CONTROVERSES ENERG...ETHIQUES !
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2010
Le pic pétrolier est arrivé

Décembre
ADIT
http://www.iea.org/ et http://www.terra-economica.info/

     Vous trouvez ça compliqué? Regardez-bien, c'est pourtant clair désormais: la production mondiale actuelle de pétrole est officiellement entrée en déclin rapide, et toute la question est de savoir si l'industrie de l'or noir pourra... ou pas... développer suffisamment vite des capacités de production nouvelles assez importantes pour éviter une profonde et durable crise énergétique globale!
     Nous avons déjà franchi le pic pétrolier, reconnaît l'Agence internationale de l'énergie (AIE). La production de pétrole conventionnel a atteint son «pic historique» en 2006, elle ne le redépassera «jamais»: telle est la bombe lâchée – et aussitôt désamorcée – par l'AIE, l'organisme parisien chargé de conseiller les pays riches de l'OCDE.
     Car il n'y a pas de crainte à avoir, rassure l'AIE: la mise en production de champs pétroliers déjà découverts ainsi que la découverte de nouveaux champs permettront de maintenir les extractions de pétrole conventionnel sur un «plateau ondulant» au moins jusqu'en 2035. Et puis même si la production de pétrole conventionnel n'augmentera donc plus «jamais», l'AIE promet que l'offre mondiale de carburants liquides pourra quand même continuer à croître (et à satisfaire la demande) grâce au développement de la production des pétroles non-conventionnels et à la liquéfaction du gaz naturel.
     D'après l'AIE, le «plateau ondulant» du pétrole conventionnel devrait pouvoir être maintenu entre 68 et 69 millions de barils par jour (mb/j), à peine juste en-dessous du maximum de 70 mb/j atteint en 2006. Et le développement «très rapide» des pétroles non-conventionnels et de la liquéfaction du gaz naturel permettra d'atteindre une production totale de carburants liquides 96 mb/j en 2035, contre 80 mb/j en 2009.
     Jusqu'ici jamais l'AIE n'avait admis une possible stagnation de la production de pétrole conventionnel.
[Une fois seulement, en 1998, l'AIE a mis en avant des graphiques montrant un déclin de la production mondiale de pétrole (pdf, voir pp. 100, 103, 104). Le pic de production était à l'époque prévu quelque part entre 2012 et 2020... Encore n'était-ce alors qu'une hypothèse, et non un scénario officiel. La "normalisation" du discours de l'AIE qui a suivi ce rapport de 1998 est très instructive. Un jeune thésard britannique, Lionel Badal, en donne plus qu'un aperçu dans une enquête publiée sur [oil man].]
     La pente du déclin des champs aujourd'hui en activité envisagé dans le nouveau rapport annuel de l'AIE est très prononcée, de l'ordre de 3% par an. Cela représente 2 mb/j de capacités de production supplémentaires à mettre en place chaque année, soit un peu plus que la consommation d'un pays tel que la France.
     De nombreux experts indépendants doutent fortement que la production mondiale puisse être maintenue grâce au développement de nouvelles capacités de production. Même la presse s'interroge, à l'instar du site du New York Times.

     Pourquoi mettre en question l'étude mondiale de référence dans le domaine de l'énergie?
     «Il me semble que l'AIE pèche à nouveau par excès d'optimisme», répond par exemple Bernard Durand, ancien directeur de la division géologie-géochimie de l'Institut français du pétrole et ancien directeur de l'Ecole nationale supérieure de géologie de Nancy.

«Excès d'optimisme»?
     L'AIE prévoit que la production des champs pétroliers qui restent encore à découvrir atteindra 23 mb/j en 2035. Cela suppose de dénicher deux fois la production de l'Arabie Saoudite d'ici aux alentours de 2025 (puisqu'ensuite, il faut compter entre 7 et 10 ans pour lancer la production d'un champ nouvellement découvert). Le problème c'est qu'à part quelques références à «l'Arctique», le rapport de l'AIE ne dit pas où l'industrie a des chances de faire de nouvelles découvertes aussi massives. Et les réserves que recèlerait l'océan Arctique, c'est «la boule de cristal», critique Bernard Durand.

suite:*
     Le rapport de l'AIE soutient que l'Arabie Saoudite, 1er producteur mondial, sera capable de passer de 9,6 à 14,6 mb/j en 2035. Pour Bernard Durand, «ça paraît être du pipeau». La semaine dernière a été publié sur ce blog un scoop qui montre que l'armée américaine redoute un déclin imminent des extractions saoudiennes. En juillet, le roi Abdallah d'Arabie Saoudite a annoncé l'arrêt de l'exploration pétrolière afin de préserver les réserves d'or noir de son royaume.
     L'avenir de la production d'or noir ne devrait donc en rien ressembler à un long autoroute tranquille. Le directeur exécutif de l'AIE reconnaît lui-même que «des événements récents ont jeté un voile d'incertitude sur notre avenir énergétique», rapporte Associated Press.

     Il est possible de continuer longuement sur ce registre des incertitudes, en évoquant par exemple le côté «demande» du scénario envisagé par l'AIE.
     Si j'étais mauvaise langue, je dirais que c'est à se demander si le climat n'est pas en train de devenir le cache-misère du "peak oil". Le 1er graphe ci-dessus ne se place pas dans l'hypothèse du business as usual. Il table sur une forte réduction de la demande pétrolière des pays riches de l'OCDE. Une réduction qui à ce jour n'est pas anticipée dans les projections de ses principaux pays membres...
     Dans ce scénario de l'AIE intitulé «nouvelles politiques», seule la demande de pétrole des économies émergentes devrait à l'avenir augmenter. Dans le résumé de son rapport annuel, l'AIE appelle de ses voeux un pic et à un déclin... de la demande de pétrole aussi rapide et important que possible, afin d'échapper aux périls du réchauffement climatique. Evidemment, si l'humanité veut réduire sérieusement ses émissions de gaz à effet de serre, il faudra qu'elle réduise sa consommation de pétrole. Et si elle réduit sa consommation de pétrole, le pic pétrolier pourrait être plus aisé à désescalader...
     Dernière remarque sur ce rapport de l'AIE qu'il ne faut pas hésiter à qualifier d'historique: je trouve que dans le 1er graphe ci-dessus, ledit «plateau ondulant» de la production de pétrole conventionnel n'ondule vraiment pas beaucoup, justement. A vue de nez, il est même presque plat.
     Se pourrait-il que la modestie ondulatoire de ce trait obéisse à des impératifs politiques, pour les auteurs d'un rapport financé par les gouvernements des pays les plus riches de la planète? Chaque ondulation du plateau sera capable de déclencher un choc pétrolier dont la profondeur dépendra de l'amplitude de cette ondulation...

     Sur une compilation des projections de l'Energy Information Administration (EIA) de Washington, on perçoit la même tendance très nette tendance à la baisse que sur les projections de l'AIE. L'EIA est une des sources principales de l'AIE. Et Washington est le principal pourvoyeur de fonds de l'AIE.


http://green.blogs.nytimes.com/
Is ‘Peak Oil' Behind Us?

Débat autour de l'effet de serre!