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2010
Comment intégrer les véhicules électriques?

ADIT, juillet
     Les véhicules électriques (VE) ont reçu de nombreuses aides l'an dernier aux Etats-Unis, avec notamment un investissement fédéral de 2,4 milliards de dollars [1]. Cependant un déploiement des véhicules électriques à grande échelle nécessite la mise en place d'une infrastructure, en particulier pour recharger les batteries. Plusieurs questions viennent alors à l'esprit: Quelle est la taille optimale de l'infrastructure? On peut imaginer que les particuliers auront une station de recharge dans leur garage, mais ils auront aussi besoin d'une station sur le lieu de travail ; qui devra payer pour l'installation? Les entreprises seront-elles prêts à financer de tels systèmes? La distance moyenne parcourue par jour aux Etats-Unis est d'environ 65 kilomètres (40 miles) par conducteur. Et puis, comment faire lorsqu'on part en vacances? Des stations de recharge seront nécessaires sur la route mais il reste à connaître le nombre à installer, leur propriétaire, le modèle économique et financier à appliquer, notamment pour payer l'électricité. Comme le solaire, l'industrie de l'automobile, les réseaux intelligents, les infrastructures destinées aux véhicules électriques auront sûrement besoin de financements importants. Le transport est une industrie lourde et mature que l'on ne peut changer du jour au lendemain.

Informer le consommateur, certes, mais pas seulement...
     Si des VE ont été développés depuis longtemps, seulement quelques personnes en ont possédés ou en possèdent une. Les informations disponibles sur le sujet restent limitées. Les constructeurs automobiles ont remarqué que les gens apprécient le concept de voiture électrique, mais n'ont aucune idée de leur fonctionnement, prix, autonomie ou façon de les recharger. Le déploiement des VE passera donc par une formation et une sensibilisation des clients potentiels. Dans le même temps les constructeurs automobiles devront également répondre aux attentes des clients, ce qui implique le besoin d'une nouvelle infrastructure efficace.
     En effet, comme dans les stations essence actuelles, le temps passé devra être le plus court possible. Un véhicule nécessitant entre 6 à 12 heures de recharge pour seulement une à deux heures de conduite ne pourra jamais toucher un large public. Les voitures représentent en effet le moyen de transport associé à la liberté de déplacement, elles doivent permettre une grande mobilité. Pour séduire les conducteurs, les véhicules électriques devront donc pouvoir se recharger dans des conditions similaires à celles des stations essence actuelles.
     Actuellement deux solutions existent pour réduire ce temps de recharge. La première est le "chargement rapide". Plusieurs constructeurs automobiles misent sur cette technologie [2]. Combiné à une infrastructure de points de recharge, ce type de solution technologique répondrait aux problèmes d'autonomie. Cependant ceci pourrait conduire à des pics élevés de demande en électricité. Typiquement une voiture électrique équipée d'une batterie d'une capacité de 25kWh a besoin d'un accès à une puissance de 3.125W pendant 8 heures. Si cette même batterie doit être rechargée en seulement 10 minutes, ceci nécessite une puissance de sortie de 155 kW. Il est clair que pour de telles recharges rapides, même si elles ne sont utilisées que par une faible quantité de véhicules, l'ajout de capacités et la gestion de l'énergie deviendront obligatoires.
     La seconde est de troquer une batterie vide contre une autre fraîchement rechargée. Better Place, la société à la tête du marché, a fait la démonstration il y a 3 mois d'une station capable d'effectuer l'échange en 60 secondes [3]. Cependant, ce système de batteries échangeables n'apparaît pas aux yeux de tous les constructeurs automobiles comme une solution économique et efficace. En effet, ils ne voient l'intérêt de devoir homogénéiser leurs voitures et de faire en sorte que les stations de recharge aient en stock une grande variété de batteries coûteuses.

Quel rôle devront jouer les opérateurs électriques?
     Fournissant l'électricité, les opérateurs auront un rôle important à jouer dans le déploiement des véhicules électriques. Cependant ce rôle aux Etats-Unis devrait dépendre en grande partie de chaque état et de chaque opérateur. Par exemple en Californie les "investor-owned utilities (IOU)", c'est à dire les opérateurs privés, représentent environ 75% de la production totale d'électricité de l'état. La réglementation leur impose de suivre un modèle découplé ("decoupling") [4], dissociant leurs bénéfices de leurs ventes d'énergie. Ceci signifie qu'elles ne gagneront pas plus d'argent en vendant davantage d'électricité destinée aux VE. Cependant, construire plus d'infrastructures et les posséder pour en tirer du chiffre d'affaires leur permettraient d'augmenter leur contrôle sur le réseau et d'obtenir de plus amples financement de la part des institutions californiennes. Ainsi les distributeurs pourraient vouloir par la suite les louer à d'autres compagnies ou aux particuliers. Garder un contrôle sur la distribution est essentiel dans le cas des VE car les opérateurs doivent réduire au maximum les pics de consommation sur le réseau, donc par conséquent réduire la concentration des points de recharges par quartier.

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     De plus, la consommation d'un VE représente deux fois celle d'une maison ordinaire. Pour les opérateurs cette demande supplémentaire d'électricité peut affecter le réseau pendant les périodes de pics de consommation. Les consommateurs verront également de leur côté des effets sensibles sur leur facture d'électricité. Ils devront changer leur attitude de consommation notamment grâce à l'accès à de nouveaux programmes de gestion de leur consommation pendant les heures creuses, soit en dehors des pics. Certains opérateurs comme Pacific Gas and Electric (PG&E) ont déjà planifié d'appliquer le modèle "Time of Use" pour les propriétaires de voitures électriques [5].

Vehicle to Grid, un nouveau mode de stockage
     Appelé "vehicle-to-grid" (V2G), ce concept permet de tirer avantage des capacités électriques des batteries des VE pendant les après midis chaudes lorsque la demande est la plus élevée et la consommation la plus chère pour éviter des coupures de courant à grande échelle. PG&E est devenu il y a trois ans le premier opérateur à démontrer publiquement [6] la possibilité d'utiliser cette possibilité pour alimenter la maison et les commerces en électricité.
     Cependant ce modèle est complexe et plusieurs problèmes doivent être résolus avant une utilisation à grande échelle. En effet, la quantité d'électricité disponible est susceptible de fluctuer énormément au cours de la journée. A cela s'ajoute le morcellement de la capacité de stockage, la gestion devenant alors très difficile. De plus les stations devront être capables de supporter des flux d'électricité bi-directionnels, à savoir un premier sens pour recharger la batterie et un second pour redistribuer l'électricité sur le réseau. Aujourd'hui les technologies traditionnelles utilisées sont conçues pour supporter seulement un seul sens, celui destiné à la recharge des batteries. Durant la conférence TechConnect à Anaheim la semaine dernière, des experts sur le sujet ont affirmé ne pas s'attendre à une large utilisation de ce modèle avant 2020.

VE et leur infrastructure: Paradoxe de l'oeuf ou de la poule?
     Du VE ou de l'infrastructure, lequel devrait être construit et déployé en premier? C'est une question récurrente lors des discussions sur la pénétration des VE. Cependant une chose est sûre: l'arrivée des VE est programmée sur le marché d'ici la fin de l'année avec notamment la Nissan Leaf et la Chevrolet Volt [7]. Les infrastructures devront donc être prêtes pour accompagner l'arrivée de ces premiers VE.
     De plus, les voitures "plug-in-hybrids", c'est-à-dire à la fois hybrides et rechargeables sur le réseau, devraient être également rapidement faire leur apparition sur le marché. La Karma de la Compagnie Fisker Automotives est prévue pour le début de l'année prochaine. Les Plug-in-hybrids ont une batterie plus petite qu'une voiture entièrement électrique (5-25 kWh à comparer avec 10-50 kWh). Elles sont équipées à la fois d'un moteur électrique et d'un moteur à essence et pourraient conduire vers une meilleure transition entre l'état actuel et le déploiement à grande échelle des VE.


- [1] "President Obama Announces $2.4 Billion in Grants to Accelerate the Manufacturing and Deployment of the Next Generation of U.S. Batteries and Electric Vehicles": 5/08/09 - ADIT-1
- [2] "Electric-Car Firms Push Alternative to Project Better Place's Idea" 13/05/08 - ADIT-2
- [3]" Swapping batteries into electric Tokyo taxis in under a minute with Shai Agassi": 27/04/10 - ADIT-3
- [4] le "decoupling": http://en.wikipedia.org/
- [5] "Vers une tarification de la facture électrique en temps réel en Californie?": bulletins-électroniques - 18/06/10 - ADIT-4
- [6] "Pacific Gas and Electric Company Energizes Silicon Valley With Vehicle-to-Grid Technology" 9/04/07 - ADIT-5
- [7] "L.A. gets wired with new electric-car charging stations": 27/06/10 - greenspace ADIT-6
- [8]" Fisker Misses Deadline, Won't Start Selling Karma Plug-in Hybrids Until 2011": Gas2.0- 28/06/10 - ADIT-7
- "California invests in EV infrastructure"25/06/10 - sgvtribuen.com - http://www.sgvtribune.com/
- ADIT-8
- "California utility prepares for surge in plug-in electric cars": USA today - 16/03/09 - ADIT-9
- Conférence TechConnect World 2010: http://www.techconnectworld.com/