La G@zette Nucléaire sur le Net! 
G@zette N°256
Secret et démocratie:
cohabitation impossible

QUELQUES  INCIDENTS
 

I- Contamination d'un travailleur à l'occasion d'un accident du travail sur l'installationMELOX d'Areva NC (Marcoule, Gard)

     Dans la soirée du 9 février 2010, un accident du travail survenu sur l'installation MELOX a occasionné la contamination radiologique d'un prestataire. Celui-ci a été immédiatement pris en charge par les équipes médicales de l'exploitant, avant d'être transféré dans la nuit dans un service spécialisé de la région parisienne. 
     L'ASN, prévenue dans la matinée du 10 février 2010 a réalisé une inspection l'après midi du 10 février, en présence de l'inspecteur du travail. 
     L'accident de contamination a eu lieu au sein d'une boîte à gants**, dans laquelle est présent un élément mécanique tournant, entraîné par un moteur fonctionnant de manière intermittente. L'équipe de maintenance, composée de salariés d'entreprises extérieures, était chargée de resserrer un écrou, ce qui nécessite l'introduction d'un bras dans un gant de la boîte. 
     Le moteur, non mis en sécurité, s'est mis en route alors que le prestataire avait le bras engagé dans la boîte à gants. Le gant a été entraîné et percé par le volant de l'élément mécanique tournant, créant par là même une rupture de confinement radiologique de la boîte à gants. La présence d'une plaie superficielle contaminée au niveau de l'avant bras du prestataire a justifié son orientation dans un service spécialisé, où il fait l'objet d'un suivi médical adapté. 
     L'inspection a démontré une série de défaillances humaines et organisationnelles à l'origine de l'accident de contamination, notamment concernant la délivrance de l'autorisation de travail, son analyse préalable des risques et une erreur dans la mise en sécurité des moteurs due à une confusion entre deux armoires électriques. 
     En raison d'une rupture de confinement, du constat d'une succession d'erreurs humaines et de la préparation inappropriée de l'opération, l'accident est classé par l'ASN au niveau 1 de l'échelle INES relative à la sûreté, qui en comporte 7. 
Les résultats des analyses radiotoxicologiques du prestataire impliqué permettront de classer ultérieurement l'évènement sur l'échelle INES radioprotection. Ces analyses ne seront disponibles que dans plusieurs semaines. 
     L'ASN a informé le 11 février 2010 la Commission Locale d'Information du site de Marcoule des éléments recueillis lors de l'inspection. La lettre de suite de l'inspection sera disponible sur le site internet www.asn.fr dans les prochains jours.

suite:
    L'usine MELOX, située sur le site de Marcoule dans le Gard, fabrique des assemblages de combustibles MOX (mélange d'oxydes d'uranium et de plutonium) destinés aux réacteurs électronucléaires à eau légère.
** Une boîte à gants est une enceinte étanche entre les matières nucléaires et les opérateurs. Des gants installés au niveau des parois de la boîte permettent de manipuler les objets situés au sein de celle-ci.
II - Classement par l'ASN au niveau 2 de l'échelle INES d'un incident ayant conduit à la contamination de 6 intervenants au cours d'une opération de mise en sécurité de source au sein de la société Feursmetal (Feurs, Loire)

     L'ASN a classé au niveau 2 de l'échelle INES la contamination de 6 personnes intervenant dans les locaux de la société Feursmetal (Feurs, Loire). Cette contamination a eu lieu au cours d'une opération de récupération hier, 26 mai, d'une source radioactive de cobalt 60 de haute activité (1,25 TBq) coincée dans la gaine d'éjection d'un gammagraphe. 
     La source était bloquée depuis le 7 mai. Le gammagraphe est situé dans un bunker au sein d'un atelier de la société Feursmetal
     Une première opération visant à débloquer la source a eu lieu, sans succès, le lundi 10 mai sous la responsabilité de Feursmetal avec le concours des équipes techniques du fabricant de l'appareil Cegelec. 
     L'ASN a mené une première inspection le 12 mai afin de vérifier que les dispositions adéquates en matière de radioprotection avaient été mises en place. 
     Le 26 mai, une seconde opération a été programmée par Feursmetal et Cegelec qui a  fait appel à l'IRSN. Elle prévoyait la mise en œuvre de robots afin de récupérer et de mettre en sécurité la source. 
     La tentative de cisaillage robotisé de la gaine d'éjection en amont et en aval de la source a conduit à détériorer  celle-ci. La source a alors perdu son étanchéité ce qui a conduit à la contamination des six intervenants. 
     Des premières analyses ont été réalisées au sein de l'unité médicale spécialisée de la centrale nucléaire EDF de Saint-Alban, en raison de sa proximité et ont confirmé la contamination. Le niveau de contamination sera précisé par des analyses radio toxicologiques en cours. 
     Deux inspecteurs de l'ASN sont présents sur site depuis le 26 mai au soir.

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III- Incident de niveau 2 à la centrale nucléaire de Chinon (Indre et Loire): Irradiation d'un travailleur dans le bâtiment combustible du réacteur n°B4

     Le 27 avril 2010, EDF a informé l'ASN de l'irradiation accidentelle le 23 avril 2010 d'un travailleur de l'entreprise KELLAL, prestataire d'EDF, lors d'une activité de mise en propreté dans le fond d'une piscine du bâtiment combustible du réacteur n°B4 de la centrale nucléaire de Chinon. Ce travailleur a été irradié lors de la manipulation d'un objet (de la taille d'une pièce de 10 centimes €) trouvé dans le fond de piscine du bâtiment combustible. 
     Le bâtiment combustible sert notamment à l'entreposage d'assemblages de combustible, qui ont été retirés de la cuve du réacteur pour permettre, en particulier, des opérations de maintenance dans le bâtiment du réacteur. Préalablement au déchargement du combustible du réacteur, une partie de la piscine du bâtiment combustible est vidée et décontaminée. A l'issue de cette décontamination, un travailleur est intervenu en tenue étanche ventilée afin de contrôler l'absence d'objets indésirables au fond de la piscine. Lors de ce contrôle, le travailleur a ramassé une pièce générant des niveaux élevés de radiation. Au déclenchement de l'alarme de son dosimètre opérationnel[1], le travailleur a déposé la pièce dans un seau en fond de piscine et l'ensemble des intervenants du chantier ont quitté le chantier. 
     Pour les travailleurs susceptibles d'être exposés aux rayonnements ionisants lors de leur activité professionnelle, les limites réglementaires annuelles de doses sont de 20 millisieverts pour le corps entier et de 500 millisieverts pour les extrémités du corps. Le résultat du suivi dosimétrique pour la dose efficace (corps entier) intégrée par l'agent est inférieur au dixième de la limite réglementaire annuelle. La dose aux extrémités a été déterminée par des mesures internes et externes menées à la demande d'EDF par l'IRSN et le CEA. Les résultats de ces mesures indiquent qu'une main du travailleur a été exposée à une dose évaluée au maximum à 1,5 fois la limite réglementaire annuelle. Son niveau d'exposition ne justifie pas de traitement médical. 
    L'ASN a mené une inspection sur site le 3 mai 2010. Les inspecteurs se sont assurés qu'EDF avait pris les mesures nécessaires, après l'événement, pour sécuriser le chantier, engager la surveillance médicale du travailleur et réaliser l'analyse des causes de cet événement. Cette irradiation accidentelle est due à une analyse insuffisante de risques et à l'absence de définition de la conduite à tenir en cas de présence d'objets indésirables au fond de la piscine. 
     En raison du dépassement de la limite réglementaire de dose annuelle aux extrémités et du non-respect des procédures relatives à la préparation et à la réalisation de cette intervention, EDF et l'entreprise KELLAL ont proposé à l'ASN le classement de cet événement au niveau 2 de l'échelle internationale de gravité des événements nucléaires et radiologiques (INES) qui compte 8 niveaux, de 0 à 7. L'ASN confirme le classement de cet incident au niveau 2.
[1] Appareil de mesure de l'exposition externe aux rayonnements ionisants avec lecture directe de la dose reçue pour le corps entier

suite:
IV- L'ASN reclasse au niveau 2 l'Incident survenu le 19 novembre 2009 dans l'usine de traitement des combustibles irradies (UP2 400) du site de La Hague
Contamination interne d'un salarié d'une entreprise sous-traitante 

     L'ASN a reclassé, le 24 mars, sur proposition de l'exploitant, au niveau 2 de l'échelle INES [1] l'incident survenu le 19 novembre 2009 dans l'atelier MAU (Moyenne Activité Uranium) de l'installation nucléaire n°33, dénommée UP2-400, du site AREVA NC de La Hague. 
     Le 19 novembre 2009, un salarié d'une entreprise sous-traitante avait été contaminé notamment par du plutonium lors d'une opération de dépoussiérage d'une cellule dans l'atelier MAU. Alors qu'il était en train d'intervenir équipé d'une tenue étanche ventilée, sa main droite a heurté un fil métallique servant à maintenir une étiquette d'identification d'une tuyauterie présente dans la cellule. Le fil métallique a percé les gants de protection du salarié et l'a piqué, ce qui a entraîné sa contamination interne. 
     L'exploitant a mené une analyse détaillée de l'incident, qui a été examinée par l'ASN. 
     L'exploitant a suspendu temporairement ce type d'opérations d'assainissement dans l'atelier pour redéfinir les conditions de travail et améliorer les conditions d'utilisation des équipements de protection individuelle. 
     Les résultats des examens complémentaires périodiques pratiqués sur le salarié contaminé ont conduit à évaluer la dose engagée sur 50 ans [2] à une valeur comprise entre 20mSv et 100mSv [3]. Le calcul de cette dose a été réalisé par les médecins du travail et confirmé par l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN). Aucune pathologie n'a à ce jour été observée pour ce niveau d'exposition. 
     Compte tenu de l'exposition du salarié, l'incident a été reclassé au niveau 2 de l'échelle INES, en application des critères de l'échelle internationale. 
     L'atelier MAU fait partie de la première usine de retraitement UP2-400 du site de La Hague, aujourd'hui mise à l'arrêt. La fonction industrielle de l'atelier MAU consistait historiquement à séparer l'uranium du plutonium contenu dans une solution d'acide nitrique, puis à purifier l'uranium. 
     Consultez l'avis d'incident


[1] L'échelle INES (International Nuclear and Radiological Event Scale) est une échelle de communication sur la gravité des incidents concernant la sûreté nucléaire et la radioprotection. Elle comprend 8 niveaux, numérotés de 0 à 7 du moins grave vers le plus grave. 
[2] La «dose efficace engagée sur 50 ans» correspond à la dose totale intégrée sur une période de 50 ans, en tenant compte de la plus ou moins grande «transférabilité» des radioéléments dans les tissus biologiques ainsi que de leur période radioactive. Elle correspond donc au calcul de l'impact de l'incident de contamination sur la vie complète de l'individu. La limite de dose réglementaire annuelle est fixée à 20 mSv pour un travailleur. 
[3] La valeur exacte de la dose n'est pas communicable pour des questions de confidentialité médicale.

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Lettre ouverte de quatre organisations antinucléaires au directeur de l'ASN
(Autorité de Sûreté Nucléaire française), André-Claude Lacoste - 28 avril 2010

Contact presse: François Mativet - 06 03 92 20 13 – francois.mativet@sortirdunucleaire.fr
     Monsieur,
     Nous venons d'obtenir des informations d'un salarié travaillant sur le site EDF de Golfech, nous signalant un incident grave survenu récemment au sein de ce centre de production nucléaire. Selon ces informations, de l'eau qui était en contact avec les barres de combustible, et qui a donc été contaminée en radioéléments, a été déversée dans l'environnement de cette centrale. Il y aurait eu, suite à ce déversement, une contamination radioactive de la nappe phréatique, essentiellement en tritium (hydrogène radioactif). Pour obtenir davantage d'informations sur ce problème, nous nous sommes tournés naturellement vers votre site internet... où nous n'avons rien trouvé. Le site internet d'EDF n'apporte également aucune information sur cet incident. Nous avons téléphoné à la centrale de Golfech le 26 avril à 16 h 30: nous attendons depuis plus de 48 heures maintenant d'être rappelés par le service communication.
     Depuis plusieurs mois, nous constatons sur votre site internet un déficit de transparence au sujet des incidents survenus sur le parc d'EDF dont vous devez assurer le contrôle et l'expertise. En particulier, nous n'avons rien trouvé concernant 3 événements survenus sur le site de Cattenom:
     - l'oubli de l'obturation d'un trou d'homme entraînant l'inondation de la salle des machines, voir: http://lequotidien.editpress.lu/1
     - la contamination d'un travailleur, voir: http://lequotidien.editpress.lu/2
     - les barres de contrôle restées bloquées dans leur course, voir: http://lequotidien.editpress.lu/3
     Ces trois informations nous sont parvenues via des médias de pays frontaliers, que notre parc nucléaire inquiète de plus en plus. Nous nous interrogeons pour savoir s'il s'agit, de la part de l'ASN, d'une méconnaissance de ces faits, ou bien de rétention d'information.
     Nous sommes les témoins de la détérioration des conditions de travail des opérateurs et employés du site de Golfech, et plus généralement dans l'ensemble des sites de production d'EDF (nombreuses grèves, actes de désespérance...). Vous savez comme nous que le management actuel fait peser une pression de plus en plus insupportable sur les équipes de conduite et de maintenance.

suite:
La pression est si forte à l'intérieur d'EDF qu'elle déborde à l'extérieur. Et c'est dans cette période d'instabilité que le nucléaire est prié de produire un maximum: «l'ordre national étant «production toute», chaque site est prié de s'organiser au mieux pour... produire au plus
Source: http://www.republicain-lorrain.fr/
     Suite à ces constats, nous vous interrogeons sur la réalité de l'indépendance de l'ASN vis-à-vis des opérateurs de l'atome, et sur votre poids effectif (cf. l'arrêté du 5 mai 2009, pris par le gouvernement en contradiction avec votre avis, et qui permet l'incorporation de radioactivité dans les biens de consommation courante). La réalité aujourd'hui est que des salariés se tournent vers des associations pour faire passer ce type d'informations. Nous souhaitons savoir ce qu'il en est de l'instance que vous aviez mise en place afin que des salariés puissent dénoncer auprès de vos services les graves dysfonctionnements du nucléaire. Ces dénonciations étaient prévues sous couvert de l'anonymat, pour protéger l'emploi des informateurs, mais cette instance, à l'évidence, ne fonctionne pas.
     Tous ces éléments nous paraissent en contradiction avec votre affirmation d'indépendance, reprise la semaine dernière dans les colonnes du Figaro «L'ASN entend bien témoigner de son indépendance vis-à-vis de l'opérateur historique».
http://www.lefigaro.fr/
     Nos convictions affirmées pour la sortie du nucléaire, vers une société plus sobre et des productions énergétiques plus diversifiées, ne peuvent s'accommoder de cette situation actuellement dégradée, dont l'issue ne peut être que fatale.
     Dans l'attente d'éclaircissements de votre part sur le débordement présumé à Golfech, les incidents à répétition à Cattenom, et d'une manière générale, sur la sûreté du parc nucléaire français, nous vous adressons nos salutations respectueuses,

Pour le Réseau «Sortir du nucléaire»:
François Mativet - 0603922013/ francois.mativet@sortirdunucleaire.fr
Pour Stop Golfech:
Marc Saint Aroman - 05 61 35 11 06 – S.A.M@wanadoo.fr
Pour l'initiative civile Cattenom - Non Merci:
Ute Schlumpberger -00 49 6866150840/ ute-schlumpberger@online.de
Pour l'Association pour la Sauvegarde de la Vallée de la Moselle:
Bernard Py – ASVM, BP 40, 57570 Cattenom – bernardpy@free.fr

p.10a

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