CONTROVERSES NUCLEAIRES !
ESSAIS NUCLEAIRES ET SANTE

Un lien entre essais et cancers
Vers l’Avenir: 01/08/06
     Paris admet aujourd'hui un lien "statistique" entre les radiations de ses essais nucléaires en Polynésie et une augmentation des cancers de la thyroïde.

     LES AUTORITÉS sanitaires françaises viennent d'admettre l'existence d'un "lien statistique" entre les radiations produites par les essais nucléaires réalisés en Polynésie Française et une augmentation du nombre de cancers de la thyroïde.
     Ce lien a été mis en évidence par un responsable de l'Institut National de la Santé et de la Recherche (Inserm), Florent de Vathaire, dans une lettre publiée en fin de semaine dernière à Papeete, principale ville de ce territoire français du Pacifique sud.
     La France a mené une quarantaine d'essais nucléaires atmosphériques en Polynésie française entre 1966 et 1974, et plus de 150 essais souterrains. Les sites d'essais dans la région ont été fermés en 1996.
    Le lien "est acquis" Selon M. de Vathaire, la relation entre essais nucléaires atmosphériques et cancers de la thyroïde en Polynésie est maintenant " statistiquement significative grâce à une étude qui a porté sur 239 cas de cancers de la thyroïde et le lien doit être désormais considéré comme acquis".
     La relation a été mise en évidence à partir "d'une reconstitution dosimétrique" et des données météorologiques disponibles durant les 21 jours suivant chaque essai, a expliqué le chercheur. "Cette relation est nette, poursuit le chercheur de l'Inserm, si l'on prend en compte la dose reçue, quel que soit l'âge au moment de l'irradiation et elle est même renforcée si l'on étudie la dose reçue avant l'âge de 15 ans et avant l'âge de 10 ans."
     Le chercheur estime néanmoins que si les essais nucléaires ont "très probablement" accru le nombre de cancers de la thyroïde, ce chiffre est néanmoins "très limité" et il parle de certitude pour une dizaine de cas entre 1984 et 2002.

Les essais nucléaires polynésiens responsables de cancers thyroïdiens
LE MONDE | 02.08.06
     Contrairement à ce qui avait pu être affirmé jusqu'ici, il y aurait bien une relation "statistiquement significative" entre les essais nucléaires atmosphériques pratiqués en Polynésie française et la survenue locale de cancers de la thyroïde.

     Fin juillet, lors d'une session extraordinaire de l'Assemblée de la Polynésie française, son président, Oscar Temaru, a donné lecture d'une lettre adressée par Florent de Vathaire, directeur de l'unité 605 de l'Inserm spécialisée dans l'épidémiologie des cancers, au délégué à la sécurité nucléaire, Marcel Jurien de la Gravière, considérant "comme acquis le fait que les essais nucléaires atmosphériques réalisés par la France ont contribué à augmenter l'incidence du cancer de la thyroïde en Polynésie".

"RELATION NETTE"
     De 1966 à 1974, la France a mené 46 essais nucléaires atmosphériques en Polynésie française. Ensuite, plus de 150 essais souterrains ont été réalisés jusqu'à la fermeture des sites en 1996. L'Inserm avait conduit deux études en association avec l'Office de protection contre les rayonnements ionisants.
     Ces études, publiées en 1994 et 1997, avaient été dirigées par Florent de Vathaire. Elles constataient une plus grande occurrence des cancers thyroïdiens. Mais l'organisme de recherche n'avait pu impliquer une "origine radio-induite".
     La Direction des applications militaires concluait pour sa part à l'"absence de relation entre la répartition des décès par cancer et la distance par rapport aux sites de tir".
     Florent de Vathaire a entrepris une nouvelle étude en comparant les données de 239 cas de cancers de la thyroïde survenus en Polynésie française à celles de 363 témoins indemnes. "Nous avons mis en évidence, indique la lettre, une relation statistiquement significative entre la dose totale de radiations reçues à la thyroïde du fait des essais nucléaires atmosphériques réalisés par la France en Polynésie française et le risque ultérieur du cancer de la thyroïde diagnostiqué entre 1985 et 2002."
     "Cette relation est nette si l'on prend en compte la dose reçue, quel que soit l'âge au moment de l'irradiation, et est renforcée si l'on étudie plus spécifiquement la dose reçue avant l'âge de 15 ans et avant l'âge de 10 ans." M. de Vathaire estime "nécessaire que l'armée fasse déclasser les rapports des services de radioprotection du Centre d'expérimentation du Pacifique, ce qui n'est toujours pas le cas, malgré les déclarations et les quelques efforts de transparence de l'armée".

Paul Benkimoun