La G@zette Nucléaire sur le Net! 
N°94/95
M.O.X. - DEMANTELEMENT

DOSSIER MOX
Voir notre dossier MOX


1. Dossier CSSIN du 29.01.1989
Extraits pages 1 à 18
RECYCLAGE DU PLUTONIUM
DANS LES REACTEURS A EAU SOUS PRESSION 
Dossier disponible sur demande au GSIEN 

1. Introduction
     Le ralentissement du programme des surgénérateurs et le bon fonctionnement de l'usine de retraitement de La Hague donnent à Electricité de France, de par la disponibilité de quantités importantes de plutonium, la possibilité de «brûler», à l'intérieur du cœur de certaines centrales nucléaires REP, du combustible mixte à base d'un mélange d'oxyde d'uranium et d'oxyde de plutonium (combustible MOX) et de réduire ainsi ses besoins en uranium enrichi. Cette possibilité a effectivement été prévue, dès la conception, pour 16 tranches de 900 MWe et est explicitement autorisée dans leurs décrets d'autorisation de création.
     La faisabilité et les conséquences de l'utilisation de ce nouveau type de combustible doivent être analysées, à l'égard de la sûreté, sur l'ensemble du cycle du combustible, c'est-à-dire depuis sa fabrication jusqu'à son retraitement et au conditionnement des déchets en passant par son utilisation en réacteur. A cet égard, Electricité de France a présenté aux autorités de sûreté, en 1986, un dossier de faisabilité dont l'instruction a débouché sur l'autorisation d'effectuer un premier chargement en combustible MOX dans le réacteur Saint Laurent B1.
     Le programme prévu par Electricité de France porte sur la possibilité d'utiliser ce combustible dans 12 des 16 tranches de 900 MWe autorisées dans la proportion de 30% des assemblages présents dans le cœur. Il a débuté par le chargement de 16 assemblages MOX dans le réacteur de Saint Laurent B1 en automne 1987 et se poursuit par une augmentation progressive du nombre de réacteurs rechargés partiellement avec du combustible MOX pour atteindre le rythme de 12 rechargements de cœur par an vers les années 1993/1994 correspondant à la fabrication de 192 assemblages par an contenant 90 tonnes de métal lourd (U + Pu) dont 4,8 tonnes de plutonium.  A titre de comparaison, l'usine de retraitement UP2-400 de La Hague produit à son débit nominal 3,6 tonnes de plutonium par an, valeur qui sera doublée lors de la mise en service de l'usine UP2-800 vers les années 1992/1993.

suite:
     Chaque chargement fait actuellement l'objet d'un examen particulier, avant que ne soit atteint, en 1989, le premier état de «cœur à l'équilibre» pour le réacteur Saint Laurent B1 (le combustible étant renouvelé par tiers, il faut 2 ans pour atteindre l'état d'équilibre et le cœur de ce réacteur contiendra effectivement 30% d'assemblages MOX en 1989 si l'autorisation d'une troisième recharge est donnée).
     Les sept chapitres qui suivent sont consacrés à l'ensemble du cycle du combustible en-dehors des réacteurs; dans le chapitre 8, sont traitées les questions relatives au fonctionnement des réacteurs eux-mêmes*.

2) Description du cycle du combustible MOX
     (Le cycle du combustible MOX est présenté sur la figure 1 comparativement au cycle du combustible standard à base d'oxyde d'uranium enrichi - pas présenté ici)
     Les étapes principales du cycle du combustible MOX sont:
     - la conversion sous forme d'oxyde d'uranium de l'UF6 appauvri en provenance de l'usine d'enrichissement ou du nitrate d'uranyle en provenance du traitement de combustibles irradiés,
     - la fabrication du combustible sous forme de pastilles frittées à partir de l'oxyde d'uranium en provenance des unités de conversion et de l'oxyde de plutonium en provenance des usines de traitement du combustible irradié, puis la fabrication des crayons,
     - le montage des crayons en assemblages,
     - l'irradiation des assemblages en réacteur,
     - le stockage intermédiaire des assemblages irradiés en piscines réacteur puis dans les piscines de stockage des usines de retraitement,
     - le retraitement.
     Le cycle du combustible MOX permet:
     - de «brûler» le plutonium non utilisé pour la fabrication de combustible pour surgénérateur,
     - de valoriser l'uranium appauvri,
     - de recycler l'uranium en provenance du traitement de combustibles irradiés sans avoir à l'enrichir,
     - de faire des économies en uranium naturel et d'éviter les opérations relatives à cette matière (extraction dans les mines, concentration, conversion en UF6 et enrichissement).

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* Ce chapitre 8 ne sera pas publié mais peut être obtenu sur demande moyennant une participation aux frais de photocopie.
3) Transports relatifs au cycle du combustible MOX
3.1) Transports de l'oxyde de plutonium
     L'oxyde de plutonium est conditionné dans l'usine de retraitement de La Hague dans des boîtes serties placées par 4 ou 5 à l'intérieur d'étuis en acier inoxydable munis d'un bouchon soudé. Chaque étui est placé à l'intérieur d'un conteneur fermé de façon étanche par un couvercle équipé d'un joint métallique.
     Le transport des conteneurs d'oxyde de plutonium entre les usines de retraitement et les usines de fabrication de combustible MOX se fait à l'aide d'emballages du type FS 47 utilisés depuis plusieurs années pour le transport de l'oxyde de plutonium nécessaire à la fabrication du combustible des réacteurs à neutrons rapides. La sûreté du transport repose sur la qualité de cet emballage dont le modèle a été agréé par le ministère des transports dans la catégorie B(U)F qui répond aux normes de transport les plus sévères. Ses caractéristiques sont telles qu'après un accident hypothétique correspondant aux conditions de référence (chute de 9 m sur une surface indéformable suivie d'une chute de 1 m sur un poinçon puis d'un incendie d'une demi-heure à 800°C), le taux de relâchement de plutonium resterait inférieur à 185 MBq (5 mCi) par semaine pour chaque colis. Ce point a été confirmé par des essais en vraie grandeur.
     Les emballages FS 47 pouvant contenir environ 17 kg d'oxyde de plutonium et étant transportés par 10 dans des rateliers, une quarantaine de rotations par an seront nécessaires en moyenne pour alimenter les usines de fabrication de combustible MOX.

3.2) Transport des crayons et des assemblages de combustible neuf
     Le transport des assemblages standards de combustible neuf est effectué à l'intérieur d'emballages à ouverture longitudinale équipés d'un berceau permettant de basculer l'assemblage en position verticale lors des opérations de chargement et déchargement.
     La présence de plutonium dans le combustible MOX neuf nécessite l'utilisation pour le transport des crayons et des assemblages neufs d'un emballage de transport classé dans la catégorie B(U)F. L'emballage utilisé pour le transport des assemblages standards de combustible neuf n'étant pas agréé dans cette catégorie, il a été nécessaire de mettre au point un emballage nouveau répondant d'une part à la réglementation des transports et présentant d'autre part une ouverture longitudinale en raison des contraintes liées à la manutention en usine et lors de la réception en réacteur.
     Comme il était difficile, compte tenu de la longueur du joint entre les deux parties de l'emballage, de garantir le maintien d'une étanchéité suffisante en conditions accidentelles, la sûreté du colis repose sur un concept nouveau, permis par le fait que les crayons n'ont pas encore été fragilisés par l'irradiation en réacteur, qui attribue aux gaines du combustible le rôle de confinement et à l'emballage celui de protection contre les agressions externes à l'emballage.

suite:
     L'ensemble des épreuves réglementaires ont été effectuées sur des prototypes de façon satisfaisante et l'emballage a reçu l'agrément du ministre des transports pour le transport des assemblages neufs.
     Une extension de cet agrément au transport des crayons sera nécessaire si la fabrication des crayons et le montage des assemblages ne sont pas réalisés dans un même établissement.
     Enfin, des essais thermiques effectués sur des emballages, couplés à des essais sur des échantillons de tubes de gainage, ont montré que les températures atteintes dans les situations les plus défavorables, en cours de transport, du fait des dégagements thermiques liés à la présence du plutonium et de l'américium 241, ne sont pas de nature à nuire à l'utilisation ultérieure des crayons.

3.3) Transport du combustible irradié
     Les premières opérations de transport d'éléments combustibles MOX irradiés n'interviendront, au plus tôt, qu'en 1991.
     Le transport du combustible MOX irradié se fera dans des emballages du même modèle que ceux utilisés pour le transport de combustibles standards à base d'oxyde d'uranium enrichi irradié. Cet emballage est agréé dans la catégorie B(U)F. Cependant, la teneur en curium 242 et curium 244 supérieure d'un facteur multiplicatif voisin respectivement de 15 et 22 entraînera une augmentation de l'émission neutronique du même ordre de grandeur et nécessitera éventuellement d'équiper ces emballages d'une protection neutronique plus efficace. La puissance résiduelle et le débit d'équivalent de dose dû aux rayonnements g peuvent être ramenés à des niveaux équivalents à ceux des combustibles standards par une prolongation du temps de refroidissement dans les piscines des réacteurs (refroidissement de 1 à 2 ans selon le taux de combustion pour le combustible MOX irradié au lieu de 6 mois à 1 an pour le combustible standard).
     Enfin, de nouvelles études portant sur la prévention du risque de criticité de l'emballage lors des opérations de déchargement sont nécessaires. Il s'agit essentiellement de déterminer le nombre d'assemblages MOX qu'il sera possible de transporter par emballage en même temps que des assemblages standards à base d'oxyde d'uranium enrichi, leur répartition à l'intérieur de l'emballage, la conception de l'aménagement interne, la nécessité de mettre en place des absorbants neutroniques supplémentaires. Une attention particulière devra être portée au suivi des assemblages MOX, d'aspect identique aux assemblages de combustible standard, afin d'éviter les risques d'interversion.

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4. Fabrication du combustible MOX
     Les opérations de fabrication des crayons de combustible standard, présentées sur le schéma bloc de la figure 2 (pas disponible ici), sont:
     - l'homogénéisation des lots de poudre d'oxyde d'uranium,
     - la granulation améliorant la coulabilité de la poudre,
     - la lubrification rendant les poudres moins abrasives,
     - le pastillage (fabrication de pastilles à l'aide d'une presse),
     - le frittage des pastilles à l'intérieur d'un four,
     - la rectification des pastilles permettant d'ajuster leur diamètre,
     - le contrôle d'aspect des pastilles,
     - le gainage permettant d'introduire les pastilles à l'intérieur d'une gaine en zircaloy,
     - le soudage des crayons après pressurisation à l'hélium,
     - le contrôle des crayons.
     Les crayons sont ensuite montés en assemblages qui sont expédiés après contrôle. Il convient également de rappeler les différents entreposages tampons équipant les usines de fabrication (entreposage de poudres, de pastilles, de crayons, d'assemblages).
     Les opérations de fabrication du combustible MOX présentées sur le schéma bloc de la figure 2 (pas disponible ici) se distinguent principalement des opérations de fabrication du combustible standard par la préparation des lots de poudre avant la granulation dont les étapes sont:
     - le mélange primaire d'oxyde d'uranium et d'oxyde de plutonium permettant de constituer des lots de «mélange mère» contenant environ 30% de plutonium,
     - l'homogénéisation et la micronisation des lots de «mélange mère» dans des homogénéiseurs à galets permettant de casser les grains d'oxyde de plutonium. L'importance de cette étape pour les opérations ultérieures de traitement du combustible MOX irradié sera présentée dans le paragraphe relatif au retraitement,
     - la dilution des lots de «mélange mère» dans de l'oxyde d'uranium afin d'obtenir des lots de poudre dont la teneur correspond aux teneurs présentes dans le combustible MOX. Il convient à cet égard de noter qu'un assemblage MOX est divisé en trois zones de teneurs en plutonium différentes nécessitant la fabrication de pastilles et crayons ayant des teneurs en plutonium différentes,
     - l'homogénéisation des lots de poudre ainsi constitués.
     La mise en œuvre d'un tel procédé pour la fabrication de combustibles MOX n'est pas inédite et une expérience d'une telle fabrication existe tant à l'usine Belgonucléaire de Dessel pour la fabrication de combustibles MOX qu'à l'atelier de technologie du plutonium de Cadarache pour la fabrication de combustibles pour réacteurs à neutrons rapides.
     La fabrication des combustibles MOX est prévue dans trois ateliers (atelier de technologie du plutonium de Cadarache, usine de Dessel de la société Belgonucléaire, usine Mélox en projet à Marcoule dont la mise en service est prévue pour 1992).
     Les capacités prévisionnelles des ateliers implantés en France sont de 100 t de combustibles MOX exprimées en masse de métal lourd (U + Pu) par an pour l'usine Mélox et 25 t de combustible par an pour l'atelier de technologie du plutonium de Cadarache.
     Les particularités de ces usines de fabrication à l'égard de la sûreté reposent principalement sur la présence de plutonium. La teneur moyenne du plutonium dans les assemblages est de l'ordre de 5,3% pour des combustibles devant être irradiés à 33.000 MWj/t et de 7,1% pour des combustibles devant être irradiés à 45.000 MWj/t, les teneurs maximales par crayon étant respectivement de 6% à 7% et de 9% à 10%.
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     Les aspects particuliers liés à la présence de plutonium sont:
     - le risque de criticité
     Il s'agit d'un risque bien maîtrisé dans les ateliers actuels de fabrication de combustibles à base d'oxyde d'uranium enrichi ou de combustibles pour les réacteurs à neutrons rapides. Les usines de fabrication du combustible MOX font appel à des principes de sûreté et à des modalités d'application analogues à ceux mis en œuvre dans ces ateliers (contrôle de la masse et de la modération dans les unités de fabrication, contrôle par la géométrie, la masse et la modération dans les stockages).
     - le risque d'exposition interne
     Il s'agit d'un problème important qui est traité selon des méthodes analogues à celles utilisées dans l'actuel atelier de fabrication de combustibles pour réacteurs à neutrons rapides. Il faut cependant souligner qu'une attention particulière doit être portée sur ce point, d'une part du fait de l'adoption du traitement de «micronisation» conduisant à une poudre plus fine, d'autre part du fait de l'utilisation, envisagée dans l'usine Mélox, de plutonium provenant de combustibles à haut taux de combustion contenant une proportion plus importante de plutonium 238 à forte activité spécifique.
     Le risque de dissémination de matières radioactives sera limité au maximum par la mise en œuvre du combustible MOX à l'intérieur d'enceintes de confinement maintenues en dépression et ayant une étanchéité très soignée. La conception des appareils de fabrication est étudiée de manière à assurer un premier confinement à l'intérieur même de ces enceintes. Lorsque la continuité de cette première barrière ne peut être réalisée, comme pour les opérations de pastillage et de rectification, le premier confinement est assuré par un confinement dynamique permettant la captation des poussières au plus près de la source et leur récupération à l'aide de cyclones.
     - le risque d'exposition externe
     Le risque d'exposition externe a pour origine principale:
     • l'émission neutronique des isotopes du plutonium,
     • les émissions neutroniques par réactions (a, n),
     • le rayonnement g de l'américium 241, descendant du plutonium 241,
     • le rayonnement g du bismuth 212 et du thallium 208, descendant du plutonium 236 (et de l'uranium 232 en cas de mise en œuvre d'uranium de retraitement),
     • les produits de fission résiduels.
     Il faut noter que la contribution des rayonnements g dus aux descendants du plutonium 236 et du plutonium 241 augmente avec le délai intervenant entre l'élaboration de l'oxyde de plutonium dans les usines de retraitement et son utilisation dans les usines de fabrication de combustible.
     A cet égard, les prescriptions techniques limitent, dans les usines de fabrication de combustibles MOX ou de combustibles destinés aux réacteurs à neutrons rapides actuellement en service, la teneur en américium 241 dans le plutonium mis en œuvre à 10.000 ou 15.000 ppm (cette teneur est obtenue de 2 à 3 ans après l'élaboration du plutonium issu du traitement de combustibles standards à base d'oxyde d'uranium enrichi).
     L'exposition externe des travailleurs aux rayonnements g et neutroniques est limitée, conformément à la réglementation en vigueur (décret du 28 avril 1975 modifié par décret du 6 mai 1988), par la mise en place de protections biologiques adéquates, par la commande à distance des appareils ou l'automatisation de certaines tâches, par la conception des appareils limitant les durées d'intervention.
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     Pour l'usine Mélox, l'objectif visé à la conception est de limiter l'exposition des agents à 5 mSv/an, soit le dixième de la limite légale, tout en permettant la mise en œuvre de plutonium contenant jusqu'à 30.000 ppm d'américium 241.
     - les risques dus aux dégagements thermiques
     Les dégagements thermiques liés à l'activité du plutonium et de l'américium entraînent un échauffement des poudres mises en œuvre dans les ateliers de fabrication de combustible MOX, en particulier dans les stockages. Ce risque est pris en compte lors de la conception des ateliers et de leur exploitation, par la recherche d'une fiabilité satisfaisante de l'alimentation électrique et des équipements des systèmes de ventilation assurant une fonction de refroidissement.
     - les risques dus à la radiolyse
     La présence de plutonium dans les solutions traitées dans l'unité de traitement des rebuts et déchets pollués implantée dans l'usine Mélox (voir paragraphe ci-après) entraîne un risque de radiolyse de ces solutions avec dégagement d'hydrogène. Un système de balayage à l'air du ciel des capacités contenant ces solutions permet d'y maintenir la teneur en hydrogène à une valeur inférieure à la limite d'inflammabilité.
     Par ailleurs, compte tenu de la radiotoxicité des matières mises en œuvre, des dispositions particulières sont prévues pour prévenir les incendies et en limiter les conséquences (sectorisation, détection, moyens de lutte contre le feu).
     Enfin, les usines de fabrication de combustible MOX sont génératrices de déchets contenant des radionucléides émetteurs a. Les dispositions mises en œuvre pour minimiser les déchets sont:
     · le recyclage des rebuts dans le procédé après broyage ou après traitement particulier si ces rebuts sont pollués,
     · le recyclage des poudres captées par les cyclones équipant les circuits de confinement dynamique,
     · les nettoyage des enceintes de confinement et des équipements par des aspirateurs équipés de cyclones et le recyclage des poudres ainsi récupérées.
     Ainsi, l'usine Mélox sera équipée d'une unité de traitement des rebuts et poudres pollués par dissolution, purification, puis transformation en oxyde par dénitration. Cette usine sera également équipée d'un atelier permettant de traiter par incinération les autres déchets engendrés par son exploitation puis de récupérer une part importante du plutonium contenu dans les cendres. Celles-ci seront ensuite stabilisées par enrobage dans une matrice en ciment en vue de leur entreposage sûr et de leur stockage définitif. Cet atelier traitera environ 50 t de déchets incinérables représentant un volume d'environ 300 m3 par an avec un facteur d'incinération voisin de 30.

5) Traitement des combustibles MOX irradiés
     Le traitement des combustibles Max irradiés est envisagé dans l'usine UP2-800 de La Hague.

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     Cette usine, en cours de construction, est dimensionnée pour le traitement de combustibles standards à base d'oxyde d'uranium enrichi. Elle permettra cependant le traitement de combustibles MOX irradiés, moyennant quelques adaptations à l'étude dès à présent par la COGEMA. Un examen par les autorités de sûreté d'un dossier de sûreté complémentaire sera toutefois nécessaire avant le traitement effectif de combustibles MOX par cette usine.
     Les opérations de traitement sont très voisines pour les deux types de combustibles. Ces opérations rappelées pour le traitement du combustible standard dans le schéma bloc de la figure 3 (pas disponible ici) sont les suivantes:
     - réception des assemblages; ceux-ci sont déchargés hors des emballages de transport,
     - stockage des assemblages en piscine,
     - cisaillage des assemblages; les tronçons de gaine contenant du combustible tombent dans le dissolveur,
     - dissolution du combustible dans une solution d'acide nitrique,
     - conditionnement des coques et embouts; les coques (tronçons de gaine) et les embouts d'assemblages sont conditionnés dans des fûts bétonnés,
     - traitement des gaz; les gaz qui se dégagent lors des opérations de cisaillage et de dissolution sont traités dans le but de les purifier des aérosols et poussières entraînés et de récupérer l'iode sous forme d'effluents liquides,
     - clarification de la solution de dissolution; les fines particules constituées principalement de produits de fission insolubles sont séparées de la solution de dissolution par centrifigation. Ces fines sont ensuite stockées dans des cuves avant vitrification,
     - décontamination de la solution de dissolution en produits de fission par extraction de l'uranium et du plutonium par un solvant; les produits de fission sont ensuite concentrés puis stockés dans les cuves avant vitrification,
     - partition de l'uranium et du plutonium par réextraction du plutonium présent dans le solvant par une solution réductrice d'acide nitrique,
     - purification de l'uranium par deux cycles d'extractions et de réextractions réalisées entre une solution d'acide nitrique et un solvant puis stockage sous la forme de nitrate d'uranyle,
     - purification du plutonium par deux cycles d'extractions et de réextractions réalisées entre une solution d'acide nitrique et un solvant, conversion du nitrate de plutonium en oxyde de plutonium et stockage de cet oxyde conditionné dans des conteneurs,
     - vitrification des solutions de produits de fission concentrés et des fines de dissolution puis stockage des conteneurs de verre.
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     Les principales modifications apportées aux opérations de traitement pour le combustible MOX sont:
     - une dissolution complémentaire éventuelle des fines (voir les développements relatifs à la solubilité du combustible MOX irradié présentés ci-après) suivie d'une nouvelle opération de clarification,
     - une dilution des solutions issues de la dissolution de combustibles MOX dans des solutions issues de la dissolution de combustibles standards à base d'oxyde d'uranium enrichi pour ramener la concentration en plutonium dans les solutions de dissolution à des valeurs compatibles avec le fonctionnement des installations de décontamination, de partition et de purification. Ceci nécessitera le fonctionnement en parallèle des deux chaînes de dissolution de l'atelier de cisaillage et de dissolution, l'une fonctionnant avec du combustible standard, l'autre avec du combustible MOX. Une solution alternative, dont la faisabilité est acquise, pourrait éventuellement être utilisée. Elle consisterait à diluer les solutions de dissolution des combustibles MOX dans un flux de nitrate d'uranyle pour entrer dans les fourchettes de fonctionnement définies pour le combustible standard.
     Comparativement au combustible standard irradié, le combustible MOX irradié se caractérise, à durée de refroidissement équivalente, par une activité b-g légèrement supérieure, une teneur en plutonium environ cinq fois plus élevée et une teneur en transplutoniens nettement plus forte (d'un facteur voisin de 9 pour l'américium 241, de 15 pour le curium 242 et de 22 pour le curium 244). L'analyse de la sûreté du traitement des combustibles MOX prend en compte ces caractéristiques.
5.1) Identification des assemblages
     Les assemblages de combustible MOX sont géométriquement identiques aux assemblages de combustibles standards à base d'oxyde d'uranium enrichi et ces deux types d'assemblages sont chargés simultanément dans un même réacteur puis stockés ensemble dans les piscines de refroidissement des centrales EDF et de l'usine de La Hague. D'autre part, les chaînes de cisaillage-dissolution sont différenciées pour les deux types de combustible.
     Pour ces raisons, deux contrôles indépendants de la nature du combustible traité sont nécessaires, notamment pour la prévention du risque de criticité lors de la dissolution.
     Ceux-ci sont réalisés d'une part par le suivi de chaque assemblage tout au long de sa vie, d'autre part par le contrôle neutronique effectué avant les opérations de cisaillage.
5.2) Dissolution
     L'oxyde de plutonium pur se dissout difficilement dans l'acide nitrique. Cette caractéristique pourrait affecter la solubilité du combustible MOX irradié contenant encore, après irradiation, des particules d'oxyde de plutonium introduites lors de la fabrication du combustible, alors que le plutonium généré de façon diffuse par les réactions nucléaires au cours de l'irradiation dans le cœur du réacteur, seul présent dans le combustible standard irradié, présente une bonne solubilité.
     D'autre part, l'expérience acquise, lors de campagnes de retraitement effectuées dans l'usine UP2-400 de La Hague, sur du combustible au plutonium irradié dans les réacteurs à neutrons rapides n'est pas transposable au combustible MOX irradié dans des réacteurs REP. En effet, la température, favorisant la diffusion du plutonium dans l'uranium, et l'irradiation, favorisant la désintégration des particules d'oxyde de plutonium, sont plus faibles dans les réacteurs REP que dans les réacteurs à neutrons rapides. Ainsi, les premières expériences effectuées il y a plusieurs années en Allemagne ont montré, pous des combustibles MOX irradiés, des taux d'insolubles en plutonium de l'ordre de 3%.
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     Une meilleure solubilité des combustibles irradiés pourra cependant être garantie par une bonne solubilité initiale de l'oxyde de plutonium dans le combustible neuf. A cet égard, des efforts ont été réalisés par les fabricants de combustible qui ont amélioré leur procédé de fabrication en y intégrant une étape de «micronisation» des poudres diminuant la taille des grains d'oxyde de plutonium dans un mélangeur à galets et en jouant sur les paramètres de frittage afin d'obtenir une bonne diffusion du plutonium lors de cette opération.
     Ainsi, si les combustibles fabriqués il y a quelques années pour des tests d'irradiation présentaient avant irradiation un taux de plutonium insoluble de l'ordre de 15%, la mise en service du procédé de fabrication par «micronisation» d'un mélange mère a permis d'atteindre pour les premières fabrications un taux de plutonium insoluble de l'ordre de 1% à 2%, valeur qui s'est améliorée au cours de la mise au point du procédé pour atteindre, pour les productions actuelles, des taux d'insolubles en plutonium compris entre 0,1% et 0,5%.
     Un test de dissolution effectué sur des échantillons de pastilles provenant de chaque lot de fabrication permet de garantir la qualité de la fabrication. Les résultats des tests ainsi effectués doivent répondre à un critère d'acceptation du combustible défini par la COGEMA, qui est actuellement un taux d'insoluble en plutonium dans le combustible vierge inférieur ou égal à 1%.
     Parallèlement, des essais de dissolution ont été réalisés au CEA sur des crayons irradiés. Ces essais ont permis de constater, d'une part une amélioration notable de la solubilité du plutonium suite à l'irradiation en réacteur, d'autre part l'obtention d'un taux d'insolubles en plutonium faible, de l'ordre de 0,02% à 0,04%, voisin de celui obtenu pour le combustible standard à base d'oxyde d'uranium enrichi, dans la mesure où le plutonium présent dans le combustible vierge présentait lui-même une bonne solubilité avant irradiation (de l'ordre de 99,8% à 99,6%).
5.3) Détection d'accumulation de plutonium
     Même à taux de dissolution du plutonium équivalent, les fines issues de la dissolution des combustibles MOX contiennent environ 5 fois plus de plutonium que les fines issues de la dissolution des combustibles standards à base d'oxyde d'uranium enrichi (rapport des teneurs en plutonium après irradiation). Il en résulte que la détection de l'accumulation des fines nécessite, pour des raisons de prévention du risque de criticité, une surveillance renforcée des installations; par ailleurs les quantités plus importantes de curium, dont l'émission neutronique masque celle du plutonium, nécessitent la mise en œuvre d'une surveillance par des appareils technologiquement plus performants permettant de détecter le plutonium dans le bruit de fond neutronique (surveillance par un procédé par interrogation active).
5.4) Risque de criticité
     Les questions soulevées précédemment au sujet de la solubilité de l'oxyde de plutonium contenu dans le combustible MOX nécessitent d'apporter une attention particulière à la prévention du risque de criticité, notamment dans les capacités susceptibles de contenir les fines. En effet, la prise en compte, au moment du retraitement, d'un taux de dissolution du plutonium de 99% valeur garantie pour chaque assemblage combustible MOX non irradié, conduirait sur la base du traitement annuel de 90 t de combustible MOX d'une teneur moyenne initiale de 5,3% en plutonium à une masse de 48 kg de plutonium non dissous par an.
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     Il apparaît toutefois que le taux de plutonium insoluble de 1% qui y correspond doive être considéré, notamment pour le traitement d'un grand nombre d'assemblages, comme une limite supérieure et qu'elle devrait pouvoir être remplacée, dans le domaine de la sûreté, par un chiffre sensiblement plus faible encore que difficile à arrêter actuellement. En tout état de cause, les différents fabricants de combustibles ont été sensibilisés sur ce sujet et la COGEMA prévoit de faire effectuer les études théoriques ou expérimentales nécessaires pour améliorer la connaissance des combustibles MOX neufs ou irradiés. La COGEMA prendra, à la lumière des résultats qui seront obtenus, les dispositions d'exploitation qui s'imposent: dissolution à cadence réduite, acidité du milieu d'attaque plus élevée, rinçages des appareils plus fréquents et, si nécessaire, mise en œuvre de gadolinium afin de rendre sous-critiques tous les appareillages susceptibles de contenir ces résidus insolubles, depuis les dissolveurs jusqu'à la vitrification des produits de fission.
     Dans ces conditions, il ne semble pas, sur le plan de la prévention du risque de criticité, que les insolubles de dissolution constituent une difficulté majeure pour la faisabilité de cette étape du traitement des combustibles MOX, sous réserve, comme on peut s'y attendre, que le taux d'insolubles observé soit sensiblement inférieur à 1%.
     A cet égard, il convient de noter que la COGEMA a, dès à présent, décidé d'équiper l'une des chaînes de l'atelier RI d'un dissolveur complémentaire de fines afin de parfaire, à acidité plus élevée et pendant une durée plus longue, la dissolution du plutonium contenu dans les fines des combustibles difficilement solubles. D'autre part, des essais de dissolution seront effectués sur des crayons irradiés extraits d'assemblages irradiés dans le réacteur de Saint Laurent B1 pendant respectivement 1 an, 2 ans et 3 ans, ces crayons étant représentatifs de la fabrication industrielle du combustible MOX.
     Ces dispositions vont dans le sens des demandes faites par les autorités de sûreté. En effet, bien qu'ayant jugé acceptable le critère actuel d'acceptation du combustible vierge dans le cadre d'un retraitement en quantité limitée, elles ont demandé à la COGEMA de présenter, après obtention des confirmations complémentaires nécessaires, un dossier définissant le critère d'acceptation du taux de plutonium insoluble à retenir en définition pour les fabrications ultérieures, compatible avec les conditions nominales de retraitement et la prévention du risque de criticité. Elles ont, d'autre part, recommandé que, dans l'attente de la transmission de ce dossier, les efforts effectués jusqu'à présent soient poursuivis, notamment en ce qui concerne les connaissances relatives à l'effet de l'irradiation en réacteur sur la solubilité du plutonium et celles relatives à l'efficacité de la dissolution complémentaire et la recherche d'un taux d'insolubles en plutonium le plus faible possible dans le combustible vierge.
suite:
     Enfin le choix, dans le premier cycle de séparation uranium-plutonium par extraction au solvant de l'usine UP2-800, d'appareillages sous-critiques quelle que soit la concentration en plutonium des solutions, permet d'assurer que le traitement des solutions résultant de la dissolution des combustibles MOX, malgré leur teneur en plutonium beaucoup plus élevée que celle des solutions de combustibles à base d'uranium enrichi, pourra avoir lieu sans difficulté particulière, sous réserve de maîtriser les phases transitoires dans les appareils du procédé.
     5.5) Risque d'exposition externe
     Les débits d'équivalents de dose dus aux rayonnements g ne seront pas très différents de ceux observés pour le combustible standard (majoration de 20% au plus pour une même durée de refroidissement). La prolongation du refroidissement du combustible MOX pendant un an supplémentaire comme le prévoit la COGEMA réduira encore cet écart qui n'est pas significatif.
     L'augmentation de l'émission neutronique due au curium d'un facteur 20 à 25 avant mélange des solutions et d'un facteur 3 à 4 après ce mélange devrait avoir un effet négligeable sur les débits d'équivalent de dose. En effet, cet élément accompagne les produits de fission lors des opérations de décontamination, les débits d'équivalent de dose dus aux rayonnements g émis par les produits de fission sont alors largement supérieurs à ceux dus à l'émission neutronique et les protections g constituées généralement par les murs des cellules en béton sont également efficaces vis-à-vis des émissions neutroniques. Une attention particulière devra toutefois être portée aux débits de dose neutronique à proximité de points singuliers constitués de protections biologiques sélectives (uniquement efficaces vis-à-vis des rayonnements g) tels que hublots, plaques métalliques...
     En outre, le traitement des combustibles MOX entraîne dans les ateliers de moyenne activité plutonium une augmentation des quantités de plutonium traité et une modification de sa composition isotopique. Celles-ci seront atténuées par les mélanges des solutions de dissolution de combustibles MOX et de combustibles standards effectués avant les opérations de partition, mais auront toutefois pour conséquence une augmentation modérée de l'émission neutronique et, du fait d'une teneur plus élevée en Pu 241, une augmentation de l'irradiation par rayonnements g émis par l'américium 241 déposé sur les parois des boîtes à gants. Un nettoyage poussé et fréquent des boîtes à gants devrait permettre d'en limiter les conséquences, l'expérience actuelle issue de l'exploitation de la voie sèche de l'atelier MAPu prouvant que cela ne pose pas de problèmes majeurs.
5.6) Conditionnement des déchets
     Les déchets issus du traitement des combustibles MOX et ceux issus du traitement des combustibles standards à base d'oxyde d'uranium enrichi seront conditionnés de manière analogue. Leur quantité et leur activité sont liées à la concentration différente des divers produits de fission et transuraniens, et rappelons-le, à la solubilité du combustible.
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     - Déchets de haute activité
     Ces déchets sont vitrifiés. Ils comprennent les produits de fission solubles, les transuraniens, les insolubles de dissolution et les effluents basiques du traitement du solvant.
     Les déchets de haute activité issus du combustible MOX se caractérisent par rapport à ceux issus du traitement du combustible standard par:
     · une légère diminution de la masse globale des produits de fission,
     · une augmentation d'environ 40% de la masse des produits de fission insolubles qui se retrouvent sous forme de fines (molybdène, technécium, ruthénium, rhodium et palladium),
     · une augmentation de la masse de plutonium,
     · une augmentation importante de la masse de transuraniens émetteurs a et neutroniques,
     · la présence éventuelle du gadolinium qui pourrait être nécessaire pour assurer la prévention du risque de criticité à la dissolution.
     Les produits de fission et fines seront entreposés avant vitrification, mélangés respectivement avec les produits de fission et fines provenant de combustibles standards traités en parallèle pour la dilution des solutions de dissolution en amont des cycles de partition ou traités lors de campagnes spécifiques dans des proportions qui ne sont pas encore définies. Il apparaît cependant, dès à présent, compte tenu de ces mélanges, que les modifications significatives dans la composition des déchets concernent principalement les teneurs en plutonium et en émetteurs a, les teneurs en fines étant voisines, après dilution, de celles obtenues lors du traitement de combustibles standards à base d'oxyde d'uranium enrichi.
     Si les spécifications actuelles des verres ne pouvaient pas être respectées, il serait nécessaire de définir de nouvelles spécifications fondées sur des études et recherches complémentaires portant en particulier sur la qualité maximale d'émetteurs a pouvant être contenue dans les verres. Il est à noter toutefois que la faisabilité du conditionnement des déchets de haute activité est assurée par la possibilité de diluer les produits de fission et les fines dans un volume de verre plus important.
     - Coques et embouts
     Les coques et embouts sont conditionnés dans des fûts bétonnés. Les teneurs plus importantes en plutonium et émetteurs a dans le combustible MOX et la moins bonne solubilité du plutonium ne mettront pas en cause la qualité et la sûreté du colis.
     - Rejets d'effluents radioactifs gazeux
     Les activités des rejets gazeux seront légèrement réduites du fait de la concentration plus faible en krypton 85.
     - Rejets d'effluents radioactifs liquides
     D'après les évaluations faites par la COGEMA, les quantités de ruthénium et d'émetteurs a présentes dans le combustible MOX ne mettront pas en cause les autorisations actuelles de rejet d'effluents radioactifs liquides.
suite:
6) Gestion du plutonium récupéré
     La composition isotopique moins riche en éléments fissiles du plutonium issu du traitement des combustibles MOX nécessiterait en cas de nouveau recyclage d'en augmenter la teneur dans le mélange UO-PuO du combustible ainsi fabriqué.
     Cependant, du fait des mélanges effectués sur les solutions de dissolution, la qualité du plutonium issu de campagnes de traitement de combustibles MOX dans l'usine UP2-800 ne devrait pas être trop éloignée de celle du plutonium issu du traitement du combustible standard à base d'oxyde d'uranium enrichi. D'autre part des mélanges de lots d'oxyde de plutonium de provenances diverses sont également possibles lors de la fabrication du combustible.
     Enfin, il faut rappeler que le recyclage du plutonium dans les réacteurs à neutrons rapides permet de s'affranchir de teneurs importantes en isotopes du plutonium de masse élevée. En effet, les réacteurs à neutrons rapides permettent de «fissionner» tous les isotopes du plutonium, ceux-ci étant d'autre part formés en quantité moindre par capture neutronique. Ainsi, le plutonium extrait d'un cœur de réacteur à neutrons rapides après irradiation est plus riche en isotopes de masse faible que le plutonium présent initialement dans le combustible.

7) Impact du cycle MOX sur le plan de la radioprotection
     L'impact, sur le plan de la radioprotection, de l'ensemble du cycle du combustible MOX a été estimé par l'IPSN comparativement à celui du cycle du combustible standard à base d'oxyde d'uranium enrichi. Cette étude s'est appuyée, d'une part sur le retour d'expérience acquis dans les usines et réacteurs du cycle du combustible standard et les usines de fabrication de combustibles destinés aux réacteurs à neutrons rapides, d'autre part sur la base des évaluations pour ce qui concerne l'exploitation des réacteurs et usines de retraitement avec du combustible MOX, la grandeur de référence étant la dose collective ramenée à la tonne de combustible irradié.
     De cette étude, il ressort, malgré les incertitudes entachant les valeurs obtenues, que les doses collectives par tonne de combustible irradié devraient être du même ordre de grandeur pour les deux cycles de combustible envisagés. En effet, les doses intégrées dans les réacteurs et usines de retraitement sont voisines pour les deux types de combustible. D'autre part, les doses plus importantes dans les usines de fabrication du combustible MOX relativement aux usines de fabrication du combustible standard sont compensées par les doses économisées dans les mines et usines de conversion.

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2. Dossier C.F.D.T.

a) Chers camarades,

     Vous trouverez ci-joint le compte rendu de la réunion du Conseil Supérieur de Sûreté et de l'Information Nucléaires, qui s'est tenue le 31 janvier 1989.
     Le sujet principal concernait «le recyclage du plutonium dans les réacteurs à eau légère de l'EDF».
     Très peu de questions, posées par les membres du Conseil, ont reçu une réponse:
     · pour la malveillance: nous avons entendu M. COGNE, Directeur de l'IPSN, nous dire qu'il ne dira rien et M. TEILLAC, Haut Commissaire au CEA, déclarer qu'il ne voyait pas qui pourrait faire un acte de malveillance à propos du plutonium ni ce que l'on pourrait faire d'une telle marchandise,  nous avons entendu M. COGNE, Directeur de l'IPSN, nous dire qu'il ne dira rien et M. TEILLAC, Haut Commissaire au CEA, déclarer qu'il ne voyait pas qui pourrait faire un acte de malveillance à propos du plutonium ni ce que l'on pourrait faire d'une telle marchandise,
     · sur le plan économique: nous avons appris que l'emploi du MOX se traduisait par un gain économique de 5% sur le combustible. Lorsque l'on connaît les incertitudes portant sur le coût des matières premières et sur le façonnage des combustibles au plutonium, cette réponse traduit clairement qu'il s'agit d'un choix politico-économique et non purement économique. Il est clair également que ces choix auront des répercussions sur l'emploi pour les mineurs d'uranium, comme pour EURODIF, dans les prochaines années.
     · en matière technique: les questions sont restées sans réponse, qu'il s'agisse des difficultés présentées par la conduite du réacteur (équipé de MOX) en situation normale et accidentelle, ou du recyclage du plutonium issu du retraitement du MOX. C'est ainsi par exemple que M. TEILLAC nous a expliqué que nous ne pouvons pas avoir de réponses aux questions sur le traitement des combustibles oxydes car l'EDF n'avait pas pris de décision en matière de retraitement pour les années postérieures à l'an 2000.
     L'intérêt de ce Conseil ne repose pratiquement que sur les informations que l'on peut y recueillir.
     Bien amicalement.

b) LE COMBUSTIBLE À OXYDE MIXTE D'URANIUM ET LE PLUTONIUM

     Le combustible à oxyde mixte d'uranium et de plutonium (UO2 + Pu02) est communément appelé «MOX» (de l'anglais Mixed Oxide). Après une revue sommaire des expériences passées et de la situation actuelle, les aspects économiques et techniques relatifs à son utilisation dans les réacteurs à eau légère d'EDF sont développés ci-après.

I. Essais du combustible MOX dans le monde
     En Europe (Belgique, France, Italie, RFA, Suède, Suisse) et aux USA, des essais de combustibles mixtes uranium-plutonium ont été menés:
     -- Dès 1963, dans le réacteur BR3 du Centre d'Etudes Nucléaires de MOL en Belgique. La Belgonucléaire avait acquis en 1983 une expérience portant sur 170 assemblages de combustibles insérés dans des réacteurs PWR et BWR.  

suite:
     -- Depuis 1972, le recyclage a été réalisé par Kraftwerk Union (KWU) AG/ Alkem, à large échelle notamment dans les réacteurs d'Obrigheim et de Gundremmingen en RFA. En 1983, l'expérience de KWU/Alkem portait sur 202 assemblages.
     -- En 1974, deux assemblages de démonstration étaient placés dans le petit réacteur de Chooz (PWR de 320 MW). Le gainage était en acier inoxydable et les teneurs en plutonium de 2,5%, 4% et 7,3% avec une teneur moyenne égale à 5,05%. Le taux de combustion atteignait 28.000 mégawatt/jour par tonne d'oxyde d'uranium (MWj/t).
     -- Des essais ont été effectués aux USA avec des crayons gainés de zircaloy jusqu'à de forts taux de comblustion (51.000 MWj/t).
     Cependant, en 1974, le programme américain était stoppé sur décision gouvernementale pour éviter les risques de prolifération. Les combustibles MOX étaient alors fabriqués par Westhinghouse et General Electric.

II. La situation française
     Le 25 octobre 1984, un groupement d'intérêt économique - GIE - de droit français était créé entre la COGEMA (60%) et la Belgonucléaire (40%). Ce GIE, appelé «COMMOX», a pour objectif la promotion et la commercialisation des crayons combustibles MOX.
     La structure industrielle ainsi créée se fonde sur les capacités de fabrication de l'usine de la Belgonucléaire à Dessel (Belgique) et en France sur le Complexe de Fabrication de Cadarache (CFCa).

III. Utilisations prévues par l'EDF
     Les études menées dès 1984 par EDF ont porté sur une utilisation du MOX dans les premiers réacteurs PWR de 900 MWe (programme CP1).
     Les premiers essais devaient s'effectuer dans le réacteur B1 de St Laurent-des-Eaux durant le 4° trimestre 1987.
     Sur une recharge annuelle de 52 assemblages (il ya 157 assemblages dans le cœur qui sont renouvelés par tiers), 16 d'entre eux sont en MOX.
     Le «taux de recyclage» (16/52) sera donc égal à 30% environ, lorsque la troisième recharge aura été réalisée.

IV. Aspects économiques
     Sachant qu'à l'équilibre, la recharge annuelle représente 24 tonnes d'uranium enrichi à 3,25% (ce qui nécessite l'emploi de 143 tonnes d'uranium naturel et 117.000 UTS pour l'enrichissement), on peut évaluer l'économie d'uranium et d'UTS réalisée en substituant 16 assemblages en uranium enrichi par 16 assemblages MOX à teneur moyenne de 5,44% de plutonium.

4.1. Economie d'uranium naturel
     L'économie brute réalisée par le nombre d'assemblages en uranium enrichi substitués par du combustible MOX est:

143 tonnes d'U nat x 16/52 = 44 tonnes par recharge.
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     Toutefois, les combustibles MOX utilisent 94,56% d'uranium, soit:
24 tonnes de combustible x 16/52 x 94,56/100 = 7 tonnes.

     L'économie nette réalisée est donc égale à 44 - 7 = 37 tonnes d'U nat, dont le cours actuel se situe aux environs de 485 F le kg pour les contrats à long terme (voir détails ci-après).
     On peut cependant supposer que les 7 tonnes d 'uranium utilisées sont constituées par de l'uranium «appauvri» en uranium 235 ou par de l'uranium issu du retraitement des combustibles irradiés. On convient dans ce cas que cet uranium n'a pas de valeur marchande.
     A cette économie, s'ajoute celle relative à la «conversion» de l'uranium (série d'opérations qui transforment l'U3O8 en hexafluorure d'uranium) avant enrichissement (environ 50 F/kg).

4.2. Economie d'UTS
     Sachant que la recharge annuelle nécessite 117.000 UTS, l'économie réalisée par l'introduction de 16 assemblages MOX sur un total de 52 représente:

117.000 x 16/52 = 36.000 par recharge.

4.3. Coût du plutonium
     Les économies effectuées sur l'uranium naturel et les UTS sont pénalisées par le coût du plutonium fixé aux environs de 100 F le gramme.

4.4. Surcoût de fabrication du combustible MOX
     Selon les chiffres français «officiels», le coût de fabrication, qui est de 1.400 F/kg pour un combustible classique UO2 (1986), serait 2,5 fois plus élevé dans le cas du MOX. Selon d'autres auteurs, le coût serait 10 fois supérieur. La Commission CASTAING avait fait dans son premier rapport des évaluations économiques en prenant un facteur égal à 9 dans le cas du combustible rapide.
     On peut évaluer un surcoût tel que le remplacement du combustible UO2 par du MOX n'apporte pas de modification de coût économique. Ce calcul simple qui fixe des ordres de grandeur suppose que l'ensemble des opérations se font dans un délai très court:

tonnage de combustible MOX = 24 t x (16/32) = 7,385 t

     Sachant que le prix moyen pondéré des contrats à long terme est de 30 dollars,. la livre anglaise - Lb - d'U3O8 (qui renferme 0,3846 kg d'U nat) l'économie de 44 tonnes d'uranium représente:

(44.000/0,386) x 30 x 6,20 = 21,28
avec comme unités:
kg/(Lb/kg) x $/Lb = MF

     Le coût de la conversion économisée s'élève à:

143 tonnes d'U nat x(16/32) x 50.000 (F/t) = 2,2 MF
suite:
     l'économie due aux UTS (1 000F.l'UTS) s'élève à :
36.000 UTS x 1.000 F/UTS = 36,00 MF

     soit un total de:

21,28 + 2,20 + 36,00 = 59,48 MF

     Il faut toutefois déduire le coût du plutonium évalué par les experts du CEA à 100 F le gramme, soit:

7,385 x (5,44/100) x 100 = 40,17 M
avec comme unités:
t de MOX x (t de Pu/t de MOX) x (MF/t de Pu)

     Soit un total de 59,48 MF - 40,17 MF = 19,31 MF
     Si le coût de la réalisation d'un kg de combustible MOX est X fois supérieur à celui d'un combustible classique (1.400 F/kg), la dépense supplémentaire est égale à

1.400 x (X-1) = 7.385 = 10,339 x (X-1)
avec comme unités:
t de MOX x (X - 1) x kg = MF (X - 1)

     A l'équilibre on obtient:

10,339 x (X - 1) = 19,31, soit X = 2,87

     Ce calcul montre que si le coût du combustible MOX est plus de 2,87 fois plus cher que le coût d'un combustible classique, le recyclage plutonium ne sera pas économiquement rentable.
     On notera, par ailleurs, que si les coûts de l'uranium naturel (contrats à long terme) et de l'UTS sont industriellement bien établis, il n'en va pas de même pour le plutonium. Or le coût du plutonium est très important dans cette évaluation économique, dans la mesure oû il représente environ les 2/3 de l'économie faite sur l'uranium naturel et les UTS.
     Comme le «coût» du plutonium est relativement artificiel, on peut en le fixant à un niveau 2 fois plus bas par exemple (50 F le gramme) ramener le surcoût tolérable du combustible MOX de 2,87 à 4,81.

V. Avantages et inconvénients du recyclage du plutonium

     L'utilisation du MOX présente des avantages et inconvénients techniques qu'il est difficile d'évaluer financièrement. Nous ferons donc une simple énumération.

5.1. Avantages
     Les avantages que nous allons décrire brièvement ne concernent pas toujours les mêmes groupes d'intérêts. Ainsi par exemple la valorisation du plutonium conforte le retraiteur mais pénalise notamment les mines d'uranium et la diffusion gazeuse.
     -- Economie d'uranium et d'UTS,
     -- permet de recycler le plutonium du retraitement qui ne peut être utilisé que très partiellement par la filière rapide (réacteurs Phénix et Superphénix),
     -- justifie le maintien du retraitement des combustibles irradiés dans la mesure oû son meilleur atout consistait dans le recyclage du plutonium,
     - permet la création d'une usine à MOX à Marcoule.

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5.2. Inconvénients
     Présente de nombreuses contraintes techniques en matière de fabrication et de gestion du combustible:
     a) la présence d'émetteurs a associés à des émetteurs g (américium-241) nécessite la fabrication du combustible dans des enceintes parfaitement confinées et blindées. Cette exigence entraîne un surcoût important en matière d'investissement qui sont comparables à ceux relatifs à la réalisation des combustibles de la filière rapide;
     b) il est nécessaire de fabriquer trois catégories de crayons combustibles à des teneurs en plutonium qui varient depuis la périphérie (3,35%) au centre de l'assemblage (6,75%) en passant par une zone intermédiaire (5,45%). Ceci complique le cycle de fabrication et nécessite la mise en œuvre d'une identification fiable des crayons en fonction de leur teneur en plutonium;
     c) pour réduire les niveaux d'irradiation g occasionnés par l'américium-241 (qui est produit, après le retraitement, par la décroissance radioactive du plutonium-241) on est contraint de limiter à environ 7.500 ppm la teneur en américium-241 du plutonium. Cette teneur est atteinte 1,5 an après le retraitement car il se produit dans les premières années environ 4.500 ppm par an.
     On est donc contraint de fabriquer le combustible dans des délais très courts, une fois le retraitement réalisé, ce qui complique la gestion.
     d) la teneur isotopique du plutonium doit être homogène pour ne pas avoir des contraintes importantes dans la gestion du cœur. Ceci apporte des difficultés importantes dans le choix des matières premières et dans la gestion des combustibles neufs pour ne pas avoir des teneurs en plutonium-240 très différentes.
     e) le débit de dose important présenté par les neutrons et les g émis par le combustible neuf impose outre les contraintes de fabrication (débit de dose au contact = 180 mrem/h et à un mètre = 13 mrem/h) des mesures de protection particulières pour le transport du combustible et les opérations de déchargement-chargement des assemblages dans les centraIes nucléaires.
     f) dans le cas de rupture de gaine d'un combustible MOX, on pourra trouver dans le circuit primaire, outre les produits de fission des émetteurs a. Le principe du «réacteur propre» sera plus difficile à assurer. Les résines échangeuses d'ions utilisées par EDF pour épurer les circuits pourront conduire à des déchets chargés en a.
     g) à la fabrication du combustible neuf et au retraitement du combustible MOX irradié, on est amené à produire des déchets riches en a qui ne pourront pas être stockés en surface. Ces difficultés sont bien connues à l'atelier Plutonium de Cadarache qui entrepose des déchets alpha de catégorie B depuis sa création. 
suite:
     h) après recyclage, le plutonium formé a une composition isotopique (faible quantité de produits fissiles) peu favorable. Le retraitement ne peut plus se justifier au moyen du recyclage dans les réacteurs à eau légère du plutonium de 2e génération. On fera donc du non-retraitement après en avoir combattu violemment le principe.
     i) l'EDF souhaitait augmenter les «intercampagnes» de 12 mois à 18 mois, afin de réduire les périodes d'indisponibilité des réacteurs (2 mois tous les 12 mois). Ceci est possible avec du combustible classique en enrichissant l'uranium-235 à 4,2%. Dans le cas du MOX, il sera nécessaire de porter la teneur moyenne à 8% du plutonium, ce qui conduira à des contraintes difficiles. Il est donc vraisemblable que l'on ne pourra pas, si l'on utilise du MOX, augmenter la période de temps qui sépare 2 arrêts programmés des réacteurs EDF.
     j) les essais de dissolution de combustible non irradié a mis en évidence un taux élevé de résidus insolubles riches en plutonium (voir article de Lebastard dans RGN de Nov.-Déc. 1985). Ceci laisse présager que le retraitement du combustible irradié donnera lui aussi des insolubles à teneur en plutonium plus élevé (voir le «Dossier Electronucléaire» CFDT - 1980 - Ed. du Seuil) que celle relative aux insolubles des combustibles à uranium enrichi.
     k) le recours massif au combustible MOX pourra accroître le faible taux de charge de l'usine EURODIF qui tourne à 45% de ses capacités. Ce phénomène s'accentuera si les partenaires étrangers adoptent les mêmes options.
     1) le recyclage éventuel de l'uranium appauvri issu du retraitement augmentera encore les niveaux d'irradiation à la fabrication et à la manipulation du combustible MOX.
     m) la teneur en transuraniens des déchets vitrifiés issus du retraitement des combustibles MOX est si importante que la radiotoxicité de ces verres est pratiquement égale à celle du combustible irradié classique non retraité.

VI. Conclusions
     Les avantages du recyclage du plutonium paraissent bien minces, si on les compare aux difficultés techniques présentées par le recyclage du plutonium. Il est cependant nécessaire d'obtenir les coûts réels de fabrication des combustibles MOX pour pouvoir se prononcer valablement sur le plan économique.
     De manière générale, la modification importante induite par l'introduction du combustible au plutonium dans les réacteurs à eau légère ne peut s'analyser uniquement au niveau du coût du combustible. Il est important d'analyser l'impact de ce choix au niveau de l'ensemble du cycle du combustible en incluant notamment les étapes de la fin du cycle et la gestion des déchets radioactifs.
     En conclusion du dossier MOX, je vous joins la lettre du collectif de défense contre l'usine MELOX de fabrication de combustible. Il est clair que cette option «mettre un combustible spécialement enrichi au plutonium» n'est pas sans poser de nombreux problèmes à tous les niveaux du cycle. 

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Avignon, le 26 octobre 1988
Monsieur Roger FAUROUX
Ministre de l'Industrie, Ministère de l'Industrie, des P. et T. et du Tourisme
101, rue de Grenelle
75007 PARIS 
     Monsieur le Ministre,
     Nous avons l'honneur de vous soumettre ci-joint le dossier que nous avons constitué et diffusé sur le projet MELOX à Marcoule. L'approbation de ce projet est actuellement sous votre responsabilité.
     L'enquête d'utilité publique, limitée aux communes voisines du site, a eu lieu en Mars 1988. Nous y avons relevé des carences graves concernant l'état de référence radiologique du site. A la demande de la Préfecture du Gard, la COGEMA a complété l'étude d'impact par le document ci-joint que nous avons reçu le 9 septembre 1988.
     Nos inquiétudes étaient fondées principalement sur la présence de plutonium dans les sédiments du Rhône, ce qui est confirmé avec d'autres transuraniens.
     Plus grave encore, nous paraît la radioactivité b de l'eau même du Rhône qui augmente d'un facteur 2 à 5 de l'amont vers l'aval de Marcoule. Ceci nous semble actuellement une menace directe pour les nappes phréatiques qui alimentent en eau la population.
     Vu les problèmes d'effluents de Marcoule, le plus ancien centre de retraitement de France, le projet MELOX nous apparaît comme une fuite en avant qui procurera peu d'emplois pour l'investissement annoncé, et qui augmentera à plusieurs niveaux des risques inacceptables pour la population, risques dont les habitants concernés ont pleine conscience, comme le montre à St-Laurent-des-Eaux, où l'un des réacteurs a été chargé en MELOX fin 1987, l'opposition d'une Association de Défense du Val de Loire, fort bien documentée, de quelques centaines de personnes.
     Devant la grave décision qui vous incombe, nous vous demandons, Monsieur le Ministre, d'entendre la voix d'une opposition de citoyens motivés.
     Nous vous demandons aussi, devant les inquiétudes manifestées par les populations du Gard, du Vaucluse et des Bouches-du-Rhône, d'impulser une étude complémentaire de la radioactivité des nappes phréatiques à l'intérieur du site de Marcoule et dans son voisinage.
     En tant que scientifiques, nous demandons à participer aux mêmes prélèvements et nous engageons à en publier les résultats d'analyses préalablement discutés avec les chercheurs de Marcoule. Ce serait, en résumé, la constitution d'un groupe de travail paritaire commun à la société nucléaire et à la société civile, et l'acceptation de contre-expertises.
     Cela se fait actuellement sur les prélèvements ramenés à Tchernobyl deux ans après. De telles possibilités existent déjà chez nos amis de RFA et ont été entérinées par décret en France avant mai 1988.
     Dans l'attente de votre réponse, nous vous prions d'agréer, Monsieur le Ministre, l'expression de notre haute considération.
Pour le Collectif d'Information
sur le Projet MELOX 
André SEVIN
Ingénieur retraité Saint-Gobain 
P.J.:
1. pour signature: Liste des Fédérations et Associations correspondantes du Collectif. 
2. Liste des pièces et dossier diffusé. 
Diffusion: Monsieur le Secrétaire d'Etat aux Risques Technologiques majeurs. Monsieur le Secrétaire d'Etat à l'environnement. Presse nationale - Presse locale - Presse et revues Environnement.
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A VOS MASQUES!
LES ARMES CHIMlQUES REVIENNENT

     22 avril 1915, 5 heures du matin, au-dessus des marais inondés de l'Yser (Belgique), un nuage toxique s'élève des tranchées allemandes vers les soldats belges et français faisant 15.000 victimes dont 5.000 morts. C'était le début de la guerre chimique moderne. Au total, pendant la guerre 14-18, il y aura près de 300.000 morts.
   Le 16 décembre 1987, les Etats-Unis lancent la production industrielle des armes binaires, une nouvelle génération d'armes chimiques. La raison: riposter face à l'arsenal soviétique. Mais les évaluations sont controversées. On sait que les USA disposent de 342.000 tonnes, l'URSS aurait entre 300.000 et 800.000 tonnes...
     Appelée «arme nucléaire du pauvre», facile à réaliser à partir des usines de pesticides implantées dans le tiers-monde notamment par Rhone-Poulenc, Hoffman-Laroche ou Ciba-Geigy, l'arme chimique revient et fait peur. Chaque année une dizaine d'allégations d'utilisation sont lancées, parfois réelles dont celles accusant l'Irak, parfois exagérées ou inventées...
     Mais la peur est fondée: le Pentagone a estimé qu'il pourrait y avoir jusqu'à 12 millions de victimes civiles en 24 heures de guerre chimique en Europe. D'où l'importance des négociations de Genève. Après 20 ans de travaux, un traité multilatéral d'interdiction des armes chimiques pourrait être conclu en 1988, dans la foulée des accords américano-soviétiques sur les euromissiles et sur les armes stratégiques.

GRIP. Groupe de recherche et d'information sur la paix
Rue van Hoorde, 33 - B - 1030 Bruxelles. Tél: 02/241.84.20

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