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G@zette N°259, février 2011
ET SI ON PRENAIT LE TEMPS DE REFLECHIR....

RESOLUTION XVIII
de la Conférence internationale scientifico-pratique
«Écologie humaine dans l'après-Tchernobyl»
Minsk, 24-26 novembre 2010
Le président du comité organisateur: Lauréat du prix d'Etat de la République du Bélarus, Docteur en sciences médicales, le professeur L.I. Tegako et la secrétaire du comité organisateur: T.V. Belookaya


 

Conférence consacrée à l'analyse scientifique et à la généralisation de l'expérience
acquise en 25 ans de luttes contre les conséquences de la catastrophe de Tchernobyl

(La traduction a été assurée par W.Tcherkov, et transmise par l’association «les enfants de Tchernobyl». Cette résolution vient bien sûr au moment des 25 ans de Tchernobyl. Elle aurait été la bienvenue plus tôt, mais elle existe/ C’est donc une reconnaissance de l’accident et de ses conséquences sur le long terme.)

     Un quart de siècle s'est écoulé depuis le jour de la tragédie planétaire du XXème siècle – la catastrophe de Tchernobyl, qui a conduit à une irradiation chronique sans précédent de la population du Bélarus, de Russie et d'Ukraine et a affecté le mode de vie de nombreux habitants d'autres pays. Ce qui est arrivé, ce sont non seulement des souffrances passées et actuelles, mais encore un défi pour l'avenir, occasionnant aujourd'hui l'aggravation d'un grand nombre de problèmes. Cette catastrophe nuira encore à bien des générations de victimes à venir.
     La catastrophe de Tchernobyl a provoqué des problèmes médico-sociaux extrêmement complexes qui exigent une analyse et une recherche minutieuses de solutions. Elle a eu une incidence sur la situation démographique, elle a considérablement dégradé l'état de santé de la population, elle s'est traduite dans les faits par des maladies oncologiques et cardiovasculaires plus fréquentes et survenant à un plus jeune âge, une multiplication des anomalies congénitales du développement, des pathologies non spécifiques chroniques, un développement du syndrome de vieillissement précoce et une mortalité sans précédent de la population.

suite:
     Le nombre global de victimes dans les trois pays s'élève actuellement à plus de 7 millions de personnes, dont plus de 2 millions d'enfants. Chez ces derniers, durant toutes ces années, on note une augmentation de la morbidité générale et nouvellement diagnostiquée, en particulier des pathologies chroniques, pratiquement dans toutes les catégories de maladies: du système nerveux, des systèmes endocrinien, digestif, respiratoire et cardiovasculaire, on constate des troubles mentaux. Le nombre d'enfants invalides s'accroît, en premier lieu à cause des anomalies congénitales du développement.
     Le temps qui passe nécessite instamment de mener une surveillance médico-sanitaire à long terme, en particulier des cohortes des victimes les plus gravement atteintes par la catastrophe:
     1- la cohorte des personnes irradiées au stade du développement intra-utérin pendant la période qui a suivi immédiatement l'accident;
     2- la cohorte des personnes qui étaient enfants et adolescents (0 à 18 ans) au moment de l'accident;
     3- ceux qui ont participé à des travaux de liquidation des conséquences de l'accident durant les années 1986-1987 (les liquidateurs);
     4- les habitants ayant vécu durablement (plusieurs années) dans des territoires contaminés par la radioactivité;
     5- les enfants de parents irradiés (représentants des cohortes 1 à 4).
     La partie la plus vulnérable de la population correspond aux  deux premiers groupes de victimes, qui ont reçu de fortes doses de rayonnements dues à des radionucléides de courte période au cours des phases du développement de l'organisme les plus sensibles aux effets des facteurs agressifs de l'environnement.
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     Les évaluations contradictoires des conséquences de la catastrophe de Tchernobyl sont liées au manque d'informations concernant les incidences de facteurs de la catastrophe sur la population irradiée, à la représentation claire – quoique écologiquement erronée – que se font les spécialistes, les pouvoirs publics et simplement les habitants des territoires atteints quant au lien entre les suites de l'accident et ne serait-ce que le processus physique de désintégration naturelle des radionucléides. Les radionucléides ne sont pas des variantes d'éléments naturels, et nous savons encore peu de choses sur leur cycle biologique et sur  la dépendance de celui-ci vis-à-vis de la quantité de nucléides accumulée dans les divers organes et tissus d'un organisme vivant. L'ignorance des effets des faibles doses de rayonnement sur les objets biologiques conduit à la prise de décisions gouvernementales irréfléchies et sans fondement scientifique. On réduit les crédits alloués à la recherche sur les problèmes médico-biologiques, ce qui non seulement n'a aucune justification scientifique, mais encore va à l'encontre du bon sens le plus élémentaire.
     Une stratégie de réhabilitation des victimes de la catastrophe de Tchernobyl présuppose l'élaboration de programmes locaux et internationaux ciblés à long terme comprenant l'étude et la mise en œuvre  d'une série de mesures de caractère médical, socio-psychologique et culturo-éducatif. La conjonction des efforts de chercheurs relevant de divers domaines de la connaissance (disciplines philosophiques, culturologiques, biologiques, sociologiques, écologiques, médicales, pédagogiques, psychologiques et économiques) permet d'organiser le travail scientifique visant l'étude du rôle des facteurs anthropogènes et la mise en évidence des mécanismes de leur influence sur l'état des systèmes sociobiologiques et socio-économiques.
     Pour l'efficacité du travail destiné à apporter une aide à la population affectée par les suites de la catastrophe de Tchernobyl, on a besoin d'un travail constant systématisé, ciblé avec les habitants, il faut une démarche polyvalente et à bases scientifiques dans la résolution urgente des problèmes. Tous les groupes de personnes affectées nécessitent un soutien juridique, médical et psychologique.
     Il est particulièrement indispensable de déterminer l'incidence, sur la santé de la population, des effets à long terme des faibles doses d'irradiation et la construction, sur cette base, de pronostics d'évolution de la dynamique de la santé tant des personnes vivant actuellement que des générations à venir. Cela permettra de mettre au point un ensemble rationnel de mesures de prophylaxie et de réhabilitation.
     Le développement économique local doit s'orienter vers la stimulation et le soutien des petites et moyennes entreprises, la création d'un secteur privé très compétitif et le développement des rapports marchands. Un tel système d'aide à l'activité de la population permettra de créer de nouveaux lieux de travail, d'attirer vers la participation à l'économie des couches de la population disposant de peu de moyens, ce qui soulagera l'Etat dans sa lutte contre la pauvreté et accroîtra les sources de revenus pour un développement durable de l'ensemble de la société.
     Aujourd'hui, il est déjà évident que les conséquences écologiques et sociales des accidents provoquant une irradiation de grande ampleur perdurent pendant de nombreuses décennies. En témoigne l'expérience acquise avec la liquidation des conséquences de l'accident de Tchernobyl et, en remontant à plus de cinquante ans, de celles d'une série d'accidents dans l'Oural.
     Il ne faut pas que l'expérience sociale de Tchernobyl n'ait servi à rien. Les données sur les suites de la catastrophe de Tchernobyl sont extrêmement importantes pour l'humanité. Elles permettent d'approfondir les arguments sur la justification de l'emploi de technologies nucléaires dans un avenir immédiat et elles exigent une révision du concept de risque/avantage à l'occasion de la prise de décisions sur leur utilisation à plus long terme.
suite:
     Les participants à la conférence sont reconnaissants à toutes les organisations internationales qui ont réagi au malheur de Tchernobyl. Inestimable est l'aide des organisations, des structures de financement et de production, des simples citoyens de divers pays du monde qui ont apporté un soutien moral et matériel aux victimes durant toutes les années qui ont suivi l'accident. La tragédie de Tchernobyl concerne et conservera encore longtemps sa nature de défi planétaire au monde entier.
L'épreuve que traversent le Bélarus, l'Ukraine et la Russie, qui continuent à supporter la charge des conséquences humanitaires – exceptionnelles par leur ampleur – a mis en lumière une série de graves problèmes communs à tous les hommes concernant les catastrophes anthropogènes et naturelles qui sont liées:
     - à la lutte contre les effets destructeurs  des conséquences de la catastrophe nucléaire sur l'environnement et la santé de la population;
     - à la nécessité d'assurer un accès efficace à des informations actualisées et objectives pour la prise de décisions optimales en matière de gestion et de technologies;
     - à l'impréparation des dirigeants et spécialistes de divers horizons quant à la prise de décisions et à un comportement à fondement écologique dans des situations extrêmes;
     - à la nécessité d'organiser pour les gestionnaires et les spécialistes de divers horizons des stages et séminaires spéciaux sur l'élaboration d'habitudes de comportement dans des situations extrêmes à caractère naturel et technogène;
     - à l'intégration globale de ressources pour lutter contre les conditions d'une catastrophe d'une telle échelle sur la basse de la conjonction des efforts de la communauté mondiale;
     - à la suppression du déséquilibre entre les rythmes du progrès scientifique et technique et le développement humanitaire de la société, à sa compréhension des conséquences d'une agression technogène par rapport à l'environnement.
     Par ailleurs, les problèmes de qualité de vie et de santé des générations présentes et futures restent prioritaires pour l'humanité tout entière.
     La lutte contre les conséquences de la catastrophe, la reconstruction des régions sinistrées et, surtout, l'établissement de conditions assurant l'innocuité des activités vitales pendant l'après-Tchernobyl ne sont possibles que grâce à une organisation de l'activité visant à assurer un développement durable des régions autour de Tchernobyl, qui prévoit:
     * le développement du potentiel humain dans les régions autour de Tchernobyl, la réinsertion sociale et morale des habitants; la formation d'une culture de la santé; l'écologisation de la connaissance; la sécurisation des activités vitales; l'introduction de nouvelles techniques agricoles; le développement de l'entreprenariat au village;
     * une activité de développement de la société civile, une transition vers des rapports marchands du fait de la formation de nouvelles valeurs existentielles, d'activités personnelles, de la citoyenneté, du devenir des communautés locales et du développement d'une autonomie sur le terrain;
     * une éducation visant une approche, sur des bases scientifiques, du développement des régions autour de Tchernobyl tenant compte des particularismes et traditions locaux;
     * une continuité dans les processus d'organisation et de réalisation de projets scientifiques avec un recrutement de grands spécialistes pour l'étude et l'évaluation concrète de l'influence du facteur Tchernobyl sur la situation sanitaire humaine et la réalisation de projets portant sur le développement durable des régions.
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     L'amélioration qualitative de la gestion à tous les niveaux est la condition première pour un développement  durable des régions. Du point de vue de la transformation des pratiques de gestion, l'objectif primordial pour la réhabilitation des régions sinistrées devient la formation de cadres gestionnaires d'un nouveau type, aptes à moderniser les systèmes de gestion, disposant d'instruments innovants, permettant une gestion efficace des ressources. En outre, dans ces régions, les gestionnaires doivent être formés pour travailler dans des conditions nouvelles et doivent être à même de bénéficier régulièrement de connaissances:
     * sur les impératifs en matière de santé et d'hygiène de vie pour assister la population de ces régions, exposée en permanence à des faibles doses de rayonnement;
     * sur l'obtention de produits agricoles écologiquement propres sur les terres contaminées;
     * sur les possibilités de satisfaction des revendications des habitants en matière de travail et de services sociaux;
     * sur une stratégie de développement durable du pays, l'élaboration de programmes ciblés de développement durable de la région et l'intégration de son économie dans l'économie du pays;
     * sur les possibilités de débouchés de ces régions sur des marchés extérieurs (CEI, Europe, etc.);
     * sur de nouvelles technologies d'organisation de la vie courante et de la production, les perspectives et les possibilités de leur application pour le développement durable de ces régions;
     * sur les ressources naturelles locales existantes et les méthodes de leur exploitation rationnelle;
     * sur les possibilités de mise en œuvre de mesures méthodiques et permanentes ayant pour but une amélioration des connaissances de la population dans les domaines du droit, de l'économie et du marketing;
     * sur les possibilités de stimulation d'initiatives publiques et entrepreneriales, le lancement d'organisations et initiatives publiques;
     * sur les moyens d'améliorer les connaissances relatives au droit, à l'économie et au marketing.
     Une rénovation de fond en comble implique des fondements philosophiques d'une stratégie de développement de l'instruction s'appuyant sur une conception d'une formation dans l'intérêt d'un développement durable. L'élaboration et le développement de pratiques de formation dans l'intérêt d'un développement durable font partie d'une stratégie prioritaire dans la formation de ressources humaines en phase avec les objectifs de mise en évidence et de solution de problèmes liés à l'amélioration de la qualité de vie des personnes, des communautés et des régions.
     L'organisation d'une vie quotidienne sans risques doit reposer sur des principes humanitaires présupposant que chaque individu manifeste un rôle actif dans l'existence. Tout d'abord, il est indispensable de changer l'échelle des valeurs et le mode de vie des sinistrés. Il faut éduquer la population dans le sens d'une motivation claire pour la santé, la connaissance de son organisme et de son environnement; pour les interactions de l'organisme et de la nature, de l'individu et de la société, pour le désir de tout faire pour être en bonne santé et réussir, assurer la santé et le bonheur de ses enfants. Il convient également de préparer toute la population à des transformations positives. Pour travailler avec la population, il est nécessaire de rechercher des moyens novateurs pour accroître le niveau d'information sur l'organisation d'une existence sans risques dans les conditions d'un milieu agressif. Il faut résoudre des questions de fiabilité et de compréhensibilité de l'information, de coopération suivie des informateurs avec les organes directeurs locaux, ce à quoi, antérieurement, on faisait obstacle.
     Il faut un cadre légal dans la recherche de voies non seulement pour guérir les malades ayant subi une irradiation externe et interne, mais encore, et surtout, une organisation de la prophylaxie et de la réhabilitation aussi bien de patients concrets, de groupes particuliers de la population, que de la population complète autour de Tchernobyl.
suite:
     Tout cela doit trouver sa place dans un suivi médical très élaboré, ainsi que dans des programmes de réhabilitation. À cette fin, le corps médical doit également recevoir une formation spécifique orientée vers les questions de médecine radiologique, d'hygiène préventive face aux rayonnements, de radioécologie, de radiobiologie. Il y a un besoin crucial d'informations sur les études médicales récentes portant sur la prophylaxie, les soins et la réhabilitation de la population sinistrée et, surtout, vivant exposée en permanence à de faibles doses de rayonnement. Le corps enseignant, à son tour, doit acquérir des connaissances sur l'organisation d'une vie quotidienne sans dangers dans des conditions de contamination de l'environnement par des radionucléides.
     Le personnel des media locaux doit être formé aux questions de sécurisation de la vie quotidienne, de stratégie de développement durable du pays et de la région, de travail efficace dans le cadre de "l'étape de rétablissement", de création d'un niveau supérieur de besoin d'informations chez les gens, ainsi qu'aux technologies pour les satisfaire. Les média locaux sont tenus de jouer un rôle important dans la résolution des problèmes de réhabilitation de la population et de développement des districts. Les problèmes posés par Tchernobyl, en particulier la sécurisation de la vie quotidienne, doivent être des "prétextes quotidiens à informations" dans ces régions. Il incombe à la radio et la télévision locales de mettre sur pied des cycles d'émissions spécialisées, de libérer des créneaux horaires pour l'information de la population par des autorités locales, des dirigeants de kolkhozes et d'entreprises, pour des interventions de spécialistes.
     Les participants à la conférence proposent aux gouvernements des trois pays les plus sinistrés d'organiser conjointement un travail sur la réhabilitation des régions sinistrées – un programme à long terme à objectifs multiples, le "Développement durable des régions autour de Tchernobyl":
     Etape I – "formation des ressources humaines et organisation concrète d'une réhabilitation polyvalente des régions";
     Etape II – "assurance d'un développement durable de la région" avec une organisation des centres de développement disposant de ressources;
     Etape III – "accompagnement polyvalent du développement durable des régions autour de Tchernobyl"
     (Les auteurs sont prêts à soumettre à un débat le projet élaboré).
      C'est le suivi médico-sanitaire qui deviendra l'instrument qui permettra de prendre correctement des décisions sur la gestion de l'environnement, en tenant compte des priorités de préservation de la santé humaine, dans le cadre d'une planification du développement des territoires, et c'est la santé humaine qui servira à mesurer la stabilité du système "homme-environnement". La santé d'une nation se mesure d'après l'état de sa santé reproductrice. Les participants à la conférence estiment qu'il est indispensable de s'adresser au Comité scientifique des Nations Unies pour l'étude des effets des rayonnements atomiques (UNSCEAR) pour les démarches concernant le financement  du Programme international d'études conjointes au Bélarus, en Russie et en Ukraine "Santé reproductrice de la population durant l'après-Tchernobyl".
     Œuvrer dans ce sens permettra de suivre la dynamique et d'évaluer véritablement l'état de santé des grands groupes de victimes: le groupe des irradiés au stade intra-utérin; les "enfants du groupe à risque radiologique"; les adolescents de 1986; les liquidateurs et la génération d'enfants de tous les groupes de victimes précités. Il faut bien comprendre aujourd'hui que leur santé et leur activité déterminent l'avenir de tout le genre humain, pas seulement la santé d'une nation prise isolément et son patrimoine génétique.
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     Suite à ces études, on obtiendra aussi, notamment, une estimation objective de l'efficacité du travail du système éducatif, des services médicaux et autres services sociaux, car la santé reproductrice ne couvre pas seulement la santé somatique globale, psychologique et l'état de santé des organes reproducteurs chez les personnes en âge d'engendrer des enfants. La santé reproductrice est également un concept social qui détermine le niveau de développement et les possibilités d'accès à des services concernant l'information, la médecine, l'éducation, etc.

    Voici ce que les participants à la conférence considèrent comme les orientations prioritaires de l'action de la communauté interdisciplinaire pour la prise de décisions de gouvernance appropriées:

     1. évolution des priorités dans la répartition des moyens à dégager pour lutter contre les conséquences de la catastrophe : réorientation de ceux-ci vers une assistance directe, l'entretien et l'amélioration de la santé des personnes, en tenant compte des spécificités des besoins des groupes à risque;
     2. optimisation du suivi médico-sanitaire des conséquences de la catastrophe de Tchernobyl dans les régions sinistrées, d'après une exploitation des résultats d'études à grande échelle, d'actions concrètes et d'enquêtes internationales, un examen des données recueillies avec désignation d'experts professionnels indépendants, une prise rapide de décisions de gouvernance;
     3. organisation d'enquêtes épidémiologiques à grande échelle sur les effets des rayonnements, s'attachant tout particulièrement aux affections génétiques, métaboliques et oncologiques et reposant sur des approches internationales, tant existantes que nouvelles, quant à l'organisation et la conduite d'études scientifiques. L'existence de différentes approches possibles permettra d'élargir également le champ des études et l'ampleur de la réflexion scientifique et pratique, d'améliorer la qualité des décisions à prendre;
     4. développement de recherches en sciences fondamentales et appliquées pour approfondir l'étude des effets des faibles doses de rayonnements ionisants sur l'organisme humain, de méthodes de reconstruction des doses de rayonnement accumulées par les diverses cohortes de victimes du fait de leur irradiation, en accordant une attention particulière aux recherches pathomorphologiques contribuant à objectiver les effets biologiques des faibles doses de rayonnements et d'autres polluants technogènes;
     5. étude des lois régissant l'instabilité génomique et les caractéristiques génotypiques de l'organisme, de leurs liens de cause à effet avec des facteurs clinico-immunologiques, en particulier l'étude des indices d'héritabilité pour les maladies multifactorielles – mise en œuvre d'approches épidémiologiques du diagnostic par la génétique moléculaire et les phénotypes;
     6. suivi médico-génétique et médico-social des jeunes femmes envisageant une grossesse, des femmes enceintes et de leur descendance;
     7. perfectionnement des mécanismes de diffusion de l'information sur les conséquences de la catastrophe de Tchernobyl et amplification de l'information  du public sur les problèmes existants, les moyens de les résoudre et les résultats obtenus;
     8. accroissement de l'efficacité de l'utilisation des médias et des bibliothèques, et aussi création de sites Internet spécialisés dans l'écologie, permettant d'assurer un large accès à des informations à jour et fiables sur tous les aspects de l'incidence des facteurs négatifs sur la santé humaine et l'environnement naturel;
     9. conjonction des efforts de scientifiques - spécialistes du système de santé, de l'éducation, de la protection sociale, de la culture et autres - en vue d'organiser des processus de réhabilitation polyvalente des régions;
     10. interaction en réseau des organisations humanitaires autonomes.

suite:
Les participants à la conférence proposent aux structures étatiques des pays sinistrés du fait de la catastrophe de Tchernobyl:

     Aux ministères de la santé:
     * d'orienter des établissements de santé publique à pratique scientifique vers l'étude des problèmes de santé de la population pendant l'après-Tchernobyl, de rechercher des modes de prophylaxie et de réhabilitation;
     * de doter les établissements de soins des régions proches de Tchernobyl de programmes efficaces de dépistage à bases scientifiques, de méthodes de diagnostic précoce de maladies dans des conditions d'effets conjugués de facteurs environnementaux agressifs et d'irradiation chronique par des faibles doses;
     * de renforcer le contrôle de la qualité des visites médicales passées par les enfants et les adolescents, en particulier: les habitants des régions proches de Tchernobyl, les enfants de liquidateurs, les évacués et émigrés; d'assurer une prophylaxie primaire et secondaire efficace des maladies;
     * d'assurer le développement ultérieur et le perfectionnement du registre d'Etat des personnes ayant été exposées aux effets des rayonnements résultant de la catastrophe survenue à la centrale nucléaire de Tchernobyl, d'autres accidents radiologiques, en ayant prévu leur insertion obligatoire dans une base de données d'informations médicales personnalisées sur les habitants des territoires ouvrant droit à un déménagement et à un contrôle radiologique périodique (5 groupes prioritaires);
     * de réaliser le calcul des doses d'irradiation cumulées individualisées (dont celles absorbées par la thyroïde) des personnes figurant dans le registre d'Etat.

     Aux ministères de l'éducation:
     * d'assurer la priorité et la systématicité des pratiques éducatives dans l'intérêt d'un développement durable, ce qui doit devenir le critère de base de la qualité de l'éducation, et de définir un ensemble d'exigences pour l'activité des établissements d'enseignement;
     * d'intégrer dans la pratique des établissements d'enseignement les principes théoriques et les procédures de mise en œuvre des approches écologiques du développement de l'intelligence émotionnelle de la personnalité, permettant de construire chez les écoliers une image complète du monde créant les conditions pour l'établissement de leur vision écocentrique du monde;
     * d'inclure dans le contenu de l'enseignement continu des cours spéciaux d'étude de la philosophie et de conception d'un développement durable, de psychologie des interactions de l'homme avec son environnement (ou psychologie écologique). De tenir compte, dans le contenu des cours spéciaux, des conclusions des rapports nationaux du Bélarus, d'Ukraine et de Russie, intitulés "les 20 ans de la catastrophe de Tchernobyl: les conséquences et la lutte pour les éliminer";
*d'organiser la formation, puis la formation continue de cadres gestionnaires et de spécialistes des questions d'élaboration de pratiques éducatives de formation des ressources humaines dans l'optique d'un développement durable ;
*de contribuer à un large développement de mouvements de jeunesse s'occupant d'écologie, permettant d'intégrer la jeunesse dans des processus décisionnels d'une importance vitale, par le biais de la stimulation d'initiatives de la jeunesse dans le domaine du développement durable et de la création de systèmes efficaces pour les soutenir.

     Pour des actions conjointes aux ministères de la santé et de l'éducation:
     * de créer des commissions conjointes "conciliatoires" pour l'élaboration de décisions sur le règlement de problèmes concernant les critères de normalisation d'évaluation de la santé, les façons de créer un mode de vie sain de la population, l'optimisation de l'éducation écologique et valéologique des enfants et de la jeunesse estudiantine;

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     * de faire concorder les actions des services des deux ministères visant à réaliser une association optimale des impératifs sanitaires dans les écoles et des objectifs des processus éducatifs. D'accorder une attention particulière à l'obtention d'une alimentation rationnelle, de qualité, à la qualité de l'eau, de l'air et à d'autres facteurs significatifs pour la santé;
     * d'élaborer, de convenir et d'organiser des études scientifiques pluridisciplinaires polyvalentes visant à assurer une prophylaxie efficace des maladies et à agir sur la santé de la nation;
     * de créer un groupe interprofessionnel d'experts scientifiques – médecins, pédagogues, psychologues, sociologues, culturologues, etc. – pour conduire une expertise polyvalente socioculturelle, sanitaire, psychopédagogique, psychophysiologique de méthodes pédagogiques novatrices et de programmes d'éducation générale.

     Aux Départements d'hydrométéorologie et en charge de l'élimination des conséquences de la catastrophe de Tchernobyl: de concrétiser des travaux sur la prévision de la contamination des territoires par l'américium-241, de sa contribution croissance à la dose reçue par la population habitant dans les régions contaminées par des nucléides à rayonnement alpha et dans des territoires limitrophes, ainsi que sur la recherche de mesures protectrices (d'après des prévisions, vers 2058 la part de l'américium-241 dans l'activité spécifique des radionucléides sera jusqu'à deux fois supérieure à l'activité des radionucléides de tous les isotopes du plutonium).

     A la Commission nationale de radioprotection du Bélarus: d'organiser une coopération interdisciplinaire des commissions et, dans les plus brefs délais, de définir et de valider de nouvelles normes RDU sur les aliments, après les avoir mises en concordance avec les seuils officiels de contamination par le césium-137 actuellement admissibles en Russie (lait: région de Bryansk – 50 Bq/l, Bélarus – 100 Bq/l; viande de bœuf: région de Bryansk – 160 Bq/l, Bélarus – 500 Bq/l), de définir des seuils officiels de contamination admissible du poisson frais.

     Au Département en charge de l'élimination des conséquences de la catastrophe de Tchernobyl et au Ministère de la santé de la République du Bélarus: 
     * de fonder au Bélarus un Centre scientifico-pratique de radioprotection de l'enfance analogue au Centre existant en Russie. D'après les données d'un dénombrement statistique d'Etat, au Bélarus, début 2009, 265.871 enfants subissant les effets de la catastrophe de Tchernobyl étaient soumis à un suivi médical, contre 94.860 en Russie.

suite:
Le Centre est invité à se doter de moyens pour les connaissances scientifiques, les consultations diagnostiques et la réhabilitation à l'intention de la population enfantine, à disposer de bases de données unifiées sur tous les pôles d'activités relevant de l'observation, des soins et de la réhabilitation des enfants victimes de la catastrophe de Tchernobyl;
     * d'informer le public d'une manière objective sur les résultats de la surveillance radiologique et sanitaire de la contamination, par des radionucléides, d'aliments, de fourrages, de matières premières médicamenteuses et sur le contrôle de l'accumulation de radionucléides dans l'organisme des habitants des territoires contaminés.

     Du fait de la nécessité d'une estimation des conséquences à long terme de Tchernobyl, aux centres scientifico-pratiques de médecine radiologique:
     * de poursuivre les dépistages parmi la population des territoires contaminés pour étudier les mécanismes fins de réponse de l'organisme aux effets des faibles doses de rayonnement, en s'intéressant tout particulièrement aux problèmes de santé reproductrice, de santé des enfants et de recherche de méthodes et de moyens de réhabilitation des victimes;
     * de lancer de vastes études épidémiologiques sur l'irradiation afin d'estimer le risque de pathologies oncologiques et non oncologiques dans divers groupes de la population sinistrée.

     Nous estimons qu'il va de l'intérêt des différents Etats et de la Communauté internationale dans son ensemble d'approfondir leur perception des conséquences à long terme des effets des radionucléides de longue période sur un organisme vivant, de définir une stratégie de réhabilitation et d'évaluer les conséquences mondiales de la catastrophe de Tchernobyl. À l’occasion de la 62ème session de l'Assemblée Générale de l'ONU (novembre 2007), la troisième décennie après Tchernobyl (années 2006-2016) a été proclamée "Décennie de la réhabilitation et du développement durable des régions sinistrées dont les principaux efforts doivent porter sur l'objectif de retour à une vie normale des communautés sinistrées, si possible dans ces délais...", et il est également recommandé un élargissement et un approfondissement de la coopération internationale dans ces perspectives.

     Les participants à la conférence sont attachés à des objectifs de conjonction des efforts des professionnels et des experts publics de tous pays pour faire connaître l'expérience acquise dans la liquidation des conséquences de la catastrophe de Tchernobyl.

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