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Le monde des BATTERIES
Documentation
Document Energies Renouvelables / SSES, No 3/2004, mai 2004, p. 26-27
"Batteries au plomb: choisir la bonne technologie"
    Dans les systèmes photovoltaïques autonomes, le stockage d'énergie représente environ 13 à 15% des investissements initiaux, mais sur une durée d'exploitation de vingt ans, ce coût peut dépasser 50% des frais totaux; il est donc primordial d'essayer de réduire cette valeur en augmentant la durée de vie de ce composant.
Texte et photo: Michel Villoz

Batterie fermée (VRLA) 12V / 500Ah
    En 2000, le marché des batteries pour les énergies renouvelables était d'environ 130 millions d'€/ans, et avec le développement des systèmes solaires  individuels  (SHS  Solar Home Systems) et des grands projets d'électrification rurale dans les pays chauds, on prévoit un accroissement qui devrait atteindre 820 millions d'€/ans en 2010.
    La batterie au plomb est un composant développé depuis le 19e siècle, et son fonctionnement est bien connu. Même aussi ancienne, elle reste encore aujourd'hui le moyen de stockage le plus utilisé pour les systèmes autonomes photovoltaïques. Deux électrodes de plomb et d'oxyde de plomb trempent dans un électrolyte composé d'acide sulfurique dilué. En reliant les deux électrodes à un récepteur externe consommant du courant, elles se transforment en sulfate de plomb et l'acide se dilue, phénomène qui permet d'évaluer l'état de charge de la batterie en mesurant la densité d'acide. En fournissant un courant opposé au système, l'acide se concentre et les deux électrodes retournent à leurs états initiaux.

«Des nouvelles technologies permettrant d'abaisser les coûts de stockage de l'énergie»

    Ne pouvant fournir qu'un nombre limité de cycles, la batterie doit être considérablement surdimensionnée pour durer de nombreuses années: par exemple, pour un système à batterie tubulaire qui doit durer au moins dix ans, on devra imposer un nombre de cycles annuels (à 100%) inférieur à environ 150, ce qui correspond à limiter les décharges journalières à 150/365, soit utiliser environ 41% de la capacité. Pour une batterie à plaques planes durant 5 ans et 250 cycles, la décharge journalière maximale se réduit à 14%.
    L'influence de la température est très importante: les phénomènes électrochimiques de corrosion doublant environ  par chaque 10oC d'accroissement, en pays chauds, les durées de vie seront souvent réduites de plus d'un facteur 2.
    De nombreux travaux récents présentent des solutions pour améliorer ces chiffres, et de nouvelles batteries ou de nouvelles techniques d'utilisation devraient prochainement permettre d'abaisser le coût du stockage d'énergie. Pour plus de détails sur la technologie du plomb et les nouvelles technologies de stockage, on visitera avec intérêt le site de la Tâche 3 du programme PVPS de l'AIE (Agence Internationale de l'Energie)
Batteries fermées (VRLA)
    L'avantage de la batterie fermée est que l'électrolyte étant stabilisé par un gel (SiO2) ou un matériau AGM (absorbent glass mat, sorte de fibre de verre absorbant l'acide) qui joue également le rôle de séparateur, les problèmes de stratification de la densité de l'acide sont en principe résolus.

Compression mécanique
    Lors de la décharge de l'électrode positive, le dioxyde de plomb est transformé en sulfate de plomb dont le volume est plus important. A la recharge, ce gros cristal est de nouveau transformé en dioxyde de plomb plus petit. Ces contraintes mécaniques entraînent une perte de cohésion entre les particules de matière active qui peuvent même se détacher, réduisant la capacité, et dans le cas d'une batterie ouverte tomber au fond du boîtier. Pour pallier cet inconvénient, un nouveau séparateur a été développé qui supporte une contrainte mécanique. Une publication récente[1] présente l'utilisation de ces séparateurs, et le gain de performances obtenu atteint plus de 1500 cycles à 100% avec une compression de 80 kpa.

Batteries ouvertes
    Une partie des améliorations réalisées avec des batteries fermées peut être transposée aux batteries «traditionnelles» ouvertes. Le problème principal à résoudre est la corrosion provenant de la stratification de l'électrolyte. Pour résoudre ce problème dans les grands systèmes solaires, on ajoute souvent une pompe de type aquarium envoyant des bulles d'air dans l'électrolyte pour obtenir un mouvement de brassage. Cette amélioration permet de réduire le taux de surcharge nécessaire utilisé auparavant pour le brassage par gazéification de 115% à 104%, ce qui réduit la consommation d'eau et la corrosion supplémentaire provenant de la surcharge.

Batterie «cristal»
    Un projet européen récent a proposé de modifier la composition de l'électrolyte en ajoutant des additifs qui pourraient stabiliser la densité de l'acide et éviter les problèmes de stratification: l'idée est de pouvoir fabriquer la batterie sur une chaîne classique (genre batterie automobile) et de modifier uniquement la formulation de l'acide, ce qui n'entraîne pas de modification du matériel de fabrication. Les premiers résultats de la batterie «cristal» sont encourageants[2]: on ajoute à l'électrolyte de l'acide phosphorique qui réduit la formation de grands cristaux de sulfate de plomb sur l'électrode positive et un colloïde de silice qui stabilise l'électrolyte. Une telle batterie devrait offrir environ deux fois plus de cycles et durer plus longtemps qu'une batterie similaire sans modification d'électrolyte.

Coût du stockage sur 20 ans
    Nous avons calculé une estimation du coût du stockage pour différents types de batterie en tenant compte des frais de changements estimés ici à 10€ par pièce. L'hypothèse est que l'on a besoin de stocker 1 kWh par jour. Le tobleau ci-dessous résume les calculs effectués:
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13
Type de batterie Coût pce €/kWh Cycles 100% profond Vie Profond. de décharge €/kWh Nbre de chgmts Nbre de batteries Poids €/kWh
Voiture
Cristal
VRLA & press
Tubulaire
50
100
150

200

100
500
1500

1500

5
7
7

12

0.14
0.27
0.82

0.41

365
365
183

487

10
4
4

2

73
14.6
4.9

4.9

1825
365
122

122

730
146
49

49

3650
1460
730

973

4380
1606
779

1022

0.60
0.22
0.11

0.14

1.Type de technologie, voiture, cristal (voir ci-dessus), VRLA compressée et tubulaire
2. Coût unitaire pour 1 kWh de stockage
3. Nombre de cycles total à 100% de décharge
4. Durée de vie
5. Profondeur de décharge choisie
6. Investissement de départ
7 à 13: période de 20 ans (7.300 kWh):
7. Nombre de changements sur 20 ans
8. Nombre de batteries utilisées
9. Poids de batteries utilisées (hypothèse: 1 kWh = 25kg)
10. Coût des changements de batteries
11. Coût des batteries
12. Coût total
13. Coût unitaire de l'énergie stockée

Remarques:

    - On voit immédiatement que les «mauvaises» batteries coûtent beaucoup plus cher. La batterie voiture qui est largement utilisée dans les SHS est catastrophique et demande 73 unités ou 1,825 tonnes pour stocker 1 kWh par jour sur 20 ans alors que les modèles tubulaires ou fermés à compression demandent seulement 122kg.
    - La grande dissémination des SHS encouragée par des financements internationaux revient à éparpiller dans les pays chauds des énormes quantités de batteries qui ne seront jamais recyclées, faute de moyens.
    - Il serait beaucoup plus opportun de promouvoir des systèmes regroupant plusieurs utilisateurs (micro-réseaux en 24 Vdc) pour pouvoir choisir au départ des batteries tubulaires ou de technologie mieux appropriée.
    Pour terminer, nous avons calculé le coût total d'un système fournissant 1 kWh/jour dans un pays chaud avec ces différents types de batteries:
  Coût total du système   batterie
 systéle solaire
 
 
départ
%
 colonne*
1
2
3
4
5
 panneaux 250W
 1250€
voiture 
1815 
5830
75 
 régulateur
 100€
 cristal
1815
3056
53
 câbles et mécanisme
 100€
 VRLA et press.
1633 
2229
35 
 Total
 1450€
 tubulaire
1937
2472
41
    Le coût des autres composants est estimé à 1450€ (*colonne 1) alors qu'en 3, nous calculons l'investissement de départ pour chaque technologie, en 4 le coût total du système sur 20 ans et en 5, la proportion des frais de stockage sur cette durée.
Conclusion
    Cette présentation de quelques types de batteries au plomb permet d'estimer le coût du stockage et montre l'importance du choix de la «bonne technologie» pour abaisser le coût des systèmes photovoltaïques autonomes.
[1] M. Perrin et al.: "Extending cycles life of lead-acid batteries: a new separation system allows the application of pressure on the plate group", Journal of Power Sources 105 (2002)
[2] L. Torcheux, P. Laillier: "A new electrolyte formulation for low cost cycling lead acid batteries", Journal of Power Sources 95 (2001)