La G@zette Nucléaire sur le Net! 
G@zette N°253
NUMERO DEDIE A PIERRE SAMUEL,
cofondateur de la GAZETTE NUCLEAIRE

info CIVAUX par les Associatifs de la CLI
Enquête publique DARPE  - 5 novembre 2008
REJETS
remarques et questions adressées par l'association Stop-Civaux à la Commission d'Enquête (Deuxième partie, suite de la Gazette N°252)



* L'EAU
     Sans eau pas de centrale
     - La plus grande part de l'eau prélevée dans la rivière alimente les circuits de refroidissement des réacteurs nucléaires en puissance et même à l'arrêt*, et sert à la réfrigération des condenseurs et des auxiliaires des salles des machines.
     - Elle sert à faire l'appoint (purges, fuites) et à compenser l'eau perdue par évaporation dans les aéroréfrigérants**.
     - Elle a d'autres usages industriels plus ou moins spécifiques (déminéralisation, prédilution des effluents, nettoyage, défense contre l'incendie...)
     - Enfin, son usage le moins vanté: la rivière est utilisée comme égout pour évacuer loin de la centrale les effluents radioactifs et chimiques, à certaines conditions de débit et de température.
     Une consommation qui refroidit !
     L'eau de refroidissement des circuits cède à son tour sa chaleur dans les aéroréfrigérants. Une partie de l'eau prélevée est évaporée (entre 0,7 et 1,05m3/s par réacteur, annoncés dans l'enquête publique, en fonction de la puissance et de la météo.  C'est le panache qui s'échappe des tours. Voir tableau 1 en bas de page

   Les chiffres de ce tableau sont à mettre en relation avec les autorisations qui figurent ci-dessous. Qu'observe-t-on? Depuis 2002 (augmentation de puissance?)  les volumes moyens prélevés et évaporés augmentent et dépassent largement les volumes autorisés (107,2 et 36,2Mm3). A quoi servent les textes officiels?

     Les autorisations: 
     L'utilisation de l'eau pour le fonctionnement des 2 tranches de Civaux  (dites de 1.400MWé), est régie par  l'arrêté interpréfectoral du 9 août 1991, comme suit:
 

* Débit moyen instantané prélevé pour 2 tranches: 
     4m3/s avec maximum à ne pas dépasser de 6m3/s
* A l'arrêt*,  les prélèvements devront être réduits aux stricts besoins, soit entre 0,05m3/s et 0,9m3/s.
* Ceci correspond à un débit moyen journalier prélevé: 
345.600 m3/jour
Et à un volume moyen annuel prélevé de:
107.295.840 m3  (107,2Mm3)
* Débit moyen instantané évaporé: 1,7m3/s
* Débit moyen journalier évaporé : 146.880 m3
* Volume moyen annuel évaporé** 36.212.346 m3  (36,2Mm3)
     La centrale devra être arrêtée si le débit moyen journalier tombe en dessous de 10m3/s
     Les réserves des barrages en amont servent à soutenir le niveau du débit.

     Les autorisations de prélèvements et de rejets (DARPE) vont faire l'objet d'un dossier en vue de leur renouvellement prévu pour 2009. La centrale de Civaux va-t-elle demander des autorisations de prélever davantage d'eau, comme à Golfech où une enquête publique est en cours. Va-t-on revoir la loi pour que la consommation colle avec le cadre réglementaire? Les autorisations sont-elles données en fonction des besoins d'EDF ou du bien public?

suite:
     - Evaporation et brouillard juridique
     Des dépassements marqués mais pas de radar: 
     Dès 2002, les débits moyens annuels prélevés et évaporés étaient outrepassés: Civaux, ne peut pas fonctionner dans le cadre de ses autorisations légales. Mais les apparences sont sauves car l'arrêté ne prescrit pas la limite annuelle maximale à ne pas dépasser. Il n'indique qu'un volume moyen. A qu(o)i servent les arrêtés flous qui ne tracent que les pointillés et pas les lignes jaunes?
     Mais ce n'est pas tout.
     Tour de passe-passe:
     Prenons l'exemple des volumes évaporés (tableau 1). Depuis 2002, ils sont constamment supérieurs au volume moyen autorisé de 36,2Mm3. Or dans ses rapports annuels sur l'environnement,  EDF met en avant des moyennes annuelles avantageuses, inférieures à la limite, qui sont calculées non pas sur 12 mois, mais sur  plusieurs années (depuis 1998). En fait, il s'agit d'une moyenne pluriannuelle qui gomme les dépassements et a été calculée en incluant des années où la tranche 1 en réparation a été arrêtée pratiquement en permanence (1998-99) et où la tranche 2 n'était pas encore en fonctionnement. Un coup de bluff qui masque la croissance régulière des volumes évaporés!
     Petits calculs:
     Autre exemple des arrangements possibles grâce aux chiffres: les volumes d'eau prélevés étaient calculés jusqu'en 2003, en fonction d'un débit des pompes estimé à 1,5m3/s.  Sous prétexte d'encrassement des échangeurs, le débit qui sert au calcul a été abaissé à 1,36m3/s, un détail qui permet d'afficher des volumes prélevés sensiblement inférieurs à ce qu'ils auraient dû être en conservant le chiffre de débit initial.
     L'artifice est simple comme bonjour: la règle du jeu change, comme à chaque fois que l'exploitant est à l'étroit dans des autorisations pourtant généreuses. Les exemples abondent de ce qu'on peut faire avec des chiffres et des moyennes.
     Civaux est surdimensionnée par rapport à la Vienne
     - Ce n'est pas la centrale pour laquelle a été menée une enquête publique: 2 réacteurs de plus de 1.400MWe au lieu des 1.300 prévus, sans nouvelle enquête publique.
     - Exploitation au maximum de puissance, productivité oblige, plus proche de 1.600MWe que des 1.400 prévus dans les autorisations. Nous considérons que ce type de fonctionnement excède la puissance réglementaire autorisée. EDF encore une fois se justifie grâce au flou des arrêtés concernant la puissance des réacteurs N4.
     - De surcroît, productivité oblige toujours, ils fonctionnent en suivi de charge (la puissance suit la demande) plutôt qu'en base (i.e. à fonctionnement constant). Or ceci a des conséquences néfastes:
     - pour la sûreté (vieillissement plus rapide des équipements et risques accrus) et
     - pour l'environnement (consommation d'eau augmentée, effluents et donc pollution multipliés)
     La rivière: usages et abus d'une ressource vitale
     La consommation d'eau et les rejets augmentent, alors que le débit de la Vienne décroît.
     L'examen des débits moyens mensuels de ces dernières années permet d'observer une tendance à la baisse avec un creux en 2005 fort compromettant pour les rejets que la centrale doit effectuer. (tableau 2)
p.25
Tableau 1:  Volumes annuels prélevés et évaporés par la centrale en millions de m3 (Mm3) (chiffres EDF)
Année
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
Volumes prélevés
76,37
82,01
107,90
92,82
111,79
106,26
111,84
105,20
113,3
102,0
Volumes évaporés
2,09
6,02
31,04
23,42
40,99
42,01
47,87
40,45
45,67
40,38
Tableau 2:  Débits moyens mensuels à Lussac-lès-Châteaux, en amont de Civaux (en m3/s)
 
jan.
fév.
mar
avr.
mai
juin
juil.
août
sept
oct.
nov.
déc.
= débit moyen annuel
2000
132
149
131
176
116
43,4
41,2
25,2
24
47,5
293
172
112
2001
177
120
238
190
182
45,4
96
34
42,1
52,6
42,6
55,2
106
2002
61,2
92,2
112
43,7
73,1
81,5
29,2
35
27,2
38
120
157
72,4
2003
187
174
90,3
35,3
71,1
32,4
17,3
17,8
24,9
27,7
51,1
83,8
76,20
2004
262
105
67,9
83,6
65
27,5
23,7
55,6
35,2
35,1
30,9
67,2
71,20
2005
88,4
87,3
53,6
104
50
24
24,5
21,8
22,2
21,5
21
47,5
46,90
2006
69,8
115
248
134
49,4
26
31,2
24,5
32,7
46,1
47
87
75,70
2007
127
190
223
60,9
 
 
 
 
 
 
 
 
 


     EDF obtiendrait-elle une permission d'exploiter aujourd'hui? Probablement pas.
     Les premières demandes d'autorisations pour Civaux étaient fondées sur un débit moyen annuel évalué à 74m3/s.  Quand EDF a opté pour des réacteurs plus puissants, le débit s'est comme par miracle transformé en 83m3/s pour permettre les autorisations de rejets supérieures. On voit bien que les débits moyens annuels depuis 2002, n'atteignent pas ce chiffre. Certes, des lâchures de barrages en amont permettent de soutenir le débit pour qu'EDF puisse fonctionner en période d'étiage (débit minimum prescrit: 10m3/s) ou effectue des rejets (interdits en dessous de 27m3/s), mais tout fonctionnement est pratiquement exclu en dessous de 14m3/s en amont de la centrale. 
     La pénurie d'eau ajoute à l'impact environnemental des problèmes graves de sûreté, les faibles débit entraînant:
     - risque de colmatage pour la prise d'eau et pour les pompes, et donc risque de perte d'alimentation en eau de refroidissement,
     - problèmes de pH, d'oxygène et de température des rejets,
     - nécessité de stockage prolongé des effluents liquides en attendant d'avoir plusieurs jours consécutifs de débit adéquat pour les rejeter car en dessous de 27 m3/s, ce n'est pas possible. Or en 2003, cela a duré plusieurs mois
     Il s'avère que la maintenance s'effectue pendant la période estivale où les rejets sont quasi impossibles. Est-ce pour cela que Civaux conserve des effluents dont elle n'a pu se débarrasser depuis 2000?
    Que se passerait-il  en cas d'incident grave avec rejets, si la capacité de stockage s'avérait insuffisante?
     Rejetterait-on quand même dans une rivière anémiée au risque de priver d'eau la ville de Châtellerault (alimentée en eau potable par la Vienne) et de contaminer les nappes phréatiques en communication avec ce cours d'eau?

* LES REJETS
     "une centrale nucléaire en fonctionnement normal est autorisée à rejeter quelques effluents radioactifs dans l'eau et dans l'atmosphère"

(de l'art de la litote atomique, in Dossier de demande d'autorisation de rejets radioactifs de Civaux, 1994)
     Rappel:
     - La matière est un assemblage d'atomes, constitués d'un noyau autour duquel gravitent des électrons (chargés négativement). Le noyau est composé de protons (chargés positivement) et de neutrons assurant la cohésion du noyau. L'atome est électriquement neutre.
     - Le rayonnement:
     Un élément radioactif - ou radioélément - a un noyau instable qui tend à redevenir stable en éjectant quelque chose. Cette désintégration s'accompagne d'énergie, c'est ce qu'on appelle le rayonnement.
     Il se caractérise par:
     - l'énergie avec laquelle il est émis et par sa nature qui est  fonction de ce qui est éjecté. Il peut s'agir:
     * de particules chargées:
     * protons, électrons donnant un rayonnement béta,
     * morceau de noyau à 2 protons et 2 neutrons, c'est-à-dire un noyau d'hélium = rayonnement alpha
     * de neutrons (n),
     * de rayonnements électromagnétiques: rayonnement gamma, et rayons X
     Le rayonnement est souvent composite.
     Si ses propriétés peuvent être exploitées, il ne faut pas oublier ses effets biologiques délétères.
     - La période
     C'est le laps de temps nécessaire pour qu'un radioélément donné, ait perdu la moitié des noyaux présents à un moment.
     Cette période (ou demi-vie) est caractéristique du radioélément.
     - Le Becquerel est une unité de radioactivité qui correspond à une désintégration par seconde.
     Comme elle est petite, elle est souvent préfixée:
     - 1 kilobecquerel (1 kBq)  = 103 Bq = 1.000 Bq 
     - 1 mégabecquerel (MBq) = 106 Bq = 1.000.000 Bq ou 1 million de Bq
     - 1 gigabecquerel (GBq)    = 109 Bq = 1.000.000.000 Bq ou 1 milliard de Bq
     - 1 terabecquerel (TBq)     = 1012 Bq = 1.000 GBq ou mille milliards de Bq!
suite:
* LES DECHETS RADIOACTIFS
     Avec eux commence une pollution chronique de l'environnement.
     D'où viennent-ils?
     * du circuit primaire: effluents non recyclés, fuites d'eau primaire, et purges car il faut modifier les caractéristiques chimiques du coeur pour réguler la réaction,
     * de la décontamination d'équipement, du  lavage des sols, des tenues d'intervention et des sanitaires en zone contrôlée: ce sont les "effluents de servitude",
     * de purges des générateurs de vapeur (GV) (l'eau du circuit secondaire pouvant être contaminée par le primaire -tritium notamment)
     * des eaux des piscines des bâtiments combustibles.
     Vous avez-dit "étanche"?
     La communication EDF insiste sur  les fameuse "arrières de sûreté" que sont les gaines du combustible, la cuve et l'enceinte du réacteur. Elles existent certes, et sont, en principe, étanches mais elles ne doivent pas masquer les importants mouvements d'effluents radioactifs imposés par le fonctionnement : joints, vannes, robinets, piquages de canalisations, sont autant d'occasions de fuites. 
     L'étanchéité des canalisations qui emmènent les effluents doit être vérifiée. Pas facile quand elles sont calfeutrées, ou souterraines d'où les risques de contamination possible des sols et de la nappe phréatique sous-jacente.
     Volumes:
     Deux exemples à titre indicatif, du volume de liquides radioactifs rejetés dans la rivière. Il se chiffre en dizaines de milliers de m3 chaque année.
2004
13.080 m3 pour les réservoirs T
81.342 m3 pour les réservoirs Ex
2006
21.121 m3 (T)
101.532 m3 (Ex)
(T: effluents radioactifs – Ex: effluents "éventuellement" radioactifs)
     Mais plus que le volume, c'est leur (radio)activité qui est nocive:
     - Qui sont-ils?
     Les effluents rejetés contiennent:
     - des produits de fission engendrés par la réaction nucléaire au sein du combustible (ex: césium 134-137, iode 131-129, argent 110, tellure
     - des produits d'activation provenant de l'action des neutrons sur l'eau et les substances chimiques qui sont ajoutées pour le contrôle de la réaction (ex: carbone 14 - venant de l'action des neutrons sur l'azote de l'eau primaire, tritium venant de réactions neutrons + bore ; neutrons + lithium-, etc.)
     - des produits de corrosion des métaux présents dans le circuit primaire. Ils sont rendus radioactifs par le bombardement des neutrons (ex: cobalt 58 qui vient de l'activation du nickel stable par les neutrons, cobalt 60, nickel 63, manganèse 54 qui vient du bombardement neutronique sur le fer, antimoine 124)
     - Où vont-ils?
     Les effluents liquides finissent toujours dans le milieu aquatique donc pour Civaux, dans la rivière Vienne. Certains éléments se lient aux matières en suspension et se retrouvent dans la vase. Les éléments lourds ont tendance à se déposer à proximité de la zone de rejets. Barbotage et pataugeage sont à proscrire! Imaginons la Loire après Chinon, avec trois centrales en amont et les rejets de Civaux qui s'y ajoutent.
     - Les autorisations
     Les procédures de rejet des effluents radioactifs liquides sont régies par l'arrêté du 8 septembre 1997
     Il prévoit les capacités minimales de stockage des effluents radioactifs qui sont recueillis en fonction de leur nature, dans des réservoirs spécifiques. 
     - En effet, les rejets primaires doivent être stockés après filtrage censé retenir les particules radioactives solides, puis ils sont "traités" par brassage et évaporation, pour récupération des produits volatils, et décroissance.
     - Les eaux d'exhaure de la salle des machines (purges et fuites du circuit secondaire hors GV) sont collectées et doivent aussi faire l'objet d'un contrôle avant rejet.
     L'arrêté fixe les conditions de débit de la rivière, les flux des rejets et les concentrations à ne pas dépasser en produits chimiques et radioactifs.
     Les rejets ne peuvent être effectués dans la Vienne que lorsque son débit est compris entre 27 et 350m3/s, (des dérogations peuvent être accordées entre 20 et 27m3/s et entre 350 et 400m3/s.)
p.26


     Après mélange à l'eau de la Vienne, l'activité volumique ajoutée dans l'environnement ne doit en aucun cas dépasser:
     - en valeur moyenne quotidienne:
800 mBq/l* pour les radioéléments autres que le tritium, le potassium 40 (40K) et le radium (Ra)
80 Bq/l pour le tritium (3H)
(* mBq/l = millibecquerels par litre)
     - et en valeur moyenne annuelle:
222 GBq pour les radioéléments autres que le tritium, le potassium 40 (40K) et le radium (Ra)
80 TBq pour le tritium (3H)
     Pour comparaison:
Tableau 3
Activité annuelle des rejets liquides de Civaux (chiffres EDF)
 
Hors tritium (GBq)
Tritium (GBq)
1999
0,39
3.600
2000
1,3
26.000
2001
1,7
16.000
2002
1,5
17.800
2003
0,49
24.200
2004
0,75
32.000
1er trim. 2005
0,15
30.400 pour 4 mois!
2006
0,27
53.900

     Les rejets hors tritium représentent une fraction de la limite autorisée. Alors pourquoi des autorisations aussi élevées?  Pour gommer l'impact d'accident?
     Les rejets en tritium vont bientôt atteindre la limite des 80 TBq  autorisés!
     Le tritium pour lequel l'autorisation est énorme, a dépassé en 2005 la moitié de la limite autorisée!
     Le cas du tritium:
     * Cet isotope de l'hydrogène (3H) est produit au sein du réacteur par –entre autres- l'action des neutrons sur les produits utilisés pour contrôler la réaction (bore, lithine). Il est produit en grande quantité, proportionnellement à la production et rien ne l'arrête, d'où la hauteur des autorisations de rejet !
     * La plupart des experts en faibles doses sont aujourd'hui d'accord pour dire que sa toxicité est sous-estimée. 
     * Le choix d'EDF d'exploiter la plupart de ses réacteurs en suivi de charge "chahute" non seulement le matériel (Rapport Bataille-Birraux sur la durée de vie des centrales), mais il est aussi responsable d'une production accrue de tritium qui doit être purgé pour ne pas contrarier la réaction nucléaire.
     L e palier N4 et Civaux en particulier, semble battre des records en la matière. D'après le CNPE, le volume de tritium rejeté devrait encore augmenter à l'avenir du fait de quantité stockées depuis 2000.
     Au fait, pourquoi? Que s'est-il passé en 2000?
     * D'autre part,  Civaux a opté pour des cycles plus longs avec un enrichissement supérieur de son combustible. Ceci se soldera par une production accrue de tritium (+30%). Le problème des rejets n'a pas fini de se poser à Civaux. Il a des conséquences directes sur la qualité de l'eau consommée.
     * L'arrêté de 1997 fixe des limites à ne pas dépasser mais il précise qu'en dessous de celles-ci, l'exploitant doit prendre "Toutes les dispositions pour maintenir l'activité des effluents radioactifs liquides rejetés, ainsi que la quantité de substances chimiques associées, aussi basses que possible" (art.2). Une recommandation qu'EDF dans son souci de productivité ignore royalement.

     Lors de l'enquête d'utilité publique (1982), EDF affirmait: 
      "Le rejet de tritium dans la Vienne ne sera pas un goulot d'étranglement à l'exploitation de la centrale".
     Le rapport sur l'environnement en 2004 est moins optimiste:
     "la concentration tritium est de plus en plus le facteur limitant le débit de rejet des bâches."
suite:
    Quel impact sur  le milieu?
     * La Vienne reçoit, pendant les périodes de rejets, une activité croissante en tritium (et pas seulement cela). Or son eau est consommée par certaines communautés. La limite sanitaire de 100Bq de tritium par litre d'eau de boisson n'est, en principe, pas dépassée par EDF qui est censée rester en dessous de 80 Bq/l. Est-ce que cela veut dire pour autant que boire une eau qui en contient quelques dizaines de Bq/l est sans danger? Quid des nourrissons, des femmes enceintes?
Tableau 4
Activité annuelle ajoutée en tritium sur la période des rejets (chiffres EDF)
2001
2001
2003
2004
2005
2006
15,5Bq/l
26Bq/l
39Bq/l
46Bq/l
48,5Bq/l
48Bq/l

     * D'autre part EDF est tenue de veiller à l'étalonnage de ses appareils de mesure et aux conditions de débit – ce qui n'a pas toujours été le cas à Civaux, à Chooz ou ailleurs. C'est pourquoi Stop-Civaux souhaite que des contrôles indépendants soient faits sur l'eau de la rivière et du robinet en période de rejets.
     * Enfin, des captages existent dans des nappes phréatiques qui sont à certaines périodes en communication avec la Vienne. Une contamination de ces nappes par le tritium est possible. Des exemples existent pour la Loire. Une goutte de tritium pur suffit à contaminer des milliards de litres d'eau. Aucune technologie n'est à ce jour capable de décontaminer une nappe phréatique.
     A la centrale de Cruas-Meysse (Ardèche), c'est le réseau sanitaire alimentant le site en eau de boisson qui est marqué par du tritium.
     L'activité fluctue à hauteur de 50 à 150Bq/l, ce qui témoigne d'une contamination des nappes sous-jacentes dont EDF dit ignorer la date ou la cause. S'il y a des infiltrations à Cruas, pourquoi n'y en aurait-il pas ailleurs? 
     Et il n'y a pas que le tritium.
     A Civaux, les analyses montrent déjà depuis 1998 un marquage du milieu aquatique par du cobalt 58 et 60, de l'argent 110m, et du manganèse 54.
     * Quelques exemples de radioéléments relâchés par la centrale dans l'environnement  avec leur type de rayonnement et leur demi-vie:
Isotopes
Rayonnement
Période
Tritium (3H)
Bêta
12,346 ans
Carbone 14
Bêta
5.730 ans
Césium 137
Bêta/Gamma
30,174 ans
Iode 131
Bêta/Gamma
8,04 jours
Argent 110m
Bêta/Gamma
252 jours
Cobalt 60
Bêta/Gamma
5,27 ans
Manganèse 54
Bêta/Gamma
0,855 ans

     * Activité annuelle des rejets en en Vienne (en GBq) pour 2004 et 2006:

 
2004
2006
Tritium (3H) 32.000 53.900
Césium 137
0,0184
0,0155
Iode 131
0,0215
0,0308
Tellure 123
0,00857
0,0113
Cobalt 60
0,187
0,0363
Manganèse 54
0,0583
0,0159
Césium 134
0,0130
0,0127
Césium 137?
0,0184
0,0155
Argent 110m
0,303
0,0646
p.27


* LES REJETS CHIMIQUES
     Des produits chimiques sont utilisés pour la déminéralisation de l'eau, le conditionnement des circuits (pH, produits anti-corrosion). Leurs rejets importants font l'objet d'une réglementation. Voici par exemple la consommation 2004 d'une partie de ces produits à Civaux:
Acide chlorhydrique 31,5 tonnes
Soude caustique 34,3 tonnes
Chlorure ferrique 33,2 tonnes
Eau de javel 3,2 tonnes
Acide borique 13 tonnes
Morpholine 945 kg
Hydrazine 578 kg
Hydroxyde de lithium 26 kg

     Certains produits sont utilisés dans le circuit primaire et sont associés aux effluents radioactifs. Il s'agit par exemple de l'acide borique qui absorbe les neutrons, de l'hydrazine qui sert à éliminer l'oxygène, de lithine pour limiter la corrosion. 

     * Quelques produits chimiques liés aux effluents radioactifs et masses rejetées par Civaux en 2004 (en kg)

2002 2004
Acide borique 12.100 10.771
Lithine 0,54 0,56
Morpholine 443 258
Hydrazine 38,2 20
Ion ammonium 537 636
Azote global 899 630
Phosphore 33 29

     * Ex. d'autres produits chimiques non liés aux effluents radioactifs, rejetés par Civaux en 2004 (en kg):
2002 2004
Chlorures 53.922 39.822
Sodium 36.264 27.753
Sulfates 3.693 2.997

     "L'écosystème terrestre est susceptible d'être influencé par les effluents radioactifs gazeux rejetés dans l'atmosphère."
     "Toute personne du public vivant en permanence aux abords de la centrale peut être soumise aux effets des rejets radioactifs gazeux par exposition externe provenant soit du panache, soit des dépôts au sol, et par exposition interne provenant soit de l'air inhalé, soit de l'ingestion de produits alimentaires." 
     Ce n'est pas nous qui le disons, mais EDF dans les études d'impact de l'enquête publique de 1994, préalable à la construction de la centrale. 

* LES EFFLUENTS RADIOACTIFS
     - D'où viennent-ils?
     ** du dégazage des effluents du circuit primaire: ils sont constitués de gaz rares radioactifs (xénon 133-135, argon 41, krypton 85), d'iode 131 et 133 et de poussières contaminées (aérosols de césium 134 et 137). On y retrouve aussi: tritium, cobalt 58 et 60, carbone 14, manganèse 54.
     Ces effluents sont stockés pendant un mois au minimum dans des réservoirs sous pression, pour décroissance des produits de fission à vie courte (iodes et xénons). 
     ** de la ventilation des locaux: bâtiments des combustibles, des auxiliaires nucléaires, de traitement des effluents et bâtiment réacteur pendant les arrêts de tranche. 
     ** Les fuites gazeuses éventuelles des circuits, dans les bâtiments mis en dépression, sont évacuées par des ventilateurs d'extraction d'air après filtration.
     La réglementation:
     Ces conditions de rejet des effluents gazeux ainsi que leur activité limite sont prescrites par un arrêté du 8-09-1997.

suite:
     Activité volumique moyenne maximum hebdomadaire ajoutée dans l'environnement, aux points de mesure, après dispersion:
     500 becquerels/m3 pour les gaz
     10 millibecquerels/m3 pour les halogènes et aérosols

     Activité annuelle maximum rejetée par Civaux:
     330 térabecquerels pour les gaz
     11 gigabecquerels pour les halogènes et aérosols

     L'arrêté prescrit un débit minimal de 43m3/s et une vitesse d'éjection des gaz de 6m/s au moins pour assurer le confinement des locaux à risque iode.
     En principe:
     - Les rejets s'effectuent dans l'atmosphère par une cheminée de 75m de hauteur propre à chaque tranche. 
     - Tous les effluents doivent être filtrés avant rejet. Ceux du bâtiment réacteur, quand il est décompressé ou quand l'air est renouvelé lors des arrêts de tranches, doivent être contrôlés. 
     - Des filtres spéciaux doivent être utilisés pour piéger les halogènes (iode).
     - Chaque cheminée est munie d'appareils de contrôle redondants.
     - La dispersion des gaz doit être assurée en tenant compte de la météo pour assurer la dilution la meilleure possible car après rejet, ces effluents ne se mélangent pas instantanément à l'air ambiant. Ils sont influencés par des facteurs tels que: la vitesse du vent, la hauteur du point de rejet, la stabilité de l'atmosphère.
     - Des balises de mesure sont implantées en périphérie du site, à 1 km et à 5 km. Elles sont aussi équipées d'une alarme signalant l'interruption de leur fonctionnement.
     Voilà les grands principes qui devraient être respectés. Dans la réalité, c'est moins simple.

Tableau 5
Rejets gazeux de la centrale de Civaux (en GBq):

activité annuelle
pour
Gaz rares
+ tritium gazeux
Limite: 330.000 GBq
Halogènes (iodes) et aérosols
Limit: 11 Gbq
2000
<33.000??
<0,06
2001
9600
<0,073
2002
1200
0,027
2003
1490
0,059
2004
2430
0,066
2005
1520
0,036
2006
2160
0,552
     ** Nous n'avons pas d'explication sur les chiffres très élevés de 2000. Que s'est-il passé cette année là que nous ignorons?
     ** L'augmentation de 2003 à 2004 s'expliquerait par les rejets nécessités par les arrêts de tranche: en 2004, 70% des rejets iodés se sont faits sur juillet et août! 
     ** Les chiffres de 2006 s'expliquent par la présence de gaines de combustible fissurées.
     Gaines défectueuses.
     Il arrive que la gaine d'un élément combustible ne soit pas étanche. Cela s'est produit plusieurs fois à Civaux, comme ailleurs, nul doute. Défaut de fabrication, défaut de contrôle qualité ou problème lié à l'exploitation, cela se traduit par une activité excessive révélatrice en Xénon 133 dont la concentration habituelle augmente. L'inétanchéité des gaines (soi-disant) "première barrière de sûreté" se solde par une augmentation des effluents gazeux radioactifs dont des iodes, auxquels le public et le milieu sont exposés! 
     Question: Quelle activité supplémentaire cela représente-t-il en produits de fission dans le circuit primaire (qui pourrait même se charger de quelques émetteurs alpha totalement proscrits des rejets)?
     Des autorisations de rejet élevées.
     L'activité déclarée paraît minime au vu des autorisations accordées. 
     Celles-ci ne sont-elles pas prévues pour gommer des rejets accidentels?
     En tout cas elles permettent de minimiser les rejets et de dire qu'un très faible pourcentage de l'autorisation (énorme) a été rejeté.
p.28


     Quel est le danger des rejets gazeux?
     En plus de l'exposition externe qu'ils peuvent occasionner, ces éléments peuvent être inhalés ou peuvent se déposer au sol et être ingérés, directement ou indirectement (lait, légumes, herbe...)
     Certains lieux sont plus exposés que d'autres en fonction des vents dominants ou des conditions météos ponctuelles.
     Les fuites répétées de mars 2007, (après celles de l'année précédente) sont-elles la cause de l'augmentation importante de radioactivité remarquée sur un échantillon végétal  prélevé le même mois (2700 Bq/kg)? Et quels sont les radioéléments en cause?
     D'après EDF, "toute l'activité émise sous forme de gaz rares diffuse dans l'atmosphère et reste sous forme gazeuse. Ces gaz étant chimiquement inertes, ils n'interviennent donc pas dans les chaînes alimentaires". Leur seule nuisance étant une exposition externe très faible.
     Non, ce n'est pas le cas des iodes et des aérosols. Pour les iodes 131 et 133, le césium 134 et 137, le cobalt 58 et 60, le dépôt est accentué par des conditions météos défavorables comme la pluie. Ils peuvent se retrouver dans la chaîne alimentaire. Le mois de mars 2007 a été pluvieux.
     Quant au tritium, il est présent en permanence, sous forme de vapeur d'eau et peut être précipité au sol par le vent et la pluie. Gare aux salades.
     Jusque là, les mesures effectuées par EDF et l'OPRI puis l'IRSN n'avaient pas décelé de marquage anormal de l'environnement terrestre ou dans le lait. (D'après eux, les traces de césium omniprésentes proviendraient des retombées de Tchernobyl ou des essais nucléaires; l'iode présent en amont et en aval de la centrale proviendrait des services hospitaliers de Limoges).
     Deux remarques: 
     - les contrôles sont peu nombreux et ponctuels et les analyses si elles ne sont pas réalisées rapidement peuvent ne plus porter de traces d'éléments très irradiants à vie courte comme les iodes 131 et 133 (périodes 8 jours et 21h), et les gaz rares, argon 41, xénon 135, etc., dont la demi-vie est de quelques heures
     - un changement dans la comptabilisation de l'activité des végétaux occulte la part de radioactivité artificielle apportée par la centrale.
     Radioactivité ambiante.
     Elle fait - en principe-  l'objet d'un contrôle grâce à des balises situées dans un rayon de 5 km autour du site.
     * L'existence d'un problème de retransmission sur les balises situées à 5km censées renvoyer en permanence la mesure de la radioactivité ambiante en salle de commande, a été évoquée. Il ne semble pas avoir été résolu, depuis des années.
     * Si ces balises ne retransmettent que par intermittence, des rejets et pics d'activité peuvent ainsi passer inaperçus (surtout du public) car non enregistrés,
     * Ce sont, comme par hasard, les balises à 5 km qui donnent les moyennes annuelles les plus élevées de radioactivité ambiante!
     Une explication a été donnée par l'exploitant: les balises enregistrent la radioactivité des murs sur lesquels elles sont posées!!
     * Par deux fois, l'unique balise témoin de l'IRSN a eu un malaise alors que des rejets importants ou accidentels avaient lieu à Civaux  (janvier et mars 2007).
     Tous ces éléments nous donnent l'intime conviction que les rejets sont sous-estimés.
     Les limites des mesures et contrôles.
     Qui sait avec exactitude ce qui sort de la centrale?
     - On ne peut que regretter que ce soit l'exploitant qui s'autocontrôle la plupart du temps.
     - D'abord la comptabilisation des effluents rejetés résulte souvent de valeurs calculées à partir de prélèvements ou estimées d'après le fonctionnement (carbone 14, par ex.) et non pas mesurées.
     De plus, les modes de comptabilisation changent.
     - Les pièges à iode ne sont mis en place sur les circuits de ventilation que si l'exploitant estime que l'activité en iode du rejet à effectuer est significative. Combien d'effluents iodés ne sont pas comptabilisés?
     Nous avons été accusés d'être soupçonneux. Cela prête à sourire.
     Bien des procédés et des dysfonctionnements sont révoltants car s'ils peuvent être fortuits, leur répétition n'incite pas à la confiance.
     Les exemples sont nombreux de déréglages et défaillances d'appareils de mesure pour les effluents liquides comme pour les gazeux.
     Quelques exemples
     - En 2002, un appareil mal étalonné à Civaux sous-estimait  l'activité du tritium rejeté, indiquant 44 Bq/l au lieu de 130 (la limite de rejet est à 80 Bq/l). La même chose est arrivée à Chooz. Or il est bon de rappeler que si ces incidents sont connus c'est parce qu'une inspection avait lieu au moment des rejets. Sinon  qu'aurait-on décelé?
     - Les centrales sont censées envoyer aux inspecteurs de l'Autorité de Sûreté les dates prévues de rejet: les omissions sont fréquentes. 
     - Même défaut d'étalonnage l'an passé, sur un appareil de mesure qui surestimait le débit de Vienne. Des rejets ont eu lieu pendant plusieurs jours alors qu'ils étaient proscrits.
     - Ailleurs c'est l'utilisation de capteurs sous-dimensionnés incapables d'enregistrer au-delà d'un certain débit de rejet.
     - Des filtres à iode sont indisponibles depuis plusieurs années (Blayais), des appareils de contrôle de radioactivité dans l'eau ou dans l'air s'avèrent n'avoir jamais été opérationnels, 
etc.
suite:
     Quand des réservoirs sont parfois vidés simultanément - ce qui est interdit - qu'est-ce qui est comptabilisé? La radioactivité d'un réservoir ou des deux?
     Les mesures sont sans doute difficiles à faire précisément. Mais il est tout aussi difficile de croire que la radioactivité émise annoncée n'est pas largement sous-estimée.
     Malgré ses rejets chroniques et massifs dans l'environnement, EDF nie tout effet sur la santé, estimant que: "la radioactivité apportée par la centrale à la population avoisinante est d'environ un centième de la dose due à la radioactivité naturelle."
     Une centrale lave plus blanc!!
     Son site internet affirme: "En dessous de 100mSv aucun effet des rayonnements ionisants sur la santé ne peut être démontré."
     Mais l'absence de preuve n'est pas la preuve de l'absence. Et les effets de l'exposition chronique aux faibles doses font l'objet de révisions constantes. Des études récentes montrent qu'un risque existe, même à faible dose.
     Une exposition de longue durée sous le vent des centrales laisse des traces. C'est ce dont témoigne aux Etats-Unis, l'analyse que des experts ont faite sur les dents de lait des enfants (Fairy Tooth Project).
     Les maladies comme les cancers mettent du temps à se révéler. Peut-être un jour saura-t-on les imputer à une cause précise. Quant aux maladies thyroïdiennes et à leur croissance chez les enfants, proviennent-elles toutes de Tchernobyl? Ceux qui veulent minimiser l'impact de Tchernobyl prétendent que l'augmentation des pathologies thyroïdiennes a commencé dans ce pays une dizaine d'années avant l'accident.

* LES DECHETS RADIOACTIFS
     Avec la mise en service du parc nucléaire en France?
     Autre problème majeur: le fameux "cycle du combustible" n'est pas un cycle. Le recyclage ne fait pas disparaître les déchets. Au contraire, il en accroît la masse. Et les déchets se rencontrent à toutes les étapes, de la fabrication à l'abandon du combustible.
     On ne sait pas en neutraliser la radioactivité. Les limites de la science à cet égard ont fait surnommer les déchets, le "talon d'Achille" du nucléaire. 
     Un cadeau empoisonné pour les générations futures.
     Une grande quantité de déchets solides est produite chaque année dans les centrales. 
     * Au tout début du cycle, il faut extraire l'uranium. La France n'a plus de mines en activité, mais sur son territoire, il reste 170 anciens sites où 52 millions de tonnes de résidus miniers sont stockées. L'exploitation minière continue avec les mêmes effets à l'étranger (Niger, Canada, Australie..)
     * La fabrication du combustible engendre de nouveaux déchets dits "de procédé" et consomme l'énergie de plusieurs centrales nucléaires qui produisent elles-mêmes du combustible irradié.
     * Chaque centrale en plus des effluents gazeux et liquides génère lors de son fonctionnement:
     - des déchets technologiques qui sont placés dans des fûts métalliques et collectés par l'ANDRA pour stockage à Soulaines. Ce sont des gants, des chiffons, des vinyles, etc., ayant servi durant les interventions et émettant moins de 2milliSieverts par heure (mSv/h),
     - des déchets dits "de procédé" comme les filtres à air, à iode, à eau qui sont plus irradiants et sont stockés dans des coques béton.
     Quantité de déchets solides produits par Civaux:

Fûts métalliques Coques de béton
2004 423 90
2003 383 36

     - enfin, le combustible usé.
     Il peut difficilement être ignoré étant donné les problèmes de sûreté et de sécurité non résolus que posent tant sa manutention, que son transport, et ce qu'on en fait après: recyclage ou stockage en l'état. 
 
     Une publicité de COGEMA exhibait jadis une pastille d'uranium enrichi pour montrer qu'il fallait peu de combustible pour alimenter une famille en énergie. Mais chaque année un réacteur produit des tonnes de combustible usé.

     Civaux, par exemple, renouvelle à chaque arrêt de tranche (un par an pour l'instant) un quart de son combustible, soit plus de 30 tonnes de matériaux hautement radioactifs, qu'il faut stocker en piscine.
     Chaque réacteur a déjà fait cinq cycles et a déjà largement contribué à irradier le personnel, l'environnement et à encombrer l'impasse monstrueuse où se trouvent les déchets radioactifs.
     Nous n'avons pas mentionné, parmi les rejets d'une centrale:
     - les rejets thermiques: les effluents liquides apportent des calories nocives aux eaux qui les reçoivent.
     - les rejets biologiques c'est-à-dire la prolifération de bactéries (comme les légionelles) et d'amibes tueuses (comme les Naegleria fowleri) qui se sont trouvées dans les eaux chaudes de la centrale une niche écologique de premier choix.
     Les légionelles colonisent le panache à hauteur de plusieurs millions de bactéries par litre. Elles peuvent être la cause de pathologies pulmonaires ou autres, moins typiques. Les amibes sont soumises à une irradiation UV qui doit maintenir leur nombre en dessous de 90 individus par litre d'eau de la Vienne. Elles sont dangereuses par inhalation: la pince-à-linge sur le nez a été conseillée avec un certain humour qui ignore sans doute que tout le monde n'est pas prévenu du danger.
     Si ces détails ne vous ont pas ennuyés, nous espérons qu'ils vous auront donné l'envie d'en savoir davantage et qu'ils auront dissipé cette illusion confortable et tenace, que d'une centrale il ne sort que de l'eau!

p.29

Paris, le 20 juillet 2009
Note d'information
L'ASN prend deux décisions relatives aux rejets d'effluents de la centrale nucléaire de Civaux


     L'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a adopté le 2 juin 2009 deux décisions relatives aux prélèvements d'eau et aux rejets d'effluents de la centrale nucléaire de Civaux exploitée par EDF sur le territoire de la commune de Civaux (Vienne).
     La demande de renouvellement des autorisations de prélèvements d'eau et de rejets de la centrale nucléaire de Civaux a été déposée par l'exploitant le 14 mai 2007.
     Cette demande a fait l'objet d'une instruction technique et administrative par l'ASN, conformément aux dispositions du décret n° 95-540 du 4 mai 1995 relatif aux rejets d'effluents liquides et gazeux et aux prélèvements d'eau des installations nucléaires de base. L'ASN a complété les consultations prévues par la réglementation par celle de la Commission locale d'information (CLI) de Civaux qui n'était pas requise.
     Au vu du dossier de demande déposé par EDF, des résultats de l'enquête publique et des avis des préfets d'Indre-et-Loire et de la Vienne, des Comités départementaux de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques (CODERST) de ces 2 départements et de la CLI de Civaux, l'ASN a adopté le 2 juin 2009 les deux décisions suivantes:

     * la décision n° 2009-DC-0138 fixe les prescriptions relatives aux modalités de prélèvement et consommation d'eau et de rejets dans l'environnement des effluents liquides et gazeux ;
     * la décision n° 2009-DC-0139 fixe les limites de rejets dans l'environnement des effluents liquides et gazeux. Cette décision a été homologuée par les ministres chargés de la sûreté nucléaire par l'arrêté du 23 juin 2009 publié au Journal officiel le 2 juillet 2009.
     Ce renouvellement des autorisations a été l'occasion d'abaisser de façon significative les limites de tous les rejets radioactifs gazeux et liquides à l'exception du tritium liquide dont l'augmentation est induite par la gestion du combustible à haut taux de combustion (du type ALCADE) qui va être mise en œuvre. Le tritium  constitue une faible fraction de l'impact de dose total.
     La préoccupation exprimée fin 2008 par l'ANCLI sur les rejets de tritium en général n'est pas négligée par l'ASN qui a mis en place deux groupes de travail pluralistes sur ce sujet.
     Ces décisions sont consultables au Bulletin officiel, sur le site Internet www.asn.fr.
     L'étude d'impact présentée par EDF est consultable à la préfecture de la Vienne, à la division de Bordeaux de l'ASN et au Centre d'information et de documentation du public de l'ASN.
p.30

NOTE: INCIDENT COMBUSTIBLE DE GRAVELINES (9 août 2009)
Monique Sené

     3 incidents:
     - 1998, Nogent sur Seine (1.300 MWé): 1 assemblage 1 UOX
     - 2008, Tricastin 2 (900MWé): 2 assemblages 1MOX et 1 UOX
     - 2009, Gravelines 1 (900 MWé): 1 assemblage MOX
     1 - Suite à l'incident de Nogent
     * Ajout d'une prescription à la règle de conduite "opération de renouvellement du combustible"
     Cette prescription demande de: "vérifier que le jeu entre deux assemblages ne dépasse pas 10mm." Et: "stipule l'utilisation d'un moyen vidéo adapté pour vérifier une valeur maximale de 10 mm du jeu inter-assemblages (Disposition Technique ou DT 81)"
     * Ajout d'une inspection télévisuelle pour suivre la sortie des internes supérieurs
     2 - Suite de Tricastin
     Rappelons que le décalage était dû à une bille de roulement venant du pont polaire et qui était tombé dans l'EIS inférieur.
     * Lors de l'inspection de suivi (22 sept 2008) les inspecteurs ont constaté:
     - pour l'un des assemblages concernés par l'événement, le critère de jeu n'avait pas été respecté à l'issue du rechargement de 2007
     - la vérification de ce critère s'effectue par des moyens peu appropriés qui permettent une estimation du jeu entre assemblages, mais ne garantit pas une mesure précise.
     D'où la demande "mettre en oeuvre des mesures correctives afin que le respect du critère concernant le jeu inter-assemblages soit désormais vérifié de manière précise avec les outils appropriés."
     - Les EIS ne font l'objet de contrôles que tous les 10 ans, d'où leur demande "d'une analyse sur la nécessité d'adapter la fréquence de contrôle des EIS, notamment en vue de détecter d'éventuelles déformations des pions de centrage"
     3 - Gravelines
     * Comme à Tricastin les inspecteurs ont demandé de considérer que "l'opération de levée des internes constitue une phase de manipulation du combustible et de lui appliquer les dispositions organisationnelles qui découlent de ce statut." 
     En effet à Gravelines, lors de leur inspection les inspecteurs ont constaté que cette nouvelle instruction de conduite n'était toujours pas appliquée puisqu'un essai périodique (système de lutte contre l'incendie) était en cours. Or les analyses de risque n'ont pu être fournies.
     Par ailleurs il y a lieu de revoir l'Instruction de Conduite Temporaire ITC 91/031
     Car les équipes de conduite n'avaient pas une bonne information du fait "de ne réaliser aucune maneuvre d'exploitation autre que les manoeuvres d'urgence."
     Il semble évident que tous les enseignements n'ont pas été tirés de l'incident "Tricastin".
     L'origine probable de l'incident est toujours la même qu'à Nogent et Tricastin: le "contrôle des jeux inter assemblages au cours du rechargement" n'est pas effectué correctement.

Extrait du rapport de l'inspection du 10 août (INS-2009-EDFGRA-033)

     "A.3 – Analyse des causes probables de l'incident
     Une origine probable de l'accrochage de l'assemblage aux EIS est un non-respect des jeux inter-assemblages. Ces jeux peuvent être modifiés par la présence de corps migrants sur la plaque inférieure de cœur. Depuis l'événement survenu sur le CNPE de Nogent en 1998 où un assemblage était également resté accroché aux EIS, une prescription particulière relative au contrôle des jeux inter-assemblages au cours du rechargement, a été ajoutée dans le référentiel d'exploitation: dans un premier temps, via la prescription 1 de la DT 81 faisant suite à l'événement survenu à Nogent, puis dans un second temps, via la prescription 3.11 intégrée au référentiel technique de la manutention combustible (RPC "opération de renouvellement du combustible" du 12 juillet 2005). Cette prescription, telle que rédigée dans la DT 81, stipule l'utilisation d'un moyen vidéo adapté pour vérifier une valeur maximale de 10 mm du jeu inter-assemblages. Cette exigence est également reprise dans la DT 291 faisant suite à l'événement survenu à Tricastin le 8 septembre 2008. Lors de l'inspection du 10 août, vous avez indiqué que les performances de l'inspection télévisuelle (ITV) réalisée en fin de rechargement étaient probablement inférieures à celles requises par la DT 291. S'agissant du contrôle du critère de jeu inter-assemblages au cours du rechargement, la DT 291 n'apportait pas d'exigence complémentaire par rapport à celle figurant dans la DT 81 ou bien la prescription 3.11 de la RPC 'opération de renouvellement du combustible'.
suite:
     Demande 8
     Je vous demande de vérifier que les performances de l'ITV réalisée à la fin du dernier rechargement de la tranche 1 sont conformes aux exigences applicables et de statuer sur sa capacité à mesurer la présence de jeux supérieurs à 10 mm.
     Les inspecteurs vous ont interrogé sur les résultats de la relecture de l'ITV du dernier rechargement du réacteur n°1. Au moment de l'inspection, votre analyse n'avait détecté aucune anomalie lors de cette relecture.
     De la même manière, le rapport de rechargement consulté par les inspecteurs n'identifie aucune anomalie significative.
     Demande 9
     Je vous demande de réaliser les études et expertises nécessaires à la découverte de l'origine de l'accrochage de l'assemblage aux EIS et de me tenir régulièrement informé de leur avancement."
     * Où en est l'étude de la maquette?
     A Tricastin, il avait fallu 5 semaines pour étudier un outil et sécuriser les assemblages.
     Remarquons qu'à Gravelines, il y a encore des remarques sur le sujet:
     "Je vous demande de me transmettre dans les meilleurs délais:
     - le cahier des charges notifié à vos prestataires pour encadrer la définition de la solution technique;
     - le dossier technique complet de la solution retenue pour la mise en sécurité et l'extraction de l'assemblage.
     Actuellement, les photos issues de la surveillance télévisuelle de l'assemblage accroché ne permettent pas de voir clairement la tête de l'assemblage et la surface inférieure des EIS. Le mécanisme d'accrochage ne peut donc pas faire l'objet d'hypothèse. En conséquence, il n'est pas possible de donner un niveau de confiance à la tenue de l'assemblage à moyen terme ou un ordre de grandeur de la force nécessaire pour son extraction. Le développement de l'outillage nécessitera probablement d'avoir recours à de meilleurs clichés de la zone.
     Demande 13
     Je vous demande de me transmettre les clichés de la zone d'accrochage de l'assemblage une fois qu'un dispositif de prise de vue plus performant sera disponible."
     QUESTIONS
     a - comment ont été transcrites "les nouvelles prescriptions de conduite" pour respecter le fait qu'aucune manoeuvre d'exploitation ne doit être réalisée lors de l'incident?
     b - quels sont les moyens de vérification du jeu inter-assemblages? quels outils ont été développés, comment ont-ils été testés? 
     c - quelles vérifications ont été menées sur l'état des "Elements Internes Supérieurs" et en particulier pour détecter d'éventuelles déformations des pions de centrage". Est-ce que la fréquence de vérification des internes va être modifiée: 10 ans n'est peut-être plus correct si les internes se détériorent plus rapidement que prévu?
     d - comment exercer un contrôle si la surveillance télévisuelle ne permet pas de voir clairement la tête de l'assemblage?
     e -Où en est le déroulement de l'"incident": la sécurisation en gestation ne permet pas de "donner un niveau de confiance à la tenue de l'assemblage à moyen terme."
Représentation de l'outil de sécurisation
installé sur la cuve du réacteur
p.31

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