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N°143/144

LE T.N.P., la prolifération
Commentaire Gazette


     Didier Anger m'a transmis un papier qui permet de mieux saisir ce que représente le nucléaire militaire. Pour obtenir l'adhésion des populations tous les moyens sont bons. C'est pour cela que je vous appelle à transmettre pétitions et lettres au Président de la République pour souligner votre désaccord à propos des essais et de cette course absurde aux arsenaux nucléaires.
     Imaginez un seul instant qu'on emploie cette bombe en plus de toutes les autres. Imaginez ce monde où l'homme ne peut plus vivre. Imaginez ce monde où plus rien ne peut exister que la peur. Ce n'est pas difficile, pensez Yougoslavie, pensez le Rwanda. Alors? Alors nous devons intervenir, nous serons une fois de plus précurseurs mais il le faut.
     Cette fois les manifs, en France rassemblent du monde, l'Australie boycotte, la Suisse proteste. Vous voyez que nous sommes bien plus que la poignée du début.
    Le Traité de Non Prolifération est un tout petit pas sur le chemin de la sagesse.
     La France a mis des années pour le signer. Enfin en 1991 elle le fait et en 92 arrête les essais: timide pas vers la paix. Et puis en 1995 elle repart sur le mauvais chemin: la guerre et ses engins de mort.
     Stop Essais, le Mouvement pour le Désarmement, la Paix et la Liberté se demandaient que faire. Eh bien il n'y a plus de questions. Par contre cette lutte contre les armes nucléaires, les essais, renaît sans cesse. Après le jarnais plus d'il y a 50 ans voici revenu la mise en place d'une idéologie légitimant l'instrument militaire.
     Que faire me direz-vous? Ma propre conviction est qu'il faut essayer de toucher le plus de gens possibles, discuter et essayer de construire des mouvements luttant contre la vente d'armes, contre les aides qui plongent les pays dans la guerre. Rien de tout cela n'est facile, rien ne va marcher simplement mais on ferra des pas dans la bonne direction.
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Le nucléaire militaire nous protège-t-il
ou doit-on s'en protéger?
Didier Anger
(Conseiller régional Les Verts,
membre au titre du CRILAN des commissions Hague et Flamanville)
20.01.1995
     Au printemps 1994, un accident - qui ne se serait pas produit dans la partie nucléaire - a causé la mort d'une dizaine de marins d'un sous-marin à propulsion nucléaire, en Méditerranée.
     Le risque n'est pas que pour les autres pays;
     Et si cela avait été un accident nucléaire?
     En mer, ou sur un site à terre ou proche de la terre?
     Le nucléaire militaire nous protège-t-il ou induit-il des risques supplémentaires?
     L'armée a fini par sortir un plan particulier d'intervention (P.P.I), en cas d'accident, pour Cherbourg et l'agglomération.

1. Pourquoi P.P.I.?
     Dans le projet de P.P.I., classé confidentiel défense, que nous avions reçu - secrètement - par la poste fin mai 1986, les hypothèses de «risques» étaient bien précisées:
     Ils pouvaient «provenir de deux installations différentes:
     - les réacteurs de puissance, adaptés à la propulsion navale et équipant les sous-marins d'attaque (S.N.A.)
     - les installations associées à terre, situées dans la partie nord-est de l'Arsenal (Zone du Homet) qui comprend des ateliers, des installations de stockage de combustible neuf ou irradié (piscine), des installations de stockage d'effluents liquides et gazeux»;
     Il existe même des autorisations de rejets, quasi confidentielles: pour les liquides dans la grande rade, 111 milliards de Becquerels pour les b, g hors tritium et 370 milliards pour le tritium, par an, et en fonctionnement dit «normal».
     Nous l'avions rendu «public» par voie de presse.
     En clair, l'Arsenal est un peu, à la fois, une petite centrale nucléaire et une petite Hague incomplète (pas d'extraction du plutonium).
     De plus, cette installation nucléaire de base est en plein coeur de la ville. Il était anormal qu'aucune mesure de protection des populations civiles n'ait été communiquée au public.

suite:
2. Nous demandons publication du P.P.I. depuis des années
     Depuis les années 70. Et avec une insistance particulière après l'accident de Tchernobyl (avril 1986). Après le printemps 1986, nous avons exercé une pression accrue. Enfin un P.P.I. a été rendu officiellement public au printemps 1991.

3. Cependant, il y a déficit démocratique quant à l'élaboration et à la gestion de ce P.P.I.
     a) le secret militaire est encore de mise pour une partie des choses.
     b) les élus «attributaires» ont-ils participé à son élaboration ou l'ont-ils reçu «tout ficelé», mis devant le fait accompli par l'armée et l'administration?
     c) on comprend bien pourquoi les élus locaux sont «attributaires» mais pas du tout pourquoi les associations écologistes, les syndicats ouvriers, agricoles, enseignants, les parents d'élèves concernés à des titres divers ne sont pas consultés.
     d) en cas d'accident, l'information est «verrouillée»:
     - les contrôles sont prévus par l'ex S.C.P.R.I. dont on sait la fiabilité depuis Tchernobyl, et non par l'A.C.R.O.
     - la diffusion médiatique est contrôlée par la préfecture et par l'armée (comme pour l'opération Daguet dans le golfe...)
     e) les élus locaux ne seront mis à contribution que pour informer les populations avant l'accident (impression de brochures? Financées et distribuées par qui?) ou pendant, pour recenser les personnes en difficulté qu'il faudra aider ou aller chercher...
     A ce jour - début 1995 - les habitants de l'agglomération n'ont reçu aucune information, aucune consigne à domicile, si ce n'est les élèves et parents du lycée Millet d'Octeville.

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     4. Un contenu 91 différent de celui de 1986
     - la version 91 est plus imprécise: on ne dit pas pourquoi un plan particulier d'intervention peut être nécessaire; aucun plan n'y figure, alors qu'en 1986, on affirmait, plan à l'appui, qu'une bande de 2 km sur 3 km pouvait être évacuée, au niveau 3 de contamination extérieure du site de l'arsenal, ce qui était, en plein coeur de la ville, déjà très important.
     - mais elle élargit le champ éventuel d'action du P. P. I.:
     a) les maires attributaires ne sont pas seulement urbains; il y a aussi ceux d'Urville-Nacqueville, Tonneville, Flottemanville-Hague, Bretteville en Saire, Diguville, Mesnil au Val, Martinvast, Tollevast, Hardinvast, Nouainville, Sideville... Apparemment, on a repris les mêmes distances que pour les centrales nucléaires (5 kilomètres: évacuation - 5 à 10 kilomètres: confinement), ce qui est dérisoire si l'on pense à la contamination due à l'accident de Tchernobyl.
     b) la protection du bétail, de l'eau et des aliments est envisagée et ceci concerne plus la campagne que la ville...
     - cependant évacuer 120.000 personnes suffirait-il? Ce peut être trop ou pas assez, selon l'accident, les vents, les pluies...
     Dans une lettre datée du 18 juillet 1990, le préfet Landrieu, reconnaissait, à propos des P.P.I. en général:
     Bien entendu, si la situation l'exige, le Préfet du département peut être conduit à étendre cette zone d'application au-delà de cette distance en déclenchant le plan ORSEC. Il convient par ailleurs de souligner que le P.P.I. ne fait que mettre en place un dispositif de première intervention, mais que la gestion des suites de l'accident entre dans le cadre des dispositions opérationnelles d'une situation de crise mettant en oeuvre des moyens bien supérieurs à ceux du département. (extrait photocopié de sa lettre)
     On peut encore faire remarquer:
     a) qu'il est difficile de compter sur l'hôpital maritime pour les soins, trop à proximité et éventuellement sur l'hôpital Pasteur, et qu'il n'est rien prévu pour les évacuer si nécessaire;
     b) qu'il serait difficile de nourrir les gens et les animaux en cas de confinement (aliments et eau du robinet, sauf si celle-ci est contaminée)
     c) que l'évacuation privée, et notamment celle des enfants des écoles, pourrait provoquer paniques et encombrements, etc.
suite:
     Ce plan est encore améliorable: il n'a pas été revu depuis 1991. Et pourtant, les choses se sont compliquées du démantèlement du Redoutable: la partie nucléaire est stockée sur la digue... Et les combustibles irradiés s'entassent puisque l'usine de la Hague ne peut cisailler les «crayons» d'uranium avant dissolution par l'acide nitrique et extraction de plutonium... du fait de leur dimensionnement.

5. Que faire?
     En attendant qu'un jour enfin les arsenaux soient reconvertis à des fins non nucléaires et civiles,
     - une brochure doit pouvoir être imprimée
     a) financée par l'armée? la préfecture?
     b) confectionnée par une Commission d'Information à constituer.
     c) ceci suppose une rediscussion démocratique du Plan, permise d'ailleurs par la réglementation (révision éventuelle tous les ans).
     d) et la redéfinition des zones à évacuer éventuellement, en fonction de la présence d'autres installations nucléaires de base en Cotentin: centre de retraitement, extraction du plutonium et centre de stockage Manche à la Hague, deux réacteurs 1.300 MW(é) à Flamanville, et en tenant compte de l'expérience grandeur nature de Tchernobyl insuffisante (50 à 60 kilomètres, c'est à la base de la presqu'île du Cotentin).

6. Et ailleurs?
     Qu'a-t-on fait des déchets du nucléaire militaire?
     Les sous-marins à propulsion nucléaire sont équipés pour le lancement d'engins nucléaires à Brest, ils peuvent stationner à Toulon...
     Les engins sont fabriqués à Valduc... (cf. émission de FR3) etc. Les sites sont nombreux...
     Tout ce qui concerne les civils doit pouvoir être transparent, près de tous les sites nucléaires, qu'il soient militaires ou civils.
     - des commissions locales d'information doivent être mises en place, avec des moyens financiers et scientifiques.
     - des plans de secours doivent être démocratiquement mis en place pour prévoir les mesures à prendre en cas d'accident, d'attentat, de conflit...
     - une expertise indépendante doit être menée non seulement sur les sites de l'armée, mais aussi sur ceux du CEA et de la COGEMA (les usines d'uranium notamment) qui ont la double mission civile et militaire.

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LETTRE TYPE CONTRE LES ESSAIS ATOMIQUES

          Monsieur le Président de la République,

     La France n'a signé le TNP qu'en 1991. En vertu de quoi elle a suspendu ses essais dans le Pacifique en 1992. A l'occasion de la conférence de révision du TNP en 1995, elle a accepté de signer le T.N.P., version 1996, s'engageant une fois de plus à «la cessation de la course aux armements nucléaires». Malheureusement les 5 puissances nucléaires ont aussi introduit des réserves leur permettant éventuellement de continuer à effectuer des tirs tests «raisonnablement».
     L'annonce selon laquelle vous avez pris la décision de reprendre les essais dans le Pacifique m'a profondément indigné. Je n'accepte pas les arguments pseudo scientifiques justifiant l'importance de ces tirs pour la Défense de la France.
     Je vous demande instamment de revoir cette position et de revenir au gel des essais, étape indispensable sur la route de la non-prolifération. La France ne peut pas concevoir de signer le T.N.P. en 1996 en maintenant des essais et tout un arsenal.
     J'affirme comme W. Epstein (ONU) que «le seul moyen d'empêcher la prolifération des armes nucléaires, c'est encore et surtout d'entreprendre un programme qui conduira à leur éventuelle élimination».
     En conclusion je demande l'arrêt des essais dans le Pacifique, la reprise des négociahohs pour un désarmement nucléaire total.

signature
Voici un exemple de lettre, vous pouvez en imaginer
autant que vous voulez. L'essentiel:
PARTICIPEZ
ECRIVEZ
EXPRIMEZ VOTRE OPPOSITION

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