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G@zette N°257
Nucléaire et agressions externes: quels risques?
SYNTHÈSE DU RAPPORT

AVENIR DE LA FILIERE  FRANÇAISE DU NUCLEAIRE CIVIL
16  juin  2010
Par François Roussely
Vice-Président Europe de Crédit Suisse - Président d'Honneur du Groupe EDF
Rapport accessible en pdf (1,5Mo)


INTRODUCTION
     Les acteurs de la filière nucléaire française (EDF, AREVA, ASLTOM au premier chef) sont des leaders industriels incontestés en France où ils ont acquis leur expérience initiale: ils figurent désormais aux premiers rangs mondiaux dans leur domaine et peuvent s'appuyer sur plusieurs centaines de PME françaises. Avec 58 tranches nucléaires en exploitation, le parc français apparaît ainsi comme une exceptionnelle réussite technologique et industrielle au moment où le marché des centrales nucléaires est appelé à profondément évoluer. 
     Dans le monde, nous assistons en effet aujourd'hui à une forte progression de la demande d'énergie nucléaire. Cette «renaissance», qui se traduira probablement par la mise en chantier d'environ 250 nouvelles centrales d'ici vingt ans crée à la fois une opportunité et un challenge pour la France. 
     La filière nucléaire française est, en effet, confrontée à un double défi à l'horizon 2030. 
     Sur un plan national, il lui faudra mener à bien les chantiers des quelques nouvelles centrales, assurer le parfait fonctionnement du parc et préparer la prolongation de la durée de vie des centrales actuelles au-delà de 40 ans. Dans le même temps, elle aura à gérer aussi bien le démantèlement prévu de certaines installations que la mise en application du programme relatif aux déchets nucléaires. 
     A l'international, la tâche est encore plus rude et nouvelle; elle devra conquérir une part significative du marché des nouvelles centrales, marché fortement segmenté et très concurrentiel. 
     La filière nucléaire française doit donc s'adapter pour être en mesure d'atteindre ce double objectif. Cette adaptation concerne autant l'Etat que les entreprises du secteur. L'Etat devra continuer d'assumer un rôle central dans l'organisation de la filière nucléaire française, comme le font tous les Etats dans le monde ayant une industrie nucléaire. Les entreprises du secteur ont, quant à elles, pris depuis plus longtemps le virage de l'international. Mais ce faisant, plusieurs faiblesses sont apparues: problèmes d'organisation globale de l'«Equipe France», de compétitivité de l'offre, de capacité de financement, de disponibilité des ressources humaines, de la mobilisation de la R&D, etc... 
     Les entreprises du secteur ont à faire de considérables efforts d'amélioration de leur offre face aux autres géants du secteur. Elles en ont la capacité, à condition d'apporter des réponses convaincantes à la question du financement du nucléaire et à celle du modèle d'alliances stratégiques à mettre en place pour assurer la performance de l'«Equipe France» à l'export. 
     Telles sont quelques unes des questions essentielles qui se posent à la filière nucléaire française auxquelles le présent rapport a pour ambition de répondre. 
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I - LA FILIERE NUCLEAIRE FRANCAISE 
     Avec près de 200.000 emplois directs et indirects, la filière nucléaire occupe actuellement une place essentielle dans notre industrie et en constitue un fer de lance. Grâce à des exigences toujours réaffirmées de sûreté et de sécurité, l'exploitation du parc de centrales nucléaires françaises n'a connu aucun incident majeur.
     Les principaux acteurs de la filière nucléaire française, née dans les années 70, sont aujourd'hui des acteurs d'envergure mondiale au premier rang desquels nous trouvons:
     * EDF, opérant un  parc de 58 centrales en France et de 15 en Grande-Bretagne, est le plus important producteur mondial d'électricité nucléaire. EDF, en tant qu'architecte-ensemblier de ce parc, et en tant qu'exploitant, a accumulé plus de 1.000 années-réacteurs et dispose d'une expérience qui n'a guère d'équivalent dans le monde;
     * AREVA est présent à toutes les étapes du cycle du combustible nucléaire, dans la conception et la fourniture des chaudières ou îlots nucléaires, ainsi que dans les services aux réacteurs en exploitation (remplacement de certains composants de l'îlot nucléaire, opérations en arrêt de tranche). Ce groupe estime à environ 20% sa part globale des marchés du nucléaire (cycle et services aux réacteurs);
     * ALSTOM est aujourd'hui l'un des leaders mondiaux pour les îlots conventionnels des centrales nucléaires (de type REP et REB). Environ 30% du parc mondial en exploitation utilise des ensembles turbine-alternateur développés par ce groupe;
     * BOUYGUES et VINCI, acteurs mondiaux dans leur spécialité de Génie Civil et d'ouvrages d'art, sont des partenaires historiques qui ont concouru à la réalisation de l'ensemble du parc français au travers des sociétés qui ont été consolidées pour former ces deux groupes.
     Au-delà de ces grands acteurs industriels, on compte environ une vingtaine d'entreprises de taille intermédiaire et plusieurs centaines de PME. Ce réseau d'entreprises, dont environ 200 spécialisées dans le nucléaire, joue un rôle essentiel.
     Enfin, il convient aussi de mentionner le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), et l'Agence Nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA) comme autant d'acteurs importants de la filière. 
Par ailleurs, GDF-SUEZ détient et exploite 7 centrales nucléaires en Belgique.
     Forts du succès de son nucléaire civil, la France et ses industriels peuvent légitimement prétendre occuper une place de premier plan dans la renaissance actuelle du nucléaire civil mondial. Toutefois, longtemps reconnue comme un modèle dans le secteur des technologies du nucléaire civil, la France voit son image se dégrader.
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     La crédibilité à la fois du modèle EPR et de la capacité de l'industrie nucléaire française à réussir de nouvelles constructions de centrales ont été sérieusement ébranlées par les difficultés rencontrées sur le chantier finlandais d'Olkiluoto et sur celui de la troisième tranche de Flamanville.
     Parallèlement, alors que la disponibilité moyenne mondiale des centrales nucléaires - mesurée par le coefficient de disponibilité Kd - a significativement augmenté au cours des quinze dernières années, la disponibilité des centrales nucléaires françaises diminue fortement  depuis quelques années.
     Il importe donc de redresser rapidement la situation, en prenant les mesures d'urgence nécessaires, et ainsi de permettre à la filière nucléaire française, qui en a les capacités, de se positionner sur les nouveaux marchés du nucléaire civil. S'il n'en allait pas ainsi, c'est la crédibilité, et donc l'existence même, de cet outil industriel autour d'AREVA qui serait menacée.
     Il est ainsi recommandé de:
     * Assurer le concours des acteurs français, sous la responsabilité d'AREVA, pour permettre l'achèvement du chantier d'Olkiluoto dans les meilleures conditions ; 
     * Établir un plan d'actions prioritaires, sous la responsabilité d'EDF, pour garantir la construction de la centrale nucléaire Flamanville 3 dans les meilleures conditions de coût et de délais; 
     * Définir et mettre en œuvre un programme d'actions pour améliorer la disponibilité des centrales françaises, notamment en améliorant la gestion des arrêts de tranche; 
     * Poursuivre et intensifier les échanges entre EDF et l'ASN afin de déterminer comment satisfaire les demandes de l'ASN tout en limitant l'impact sur les durées d'arrêt des centrales. 
     Il découle aussi de ces constats et recommandations qu'il convient impérativement d'effectuer un retour d'expérience des chantiers d'Olkiluoto, de Flamanville 3, et de Taishan (Chine), avant de commencer la construction proprement dite de Penly 3. Le calendrier des opérations au Royaume-Uni sera mis à profit dans le même souci. 

II - LE MARCHE DES REACTEURS 
     La capacité de production nucléaire installée dans le monde est de l'ordre de 375 GWe (avec près de 440 réacteurs en fonctionnement). Toutes les études prospectives envisagent un accroissement de la capacité nucléaire mondiale à l'horizon 2030. Au total, suivant les scénarios, seraient remplacés et construits de 175 à 520 GWe d'ici 2030, selon les hypothèses retenues pour l'extension de la durée de vie. A titre de comparaison, la puissance cumulée des mises en service dans le monde depuis le 1er janvier 2000 n'a été que de 31GWe. Toutefois, ces prévisions n'anticipent une véritable accélération des mises en service nouvelles qu'au-delà de l'horizon 2020-2030. 
     Au début de 2010, l'AIEA recensait dans le monde entier, 57 réacteurs en construction (soit près de 55GWe), ce qui correspond à un rythme moyen annualisé de l'ordre de 10 GWe de constructions neuves. Il est raisonnable d'anticiper que ce rythme de constructions double ou triple à moyen terme. Un acteur déterminé de ce marché, qui déclarerait l'ambition d'en prendre le quart, peut prévoir de disposer d'une capacité de construction de 5 à 6 GWe / an. 
     Pour la filière nucléaire française, les perspectives à moyen terme se dessinent très nettement: en fonction d'une durée de vie supérieure à 40 ans, et a fortiori 50 ans, des centrales nucléaires françaises, les marchés auxquels elle peut concourir sont essentiellement situés à l'exportation
     La renaissance mondiale du nucléaire, en période de globalisation de l'économie, a bousculé les schémas historiques. Désormais, la construction de centrales nucléaires est souvent réalisée dans le cadre d'appels d'offres internationaux. Citons par exemple les appels d'offres de ces dernières années en Chine, en Finlande et aux Emirats Arabes Unis. 
     La filière nucléaire française propose à l'international le réacteur EPR (European Pressurized Reactor). Il s'agit d'un réacteur de troisième génération, fruit d'une longue coopération franco-allemande, dont l'objectif était de développer un réacteur dont la sûreté et la rentabilité économique seraient accrues. L'EPR a suivi les prescriptions du cahier des charges élaboré par les électriciens européens et a satisfait toutes les exigences successives des autorités de sûreté française et allemande. Ainsi, les solutions retenues ont-elles pu être validées. 
     EPR est parmi les meilleurs modèles de troisième génération et le produit cœur, voire unique pour le moment, de notre industrie nucléaire
     Comment soutenir une politique d'exportation avec un seul produit, a fortiori aussi typé?
     La complexité de l'EPR résultant des choix de conceptions, notamment du niveau de puissance, de l'enceinte, du récupérateur de corium (core catcher) et de la redondance des systèmes de sécurité est certainement un handicap pour sa réalisation et donc ses coûts. Ces éléments expliquent en partie les difficultés rencontrées en Finlande ou à Flamanville.

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Il convient donc de poursuivre l'optimisation de l'EPR à partir du retour d'expérience des réacteurs en construction et de l'acquis des réalisations antérieures. Cette optimisation devra faire l'objet d'un développement mené en commun par EDF et AREVA, en liaison avec l'ASN en vue de progresser dans la conception détaillée à sûreté égale.
     Parallèlement, des modèles plus petits que l'EPR semblent plus conformes aux attentes de certains clients. Il convient donc de compléter l'offre française et de disposer de plusieurs familles de produits compétitifs sur le marché international
     ATMEA 1 pourrait être un de ces produits. Réacteur à eau pressurisée de troisième génération, d'une puissance comprise entre 1.000 et 1.150 MW, il est actuellement conçu conjointement par AREVA et Mitsubishi Heavy Industries. Toutefois l'ATMEA1 ne disposera, une fois certifié, de vraies chances commerciales uniquement si les études de conception de ce réacteur prennent en compte les apports d'exploitants confirmés - et tout particulièrement d'EDF - et si une centrale nucléaire de référence conçue autour de ce réacteur est mise en construction dans un pays expérimenté. 
     Avec les mêmes objectifs, et à niveau de sûreté équivalent, il convient aussi de prendre en considération les nouveaux réacteurs de plus petites puissances développés par nos partenaires industriels étrangers. Lorsque ces différentes étapes auront été franchies, le catalogue de l'exportation française sera renforcé. 
     Enfin, les experts auditionnés par la Mission ont réaffirmé unanimement leur conviction qu'il ne saurait être question pour la filière française de commercialiser des réacteurs «low cost» dont le moindre coût résulterait d'une sûreté dégradée par rapport à des modèles supposés équivalents.

III - LE  CYCLE    DU  COMBUSTIBLE    ET    LA  GESTION    DES DECHETS
Sécuriser l'amont du cycle 
     Les scénarios de croissance modérée au niveau mondial tendent à démontrer que, globalement, les ressources minières et les autres capacités industrielles nécessaires à la couverture des besoins de l'amont du cycle (Extraction minière de l'uranium, conversion ou fluoration, enrichissement, fabrication des assemblages combustibles.) existent ou pourraient être «aisément» ajustées, sous réserve que les industriels disposent d'une visibilité suffisante et des moyens financiers nécessaires et sachent, avec leurs clients électriciens, anticiper, c'est-à-dire décider de nouvelles capacités de production, ou remplacer des capacités de production vieillissantes. 
     Compte-tenu des longues durées d'anticipation indispensables à l'exploration puis au développement d'une mine nouvelle, cela signifie d'une part, que l'effort d'exploration ne doit pas être affaibli, et d'autre part, que la sécurité des approvisionnements nationaux reste un sujet important.
     Pour l'amont du cycle, il est essentiel de conforter le dialogue stratégique entre l'Etat, AREVA et EDF, AREVA étant un acteur minier de premier plan (En 2009, premier producteur mondial avec de l'ordre de 20% de la production d'uranium primaire) et EDF le plus gros consommateur mondial d'uranium enrichi. Pour concrétiser cette idée, AREVA pourrait apporter ses actifs miniers d'uranium à une société ad hoc dont elle conserverait la majorité et assurerait la gestion; les autres actionnaires pourraient être des clients. En outre, une telle opération permettrait à AREVA de réduire significativement ses besoins en capitaux. 
Promouvoir les compétences françaises dans l'aval du cycle 
     Les dispositions prévues et les démarches adoptées pour gérer les assemblages combustibles déchargés des réacteurs (les «combustibles usés») constituent ce que l'on désigne sous le vocable «aval du cycle». À l'échelle mondiale, les politiques d'aval du cycle se sont de facto divisées en deux catégories: l'entreposage en vue, normalement, d'un stockage définitif direct et le retraitement et recyclage, qui concourent d'une part à réduire le volume et contenir la radioactivité des déchets ultimes, d'autre part à économiser par recyclage la ressource primaire uranium. 
     Il est recommandé de  promouvoir les moyens et savoir-faire industriels français dans les domaines du retraitement-recyclage. La position de la France devra être, en tout état de cause, dominée par la préoccupation constante de non-prolifération. 
Réalisation du centre de stockage en couche géologique profonde: garantir l'étude dans les délais fixés par la loi
     La gestion des déchets ultimes fait en France l'objet d'une loi de programme du 28 juin 2006 sur laquelle le présent rapport n'imagine pas qu'il y ait lieu de revenir. 
     Cette loi a fixé au projet de Centre de Stockage Profond (CSP) confié à l'ANDRA l'échéance légale de 2015 pour l'instruction de la demande d'autorisation correspondante.

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     Il est désormais indispensable que l'ANDRA définisse de façon urgente la planification opérationnelle fine de la préparation de l'échéance de 2015 concernant le centre de stockage profond (CSP).
     Pour pouvoir atteindre cet objectif, il est proposé que l'ANDRA associe d'urgence EDF, AREVA et le CEA à la définition optimisée du CSP et à sa réalisation. Parallèlement, il convient de responsabiliser l'ASN, dont le rôle, dans la définition d'un  cahier des charges réaliste de l'ouvrage, peut s'avérer crucial.

IV - POUR  UNE  NOUVELLE  ORGANISATION  DE  LA  FILIERE NUCLEAIRE CIVILE  FRANCAISE 
L'Etat doit renforcer son rôle dans l'organisation de la filière nucléaire française tout en s'adaptant à la nouvelle donne internationale 
     La gouvernance du nucléaire en France doit être renforcée et resserrée, pour assurer avec efficacité la maîtrise de la pluralité des enjeux (stratégiques, politiques, industriels) du secteur et  un véritable suivi de l'offre nucléaire française à l'export. 
     L'importance stratégique et l'ampleur des missions de réflexion, d'animation et de coordination à mettre en œuvre dans le domaine du nucléaire justifient la constitution soit d'un ministère de l'énergie dirigé par un ministre de plein exercice soit d'un secrétariat général à l'énergie rattaché à la Présidence de la République. Ce ministère ou ce secrétariat général s'appuiera sur une direction d'administration centrale identifiée, disposant de l'ensemble des compétences nécessaires pour mener à bien ses missions et d'un budget propre. Il assurerait le secrétariat du Comité de Politique Nucléaire que préside le Chef de l'Etat. 
     Parallèlement, la mission de l'Agence France Nucléaire Internationale (AFNI) doit être étendue pour développer l'action internationale de la France dans le domaine du conseil nucléaire. En effet, chaque Etat désireux de se lancer dans le développement de l'énergie nucléaire civile ou envisageant de développer son parc de centrales doit créer ou réévaluer un «référentiel de sécurité». Ce référentiel est constitué d'un ensemble de normes, de dispositifs et de procédures concourant à la sûreté et à la sécurité (intérieure et extérieure) des installations nucléaires et de leur environnement. La France est en mesure d'offrir sa coopération dans l'établissement ou l'amélioration de ces référentiels.
L'Etat doit créer une structure industrielle dédiée pour l'exportation 
     L'échec aux Emirats Arabes Unis a surtout montré les limites de l'organisation des acteurs français face à une demande nouvelle de primo-accédant. L'issue aurait pu être différente si, dès qu'a été connue la position des Emirats, il y avait eu une analyse objective de la demande, débouchant sur une proposition d'offre sous pilotage d'EDF. 
     L'organisation pratique à l'exportation doit être repensée, en gardant à l'esprit que les marchés accessibles sont segmentés et de natures variées, selon que l'on ait affaire à des pays ayant une expérience plus ou moins ample de la production électronucléaire ou à des primo-accédants. Il est nécessaire de constituer une interface qui puisse, au nom de tous, identifier et recenser les demandes, dialoguer avec le client potentiel sur le modèle contractuel souhaité et, ensuite, proposer à ses mandants une position de principe sur la réponse et un choix d'organisation avec identification du chef de file et du type d'offre souhaité. Cette interface n'a pas vocation à faire les offres mais uniquement à proposer l'organisation la mieux adaptée à la satisfaction de la demande du client. Il s'agit bien d'une société de services, en amont de l'offre. 
     L'industrie nucléaire française doit être resserrée autour de ses champions nationaux associés dans une nouvelle dynamique
     Sur un marché devenu mondial et concurrentiel, et après quelques vicissitudes regrettables, il est important désormais que la filière industrielle se réorganise pour conforter ses atouts, renforcer sa coordination et développer ses performances à l'exportation, son principal marché demain. 
     * En règle générale, EDF doit être pour les projets de construction de centrales nucléaires, tant en France qu'à l'étranger, l'architecte-ensemblier de «l'Equipe France»
     L'ingénierie joue un rôle majeur dans toute construction nouvelle et représente une part importante du coût total. C'est le domaine dans lequel les connaissances des différents acteurs sont non seulement complémentaires mais nécessairement associées pour la réussite de l'opération. Le rôle central est tenu par un chef d'orchestre, l'architecte-ensemblier qui organise tout le déroulement de l'opération et gère les interfaces.

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Il doit réunir des compétences dans tous les domaines concernés et, en particulier, il doit disposer directement ou indirectement des connaissances d'un opérateur pour optimiser l'installation et bénéficier du retour d'expérience d'exploitation dans tous les détails de la conception finale.
     Dans une compétition désormais mondiale, l'avantage exceptionnel dont dispose la France est de pouvoir intégrer dans son offre le retour d'expérience unique de l'exploitant EDF, également responsable de l'ingénierie d'ensemble. Les deux exemples reconnus au plan mondial sont EDF qui a tenu ce rôle dans la construction du parc français et a apporté son aide dans plusieurs réalisations à l'export, et les sociétés américaines d'Ingénierie qui ont réalisé un grand nombre de centrales, aux Etats-Unis et dans le monde, mais ne les exploitent pas. 
     Ainsi, EDF est-il à ce jour le seul groupe à disposer de l'expérience longue et reconnue lui permettant d'exercer la responsabilité d'architecte-ensemblier. Néanmoins si, à l'international, le client ne souhaite pas la présence d'EDF ou EDF ne souhaite pas répondre à un appel d'offre, le consortium qui répondra à l'appel d'offre devra  trouver un exploitant et une ingénierie sur lesquels s'appuyer pour disposer de compétences comparables à celles d'EDF. 
     * Le rôle d'AREVA 
AREVA réunit aujourd'hui les activités du cycle du combustible nucléaire, la conception et la fabrication d'îlots nucléaires, et des services à l'exploitation des centrales. 
     La création d'une société allant de la mine au retraitement est une idée qui a fait débat en son temps, moins aujourd'hui. D'une part, il s'agit de pouvoir offrir un service complet aux clients. D'autre part, la diversité des niveaux et des cycles d'investissement permet d'étaler les risques financiers et de garantir une rentabilité moyenne honorable en tous points du cycle. 
     Le modèle « intégré » d'AREVA repose sur le caractère contra-cyclique d'un portefeuille d'activités diversifié et cohérent, mais il ne dispense pas d'achever la rationalisation de la société et une meilleure maîtrise des coûts. 
     * Il est désormais essentiel de donner une nouvelle dynamique aux liens stratégiques entre EDF et AREVA
EDF est le principal client du Groupe AREVA, et AREVA le principal fournisseur d'EDF.  Les liens entre les deux groupes hérités de l'histoire et fondés sur la proximité technologique et industrielle semblent s'être distendus ces dernières années, au moment où les objectifs d'intérêt général ont cédé le pas devant des objectifs commerciaux. EDF s'est ainsi engagée dans une démarche de diversification de ses fournisseurs (principalement dans l'amont du cycle); AREVA a œuvré pour élargir son portefeuille de clients étrangers. Ces deux démarches, même si elles ont leurs logiques, ont malgré tout contribué à créer la distance aujourd'hui constatée. 
     Or on attend de ces deux groupes sous contrôle public, qu'ils sachent développer leurs complémentarités chaque fois que la satisfaction de la demande du client l'exige. Ce qui peut signifier mener en commun des réflexions et analyses préalables sur tel sujet, se donner une visibilité réciproque, se reconnaître dans tel domaine pré-identifié soit une préférence réciproque, soit une liberté d'action, ou bien encore décider sur tel point d'une démarche ou politique commune. Seuls un dialogue sérieux et une volonté partagée, sans arrière-pensées, au niveau des deux directions générales, permettront de donner du corps à un partenariat stratégique à retrouver. Cet accord stratégique est une nécessité impérieuse pour la France, pour fédérer efficacement sa filière nucléaire civile à l'international, pour préparer l'enjeu du renouvellement du parc électronucléaire français, pour accompagner l'indispensable relance de l'économie française. 
     L'examen de la géopolitique actuelle du nucléaire montre le rôle fondamental de la Chine. EDF et AREVA sont présents activement depuis de nombreuses années en Chine. Dans ce contexte, il est recommandé que, forts de leur expérience, AREVA et EDF proposent aux acteurs chinois, sous la responsabilité de l'Etat, un contrat commun de partenariat. 
     * Il convient aussi, autour des champions nationaux, de fédérer et soutenir le tissu de PME essentiel à la filière française 
     Ces industriels ont besoin de l'aide des grands acteurs (EDF, AREVA...) pour améliorer leur offre, de disposer de standards... Ils ont aussi besoin d'une certaine indépendance pour répondre à des demandes de concurrents des grands acteurs français. 
     Il est proposé que l'Etat confie au CEA, en collaboration avec le Pôle de compétitivité Nucléaire Bourgogne (PNB), une mission de recensement des compétences et des potentialités de ces industries. Enfin, les industriels de rang 2 pourraient être incités à renforcer leur action concertée au sein d'un groupement interprofessionnel qui serait leur porte-parole auprès de l'Etat et des grands acteurs.
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Le maintien d'une exigence haute de sûreté et de sécurité doit impérativement être décliné pour tous les acteurs de la filière nucléaire française. 
     * Le caractère universel de l'impératif de sûreté n'a toutefois pas, à ce jour, entraîné l'adoption de normes mondiales pour le nucléaire civil
     Les règles de sûreté sont actuellement définies au niveau de chaque Etat, contrairement à d'autres secteurs d'activité pour lesquels l'exigence de sécurité est aussi très importante (aéronautique, par exemple). 
     La question du risque nucléaire acceptable, ou plus généralement du risque technologique acceptable, est un débat de société à part entière pour lequel la ou les réponses à donner sont naturellement du rôle du Politique. Force est néanmoins de constater que la notion même de compétitivité du nucléaire et l'hétérogénéité des règles de sûreté selon les Etats renforcent l'actualité de ce débat et la nécessité de préciser certaines exigences de sûreté. La seule logique raisonnable ne peut pas être une croissance continue des exigences de sûreté. Dans ce contexte, il est proposé de lancer, sous la responsabilité de l'Etat, un groupe de travail dont la mission serait de formuler des propositions en vue d'associer au mieux exigences de sûreté et contraintes économiques, en incluant une vision internationale, a minima européenne. 
     Parallèlement, et en cohérence, il est proposé de confier à l'IRSN le rôle d'établir un corpus des dispositions de sûreté en vigueur en France afin d'en assurer la diffusion et la promotion à l'international de sorte que les industriels puissent y faire référence dans leurs offres. Il n'est pas, à ce jour, dans la mission de l'ASN d'intervenir dans les processus d'offre à l'exportation. 
     * En France, il convient que l'État définisse un modus vivendi équilibré avec l'Autorité de Sûreté, c'est-à-dire réaffirme le rôle régalien qu'il ne devrait pas abandonner à une autorité indépendante
     L'ASN doit aussi poursuivre ses efforts pour permettre une compréhension par le plus grand nombre de ses prises de position. L'exercice du droit et du devoir de communication de l'ASN concerne des sujets complexes et est particulièrement délicat. Il convient d'éviter que des événements de portée très limitée conduisent à jeter une suspicion injustifiée sur l'ensemble d'une  technologie. 
     * La sous-traitance est un enjeu de taille pour la filière nucléaire
     La seule maintenance des centrales nucléaires d'EDF en France emploie plus de 20.000 intervenants extérieurs regroupés au sein de 600 entreprises partenaires, dont 16.000 travaillent en zone contrôlée. 
     Il est proposé, en se référant aux textes existants, d'établir une charte fixant les conditions de travail qui s'appliqueraient à tous les salariés du nucléaire en France. 
Cette charte pourrait s'inspirer de la Charte de Progrès et de Développement Durable établie en janvier 2004 entre EDF et les organisations professionnelles représentant les entreprises prestataires de services de maintenance intervenant sur ses installations nucléaires. 
     Il est aussi proposé que toute entreprise amenée à intervenir sur le nucléaire fasse l'objet d'un agrément par les autorités de contrôle. Cet agrément serait nécessaire quel que soit le statut contractuel des salariés intervenants (CDI, CDD, intérim, etc.).

V - COMPETITIVITE ET FINANCEMENT DU NUCLEAIRE 
  Dans un monde où le secteur de l'énergie est dérégulé dans de nombreuses zones économiques (Europe, Amérique du Nord,...) la question du financement du nucléaire civil, et donc de sa compétitivité, est désormais essentielle. 
     L'énergie nucléaire civile n'a quasiment aucun usage captif, contrairement à d'autres énergies comme le pétrole avec les transports routiers. La question des coûts relatifs de l'électricité d'origine nucléaire et de celle d'origine fossile a une réponse éminemment fluctuante : une nouvelle marée noire, comme celle récente du Golfe du Mexique, et ses dégâts sur l'environnement, une nouvelle découverte permettant de mieux exploiter les gisements de pétrole ou gaz non conventionnels, un accroissement du réchauffement climatique, sont autant de facteurs qui peuvent avoir un impact fort sur le prix des hydrocarbures ou du charbon, et ainsi sur la compétitivité à moyen terme de l'énergie nucléaire. 
     Le coût de production de l'électricité a trois grandes composantes: les coûts d'investissement, les coûts d'exploitation et de maintenance, les coûts du cycle du combustible. Au premier ordre, la compétitivité du nucléaire dépend fondamentalement de deux facteurs: la maîtrise des coûts de construction et les conditions de son financement. Les besoins globaux de financement d'un projet nucléaire sont élevés, mais ne sont pas exceptionnels dans l'énergie. 

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     * Quelles pourraient être les conditions pour un financement privé?
     Les investisseurs privés sont aujourd'hui très réticents. Le caractère très capitalistique du nucléaire ne devrait pas être un élément dissuasif en soi. Une centrale nucléaire se prête a priori de manière idéale à des financements longs du fait de sa stabilité économique une fois en service: pas d'aléa climatique, coûts marginaux et d'exploitation faibles, fourniture en base, outil fiable. Une comparaison avec l'industrie pétrolière montre bien que ce n'est pas le montant des investissements, ni même l'inflation rapide de leurs coûts, qui pose un problème aux investisseurs privés pour s'engager dans le nucléaire. 
     Une réflexion sur le financement du nucléaire conduit nécessairement à se poser la question «le nucléaire est-il une industrie comme les autres?». S'il ne fait aucun doute que l'ouverture au financement privé est une tendance lourde, il n'en reste pas moins que le nucléaire dispose de caractéristiques propres (risques, règles de sûreté et de sécurité, lien avec les questions de défense,...). En outre, l'Etat reste en France, comme dans de nombreux pays, le garant du nucléaire. 
     * La filière nucléaire doit atteindre une compétitivité attractive pour l'investissement privé
     Vouloir créer les conditions économiques d'un financement privé du nucléaire n'est pas un choix idéologique mais un principe de réalité: c'est la mesure la plus sûre de la compétitivité de notre industrie. Son développement ne se fera plus par un vaste programme national piloté par l'Etat.
     Notre industrie doit donc améliorer sa compétitivité et devenir attractive pour les investisseurs privés. Cela exige une action déterminée des entreprises. Cela exigera aussi un changement de culture industrielle. 
     Les principaux axes de progrès des industriels sont parfaitement identifiés et donnent d'ores et déjà lieu à un intense travail de tous les acteurs de la filière nucléaire : réduction de la durée du chantier, standardisation et construction en série, simplification de la conception, construction de plusieurs tranches sur un même site, efficacité accrue de la gestion du parc. 
     * Le renforcement de la compétitivité du nucléaire civil français nécessite aussi de véritables engagements de l'Etat, dont les principaux axes pourraient être les suivants: 
     - Poursuivre la mise en place d'une tarification du CO2
     - Soutenir l'extension de fonctionnement des centrales à 60 ans, à sûreté constante ; 
     - Planifier une hausse modérée mais régulière des tarifs de l'électricité (en euro constant) afin de permettre la préparation du financement du renouvellement du parc à long terme ; 
     - S'assurer que le prix de cession de l'électricité par EDF prévu par la loi Nome, couvre bien à terme le coût complet de renouvellement du parc ; 
     - Poursuivre une action politique résolue pour obtenir que tous les financements multilatéraux destinés aux énergies renouvelables soient aussi ouverts au nucléaire.

VI - LES MOYENS D'UNE POLITIQUE AMBITIEUSE DU NUCLEAIRE CIVIL 
Renforcer l'information du public 
     L'industrie nucléaire est et restera une filière tout à fait spécifique. Le nucléaire est en effet probablement la seule activité économique dont l'avenir est largement déterminé par l'opinion publique. L'acceptation par le public et les acteurs institutionnels est une condition majeure pour le développement du nucléaire civil
     Pour les Français, l'atout-maître du nucléaire est sa contribution essentielle à l'indépendance énergétique de la France. Ils sont d'ailleurs plus de 70% depuis 2005 à reconnaître que le nucléaire nous apporte cette indépendance. Sept Français sur dix pensent que la filière nucléaire est bonne pour l'économie et crée des emplois. Les Français citent aussi l'atout environnemental de l'énergie nucléaire et le coût de revient assez faible de l'électricité produite. Le nucléaire est pour beaucoup un symbole de fierté nationale. 
     La gestion des déchets nucléaires nécessite de développer un effort d'explication: pour 60 à 70% des Français, il s'agit de l'argument le plus convaincant contre le nucléaire. 
     Même s'il ne suffit pas d'informer pour convaincre, il est essentiel que tous les citoyens aient accès à des informations fiables, comme le rappelle la Commission Européenne dans son Programme indicatif nucléaire - Communication au Conseil et au Parlement Européen du 4 octobre 2007. Il est donc proposé d'établir un portail Web national, animé par le nouveau Ministère de l'Energie, qui mettrait à disposition des informations fiables et multiples.

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     Parallèlement, il est proposé de lancer un programme national d'éducation à l'énergie et aux métiers de la filière énergie, en milieu scolaire, dès l'école primaire.
     Il est aussi proposé de déterminer des modalités pratiques compatibles avec les règles de sécurité en vigueur (notamment Plan Vigipirate), permettant d'ouvrir de nouveau au public les centrales nucléaires ainsi que les installations des industriels et acteurs de contrôle de la filière nucléaire française. 
     Affirmer un rôle majeur dans la définition des nouvelles règles internationales du nucléaire civil
     La nouvelle bataille industrielle du nucléaire civil est désormais d'une telle importance qu'elle oblige les Etats à s'investir, en renonçant parfois à leurs positions traditionnelles, en soutenant vigoureusement et au plus haut niveau la prospection commerciale de leurs grandes entreprises et en multipliant les accords intergouvernementaux. 
     Un certain nombre de pays responsables, dont évidemment la France, sont à la fois: 
     - En faveur de cette montée en puissance (aspects climatiques, énergie sans émission de CO2, réponse partielle à la croissance de la demande énergétique mondiale); 
     - et inquiets des risques engendrés par celle-ci: détournement de matières fissiles à des fins terroristes, non respect des normes de sûreté, prise en compte insuffisante des risques géologiques locaux, formation insuffisante des ingénieurs et techniciens responsables des installations, etc. 
     Au regard d'éléments du contexte international (risques de prolifération, renaissance du nucléaire civil), il est souhaitable de soutenir la mise en place d'une «gouvernance mondiale» du nucléaire civil. 
     Il s'agit de promouvoir un développement de l'énergie nucléaire responsable, c'est-à-dire qui garantisse le respect des meilleures exigences de non-prolifération, de sûreté et de sécurité nucléaires. «L'Equipe France» doit dès lors: 
     - Participer pleinement à l'élaboration de normes internationales; 
     - S'impliquer davantage sur le nucléaire civil du futur; 
     - Favoriser l'accès des pays qui le souhaitent au nucléaire civil sans faire de concession sur les questions de sûreté, de sécurité et de non-prolifération. 
Une R&D à la hauteur de nos ambitions 
     Pour permettre une plus grande efficacité de la R&D de la filière nucléaire française, la coordination entre les différents acteurs, principalement CEA, EDF et AREVA, doit être renforcée. Il est ainsi proposé qu'un plan stratégique R&D soit élaboré au niveau national avec le CEA, les ministères concernés et les principaux industriels. Ce plan servira de référence pour la programmation pluriannuelle du CEA dans le domaine nucléaire et un nouvel examen du système de financement du CEA doit en découler
     Les programmes de recherche et développement à mettre en œuvre dans le domaine du nucléaire civil se répartissent en quatre catégories: 
     Recherche amont: cette recherche amont, responsabilité du CEA, en liaison avec le CNRS et les Universités, doit couvrir les principaux domaines, physique nucléaire, matériaux, mécanique, chimie, simulation numérique... 
     Moyens d'essai: les développements dans le domaine nucléaire impliquent souvent l'utilisation de moyens lourds tels que des réacteurs d'essai ou d'irradiation, des laboratoires chauds, des appareils de mesure sophistiqués... C'est une autre responsabilité du CEA qui, en liaison avec les industriels, doit veiller au maintien d'un potentiel adapté. 
     Accompagnement des réalisations industrielles: il convient notamment de renforcer les programmes concernant l'optimisation des réacteurs de troisième génération (en priorité EPR) et le prolongement de la durée de vie des centrales nucléaires à 60 ans ou plus. 
     Préparation du futur: l'inscription dans le grand emprunt d'un premier financement pour le prototype ASTRID est une décision importante qui montre, à l'intérieur comme à l'extérieur du pays, la volonté française de développer ces systèmes de quatrième génération.
suite:
La formation et la gestion des ressources humaines de la filière nucléaire française 
     La renaissance du nucléaire lance un véritable défi de renouvellement des compétences dans tous les domaines, des chaudronniers aux ingénieurs spécialisés. Les générations de techniciens, d'ingénieurs et de chercheurs recrutés à l'époque des grands programmes de construction des années 1970-1980 partent à la retraite et doivent être remplacées. La filière est donc désormais confrontée, dans un délai court, à la double obligation de préserver les savoirs et savoir-faire acquis, et de former une nouvelle génération de personnels, afin de soutenir un développement international et de garantir la performance du parc existant. 
     La gestion, le maintien et le développement des compétences de tous les collaborateurs de la filière nucléaire française sont des éléments déterminants pour répondre aux enjeux et ambitions de la France dans le domaine du nucléaire. 
     Les efforts réalisés par le système de formation français ne sont pas encore à la hauteur des enjeux. Ce constat porte aussi bien sur le nombre total de personnes formées que sur la palette de formations couvertes. 
     En complément des actions menées par les acteurs de la filière, il convient désormais de définir et d'engager un plan national coordonné de développement des compétences, qui devra mobiliser tous les acteurs: Etat, industriels, acteurs du système de formation français. 
     Ce plan national pourrait comprendre: 
     - La mise en œuvre et le développement de mesures destinées à renforcer et pérenniser les emplois de la filière nucléaire
     - La coordination des efforts de formation dans le domaine nucléaire au plus haut niveau de l'Etat
     - La création d'un «Campus du nucléaire»; l'Institut International de l'Energie Nucléaire sera placé au sein de ce campus, comme coordonnateur des formations destinées aux pays clients étrangers et des centres d'excellence que la France souhaite développer en partenariat avec d'autres Etats à l'international; 
     - L'intégration de la «stratégie nucléaire» au sein du cycle de formation de l'Institut des Hautes Etudes de la Défense Nationale (IHEDN) et de l'Institut National des Hautes Etudes de Sécurité et de Justice (INHESJ)

LES 15 PRINCIPALES RECOMMANDATIONS 

Des mesures structurelles 
     1. Créer un Ministère de l'Energie ou un Secrétariat Général à l'Energie, et regrouper le pôle de compétences «nucléaire» de l'Etat au sein d'une direction dédiée. 
     2. Créer une société de services qui, en amont de l'offre, identifie les besoins des clients et propose un schéma de réponse industrielle 
     3. Confirmer EDF dans son rôle d'architecte-ensemblier de «l'Equipe France». 
     4. Etablir une charte fixant les conditions de travail applicables à tous les salariés du nucléaire en France et rendre obligatoire l'agrément de toutes les entreprises amenées à intervenir sur le nucléaire en France. 
     5. Diversifier l'offre française à l'international 
     6. Poursuivre l'optimisation de l'EPR à partir du retour d'expérience des quatre réacteurs en construction et de l'acquis des réalisations antérieures. Cette optimisation devra faire l'objet d'un développement mené en commun par EDF et AREVA. 
     7. Soutenir l'extension de fonctionnement des centrales à 60 ans, à sûreté constante. 
     8. Réexaminer et réaffirmer la mission de l'ASN telle qu'elle est définie dans la loi Transparence et Sûreté Nucléaire du  13 juin 2006. 
     9. Confier à l'IRSN le rôle d'établir un corpus des dispositions de sûreté en vigueur en France afin d'en assurer la diffusion et la promotion à l'international. 
     10. Demander à l'ANDRA d'associer de façon urgente EDF, AREVA et le CEA à la définition optimisée et à la réalisation du projet de Centre de stockage en couche géologique profonde (CSP). 
     11. Etablir un portail Web national du nucléaire. 
     12. Créer un  Campus du nucléaire. 

Des mesures d'urgence 
     13. Assurer, sous la responsabilité d'AREVA, l'achèvement du chantier d'Olkiluoto dans les meilleures conditions. 
     14. Etablir un plan d'actions prioritaires, sous la responsabilité d'EDF, pour garantir la construction de la centrale nucléaire Flamanville 3 dans les meilleures conditions de coût et de délais. 
     15. Assurer un retour d'expérience des chantiers de construction d'Olkiluoto et Flamanville 3 avant celui de Penly 3 et dans des délais compatibles avec le calendrier des réalisations d'EPR au Royaume-Uni.

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