La G@zette Nuclçaire sur le Net!   
G@zette N°179/180
DOSSIER DÉCHETS

I - SITUATION ADMINISTRATIVE DU CENTRE DE L'AUBE AVANT LE 04 MAI 1995
Lettre ANDRA
 
     La création du Centre de l'Aube (CA) a été autorisée par le décret du 04 septembre 1989 (J.O.R.F. du 06 septembre 1999) autorisant le Commissariat à l'Énergie Atomique (Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs) à créer, sur le territoire des communes de Soulaines-Dhuys et de la Ville-aux-Bois (Aube), une installation de stockage de déchets radioactifs.
     L'article 2.2 de ce décret précise notamment que :"l'installation sera conçue, réalisée et exploitée pour ne pas rejeter d'effluents radioactifs liquides ou gazeux pendant les phases d'exploitation et de surveillance...".
     L'article 7 précise un certain nombre de prescriptions techniques que l'exploitant devra respecter, notamment:
     7.2: ". . . L'installation n'est pas autorisée à rejeter des effluents radioactifs liquides. Les modalités de contrôle du respect effectif de cette clause seront définies par le service central de protection contre les rayonnements ionisants du Ministère chargé de la Santé...".
     7.3 . "Dans les ateliers utilisés pendant la phase d'exploitation où existera un risque de dissémination dans l'air de substances radioactives, des dispositions de confinement, notamment de ventilation, seront prises en fonction du risque à courir. L'air extrait des parties ventilées de l'installation présentant un risque de dissémination de radioactivité sera purifié au travers de filtres à très haute efficacité et contrôlé en permanence, avant d'être rejeté à l'extérieur. Les dispositifs de ventilation, et notamment l'efficacité de leurs filtres, feront l'objet d'une surveillance régulière...".
     L'article 7.11 relatif à la surveillance radiologique du Centre et de l'environnement précise que"Sans préjudice de l'application de la réglementation sanitaire en vigueur, l'exploitant est tenu d'effectuer pendant les phases d'exploitation et de surveillance, une surveillance radiologique de l'installation et de son environnement. Celle-ci devra lui permettre de confirmer l'absence de dissémination radioactive hors du stockage. Les contrôles effectués par l'exploitant porteront notamment sur l'air, l'eau superficielle, 1a nappe phréatique, le sol, les végétaux et le rayonnement g ambiant; le programme et les modalités de ces contrôles feront l'objet de prescriptions particulières du service central de protection contre les rayonnements ionisants du ministère chargé de la santé.
      Ainsi, en application de l'article 7 du décret, le SCPRI a édicté, le 19 juillet 1991 (courrier référencé 104387-l), les prescriptions relatives au contrôle des eaux du Centre et à la surveillance de son environnement.
     "Contrôle avant rejet des eaux collectées dans les installations.
     1.1 Toutes les eaux d'infiltration collectées sous les ouvrages de stockage sont contrôlées en laboratoire avant rejet éventuel.
     Pour la collecte de ces eaux, , l'exploitant dispose d'une capacité minimale de stockage de 500 mètres cubes, répartie en au moins 2 réservoirs.
     L'étanchéité des réseaux de collecte et des réservoirs de stockage fait l'objet d'une surveillance systématique.
     Les eaux recueillies dans les réservoirs de stockage peuvent être dirigées vers le bassin de retenue des eaux pluviales du Centre en vue de leur rejet, à condition que l'analyse préalable dans les réservoirs confirme que l'activité volumique ajoutée, calculée après dilution dans le bassin des eaux pluviales, reste inférieurs à: 400 becquerels (10 nanocuries) par litre pour le tritium, 0,8 becquerels (20 picocuries) par litre pour l'ensemble des radioéléments autres que le tritium et le potassium 40, 0,8 millibecquerels (0,02 picocuries) par litre pour les radioéléments émetteurs a.
suite:
     Dans le cas contraire, les eaux collectées sont soit dirigées vers l'atelier de conditionnement complémentaire pour être incorporées dans les déchets, soit évacuées hors du centre pour être traitées dans un établissement autorisé.
     1.2 Toutes les autres eaux usées produites dans les bâtiments techniques du site et susceptibles d'être faiblement radioactives sont collectées dans des réservoirs séparés dont la capacité totale est d'au moins 30 m3. Ces eaux sont soumises aux mêmes vérifications et aux mêmes conditions de rejet que celles fixées au paragraphe 1.1 pour les eaux collectées sous les ouvrages de stockage. .".
     Aucune autre prescription technique particulière n'est venu compléter ou préciser celles évoquées cl-dessus même après l'autorisation de mise en actif de l'Atelier de Conditionnement des Déchets (ACD)
     En effet, dans le cadre du dossier de demande d'autorisation de mise en actif de l'ACD en 1992, I'ANDRA avait évalué l'impact lié aux effluents gazeux susceptibles d'être produits lors des opérations de conditionnement.
     Les conséquences radiologiques de ces émissions correspondaient, sur la base des hypothèses retenues, à de faibles doses efficaces engagées, pour l'individu du public le plus proche, à 3.10-11 Sv/an (il faut préciser que dans le cadre de la Directive Européenne 96129 du 13 mai 1996, une valeur d'exemption de 10 microSv/an, à partir de la quelle une demande d'autorisation de rejet devrait être nécessaire, a été préconisée).
     Lors de l'analyse du dossier par l'appui technique de la DSIN, I'lPSN/DES/SESID (fiche SESID 92/38) avait considéré que ces émissions à l'atmosphère "étaient si faibles qu'elles ne paraissaient pas être en rapport avec les rejets habituellement soumis à autorisation"
     De fait, par courrier DSIN/FAR/n°A10085/93 du 20 janvier 1993, la DSIN avait rendu un avis favorable à la mise en service de l'ACD sans aucune remarque particulière concernant les rejets gazeux rejetés par l'émissaire de la ventilation nucléaire

II DEPUIS LE 04 MAI 1995
     A la suite de la mise en place, par le décret n° 95-540 du 04 mai 1995 relatif aux rejets d'effluents liquides et gazeux et aux prélèvements d'eau des installations nucléaires de base, du nouveau régime pour les INB, issu de la loi n° 92-3 du 03 janvier 1992 sur l'eau, l'ANDRA a déposé, le 17 décembre 1997, auprès de la DSIN, conformément à l'article 8 du dit décret, une demande d'autorisation pour certaines installations, ouvrages, travaux, activités soumis à la police des eaux définie dans la nomenclature instituée par le décret n° 93-743 du 29 mars

III REJETS LIQUIDES;
      L'ensemble des eaux sur le Centre de l'Aube peut se distinguer sous la forme;
-d'eaux claires (eau pluviale) et une faible quantité d'eau provenant de la nappe phréatique,
-d'eaux industrielles (eaux usées, effluents), recueillies dans les différents bâtiments techniques.
     Tous ces effluents recueillis dans les différents bâtiments techniques ont été gérés conformément aux modalités de gestion prescrites par l'OPRI et tous ont pu être déversés dans le bassin d'orage puis dans l'environnement.
 
 
 

p.11

     Le retour d'expérience des premières années d'exploitation (7 années) montre que l'activité volumique des rejets (dont le volume annuel est en moyenne de 185.000 m3 et au maximum de 300.000 m3) des eaux du bassin d'orage vers le ruisseau des Noues d'Amance, a toujours été inférieure aux limites de détection des appareils de mesure:
     8 Bq/l pour le tritium,
     0,2 Bq/l pour les émetteurs b autres que le tritium et le potassium 40,
     0,2 Bq/l pour les émetteurs a.
     L'ANDRA a évalué l'impact dosimétrique de ces rejets: en considérant comme significatives les activités des eaux du bassin d'orage rejetées dans les Noues d'Amance alors que les activités mesurées de ces eaux sont toutes en deçà du seuil de détection. Dans ce cas, ont été retenus les volumes annuellement rejetés et un débit des Noues d'Amance de 200 I/s, en prenant en compte un rejet annuel 300.000 m3/an du bassin d'orage vers le milieu naturel,, d'eau présentant les activités maximales en a total, b total et tritium autorisées par les prescriptions techniques de l'OPRI.
     L'évaluation la plus pénalisante conduit à un impact négligeable (sur la base du calcul avec les LAI du décret n" 66-450 du 20 juin 1966 modifié: 1,8.10-3) et à une dose efficace engagée maximale de 4.10-3 mSv/an.
     La Directive Européenne EURATOM 96/29 du 13 mai 1996 préconise que la dose efficace pouvant être reçue par tout citoyen en raison de la pratique faisant l'objet d'une exemption est de l'ordre de 10 mSv/an ou moins (Annexe 1 - Critères à prendre en considération pour l'application de l'article 3).
     Compte tenu des évaluations d'impact présentées, I'ANDRA ne sollicite pas, au titre du décret n°95-540 susvisé, d'autorisation de rejet d'effluents radioactif liquides. De fait, I'ANDRA considère que ces rejets d'eau du bassin d'orage ne peuvent être traités comme des rejets radioactifs au titre de la rubrique 2.3.2. du décret n"93-743 du 29 mars 1993 et respectent bien l'article 7.2 du décret d'autorisation de création.
     Cependant, au titre des rejets liquides, I'ANDRA sollicite les autorisations suivantes correspondant aux rubriques du décret n"93-743 du 29 mars 1993:
     Rubrique 2.2.0: rejet des eaux du bassin d'orage vers la rivière des Noues d'Amance susceptible de modifier le régime des eaux de cette rivière,
     Rubrique 5.3.0: rejet des eaux du bassin d'orage vers la rivière des noues d'Amance avec une surface totale desservie égale à 95 ha,
     Rubrique 6.4.0: création d'une zone imperméabilisée de surface égale à 13,5 ha.
Pour la suite du suivi tritium sur cette page, dernier point p.13.
 (suite)
suite:
IV REJETS GAZEUX
     La ventilation de certaines installations telles que l'Atelier de Compactage dos Déchets est susceptible de conduire à une dissémination dans l'air de substances radioactives. La majeure partie de ces effluents sous forme d'aérosols ou de poussières, est retenue par des filtres très haute efficacité. Une faible quantité d'éléments gazeux est cependant rejetée à la cheminée. En application de l'article 7.3 du décret d'autorisation de création, l'air extrait des parties ventilées fait l'objet d'un contrôle permanent et d'un programme de surveillance dont le contenu est expertisé par la DSIN et l'OPRI.
     En considérant les activités volumique significatives, c'est-à-dire supérieures au seuil de détection des appareils de mesure, le bilan des rejets peut se présenter de la manière suivante (en Bq):
 
125I
129I
131I
HTO
HT
1993
3,2.104
0
0
1,1.1010
1,7.1010
1994
2,9.105
0
0
6,6.109
3,0.109
1995
4,6.106
0
2,2.104
4,0.109
1,2.1011
1996
3,3.106
0
7,9.104
2,8.109
4,4.109
1997
3,2.106
0
1,0.105
3,5.109
1,9.109
1998 8,9.105 0 3,2.104 1,3.109 1,2.109

     Le calcul de l'impact dosimétrique de ces rejets a été réalisé en considérant l'ensemble des mesures comme étant des mesures significatives avec:
-les Limites Annuelles d'lncorporation stipulées dans le décret n° 66.450 du 20 juin 1966 modifié qui montre que l'impact est négligeable (1,26.10-3)
-la dose maximale efficace engagée calculée au moyen des facteurs de dose de la Directive Européenne EURATOM 96/29 du 13 mai 1996 préconise que la dose efficace pouvant être reçue par tout citoyen en raison de la pratique faisant l'objet d'une exemption est de l'ordre de 10 microSv par an ou moins (annexe 1 - Critères à prendre en considération pour l'application de l'article 3).
     Ainsi, compte tenu de l'évaluation de l'impact dosimétrique des rejets gazeux sur l'environnement et de l'absence de pollutions atmosphériques ou d'odeurs telles que définies dans l'article 1er de la loi du 2 août 1961 susvisée, I'ANDRA ne sollicite pas de demande d'autorisation de rejets gazeux radioactifs et non radioactifs.

p.12

II- FICHE IPSN transmise à la Commission Spéciale d'Information Prés l'Établissement de la Hague (CSPI)
Programme de reprise des boues issues du retraitement des combustibles irradiés
entreposées sur le site COGEMA de La Hague
 
     Les déchets produits actuellement par les usines UP3 et UP2-800 sur le site COGEMA de La Hague sont, d'une manière générale, traités en ligne. En particulier, une faible partie des effluents de faible et de moyenne activité (de l'ordre de 3000 m3 par an) est traitée par co- précipitation dans l'atelier STE3 où les boues produites sont incorporées dans du bitume (100 à 200 fûts par an), tandis que l'autre partie (de l'ordre de 15.000 m3 par an) est, après recyclage et concentration, incorporée dans des blocs de verre.
     Par contre, les déchets issus de l'exploitation des installations de l'usine UP2-400 sont entreposés dans divers ouvrages du site. Il s'agit des déchets provenant essentiellement du retraitement de 1966 à 1984 de combustibles de la filière Uranium Naturel Graphite Gaz (UNGG) et, depuis 1976, du retraitement de combustibles de réacteurs à eau légère. 
     Les effluents de faible et de moyenne activité provenant de ces opérations de retraitement ont, depuis le début de l'exploitation de l'usine UP2-400, subi un traitement par co- précipitation dans la station de traitement des effluents dénommée atelier STE2 et les boues résultant de ce traitement ont été entreposées dans un ensemble de silos associés à cet atelier.

1 Caractéristiques des boues entreposées
     Le volume des boues entreposées est d'environ 9200 m3 et leur radioactivité totale sera, en 2005, voisine de 75 PBq (1) dont 3,5 PBq d'émetteurs a.
     Compte tenu de la grande variété des effluents traités par co-précipitation depuis 1966 et des évolutions successives de ce procédé, les boues entreposées dans les silos de l'atelier STE2 présentent une grande diversité radiologique et chimique.

p.12

     Des analyses ont été commanditées par COGEMA au cours des années 1992-1996 sur des échantillons prélevés dans un certain nombre de silos. Selon COGEMA, les bilans chimique et radiologique globaux par silo seraient en bon accord avec les bilans effectués sur la base de la compilation des données relatives à chaque campagne de production et les boues seraient sédimentées en strates plus ou moins représentatives des caractéristiques des boues produites au cours des différentes campagnes de traitement.
     Pour sa part, après examen des dossiers correspondants, I'IPSN souligne la grande hétérogénéité de ces boues qui ne peuvent pas être totalement assimilées aux boues provenant de l'exploitation des usines UP3 et UP2-800; de plus, en raison des caractéristiques des effluents traités depuis le début des opérations dans l'atelier STE2 et des premiers procédés de co-précipitation utilisés, les boues des silos des ateliers STE2 contiennent des éléments chimiques supplémentaires tels que le magnésium et le calcium et, dans certains silos, une concentration importante d'hydroxyde d'uranyle. Cette hétérogénéité se retrouve dans les caractéristiques radiologiques, notamment pour ce qui concerne les concentrations en émetteurs a , I'activité b, g provient en majeure partie des radioisotopes 137Cs et 90Sr.

2 Caractéristiques des silos d'entreposage des boues
     Les boues sont entreposées dans sept silos de l'atelier STE2 dont les critères de conception ont évolué au cours du temps. Certains prélèvements d'eau dans les puisards situés à proximité des silos les plus anciens (silos 550-12, 550-13, 550-14, 550-15) présentent une radioactivité significative dont l'origine n'a pas été clairement établie (radioactivité b, g moyenne voisine de 100 Bq/l, radioactivité a de l'ordre de 2 Bq/l, radioactivité due au tritium voisine de 3.000 Bq/l). En particulier, l'apparition d'une fissure dans la paroi du silo 550-13 aurait, selon les documents de COGEMA, provoqué en 1978 une contamination au pied de la paroi de ce silo. Cette fissure a ensuite été colmatée par de la résine «époxy» et les contrôles hebdomadaires par frottis effectués par COGEMA n'ont plus mis en évidence de nouvelle fuite depuis cette date. Par ailleurs, plusieurs incidents de débordement de silos ont été signalés.
     Ainsi, I'IPSN considère que la reprise des boues contenues dans les silos d'entreposage de l'atelier STE2 constitue une action prioritaire en raison des risques de contamination de la nappe phréatique, même si la contamination de la nappe aurait probablement un caractère limité. En tout état de cause, la reprise nécessitera des années, compte tenu des difficultés techniques inhérentes à cette opération.

3 Programme de reprise des boues
     COGEMA a proposé un scénario de reprise et de conditionnement des boues comportant les principales étapes suivantes:
•remise en suspension des boues par agitation dans leur silo d'entreposage et transfert par pompage dans un silo intermédiaire non utilisé à ce jour,
•décantation et séparation des surnageants,
•ajustement éventuel des caractéristiques chimiques et radiologiques des boues,
•transfert des boues vers l'atelier STE3 pour conditionnement par le procédé de bitumage.

3.1 Qualification des procédés
     A ce jour, COGEMA a établi un avant-projet sommaire de l'installation de reprise et de transfert vers l'atelier STE3 des boues entreposées dans l'atelier STE2.
     La mise au point des équipements destinés à effectuer ces opérations est en cours avec des boues simulées, de même que la définition du système de guidage de l'ensemble pompe/agitateur à l'intérieur des silos. Les opérations de reprise en milieu réel risquent toutefois de se heurter à des difficultés en raison de la densification des boues, notamment au fond des silos.

suite:
    Pour le conditionnement des boues, comme indiqué plus haut, COGEMA prévoit leur incorporation dans du bitume sur la base du procédé mis en oeuvre dans l'atelier STE3 pour le conditionnement des boues issues du traitement des effluents des usines UP3 et UP2-800. Ce choix est fondé sur les résultats d'essais, estimés concluants par COGEMA, réalisés dans les laboratoires du CEA/Cadarache avec des boues réelles prélevées dans les silos de l'atelier STE2 et des boues simulées. La réactivité des boues et celle des boues simulées enrobées dans du bitume ont été étudiées au cours des essais précités ainsi que les caractéristiques physico-chimiques des déchets bitumés et l'évolution de ces caractéristiques sous l'influence de diverses contraintes.
     Ce mode de conditionnement suscite toutefois aujourd'hui un certain nombre de réserves de la part de l'IPSN, compte tenu des éléments suivants:
     - l'hétérogénéité des boues entreposées dans les silos de l'atelier STE2 est telle qu'il est difficile de prouver que les essais de caractérisation réalisés sont représentatifs de l'ensemble des boues;
     - les spécifications de production des déchets bitumés appliquées au conditionnement des boues produites dans l'atelier STE3 ne sont pas strictement applicables aux boues entreposées dans l'atelier STE2, en raison notamment de leurs différences en matière de composition chimique;
     - l'expérience acquise à La Hague sur le conditionnement des boues dans du bitume ne couvre qu'un faible domaine de variation des compositions chimique et radiochimique de ces boues compte tenu du fait que le procédé de co- précipitation appliqué aux effluents des usines UP3 et UP2-800 n'a pas subi de modifications importantes au cours du temps;
     - l'expérience acquise à l'établissement COGEMA de Marcoule, concernant le comportement des déchets bitumés produits sur ce site, montre que, si l'on extrapole à partir des fûts visibles, 25% environ des fûts entreposés fabriqués entre juin 1988 et juin 1990 pourraient présenter un gonflement significatif; ce phénomène a entraîné des débordements de fûts dans les casemates d'entreposage sans que les causes de ces gonflements aient pu être complètement élucidées;
     - le comportement à long terme des déchets bitumés reste mal connu et fait actuellement l'objet d'un programme de recherche et de développement de COGEMA et du CEA.
     C'est pourquoi, I'IPSN estime aujourd'hui qu'avant tout conditionnement dans le bitume de boues entreposées dans les silos de l'atelier STE2, COGEMA devra démontrer la sûreté et l'adéquation de ce mode de conditionnement, en tenant compte en particulier de l'expérience acquise à Marcoule et à La Hague, et de résultats d'études relatives à l'influence des divers paramètres pouvant influer sur le comportement des déchets bitumés à moyen terme et à long terme.
     Par ailleurs, compte tenu des difficultés qui pourraient être rencontrées dans la mise en oeuvre du procédé de bitumage et des risques d'incendie et d'explosion associés à un tel procédé, I'IPSN estime que COGEMA doit étudier en parallèle d'autres procédés de conditionnement tels que la cimentation des boues ou leur compactage.

3.2 Délais de reprise
     A la lumière des éléments qui précèdent, la Direction de la Sûreté des Installations Nucléaires (DSIN) a demandé à COGEMA de présenter en 2002 un dossier démontrant sa maîtrise du procédé de bitumage en vue de procéder aux opérations de reprise et de conditionnement de ces boues à partir de 2005 au plus tard. Si cette maîtrise n'était pas démontrée, COGEMA devrait mettre en oeuvre un autre procédé permettant de respecter la même échéance ou, dans le cas contraire, transférer, toujours à la même échéance, les boues dans un entreposage sûr en attendant la qualification d'un procédé de conditionnement.
 
 

 p.13


III- CONSEIL SUPÉRIEUR DE LA SÛRETÉ ET DE L'INFORMATION NUCLÉAIRE
Les filières d'élimination des déchets de très faible radioactivité
provenant des installations nucléaires de base
Réunion du 12 octobre 1999
 
1 INTRODUCTION
     L'industrie nucléaire produit des déchets de diverses natures et en quantité variable tout au long de la vie des installations. Au nombre de ceux-ci, on compte les déchets de très faible radioactivité (TFA). Ces derniers ont une radioactivité spécifique de quelques dizaines de becquerels par gramme ou moins et ont la particularité de se présenter sous les formes les plus hétéroclites: ferrailles, gravats, huiles, calorifuges... Leur quantité est non négligeable pour les installations en fonctionnement (plusieurs milliers de tonnes par an aujourd'hui); elle croîtra largement lors du démantèlement des installations nucléaires actuellement en activité (quelques dizaines de milliers de tonnes par an après 2020). Ce qu'il est convenu d'appeler le nucléaire «diffus» (installations industrielles classiques, services médicaux, sites orphelins) contribue également à produire des déchets de très faible radioactivité.
     Les déchets TFA peuvent présenter des risques chimiques ou infectieux qui sont parfois prédominants, mais le risque radiologique associé reste faible et, dans tous les cas, disproportionné par rapport aux solutions actuellement existantes pour la gestion des déchets radioactifs (par exemple le centre de stockage en surface de l'Aube). Le coût financier de ces solutions est tel que certains craignent qu'il soit tentant de recourir pour les déchets TFA à des voies de gestion minimalistes.
     La DSIN a initié, dès 1994, une démarche associant les exploitants d'installations nucléaires de base (INB), producteurs de déchets radioactifs, 1'ANDRA et les administrations concernées (DPPR, DGS, DGEMP...) en vue de rationaliser la gestion des déchets TFA provenant des installations nucléaires de base selon des règles qui s'appliquent déjà aux autres catégories de déchets radioactifs. Cette démarche visait à mettre un terme à des pratiques de gestion peu rigoureuses découvertes au début des années 90 (affaire Radiacontrôle, par exemple). Dans ce cadre, des filières d'élimination sont en cours d'étude ou de mise en place, parmi lesquelles un projet de stockage définitif dédié aux déchets TFA, étudié par 1'ANDRA et France-Déchets.

2 LES CONDITIONS DE MISE EN PLACE D'UNE FILIÈRE D'ÉLIMINATION DE DÉCHETS TFA
     L'Autorité de sûreté considère qu'il est nécessaire de maîtriser le contrôle des filières d'élimination de déchets de très faible radioactivité produits par les installations nucléaires de base, à l'instar de ce qui se fait pour les autres catégories de déchets radioactifs. Ce contrôle ne pose a priori aucun problème aujourd'hui pour les filières qui, de bout en bout, utilisent des installations nucléaires de base. n sera assuré par l'Autorité de sûreté qui peut, en tant que de besoin, agir auprès des exploitants nucléaires. En revanche, une réflexion plus approfondie est nécessaire pour les filières fondées sur une élimination des déchets dans des installations industrielles conventionnelles (installations classées pour la protection de l'environnement ou ICPE). Ces installations relèvent en effet du champ de compétence de la direction de la prévention des pollutions et des risques du ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement (DPPR). Des discussions ont eu lieu pour préciser les interfaces avec la DSIN.
     L'Autorité de sûreté estime qu'une filière d'élimination de déchets TFA provenant d'INB doit obéir aux impératifs suivants:

suite:
     a) gestion correcte et sûre des déchets le long de la filière, ie : tri, caractérisation, conditionnement, transport, élimination réalisés en assurance qualité selon des spécifications approuvées;
     b) traçabilité des déchets et de leur gestion;
     c) impact de la filière sur les travailleurs, la population et l'environnement évalué comme acceptable;
     d) installations de la filière explicitement autorisées à recevoir les déchets;
     e) information du public.
     L'approche par filières s'affranchit de toute libération incontrôlée des déchets TFA provenant d'lNB dans le domaine public sur la base de seuils génériques. Cette pratique est courante dans des pays tels que l'Allemagne ou le Royaume-Uni, mais est récusée par l'opinion publique française car elle fait fi du principe de responsabilité des producteurs de déchets que l'on veut voir assumer pleinement par l'industrie nucléaire.

3 LE CADRE RÉGLEMENTAIRE
     Cette stratégie de gestion des déchets TFA par le biais de filières identifiées, évaluées et autorisées repose sur un cadre réglementaire constitué de plusieurs textes, notamment la loi 75-633 du 15 juillet 1975 relative à l'élimination des déchets et à la récupération des matériaux, la loi 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement et le décret 66-450 du 20 juin 1966 relatif aux principes généraux de radioprotection contre les rayonnements ionisants. Ce dernier texte est en cours de révision pour prendre en compte les dispositions de la directive EURATOM 96/29 du 16 mai 1996 fixant des normes de base en matière de radioprotection.
     La DS1N finalise par ailleurs un projet d'arrêté interministériel pris en application du décret 63-1228 du 11 décembre 1963 relatif aux installations nucléaires de base comportant des dispositions spécifiques à la gestion des déchets produits par les INB. A l'instar de ce qui avait été prescrit à certains exploitants de l'industrie classique, ce texte prévoit notamment que les exploitants nucléaires doivent réaliser des «études déchets». Ces études doivent les conduire à dresser un inventaire des déchets qu'ils produisent et à recenser les pratiques de gestion en vigueur sur leur site. Cet état des lieux est conçu comme le point de départ d'une démarche de progrès visant à améliorer la gestion globale des déchets sur les sites et à développer de nouvelles filières de gestion. Ces études seront le vecteur de nouvelles pratiques en matière de gestion des déchets TFA, notamment un premier tri entre déchets radioactifs et déchets non radioactifs sur la base d'un zonage des installations. Elles seront soumises, pour approbation, au directeur de la sûreté des installations nucléaires, qui aura ainsi un moyen de contrôle des filières d'élimination utilisées par les producteurs de déchets, notamment de déchets TFA. Les cinq critères présentés plus haut serviront de référence pour l'évaluation des filières.
     Quand les filières de gestion de déchets TFA font intervenir des installations classées pour la protection de l'environnement, la mise en oeuvre harmonieuse de ce cadre réglementaire relève d'une action coordonnée de l'Autorité de sûreté nucléaire et des services régionaux de l'environnement industriel des directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement (DRIRE).

p.14

     L'Autorité de sûreté nucléaire est notamment en charge:
     - d'approuver, si les conditions sont réunies, les dossiers de filière d'élimination présentés à terme par les exploitants nucléaires dans le cadre des études déchets,
     - de réaliser des inspections sur les INB à l'origine des déchets TFA pour vérifier que les dispositions de gestion prises à ce niveau sont correctes,
     - de susciter l'information du public.
     Les services régionaux de l'environnement industriel des DRIRE sont, quant à eux, en charge:
     - d'instruire les dossiers de demande d'autorisation des installations classées pour la protection de l'environnement, réceptrices de déchets TFA provenant d'INB, et, dans ce cadre, d'évaluer les études d'impact associées,
     - de préparer les projets d'arrêtés préfectoraux d'autorisation incluant les prescriptions techniques pertinentes,
     - de réaliser des inspections sur les ICPE réceptrices des déchets TFA, O)de susciter l'information du public et, le cas échéant, , d'organiser une enquête publique.

4 LA MISE EN ŒUVRE PRATIQUE
     Plusieurs projets de filières d'élimination de déchets de très faible activité ont été étudiés, à l'initiative de l'industrie nucléaire:
     - le stockage définitif de déchets TFA sur un site de surface dédié;
     - l'incinération d'huiles d'EDF très faiblement contaminées;
     - le recyclage de ferrailles du CEA provenant du démantèlement d'installations nucléaires ou de colis de transport; - l'inertage d'amiante d'EDF très faiblement radioactive provenant du décalorifugeage de certaines installations nucléaires.
     Ces projets ont fait l'objet d'études d'impact, qui ont été évaluées par l'Autorité de sûreté nucléaire et son expert technique, l'IPSN. Une attention particulière a par ailleurs été accordée à la traçabilité des opérations de traitement et à la traçabilité des déchets, ainsi qu'aux dispositions d'assurance qualité prises par les exploitants pour garantir l'adéquation des caractéristiques des déchets avec les spécifications d'acceptation des filières.

suite:
    En 1999, des avancées notables ont été réalisées concernant les filières de recyclage de ferrailles du CEA et le stockage définitif dédié au déchets TFA.
     Au printemps 1999, une usine sidérurgique a ainsi été autorisée à recevoir des ferrailles décontaminées du CEA, après avis du Conseil départemental d'hygiène concerné et ce, conformément à la réglementation en vigueur. Au préalable, le dossier avait été localement présenté au secrétariat permanent pour les problèmes de pollutions industrielles (S3PI) de la zone intéressée.
     Par ailleurs, l'ANDRA et France Déchets ont annoncé en Commission locale d'information du Centre de stockage de l'Aube, début 1999, puis aux 5èmes Assises nationales des déchets de la Baule, en septembre 1999, la création d'un GE, nommé Omégatech, destiné à commercialiser les prestations d'un futur centre de stockage de déchets TFA, dont l'implantation est envisagée près du Centre de stockage de l'Aube et qui pourrait être opérationnel en 2002.

5 L'INFORMATION DU PUBLIC
     L'application sur la démarche de rationalisation de la gestion des déchets de très faible activité provenant d'INB a été présentée à plusieurs reprises au public dans le souci de l'informer de l'avancement des réflexions.
     Ainsi, des rencontres avec des associations de protection de l'environnement ont été organisées par la DSIN en 1997, 1998 et 1999. En 1994 et en 1997, le dossier central d'un des numéros de la revue Contrôle publiée tous les deux mois par la Direction de la sûreté des installations nucléaires a été consacré au thème des déchets de très faible activité. Ce même thème a par ailleurs été débattu en 1995, en 1997 et en 1999 dans un atelier des Assises nationales des déchets de La Baule.

     Une présentation au Conseil supérieur de sûreté et d'information nucléaires avait été réalisée le 4 mars 1997.

 début p.15

12 octobre 1999
LE PROJET DE STOCKAGE DÉDIÉ AUX DÉCHETS TFA
 
Les déchets
     L'installation serait destinée à recevoir sur trente ans 750.000 t de gravats, ferrailles, calorifuges et déchets industriels spéciaux contaminés provenant de l'industrie électronucléaire (démantèlement des installations, déchets de procédés,...), de l'industrie non nucléaire (ferrailles, traitement des phosphates...) et de l'industrie des déchets (REFIOM,...).
     Ces déchets auraient une activité massique inférieure à 100 Bq/g avec une moyenne de l'ordre de 10 Bq/g. La plus grande partie des radionucléides seraient à vie courte. Dix pour cent des déchets seraient des déchets industriels spéciaux.

Les clients
     Les clients seraient les gros producteurs de déchets TFA (industrie nucléaire: EDF, COGEMA, CEA), signataires d'une lettre d'engagement, ainsi que les producteurs du nucléaire diffus.

La solution de stockage
     Le concept de stockage en surface repose sur un système de confinement à deux barrières:

- une géomembrane entourant les déchets dont les caractéristiques et la pérennité permettent le confinement des radionucléides à vie courte;
- un « module de confinement » composé par l'argile qualifiée du site et par une couverture pour le confinement des radionucléides à vie longue. Le centre relèverait de la réglementation des ICPE. D'une superficie de 25 ha, il est prévu pour être exploité une trentaine d'années auxquelles s'ajouteront une trentaine d'années supplémentaires pour la surveillance. Le coût total de l'installation serait de 113 MF et le coût de prise en charge serait de 1 F/kg (déchets standard).

Le projet
     Le projet est en fin de phase préliminaire de conception. Les principes de l'installation, de son fonctionnement et de son exploitation sont connus. Un site d'implantation situé à proximité du Centre de l'Aube est envisagé. Les prochaines échéances concernent l'achat des terrains, le dépôt des dossiers réglementaires et la recherche des modalités de financement.

     L'installation devrait pouvoir démarrer en 2002.

fin p.15

Retour à la G@zette N°179/180