des fûts est inconnu. Ainsi, seules certaines chambres de stockage devraient être ouvertes dans un premier temps, afin de récupérer entre 1.000 et 3.000 fûts, sur lesquels le BfS souhaite effectuer des essais et mesurer la réactivité. Si les conteneurs s'avéraient être en plus mauvais état que prévu, leur récupération pourrait être remise en question et d'autres options à nouveau considérées.

(suite)
suite:
     Suite à la récupération des fûts, un stockage en surface provisoire des déchets sur le terrain de la mine sera nécessaire, pour tester et traiter les déchets avant de les envoyer dans un site de stockage définitif. Cela représente une dose d'irradiation supplémentaire pour le personnel qui devra ainsi manier les déchets, mais qui selon Wolfram König demeurerait en dessous des limites de sécurité. En effet, le BfS estime la dose d'irradiation totale à 900 mSv/an, répartie entre les travailleurs, dont chacun ne recevrait donc qu'une dose bien inférieure à la limite de 20 mSv/ an. Une grande partie des travaux devrait être menée par des machines automatiques et dirigée à distance. De plus, toute exposition des riverains serait exclue.
     Pendant la planification de la récupération des fûts, le BfS mènera des travaux de stabilisation de la mine. Depuis des mois, les cavités ne contenant pas de déchets sont scellées. Pour le stockage des déchets en provenance d'Asse, le BfS examine la possibilité d'exploiter l'ancienne mine de fer de Konrad à Salzgitter (à 20 km de Asse), qu'il aménage actuellement en site de stockage définitif pour des déchets FMA. Toutefois, l'agrément concernant Konrad ne s'applique qu'à un maximum de 303.000 m3 de déchets. Or le volume des déchets en provenance d'Asse dépasse 100.000 m3, ce qui laisserait peu de place pour une prise en charge des déchets nucléaires jusqu'en 2040. Comme il est prévu, la capacité d'accueil de Konrad devrait être reconsidérée.
     La prise en charge des coûts massifs demeure encore incertaine: l'ex-ministre de l'environnement et actuel chef du SPD Sigmar Gabriel brigue une participation des responsables du "scandale d'Asse", en particulier les propriétaires des centrales nucléaires, à l'origine de deux-tiers des déchets d'Asse.

- [1] Informations supplémentaires sur Asse II:
* "Mesures de sécurisation de la mine d'Asse II pour protéger l'environnement contre la radioactivité", http://www.bulletins-electroniques1 - BE Allemagne - 09/07/2009
* "Changement de statut et d'exploitant pour la mine de Asse II: le centre de recherche devient centre de stockage de déchets radioactifs" - http://www.bulletins-electroniques2 - BE Allemagne 402 - 11/09/2008 "
* "Une commission d'enquête sur le site de stockage de déchets radioactifs de Asse II" - http://www.bulletins-electroniques.com2 - BE Allemagne 436 -15/05/2009
* Site du BfS concernant Asse II (en allemand): http://www.endlager-asse.de
- [2] Evaluation technique des options de d'arrêt définitif de la mine d'Asse (en allemand): http://redirectix.bulletins-electroniques.com/
- Office fédéral pour la radioprotection et la sûreté nucléaire, Willy-Brandt-Str. 5, D 38226 Salzgitter - tél: +49 30 18 3330 - email: epost@bfs.de - http://www.bfs.de
- [3] Dans une chambre à 511 m de profondeur sont stockés environ 1.300 fûts de déchets de radioactivité moyenne, qui proviennent avant tout de centrales nucléaires et contribuent à 40% du rayonnement. A 750 m de profondeur, environ 12 chambres sont remplies avec quelque 125.000 fûts de déchets à faible radioactivité.
- "Alle 126.000 Fässer sollen wieder ans Tageslicht", Süddeutsche Zeitung - 16-17/02/2010
- "Ab in den Schacht", Tagesspiegel - 16/01/2010
- "Atommüll soll raus aus der maroden Asse", Die Welt - 16/01/2010
- Communiqué de l'Office fédéral pour la radioprotection et la sûreté nucléaire - http://idw-online.de/ - 15/01/2010
février ADIT
http://www.la-croix.com/
Le stockage des déchets radioactifs en Allemagne vire au désastre
07/02/2010 18:29
     Les autorités de surveillance du nucléaire recommandent l'évacuation rapide des 126.000 barils de déchets emmagasinés depuis 1967 dans une mine de sel de Basse-Saxe rongée par les infiltrations.
     En inaugurant le stockage des déchets nucléaires dans une mine de sel il y a quarante ans, l'Allemagne était à la pointe de la technique. Quarante plus tard, elle l'est toujours en préparant son évacuation.
     Les autorités fédérales de surveillance des rayonnements et déchets nucléaires (BFS) ont remis en effet le 15 janvier leur expertise recommandant le déstockage des 126.000 barils de déchets nucléaires entreposés entre 1967 et 1979 dans la mine de sel d'Asse II, en Basse-Saxe, dans la région de Brunswick, dont 1.300 fûts de déchets de moyenne activité, contenant environ 11 kg de plutonium de l'usine de traitement de combustible usé de Karlsruhe.
     Depuis des décennies, 12 m3 d'eau, soit 12.000 litres, ruissellent en moyenne, chaque jour, sur les parois de la mine de sel. La montagne exerçant une pression gigantesque sur les galeries de sel, 32 points d'infiltration supplémentaires ont été recensés depuis 1988. Certaines galeries s'effondrent, des barils, encastrés dans le sel, ont été endommagés sans que l'on sache précisément lesquels, contaminant la saumure. Au-delà de 2020, la mine ne sera plus exploitable.

«Asse est à peu près aussi trouée qu'un morceau de gruyère suisse»
     L'expertise de la BFS confirme ce que les écologistes assurent depuis belle lurette dans la région. «Asse est à peu près aussi trouée qu'un morceau de gruyère suisse», selon Sigmar Gabriel, président du SPD, ancien ministre de l'environnement et natif de Brunswick.
     La saumure qui ruisselle vers le fond de la mine peut être radioactive dans des proportions qui dépassent jusqu'à dix fois la norme. Recueillie dans une «piscine» à plus de 500 mètres de profondeur, elle est évacuée vers la surface. Mais les infiltrations régulières pourraient provoquer une inondation qui serait fatale. Une vraie «catastrophe nucléaire». La nappe phréatique contaminée rendrait la région voisine inhabitable. «Ce n'est plus qu'une question de temps», selon les écologistes.

suite:
     Les autorités se renvoient la balle des responsabilités. Le bureau des mines du Land à Clausthal-Zellerfeld, au courant du danger, n'aurait pas jugé utile de sonner l'alarme au ministère de l'environnement, qui aurait peu tenu compte de ses observations.

Bétonnée, la mine serait une bombe à retardement
     Le centre Helmholtz de Munich, chargé de l'exploitation d'Asse II, prétend avoir informé le bureau des mines et préparé la fermeture de l'exploitation. Les spécialistes de l'atome et des déchets seraient «tombés de haut» en découvrant l'étendue du désastre, assure un professeur de l'université technique régionale de Clausthal. L'opinion publique n'a rien su ou presque pendant trente ans.
     Si l'évacuation est décidée – et «le temps presse», souligne la BFS –, le chantier durerait une dizaine d'années et coûterait 2,5 milliards €, payés pour l'essentiel par le contribuable. Ce sera la méthode la plus coûteuse et la plus délicate pour sécuriser Asse II. «Techniquement, c'est un sacré défi, il faudra déplacer des fûts dont le contenu et l'état sont inconnus», note Thorben Becker, expert du Bund (Fédération allemande de la protection de la nature et de l'environnement). Il faudra en extraire de galeries qui ont été comblées par le sel. Avec les risques de contamination auxquels seront exposés les ouvriers.
     D'autres solutions, telles que le comblement total de la mine, seraient évidemment plus rapides et moins coûteuses. Mais ce serait un pis-aller. «Cela ne marcherait que si Asse II était stable, ce qui est pratiquement exclu», explique l'expert. Bétonnée, la mine serait une bombe à retardement. Extraits d'Asse II, les 126.000 barils devraient être transportés à la mine de fer de Konrad, toute proche. Mais celle-ci n'est pas, pour l'instant, prévue pour cet usage. Et la résistance des écologistes et de la population de la région n'en est qu'à ses débuts.
 

Michel VERRIER, à Berlin
janvier ADIT
Un centre de stockage de déchets nucléaires jugé trop peu sûr 
BERLIN (AFP)

     L'Office allemand de protection contre les radiations (BfS) a estimé vendredi qu'une ancienne mine de sel où sont stockés des déchets nucléaires était peu sûre, en raison d'infiltrations d'eau, et a recommandé que les 126.000 fûts qui y sont stockés en soient retirés.
     "C'est la meilleure solution en ce qui concerne les déchets radioactifs qui y sont stockés", a affirmé Wolfram König, patron du BfS, qui a émis la recommandation.
L'Office estime que les fûts doivent être tous retirés d'ici dix ans.
     Mais il appartiendra au gouvernement de décider de l'avenir des déchets.
     Le ministère de l'Environnement a souligné vendredi soir qu'aucune décision n'avait encore été prise. Le retrait complet des fûts apparaît "en l'état actuel des connaissances comme la meilleure solution en terme de sécurité à long terme", mais seulement si l'état intérieur de la mine permet une telle opération, a souligné le ministère.
     L'ancienne mine Asse II, dans le centre de l'Allemagne, a été utilisée pour stocker des déchets radioactifs de 1967 à 1978, par 500 à 700 mètres de fond, mais des infiltrations d'eau ont lieu depuis 1988. Elles ont provoqué des fuites dans certains fûts et menacent à présent de provoquer l'effondrement de plusieurs galeries. L'eau continue de s'infiltrer et les autorités n'excluent pas que la mine soit un jour inondée.
     Certains déchets ne sont que légèrement radioactifs, mais des révélations l'été dernier ont fait état de la présence dans la mine de 28 kilos de plutonium à très haut niveau de radiation.
     Selon la presse, les fûts avaient dans un premier temps été stockés de façon ordonnée, mais dans les années 1970 ils auraient simplement été empilés et recouverts de gravas, et certains sont maintenant rouillés et endommagés.
     La récupération des fûts risque de poser de nombreuses difficultés techniques, mais il s'agit de la solution la plus sûre sur le long terme, a estimé M. König.
     L'opposition écologiste, social-démocrate et radicale de gauche (Die Linke) s'est félicitée de l'avis rendu par l'Office de protection contre les radiations. "Le retrait des fûts est la seule option sûre", a dit le chef du SPD et ancien ministre de l'Environnement, Sigmar Gabriel.
     Berlin a décidé en 2000 de fermer les 17 centrales nucléaires du pays, au plus tard en 2020, mais le nouveau gouvernement d'Angela Merkel envisage désormais de repousser à plus tard ces fermetures.


http://www.lesechos.fr/
L'avenir du nucléaire allemand au coeur d'une nouvelle polémique

     L'office de protection contre les radiations préconise l'évacuation du site d‘Asse II, affecté par des fuites d'eau. Le débat reprend sur l'allongement de la durée de vie des réacteurs, prévu par l'accord de coalition de la majorité.
     Le débat sur l'énergie nucléaire a été relancé vendredi outre-Rhin, à la suite de la recommandation de l'office de protection contre les radiations (Bundesamt für Strahlenschutz, BfS) d'évacuer l'ancienne mine de sel d'Asse, où sont sto ckés quelque 126.000 fûts de déchets radioactifs. Le BfS estime que tous les conteneurs devraient être retirés d'ici à dix ans. L'ancienne mine de sel, située dans le Land de Basse-Saxe, a été utilisée, de 1967 à 1978, pour stocker des déchets nucléaires, par 500 à 700 mètres de profondeur, mais des infiltrations d'eau ont été répertoriées depuis 1988. Elles pourraient provoquer l'effondrement de certaines galeries.
     La plupart des fûts contiennent des déchets faiblement radio actifs, mais un rapport a révélé l'année dernière que la mine contenait aussi 28 kilogrammes de plutonium à très haut niveau de radiation.

Principe de précaution
     C'est au gouvernement qu'il appartient maintenant de prendre la décision. Il est sous la pression de l'opposition. Sigmar Gabriel, le chef des sociaux-démocrates, par ailleurs ancien ministre de l'Environnement de la grande coalition, a salué la recommandation du BfS, estimant que «le retrait des fûts est la seule option sûre». Il a aussi réclamé l'instauration d'une nouvelle taxe sur les grands opérateurs nucléaires, de manière à financer l'évacuation des déchets, qui va poser de sérieux défis technologiques.

suite:
     L'affaire pose à nouveau la question de l'avenir du nucléaire en Allemagne. Le contrat de coalition entre la CDU d'Angela Merkel, ses alliés bavarois de la CSU et les libéraux du FDP prévoit l'allongement de la durée de vie de certains réacteurs nucléaires, comme «solution de transition», le temps que les solutions de subsitution à base d'énergies renouvelables prennent le relais. Mais l'industrie s'inquiète de la lenteur avec laquelle le gouvernement allemand avance sur ce sujet miné, tant l'opinion publique est réservée sur le nucléaire. Les opérateurs, eux, réclament de la visibilité, alors que le réacteur de Neckarwestheim, opéré par EnBW, doit être mis hors service d'ici à cet été. La coalition rouge-vert dirigée par Gerhard Schröder avait décidé, en 2000, de sortir progressivement, mais complètement, du nucléaire, d'ici à 2020.

Exploitation prolongée
     Le ministre de l'Environnement du Land de Bavière, Markus Söder, a proposé la semaine dernière d'allonger la durée de vie des réacteurs de dix ans, moyennant une taxe sur les profits ainsi engrangés par les grands électriciens. Le responsable politique réclame d'ailleurs une partie de ces nouvelles recettes fiscales pour les Länder. On n'attend pas, toutefois, de décision rapide. La chancelière Merkel a dit comprendre, dans une interview au Handelsblatt, la semaine dernière, le besoin de clarté des opérateurs, mais estime nécessaire d'attendre la définition d'une stratégie énergétique globale pour l'Allemagne. Elle promet de présenter son concept à l'automne. Le leader des Verts, Jürgen Trittin, ministre de l'Environnement de Gerhard Schröder, a promis d'utiliser «tous les moyens légaux et constitutionnels» à sa disposition pour s'opposer à une prolongation des réacteurs.


http://www.world-nuclear-news.org/
Germany's waste removal decision
18 January 2010

     Thousands of barrels are to be removed from Germany's Asse radioactive waste disposal facility, a salt dome which has proven unstable.
     The decision has come from the country's Federal Office for Radiation Protection (Bundesamt für Strahlenshutz, BfS), which described the job as a "major scientific and technological challenge".
     Some 126,000 barrels are to be removed to the surface for alternative storage. They contain low-level radioactive waste such as lightly contaminated clothes, paper and equipment. In most countries these are disposed of permanently in purpose-built landfills, carefully lined to protect surrounding land. Asse, by contrast, is within a network of tunnels and caverns left by salt mining research operations.
     It was decided to use Asse in the 1960s and 1970s but this is seen as a licensing failure: The complex is in the upper portions of the salt, which are now unstable and increasingly allowing the ingress of groundwater. Ultimately this would be expected to erode waste canisters and allow contamination of groundwater.

     To address this, the BfS considered three options:
    * Filling the complex with concrete to provide a stable matrix
    * Moving wastes to a stable area deeper in the salt mass
    * Removing the wastes for interim storage on the surface

     The BfS said that an argument against the first option was that it could not be shown to satisfy long-term safety requirements. Meanwhile, the second option relies on the identification of an deep area of salt stable enough to satisfy German law. It would also be an especially long-lasting and challenging project.
     Both of the latter options require every canister to be checked and possibly repackaged using a new underground process line.
     While deciding on removal to the surface, the BfS warned that none of its options were optimal and all were uncertain. It noted that unpredictability of the salt and degradation of the packages could potentially prove to be too great a danger to workers. However, long-term security was its priority and the BfS would proceed with removal. It concluded that it will soon present a plan to open the waste vaults and investigate the exact condition of the barrels.

Researched and written by World Nuclear News