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N°275, février 2015

LES TEMPS TROUBLES
ANNEXE de la lettre ASN CODEP-DRC-2014-062807
DEMANDES A PRENDRE EN COMPTE POUR LA POURSUITE DU PROJET ASTRID
Objectifs associés au réacteur ASTRID dans le «Dossier Option de Sûreté ou DOS»
2014


 
Un Rappel de la Gazette N°272 page 20
     Demande n°1: rôle de démonstrateur de sûreté
     L’ASN estime nécessaire que la quatrième génération de réacteur apporte un gain significatif de sûreté par rapport à la troisième génération. ASTRID doit donc permettre de tester effectivement des options et dispositions de sûreté renforcées. Je vous demande, au stade du dossier d’options de sûreté (DOS), de me faire part de vos propositions sur ce point.
     Demande n°2: objectifs de sûreté
     Les objectifs généraux de sûreté du réacteur ASTRID, qui seront précisés au stade du DOS, doivent assurer un niveau de sûreté au moins équivalent à celui des réacteurs de type EPR, et tenir compte des enseignements tirés de l’accident de Fukushima, avec les adaptations nécessaires aux réacteurs de type RNR-Na.
     Demande n°3: essais de transmutation d’actinides mineurs
     Je vous demande de préciser, au stade du DOS, si vous envisagez la mise en œuvre d’essais de transmutation d’actinides mineurs et d’évaluer l’impact de ces essais sur les objectifs généraux de sûreté.

Référentiel réglementaire
     Demande n°4: référentiels réglementaires applicables
     Je vous demande de mener, au stade du DOS, un examen détaillé des référentiels réglementaire et para- réglementaire applicables.
     Demande n°5: risques de rejets toxiques
     Je vous demande, au stade du DOS, de démontrer la sûreté de votre installation vis-à-vis des risques de rejets toxiques selon une approche déterministe prudente, fondée sur le principe de défense en profondeur, tel qu’il est prévu à l’article 3.1 de l’arrêté du 7 février 2012 modifié, et de compléter cette approche par des analyses probabilistes. La démarche mise en œuvre devra, de plus, permettre d’atteindre un niveau de risque aussi bas que raisonnablement possible.

Démarche de conception: classement des situations et méthodes d’analyse
     Demande  n°6: classement des situations de fonctionnement et les règles d’analyse associées
     Pour les risques radiologiques, les principes de classement des situations de fonctionnement et les règles d’analyse associées, largement reconduits des réacteurs précédents, sont satisfaisants tels qu’exposés dans le DOS. Je vous demande de présenter les règles d’analyse de manière plus détaillée dans le DOS.
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     Pour une même famille d’événements, vous définirez des situations classées dans les différentes catégories de conditions de fonctionnement jusqu’au domaine dit  hypothétique», permettant ainsi une progressivité dans la définition des dispositions de limitation des conséquences d’un incident ou accident.
     Demande n°7: utilisation des études probabilistes de sûreté
     Je note que vous cherchez à développer votre démarche de défense en profondeur au moyen de la méthode des lignes de défense et de mitigation: les lignes de défense visent à prévenir les accidents graves, les lignes de mitigation visent à limiter les conséquences de tels accidents. L’utilisation de la méthode des lignes de défense et de mitigation à la conception permet d’orienter certains choix; je vous demande néanmoins de développer de façon plus systématique votre démonstration de sûreté et de l’étayer, notamment par des études probabilistes de niveaux 1 et 2.
     Demande n°8: situations à «éliminer  pratiquement»
     Les démarches de prise en compte des accidents graves et d’ «élimination pratique» des situations susceptibles de conduire à des rejets importants ou précoces présentées dans le DOS sont satisfaisantes. Néanmoins, conformément à l’article 3.9 de l’arrêté du 7 février 2012 modifié fixant les règles générales relatives aux INB, je vous demande de justifier l’élimination pratique de telles situations, y compris concernant les rejets non radiologiques. Vous privilégierez les justifications s’appuyant sur des impossibilités physiques. En tout état de cause, les dispositions visant à prévenir ces situations doivent répondre à des exigences fortes de conception et d’exploitation.
     Demande n°9: classement de sûreté
     Concernant la démarche de classement de sûreté, je vous demande, dans le DOS, de détailler l’ensemble des règles permettant d’attribuer des classes de sûreté aux systèmes, structures et composants (SSC) ainsi que les exigences associées à chacune de ces classes.
     Demande n°10: situations de fonctionnement
Afin que les agressions externes n’augmentent pas significativement le risque de fusion du cœur, je vous demande de spécifier les agressions et cumuls d’agressions à prendre en compte respectivement pour le domaine de «dimensionnement de référence» et pour les aléas au delà de ce domaine.
     Demande n°11: agressions externes au-delà du «dimensionnement de référence»
     Je vous demande:
     - de définir, au stade du DOS, la liste des structures, systèmes et composants (SSC) nécessaires à la gestion des situations au-delà du dimensionnement de référence de façon à éviter les rejets précoces importants,
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     - de considérer les situations au-delà du dimensionnement de référence comme des situations normales pour le dimensionnement de ces SSC et d’adopter des critères adaptés à leurs exigences fonctionnelles.
     Demande n°12: démarche de prise en compte des agressions
     Conformément à l’article 3.2 de l’arrêté du 7 février 2012 modifié, je vous demande de considérer les agressions retenues pour dimensionner l’installation pour l’ensemble des états possibles de l’installation, qu’ils soient permanents ou transitoires.

Critères de sûreté relatifs au combustible et à la première barrière
     Demande n°13: intégrité de la première barrière
     Les critères de sûreté définis pour la première barrière doivent, en particulier, permettre de déterminer les limites à respecter sur le combustible au cours de son irradiation et d’éviter sa fusion dans les aiguilles pour les conditions de fonctionnement de catégories 1 à 3. Concernant les critères de sûreté qui s’appliquent lors des périodes de manutention, je vous demande, au-delà de la conservation d’une géométrie refroidissable des assemblages dans les conditions accidentelles, de rechercher le maintien de l’intégrité des gaines pour les conditions de fonctionnement de catégories 1 à 4.
 
Fonctions de sûreté et aux risques liés au sodium
Demande n°14: risques spécifiques liés aux RNR-Na
     Je vous demande, dans le DOS, de démontrer des gains de sûreté significatifs par rapport aux précédents réacteurs RNR-Na concernant:
     - les risques d’interaction sodium-eau (notamment dans un générateur de vapeur),
     - l’inspectabilité et l’inspection en service des équipements en particulier ceux sous sodium,
      - la tenue, en cas de séisme, des équipements dont l’épaisseur est relativement faible.
     Demande n°15: effets de vide locaux
     Le concept de cœur dit «hétérogène » décrit dans le DOS et visant à limiter l’effet de réactivité positif d’une vidange accidentelle du sodium du cœur («effet de vide») devrait entraîner une modification sensible de la phénoménologie accidentelle, difficilement modélisable par les outils actuellement disponibles. Cette réduction de l’effet de réactivité positif de la vidange globale du cœur ne permettant de renforcer la prévention et la limitation des conséquences que pour certains accidents, je vous demande d’examiner également les effets de vide locaux.
     Demande n°16: évacuation de la puissance résiduelle
     Concernant l’évacuation de la puissance résiduelle (EPuR), vous avez retenu la mise en place de circuits diversifiés dédiés, capables de fonctionner en cas de fusion du cœur. Je vous demande de viser à ce que les situations résultant d’une perte définitive de la fonction EPuR soient «pratiquement éliminées».
     Demande n°17: barrières de confinement
     Je vous demande, concernant le confinement des substances dangereuses, de décrire précisément les barrières de confinement pour lesquelles j’ai noté que vous visiez à limiter les risques de bypass.
     Demande n°18: séparation des zones
     Je vous demande de développer, dans le DOS, les dispositions de séparation des zones de l’installation présentant des risques radiologiques de celles qui contiennent du sodium non radioactif, dans l’objectif d’éviter l’agression de l’enceinte de confinement par un feu de sodium provenant d’un circuit intermédiaire.
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     R&D en support à la sûreté
     Demande n°19: qualification et validation des outils de calculs
     Je note que vous avez identifié les domaines pour lesquels des programmes de recherche et développement sont nécessaires pour la conception du réacteur ASTRID mais les éléments fournis ne me permettent pas de me prononcer au stade actuel sur la suffisance, la cohérence et les délais de votre programme de R&D.
     Néanmoins, conformément à l’article 3.9 de l’arrêté du 7 février 2012 modifié, je vous demande que les outils de calcul utilisés en support à la conception du cœur, y compris pour le domaine accidentel, fassent l’objet d’une qualification et d’une validation aussi complètes que possible.
 
     Retour d’expérience des réacteurs RNR-Na
     Demande n°20: retour d’expériences et solutions technologiques à l’étude
     Les orientations présentées dans le DOS tiennent compte de façon satisfaisante des principaux éléments du retour d’expérience des réacteurs RNR-Na, ainsi que des études et des analyses de sûreté réalisées pour ces réacteurs. Sur le plan des principes, la démarche de conception présentée et les principales pistes d’améliorations de la sûreté sont globalement satisfaisantes. Je vous demande de préciser ces aspects dans le DOS et d’apporter des éléments complémentaires concernant les solutions technologiques actuellement à l’étude, pour me permettre d’apprécier leur faisabilité ou leur caractère suffisant en termes de sûreté.
EXPERIMENTATIONS A METTRE EN ŒUVRE
EXTRAIT DU RAPPORT n°8 (juin 2014)

Commission Nationale d’EVALUATION 2

     Pages 11 -12-13 (pdf  intégral ICI)
     Chapitre 1
     SÉPARATION ET TRANSMUTATION
     Le choix de la France en faveur d’un cycle du combustible nucléaire fermé permet de disposer d’uranium et de plutonium issus du traitement des assemblages de combustible usé ainsi que d’uranium appauvri (450.000 t en 2040) résultant du processus d’enrichissement en uranium 235 de l’uranium naturel. Ces matières rendent possible la fabrication de combustible qui alimenterait une flotte de réacteurs à neutrons rapides électrogènes.
     Actuellement le stock de plutonium est d’environ 300 t et s’accroît à raison de 6 t par an. Une flotte de RNR électrogènes permettrait de gérer le plutonium. Dans un premier temps, elle conduirait à une stabilisation du plutonium dans le cycle (environ 1.000 t à l’horizon 2100). Le moment venu, si on le souhaitait, ces RNR pourraient servir à réduire significativement la quantité de plutonium.
     Si la France renonce à une filière de RNR, le plutonium devra être considéré comme un déchet destiné au stockage géologique profond et aucune transmutation des actinides mineurs ne pourrait être envisagée.

     1.1-ASTRID (ADVANCED SODIUM TECHNOLOGICAL REACTOR FOR INDUSTRIAL DEMONSTRATION)
     Les connaissances et le retour d’expérience acquis en France et dans le monde montrent que la technologie des réacteurs à neutrons rapides est mature et pourrait, sous réserve d’innovations majeures concernant la sûreté, commencer à être industriellement mise en œuvre dès la deuxième moitié du 21ème siècle.
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     Un programme important de R&D est en cours depuis plusieurs années pour la construction d’un prototype industriel, Astrid, réacteur à neutrons rapides, refroidi au sodium d’une puissance de 600 MWe. Aujourd’hui, ce programme est dans la phase d’avant-projet sommaire phase 2 (AVP2)  qui a débuté en 2013 et se poursuivra jusqu’en 2015; cette phase prépare l’avant-projet détaillé (APD). La Commission note qu’à ce jour les soutiens financiers pour Astrid ne sont garantis que jusqu’en 2016 alors que la R&D doit se poursuivre bien au delà.
     La Commission recommande de veiller à ce que le programme Astrid puisse se développer dans toutes ses composantes sans être compromis par des contraintes de financement.
     Fin 2013 dix collaborations industrielles avec participation sur fonds propres garantissent la prise en compte des contraintes opérationnelles dès la conception d’Astrid. De même le CEA a établi des contacts visant des collaborations de R&D internationales avec la Russie, les Etats-Unis, la Chine, l’Inde, la Corée du Sud, le Royaume Uni. Récemment la France a signé un accord avec le Japon qui définit un cadre de participation au projet Astrid. Le CEA développe également un réseau R&D de partenaires européens.
     Des options innovantes pour réaliser un démonstrateur industriel de RNR-Na de nouvelle génération (degré de sûreté au moins égal à celui de l’EPR, intégration des enseignements tirés des événements de Fukushima) ont été identifiées durant la période 2010-2012 et elles font l’objet de R&D pour préparer l’APD. Il s’agit:
     * D’un cœur à faible coefficient de vidange («CFV»), en rupture par rapport aux technologies RNR connues, (brevet CEA-Areva-EDF), qui améliore très sensiblement la sûreté, puisqu’il permet d’éviter l’emballement de la réaction de fission en cas de vidange locale du caloporteur sodium.
     * D’un système de refroidissement sodium-sodium-azote permettant d’éviter tout contact possible entre sodium et l’eau du circuit tertiaire d’un système sodium-sodium-eau, l’azote assurant la conversion thermodynamique de la chaleur en électricité. Cette amélioration très innovante est fondée sur les progrès réalisés dans le domaine des turbines à gaz. Des essais prometteurs ont été réalisés à Cadarache en 2013; le rendement net de conversion pour un système sodium-sodium-azote (37%) est plus faible que pour un système sodium-sodium-eau (45%) mais reste acceptable. Alstom en étudie la faisabilité industrielle.
     * D’une accessibilité et d’une inspection en service prévues dès la conception et la mise au point de capteurs permettant des mesures sous et hors sodium. Ces innovations bénéficient des REX de Phénix et Superphénix.
     * D’un récupérateur de corium interne, placé dans la cuve principale; il assurerait le maintien de l’intégrité de cette dernière et éviterait tout rejet précoce ou important en cas d’accident grave.
     Des moyens importants seront nécessaires pour conduire les innovations majeures du projet et garantir que le niveau de sûreté Génération IV des RNR puisse être atteint. La Commission recommande qu’ils soient mis en place en temps voulu.
     La R&D concerne également les matériaux pour le gainage qui doivent présenter un taux de gonflement très faible sous irradiation pour des taux de combustion élevés, de l’ordre de 150 GWj/t.
     Les recherches en cours concernent les aciers ODS de type martensitique et ferritique.
     La R&D concerne en outre la fabrication du combustible MOX RNR pour Astrid et les matériaux des turbines à gaz et des échangeurs sodium-gaz devant supporter une pression de 18 MPa et une température comprise entre 300 et 500°C.
     La Commission souligne que le choix des matériaux de structures du cœur et des gaines de combustible exigera un effort de recherche important qui devra s’accompagner de l’identification des industries très spécialisées aptes à les produire et les mettre en forme. Il s’agit d’engagements à long terme qui doivent être garantis pour assurer le succès du projet.
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     La Commission rappelle que le choix du procédé de fabrication du combustible MOX RNR devra être précisé et qu’un atelier de fabrication du combustible, dont la localisation reste à définir, devra être mis en service 3 ans avant le démarrage du réacteur.
     Le développement de l’APD doit se poursuivre de 2015 à fin 2019 date à laquelle la demande d’autorisation de création d’Astrid pourrait être déposée, suivie d’une phase de construction pour une divergence en 2025 et un couplage au réseau en 2026. Les options préliminaires de sûreté d’Astrid sont en cours d’examen par l’ASN. La décision de construction du réacteur Astrid devrait être prise fin 2019.
     (...)
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1.3 SÉPARATION ET TRANSMUTATION

     1.3.1 Séparation
     L’axe principal des E&R en chimie séparative concerne le programme de multi-recyclage du plutonium et plus généralement le recyclage des éléments actinides à vie longue. Le CEA a développé les molécules, les procédés et les technologies permettant la séparation des actinides, des produits de fission, de l’uranium et du plutonium. Pour être appliquées à l’échelle industrielle aux combustibles MOX des REP, EPR et RNR, ces séparations requièrent une R&D conséquente destinée à adapter les procédés actuels. Pour répondre à cette demande, le CEA mobilise les départements de Saclay, Cadarache et Marcoule, l’ICSM ainsi que ses installations, en particulier, Atalante. Les recherches sont organisées autour de deux grands thèmes: comprendre les phénomènes qui gouvernent la séparation et imaginer de nouveaux concepts pour la séparation.
     Par ailleurs, cette R&D devrait également permettre de simplifier le traitement du minerai d’uranium qui exige, pour la fabrication du combustible des réacteurs thermiques, de multiples étapes avant d’obtenir l’oxyde d’uranium.
     La mise en œuvre d’une telle recherche exige une expertise et une compétence dans des domaines tels que la radiochimie, la chimie, la chimie physique, les sciences de la séparation et des procédés.
     La Commission recommande qu’une recherche amont forte soit maintenue dans le domaine de la chimie, dans le cadre de coopérations renforcées, car elle est essentielle pour maintenir le niveau de compétence nécessaire à la gestion scientifique et technologique d’un parc de réacteurs nucléaires recyclant tout ou partie des combustibles usés.
     1.3.2 Transmutation
     Les RNR, grâce aux flux et à l’énergie des neutrons mis en œuvre, permettent d’envisager la transmutation des actinides mineurs. Aujourd’hui le CEA met l’accent sur la transmutation de 241Am et de 243Am qui sont les isotopes de l’américium les plus abondants du combustible usé et qui présentent une forte radio-toxicité. Comme ils sont responsables d’une grande partie de l’émission de chaleur par les colis vitrifiés, leur élimination permettrait de diminuer la radio-toxicité des déchets et de réduire d’un facteur trois l’emprise du stockage des déchets HAVL d’un nouveau parc comportant suffisamment de RNR.
     Les recherches en cours concernent la synthèse et la caractérisation de composés à base d’américium ainsi que la métallurgie des poudres pour la fabrication des combustibles des couvertures chargées en américium (CCAm). Ces études s’accompagnent d’un programme d’irradiation, s’appuyant sur des coopérations internationales, ayant pour but de définir le comportement de ces combustibles ainsi que les conditions optimales pour la transmutation de l’américium (Cf. Annexe VIII).
     La Commission recommande qu’une recherche active et structurée concernant la transmutation des actinides soit maintenue pour une bonne mise en œuvre de celle-ci dans Astrid. Elle permettra de disposer des données nucléaires manquantes, mais également de l’expertise et des compétences pour évaluer la capacité industrielle de dispositifs susceptibles de transmuter (RNR-Na, ADS,...). La sûreté et la radioprotection dans toutes les phases de manipulation de quantités importantes (au moins de l'ordre du kg) d’actinides doivent faire l’objet de recherches soutenues.
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     1.4 FIN DE CYCLE ET BRÛLEUR DE PLUTONIUM
     Les RNR, fonctionnant en mode iso-générateur tel que décrit dans la configuration D des scénarios industriels, permettraient de stabiliser le stock de plutonium à environ 1.000 t.
     Une alternative au stockage géologique profond du plutonium est sa destruction dans des RNR fonctionnant en mode sous-générateur. Cette stratégie permettrait la résorption du plutonium accumulé au cours du fonctionnement à l’équilibre d’un parc électronucléaire de 60 GWe (a) (Configuration D, Cf. Annexe VII). Ce type de fonctionnement présente l’avantage d’être toujours électrogène. On réduirait ainsi d’environ 50% le stock de plutonium existant tous les 50 ans.
     Le CEA définit aujourd’hui les caractéristiques de la R&D à mettre en œuvre pour réaliser les adaptations du cœur CFV d’Astrid (teneur en Pu de l’ordre de 45%) en utilisant notamment la démarche de conception de Capra (Consommation Accrue de Plutonium dans des RApides).
     Le programme de recherche comportera des étapes importantes: neutronique, fabrication du combustible, qualification du cœur, traitement du combustible irradié, sûreté...
     La Commission demande qu’un programme de recherche complet soit mis en œuvre afin que le fonctionnement industriel d’Astrid comme brûleur de plutonium puisse être évalué une fois qu’Astrid aura été testé en mode iso-générateur.

     1.5 RECHERCHE PLURIDISCIPLINAIRE AMONT
     Faisant suite au programme Pacen (Programme de recherche pour l’Aval du Cycle ElectroNucléaire) le CNRS a mis en place en 2013 un programme interdisciplinaire de recherche: «Nucléaire: Environnement, Énergie, Déchets et Société» (Needs) en partenariat avec CEA, Andra, Areva, IRSN, EDF et BRGM.
     Ce programme est financé pour moitié par le CNRS et pour moitié par les autres partenaires. Il vise à fédérer et structurer l’effort interdisciplinaire de la recherche amont sur l’énergie nucléaire. Ce programme est détaillé en Annexe IX qui traite également de la recherche amont pour le nucléaire. S’agissant de la production d’énergie nucléaire et de la séparation- transmutation Needs comporte 6 axes de recherche:
     * Les ressources,
     * Les données nucléaires,
     * Les RNR-Na et les RNR-Gaz,
     * Les ADS,
     * Les réacteurs à sels fondus,
     * Les scénarios et la modélisation;
     auxquels s’ajoutent deux autres axes liés à l’aval du cycle électronucléaire:
     * Caractérisation des déchets,
     * Traitement et conditionnement, nouveaux matériaux et analogues naturels;
     et un axe important à portée générale:
     * L’étude des rapports entre connaissance, société et démocratie.
     Needs s’inscrit dans de nombreuses collaborations en Europe et dans des réseaux internationaux.
     S’agissant des ADS, le CNRS est un partenaire majeur dans le projet Myrrha. Il conduit pour son compte les E&R sur les réacteurs à sel fondus au thorium et le cycle correspondant. Le CEA a également ses propres recherches amont.
     La Commission apprécie la participation de la communauté scientifique française aux recherches amont sur l‘énergie nucléaire et la volonté du déploiement d’une recherche pluridisciplinaire. Certaines disciplines clefs comme la radiochimie, la chimie et la chimie physique des actinides, les sciences de la séparation, la neutronique... doivent être développées de manière cohérente pour s’assurer d’un réservoir de connaissances, d’expertises et de compétences permettant de mettre en œuvre, avec une sûreté optimale, le parc de réacteurs électronucléaires de l’avenir et d’en gérer les déchets.
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     La Commission souligne l’intérêt des recherches sur la dissolution du combustible usé, la chimie séparative des éléments de ce combustible et leur recyclage qui sont un socle indispensable pour des innovations dans l’aval du cycle. De même les recherches sur les aspects géologiques et géochimiques sont à la base de la compréhension du comportement à long terme d’un stockage géologique.
     La Commission estime que ce n’est qu’au travers de collaborations ciblées que l’accès aux grands équipements ou aux équipements spécifiques du nucléaire est possible.
     Elle recommande de renforcer, au-delà de Needs, les partenariats permettant un couplage entre les recherches académique, technologique et industrielle.
     Les recherches amont doivent évidemment bénéficier d’une grande liberté d’approche puisque c’est leur rôle d’introduire des voies nouvelles fructueuses pour l’avenir.
     La Commission recommande que les recherches soient cohérentes et crédibles, c’est à dire que les programmes propres des organismes s’attachent aussi à étudier la faisabilité des concepts.
     Par exemple, si le CNRS souhaite s’engager plus avant sur les réacteurs à sels fondus, il est impératif d’engager dans le même temps les recherches sur les matériaux indispensables à leur réalisation et de renforcer celles nécessaires à la maîtrise du cycle du combustible.
     La Commission recommande que des projets pluridisciplinaires soient conçus pour fédérer les communautés autour d’un objectif majeur de l’électronucléaire et qu’ils se fertilisent mutuellement.
     La Commission recommande que Needs soit mieux doté financièrement sous réserve de soutenir des projets d’envergure, en adéquation avec les priorités nationales.
     Ceux-ci devraient être menés dans le cadre de coopérations inter-organismes, en particulier entre les scientifiques du CNRS, des Universités et du CEA, pour pleinement valoriser les atouts de chacun et notamment profiter de l’opportunité que devrait offrir l’ICSM comme plateforme d’entrée à Atalante.
     Enfin dans le contexte du financement multi-parties de la recherche, la Commission recommande que l’ANR renforce dans ses programmes les thématiques associées à l’énergie nucléaire en liaison avec les feuilles de route de l’Ancre.

     COMMENTAIRE GSIEN:
     Comme on peut le constater (demandes ASN, analyse puis demandes CNE2) il y a encore loin de la coupe aux lèvres:
     - la partie matériaux est toujours à l’étude;
     - les combustibles sont aussi à l’étude;
     Mais de plus, il faut aussi:
     - valider la démarche de sûreté;
     - agir sur l’intégrité de la première barrière (la gaine du combustible)
     - prévoir l’enceinte de confinement et sa capacité à résister aux agressions interne et externe;
     - se préoccuper de radioprotection si on s’oriente vers une prise en charge de combustibles à l’américium;
     - se préoccuper de la faisabilité d’un cœur mixte.
     On est donc très loin des autorisations: il est prévu un début de construction pour fin 2019 et un démarrage vers 2026 si l’ASN donne son accord. Cet agenda paraît irréaliste.
     Et quand on voit tous les retards de chantiers (Réacteur de recherche Jules Horowitz, EPR...) il convient d’être très prudent et de garder des pistes alternatives pour éviter des pénuries et surtout de gros problèmes d’entreposages de déchets.

(a) 63,2 GW fin janvier 2015 (source http://www.connaissancedesenergies.org/)
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