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N°84/85

NORMES ET SANTE
LE FACTEUR RISQUE
II. LES NORMES DE CONTAMINATION RADIOACTIVE DES ALIMENTS

A. CONSEIL DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

a. PRÉSENTATION DU RAPPORT COM 87/28 FINAL

     Si vous n'êtes pas d'accord avec l'exposé des motifs du pourquoi et du comment sont établies les normes, si vous pensiez que c'était SCIENTIFIQUE, si vous pensez qu'il faut donner votre avis en temps que personne ou mieux en tant que groupe de personnes, intervenez directement au niveau CEE ou au niveau de vos instances. Sinon SCIENTIFIQUEMENT tout continuera comme avant.
     A la lecture des généralités du rapport COM(87)28, on reste pantois:
     Une belle envolée au point 1.1...: «Ces propositions doivent être fondées sur les dispositions applicables en la matière, prévues dans le traité Euratom et établies sur une base scientifique»...
     On constate au point 1 .3. - «l'article 36 du traité de la CEE permet aux Etats membres de déroger, pour des raisons sanitaires, à toutes les obligations concernant la liberté d'importation»... et que 1.6... «il a été tenu compte de paramètres dépassant la compétence du groupe «article 3 .1» tels que les limites imposées par les pays tiers».
     La Science là-dedans n'entre pas pour grand chose.
     Par contre on constate que, à chaud, il n'a pas été possible de fixer des limites: le 23 mai soit près d'un mois après Tchernobyl, il était recommandé de prendre 1.000 Bq par kg pour le Césium. Par contre évidemment l'Iode n'était pas considéré compte tenu de sa période comme le relève l'article 1.5 et que finalement, article 1.6 le 30 mai, on a fixé une limite à 370 Bq/kg pour le lait, les produits laitiers et les produits alimentaires destinés aux nourrissons et une limite à 600 Bq/kg pour les autres produits.
     L'inconvénient du travail qui a été fait c'est que finalement on aboutit à des «limites ad hoc» (cf. article 1.8) à fixer à la lumière du contexte propre à chaque accident.
     Quant à la suite de l'analyse, on sent tout de même que tout n'est pas bien vécu car on a créé un groupe d'experts «ad hoc» et surtout indépendants. Quand on regarde les conclusions des deux groupes d'experts, force est de constater qu'il y a des divergences.

suite:
b. EXTRAITS DU RAPPORT COM 87/28 FINAL

1. Généralités
     1.1. Lors de sa réunion du 12 mai 1986, faisant suite à l'accident du réacteur de Tchernobyl, le Conseil a invité la Commission à établir dès que possible des propositions visant à compléter les Normes de Base Euratom relatives à la protection sanitaire de la population et des travailleurs contre les dangers des rayonnements ionisants[1]. Ces propositions doivent être fondées sur les dispositions applicables en la matière, prévues dans le traité Euratom et établies sur une base scientifique pour la protection sanitaire et la préservation de l'unité du marché intérieur communautaire. Dans sa communication cadre au Conseil du 12 juin[2], la Commission a fait observer qu'elle a déjà entrepris l'étude d'un projet sur les limites à fixer en matière de contamination des produits agricoles. Dans la communication du 20 août concernant l'application du chapitre 3 du traité Euratom «Protection Sanitaire»[3], il est fait observer que la Commission entendait formuler ses propositions sous la forme d'un projet de réglement du Conseil; la présente communication porte sur un premier projet d'un tel règlement.
     1.2. Les Normes de Base actuelles ne stipulent pas des limites de doses applicables en cas d'exposition accidentelle. Aux termes de l'article 45 des Normes actuelles, chacun des Etats membres décide des niveaux d'intervention à retenir comme critères pour l'adoption de contremesures concernant les groupes de population susceptibles de recevoir des doses excédant les limites fixées pour l'exposition contrôlable.
     1.3. A la suite du rejet de matières radioactives dans l'atmosphère pendant l'accident du réacteur de Tchernobyl survenu le 26 avril 1986, des substances radioactives se sont déposées dans de vastes régions de la Communauté au cours des semaines qui ont suivi, entraînant la contamination directe et indirecte des produits agricoles et la nécessité d'examiner de toute urgence les niveaux d'intervention qu'il conviendrait d'appliquer pour la commercialisation de ces produits. Si chacun des Etats membres avait agi indépendamment, il aurait pu en résulter de graves conflits commerciaux étant donné que l'article 36 du traité de la CEE permet aux Etats membres de déroger, pour des raisons sanitaires, à toutes les obligations concernant la liberté d'importation.

p.14
1. Directive du Conseil 80/836/Euratom (J.O. 246 du 17.9.80) modifiée par la directive du Conscil 84/467/Euratom (J.O. L265 du 5.10.84).
2. COM(86) 327 final
3. COM(86) 434 final
     1.4. En conséquence, le 6 mai, après avoir consulté les Etats membres, la Commission a publié la recommandation n° 86/156/CEE[1] fixant des niveaux d'intervention sous la forme de limites de contamination radioactive pour certains produits agricoles; ces limites avaient été conçues pour parer au danger immédiat provenant d'un type particulier de matière radioactive, à savoir l'iode 131. Ce risque étant de durée relativement brève, l'on a ensuite envisagé les risques à long terme associés à la présence d'autres matières radioactives.
     1.5. A la suite de discussions peu concluantes avec les Etats membres, le groupe d'experts nommé pour le Comité Scientifique et Technique pour conseiller la Commission dans l'établissement des Normes de Base Euratom en matière de protection sanitaire, aux termes de l'article 31 du traité Euratom, a été invité à donner son avis de toute urgence. Le 23 mai, le groupe a recommandé de fixer, provisoirement, la limite à 1.000 becquerels (Bq) pour le césium 134 et césium 137 combinés par kilogramme de denrée alimentaire et un groupe de travail a été constitué afin d'examiner l'ensemble de la question des limites applicables en matière de contamination radioactive des denrées alimentaires consécutive à un accident. La limite provisoire s'appliquait précisément au cas de Tchernobyl, en ce qu'elle tenait compte du fait que toutes les formes de matières radioactives autres que celle du césium étaient, à la suite de la décroissance naturelle de l'iode 131, de relativement peu d'importance sous l'angle du risque sanitaire causé par l'intermédiaire des denrées alimentaires.
     1.6. Dans son règlement n° 1/07/86[2], adopté aux termes du traité CEE le 30 mai, le Conseil a fixé des limites qui étaient en fait inférieures à celles recommandées par les experts. Ce faisant, il a tenu compte de paramètres dépassant la compétence du groupe «article 31» tels que les limites déjà imposées par les pays tiers; c'est ainsi que, les Etats-Unis, la Suède et le Canada avaient tous adopté des limites autour de 370 Bq/kg, en ce qui concerne les importations de produits agricoles.

1. J.O. L118/28 du 17.5.86
2. J.O. L146/88 du 31.5.86

     En conséquence, une limite de 370 Bq/kg a été appliquée par le règlement au lait, aux produits laitiers et aux produits alimentaires destinés aux nourrissons et une limite de 600 Bq/kg a été appliquée à tous les autres produits agricoles; si le règlement en soi ne s'appliquait qu'aux importations vers la Communauté[1], il a été convenu qu'aucune limite inférieure ne serait appliquée par les Etats membres en ce qui concerne le commerce intracommunautaire.
     La validité du règlement expirait le 30 septembre 1986 et la Commission a été invitée à présenter immédiatement des propositions détaillées et complètes, basées sur le traité Euratom et en particulier l'article 31, cherchant à établir un système permanent visant à limiter la contamination des denrées alimentaires consécutive à un accident, et complétant les Normes de Base relatives à la protection sanitaire.
     1.7. En conséquence, la Commission a invité le groupe «article 31» à accélérer ses travaux dans ce domaine et, le 3 septembre, le groupe a formulé ses recommandations sous la forme d'un rapport indiquant les bases scientifiques d'un système permanent de limitation de la contamination, décrit au chapitre III ci-dessous.
     1.8. Toutefois, le système recommandé ne comprend pas des limites permanentes bien déterminées mais au contraire, prévoit des limites ad hoc, à fixer à la lumière du contexte propre à chaque accident en particulier; en tant que tel il nécessite la création d'une procédure de prise de décision visant à fixer ces limites en priorité après un accident. Cette méthode s'aligne entièrement sur celle proposée précédemment concernant d'autres aspects de la protection contre les rayonnements ionisants en cas d'accident, en particulier dans un rapport[2] établi par le Groupe concernant les critères de dose permettant de décider de l'évacuation et de la mise à l'abri de la population et de la distribution de comprimés d'iode en tant que mesure prophylactique à la suite d'un accident de réacteur.

suite:
1. En attendant l'établissement de ce règlement, les importations de certains pays tiers avaient été provisoirement suspendues au titre du règlement n° 1382/86 du Conseil (J.O. L l27/1 du 13.5.86).
2. "Critère de radioprotection pour limiter l'exposition du public en cas de rejet accidentel de substances radioactivess", doc. V /5290/EN F, juillet 1982.

     En outre, la même méthode, destinée à être appliquée sur une base plus large, et comprenant en particulier le contrôle des denrées alimentaires contaminées, a été recommandée par la Commission Internationale de la Protection Radiologique[1].
     1.9. En outre, la Commission a décidé, en mai, de nommer un groupe ad hoc d'hommes de sciences indépendants de haut niveau chargés de la conseiller sur les implications de l'accident de Tchernobyl, pour ses futurs travaux en matière de radioprotection en général.
     1.10. En septembre[2], une prorogation du règlement 1707/81 a été proposée pour les raisons suivantes:
     - le rapport du groupe «article 31» a confirmé que la recommandation originale de 1.000 Bq/kg pour le césium 134 et le césium 137 était prudente du point de vue sanitaire;
     - il ne serait pas indiqué de supprimer tous les contrôles;
     - le règlement ne provoquait pas de difficultés commerciales excessives.
     1.11. Le 3 septembre[3] le Conseil a adopté le règlement 3020/86 prorogeant la validité du règlement 1707/86 jusqu'au 28 février 1987. En outre, la Commission s'est engagée de présenter des propositions visant à fixer un système permanent au plus tard à la fin de novembre 1986. Ces propositions font l'objet de la présente communication.

1. Publication 40 du CIPR, annales du CIPR, volume 14/2, 1984. 
2. J.O. L 146/88 du 31.5.86. 
3. J.O. L280/79 du 1.10.86.

2. Nature de la radioactivité et des rayonnements nucléaires

     2.1. Il est indispensable de comprendre la nature de la radioactivité et des rayonnements nucléaires pour évaluer les problèmes scientifiques qui doivent être résolus lorsqu'on fixe un système de contrôle de l'exposition à des rayonnements nucléaires.
     2.2. L'exposition à des rayonnements nucléaires implique le dépôt d'énergie dans les tissus de l'organisme, résultant de l'absorption, totale ou partielle, de rayonnements par l'organisme. On sait que pour des expositions relativement élevées, ce dépôt d'énergie peut entraîner une lésion cellulaire susceptible de provoquer, à long terme, le cancer, même en l'absence de tout signe immédiat d'une telle lésion(1). Ces rayonnements peuvent provenir de processus naturels, tels qu'ils interviennent dans le soleil et autres étoiles, ou de processus artificiels, comme ceux qui sont induits dans les réacteurs nucléaires. En outre, il existe une catégorie de matériaux, appelés matières radioactives, qui émettent constamment des rayonnements nucléaires, indépendants de tout processus dans lequel elles peuvent être ou ne pas être impliquées. On sait que tous les éléments chimiques possèdent de telles formes radioactives qui, tout en émettant des rayonnements, continuent à se comporter chimiquement et métaboliquement de la même manière que leurs formes correspondantes non radioactives, c'est-à-dire «stables».


(1) Commentaire Gazette: c'est le concept de seuil
p.15

     2.3. L'émission de rayonnements nucléaires par ces matières est une caractéristique inhérente au processus de désintégration radioactive, par lequel les matières essayent de revenir à une forme stable; le déroulement de ce processus s'accompagne d'une réduction de la radioactivité de la matière(2). La vitesse de réduction est caractéristique de la forme particulière de la matière radioactive impliquée et s'exprime en termes de demi-vie, c'est-à-dire de la période nécessaire pour que la radioactivité diminue de moitié et pour que l'intensité des rayonnements émis diminue en conséquence. La demi-vie de la matière peut aller d'une infime fraction de seconde à plusieurs millions d'années, selon la forme particulière concernée. Ainsi, dans l'environnement terrestre, l'homme est constamment exposé à des rayonnements provenant de matières radioactives naturelles possédant une demie-vie si grande qu'elles existent depuis la formation de la terre, ainsi qu'à des rayonnements provenant de l'espace inter-sidéral, les «rayonnements cosmiques», du soleil et d'autres étoiles. Certaines matières radioactives naturelles sont même incorporées dans le corps humain du fait de leurs propriétés chimiques et métaboliques.
     2.4. Le taux d'émission de rayonnement par des matériaux radioactifs à tout moment est mesuré en becquerels (Bq); les concentrations radioactives peuvent donc être exprimées en becquerels par kilogramme (Bq/kg) du matériau en question. C'est ainsi qu'une forme naturelle de potasse radioactive, appelée potassium 40, existe dans nos corps à un niveau de quelque 70 Bq/kg de tissu; sa demi-vie dépasse 1.000 millions d'années et les rayonnements qu'il émet ne diminuent par conséquent pas pendant la durée d'une vie humaine.(3)
     2.5. L'exposition aux rayonnements est mesurée en sievert (Sv) ou en subdivision de cette unité; pour les besoins du présent projet il sera utile d'utiliser le millesievert (mSv), qui équivaut à 1/1000 de sievert.(4) En moyenne, nous sommes soumis dans le monde entier à une exposition (ou dose) de 2 mSv par an de rayonnements naturels, dont 1,3 mSv environ proviennent de matériaux radioactifs existant dans la nature, tels que le potassium 40 qu'absorbe le tissu humain. A certains endroits, l'exposition aux rayonnements naturels peut être dix fois supérieure à la moyenne du monde entier; à titre de comparaison, même les membres de la population vivant à proximité d'une centrale d'énergie nucléaire ne sont exposés que rarement à une dose annuelle excédant 0,02 mSv due au fonctionnement de la centrale.
     2.6. Il est important de noter que le taux d'exposition découlant d'une quantité quel qu'elle soit de matériaux radioactifs et exprimée en becquerels ne dépend pas seulement de l'intensité des rayonnements, mais également(5) de sa nature exacte, qui dépend elle-même du type spécifique de matériaux radioactifs concernés.
Commentaires Gazette:
(2) De la bouillie pour chat. En plus le choix des termes est curieux. Pourquoi les corps «essayent de revenir à un état stable»? Ils n'essayent pas, c'est la logique de l'émission radioactive. Il y a un mélange de terme d'où des choses curieuses. L'énergie de la particule émise ne change pas. Ce n'est donc pas l'intensité mais la quantité qui diminue.
(3) Une forme naturelle de potasse? Ca signifie quoi exactement?
(4) Mille-sievert: jolie expression pour millisievert et pourquoi équivaut: le millisievert est le milliéme de sievert par définition.
(5) Pas clair du tout: bien sûr cela dépend de la particule émise a, b ou g mais aussi de l'énergie transmise à cette particule lors de la désintégration radioactive.
suite:
     Par ailleurs, l'exposition totale mesurée au cours d'un laps de temps quel qu'il soit dépendra également de la vitesse à laquelle l'intensité des rayonnements diminue (c'est-à-dire la demie-vie) et des processus chimiques et biologiques qui peuvent faire en sorte que tel matériau est transféré hors du système; là encore, ces aspects dépendent du matériau radioactif spécifique utilisé. Il n'existe par conséquent pas de rapport fixe entre le degré de radioactivité exprimé en becquerels et l'exposition subie exprimée en sieverts.(6)
     2.7. L'un des principes fondamentaux de la radioprotection est que, même s'il n'est pas possible d'établir des différences dans le nombre de cas de cancers correspondant à des doses mesurées en mille sievert(7), on suppose néanmoins que le risque de cancer est proportionnel à l'exposition subie et que les effets provoqués(8) par de faibles doses sont masqués par le fait que des cas de cancer peuvent se déclarer pour d'autres raisons. On est parti de cette supposition dans l'intention d'obtenir une marge de sécurité(9) pour toutes les erreurs susceptibles de se produire, il y a en effet de bonnes raisons de penser que le rapport actuellement utilisé et qui repose sur des expositions à des doses beaucoup plus élevées, telles que celles dont on a fait l'expérience avec des armes atomiques au Japon, est dans la pratique de nature très conservateur.
     Les limites fixées par les Normes de Base Euratom pour les expositions contrôlables sont établies pour assurer que le risque de cancer, même dans une optique pessimiste, est très faible par rapport à tous les risques auxquels nous sommes exposés dans la vie quotidienne.(10)

3. Recommandations du groupe d'experts «article 31»
     3.1. Le principe qui gouverne l'instauration d'un système souple de maîtrise de l'exposition à la suite d'un accident est que le coût social et les risques résultant de l'adoption d'une mesure quelconque ne doivent pas dépasser ceux liés à l'exposition radiologique évitée. C'est pourquoi, deux «niveaux d'exposition de référence» en cas d'accident (NER) sont donnés à titre indicatif pour chaque type de mesure envisagé:
     - un niveau inférieur au-dessous duquel il est extrêmement peu probable qu'une action se justifie pour des raisons de protection radiologique et
     - un niveau supérieur auquel il est pratiquement certain qu'une action a été tentée pour des raisons de protection radiologique.(11) Le niveau réel auquel la mesure devrait être mise en œuvre se situera entre ces deux extrêmes, selon les circonstances particulières résultant de l' accident.


Commentaires Gazette:
(6) Rapport unique et non fixe. 
(7) Millisievert. 
(8 et 9) Affirmation péremptoire mais contestable. Tout le problème des faibles doses repose sur cette interprétation officielle, car ce que nous affirmons est qu'on n'a aucune certitude sur les effets de faibles doses par manque de recul et d'études. 
(10) Affirmation fausse. 
(11) Doit être tenté et non pas "a été".
p.16

     3.2. Le groupe d'experts de l'article 31 a constaté que les actions nécessaires pour maîtriser la distribution et l'importation de denrées alimentaires dans la Communauté sont complexes et ont des conséquences sociales et économiques considérables. Pour la première année suivant un accident, il propose les NER recommandés par la Commission Internationale de Protection Radiologique pour l'exposition aux rayonnements provenant des denrées alimentaires[1], à savoir un niveau inférieur de 5 mSv et un niveau supérieur de 50 mSv[2]. Pour les années suivantes, les niveaux recommandés sont de 1 et 10 mSv étant donné que les niveaux de contamination seront plus faibles et que le temps aura permis de mettre sur pied, s'il y a encore lieu, des moyens de protection efficaces et économiques. Les experts notent encore que la probabilité d'un accident touchant de vastes zones de la Communauté est suffisamment faible pour qu'il soit possible 1 d'examiner chaque accident séparément.(12)

1. Publication CIPR 40, Annales de la CIPR Vol. 14/2, 1984.
2. L'exposition particuliére subie par des organes déterminés, par exemple de l'irradiation de la thyrolde par l'iode 131, peut déboucher sur des critéres différents. Pour la simplicité, ces cas ne sont pas examinés dans la présente communication mais ils sont pris en compte dans les limites de contamination proposées dans le projet de réglement en annexe.

     3.3. Toutefois, pour des accidents moins graves, des niveaux inférieurs à ceux proposés peuvent convenir pour des contre-mesures plus simples que celles requises pour contrôler les denrées alimentaires à l'échelle communautaire.
     3.4. Ayant déterminé des critères d'exposition, il est nécessaire de fixer des niveaux de contamination correspondants pour les denrées alimentaires, c'est-à-dire des niveaux de référence dérivés (NRD). Pour cela, il faut tenir compte des taux de consommation de denrées alimentaires afin d'évaluer l'incorporation éventuelle de radioactivité résultant de tout niveau quelconque de contamination. En outre, comme dit précédemment, le rapport entre l'incorporation et la dose qui en résulte dépend du type particulier de rayonnement impliqué. Enfin, le passage dans le corps humain de toute source de radioactivité sera fonction de son comportement métabolique qui variera également d'un individu à l'autre, d'une manière générale, mais en fonction de l'âge, en particulier.(13)
     3.5. En conséquence, les membres du groupe de travail «Article 31» ont pris en considération 19 sources radioactives distinctes (également dénommées «radionucléides») et trois groupes d'âge, le nourrisson d'un an, l'enfant de 10 ans et l'adulte. Pour chaque groupe d'âge, ils ont évalué la consommation annuelle type de cinq composantes principaux de l'alimentation, à savoir les produits laitiers, la viande, les fruits et légumes, les céréales et l'eau potable. Au total ceci donne lieu à près de 300 combinaisons différentes pour lesquelles la concentration radioactive (Bq/kg) correspondant à une dose donnée (mSv) a été calculée. 

suite:
Afin d'obtenir un résultat plus facilement utilisable, les radionucléides ont été ensuite groupés en trois catégories et le nombre de produits alimentaires a également été ramené à trois du fait du regroupement de la viande, des fruits, des légumes et des céréales en une seule catégorie appelée «autres denrées alimentaires principales». Pour chacune des neuf combinaisons ainsi déterminées, les niveaux de contamination obtenus pour un niveau de dose donné correspondent en général aux niveaux les plus bas pour chaque nucléide dans la catégorie en question, indépendamment du groupe d'âge du consommateur.
     3.6. Le rapport du groupe de travail a été approuvé par le groupe de l'Article 31 qui a transmis ses recommandations à la Commission[1]. Il convient de souligner un certain nombre de points importants dans les recommandations du groupe.
     a) Comme indiqué précédemment, les niveaux de référence inférieurs recommandés sont destinés à faire en sorte que l'exposition ne dépasse pas 5 mSv au cours de la première année et 1 mSv les années suivantes.
     b) On suppose que l'application d'une limite permettra de s'assurer que sur une année complète le niveau de contamination moyen des produits consommés ne dépassera pas 10% de cette limite. Cette supposition est basée sur:
     - la réduction importante des niveaux de contamination au cours de la première année, due à des processus dans le milieu terrestre et à la décroissance radioactive des nucléides à courte demie-vie;
     - le fait que tous les produits consommés ne seront pas contaminés jusqu'à la limite adoptée, même au début. En outre, la valeur de 10% est considérée comme suffisamment prudente pour qu'il soit inutile de tenir compte des effets additionnels des trois catégories de denrées alimentaires et les trois catégories de nucléides.
     c) Jusqu'à présent, il n'existe pas de données reconnues au niveau international concernant les effets de l'âge sur le comportement métabolique. Les experts ont utilisé les meilleures données disponibles.
     d) Exceptionnellement, les niveaux de concentration en nucléides des «produits laitiers» ne sont pas basés, en ce qui concerne la catégorie de nucléides contenant des radionucléides de césium, sur la valeur de nucléide la plus basse, mais sur le césium 134. Cela est justifié si l'on considère les voies de contamination des denrées alimentaires susceptibles de résulter des accidents de réacteurs.
Commentaires Gazette:
12. Méconnaissance des probabilités: c'est donc discutable comme approche car une probabilité faible n'a jamais fixé l'heure de sa réalisation. Donc on peut avoir successivement 2 accidents au même endroit. Demandez à Sandoz ce qu'il pense de l'année 1987. 
13. On attend les normes pour enfant en particulier en France.
p.17
1. Doc. N°V /2950/B6 EN.
4. Avis du groupe ad hoc d'experts scientifiques de haut niveau
(pages 12-13 du rapport COM 87-28 final)

     4.1. Comme indiqué dans le paragraphe 1.9., la Commission a décidé, sans porter préjudice à l'Article 31 du traité Euratom, de constituer un «Comité ad hoc d'experts scientifiques indépendants de haut niveau» (ci-après appelé Comité des Sages - CDS) pour évaluer les résultats scientifiques des recherches en cours suite aux incidents nucléaires récents, pour envisager les implications éventuelles pour les Normes de Base et les niveaux de référence en cas d'accident et pour conseiller la Commission quant aux futures actions en radioprotection.
     4.2. Les Normes de Base imposent entre autres des limites à l'exposition de la population applicables à des sources d'exposition telles que les installations nucléaires en fonctionnement normal. Suite à un accident, lorsque la source n'est plus sous contrôle, un système de niveaux de référence d'urgence (ERLs) [Emergence Reference Levels] a été recommandé par le groupe d'experts de l'Article 31 qui, pour traduire ces niveaux en quantités facilement utilisables en pratique, a calculé des niveaux dérivés de référence de contamination radioactive pour les produits alimentaires.
     4.3. En ce qui concerne les Normes de Base, le CDS a recommandé qu'elles doivent rester compatibles avec les recommandations de la CIPR. Jusqu'à présent, les Normes de Base reflètent les recommandations de la CIPR de 1976 et 1980, établissant pour le public une limite d'exposition annuelle de 5 mSv. Cependant, en 1984, la CIPR a fait observer qu'une limite de dose annuelle de 5 mSv ne devrait être permise que pour quelques années et que la dose moyenne annuelle sur une vie ne devrait pas excéder 1 mSv. Ceci n'a pas encore été pris en compte dans les Normes de Base. Cependant, la conformité aux limites actuelles des Normes de Base et les pratiques opérationnelles courantes des centrales nucléaires dans la Communauté entraînent une dose au public loin en-dessous de 1 mSv. Le Programme de recherche en Radioprotection de la Commission a contribué à la préparation des recommandations susmentionnées.
     4.4. En ce qui concerne les niveaux de référence de dose en cas d'accident, la CIPR a publié un niveau inférieur et supérieur, respectivement 5 et 50 mSv, de dose (voir § 3.2.) provenant des aliments contaminés consommés durant la première année et le groupe d'experts de l'Article 31 est en accord avec ces valeurs. Le CDS a avalisé cette approche et a mis l'accent sur le fait que l'objectif du choix des niveaux de référence en cas d'accident est la limitation de la dose au groupe d'individus les plus exposés.
     4.5. Pour l'établissement de niveaux dérivés de référence dans les aliments, aucune indication provenant d'organisations internationales n'est encore actuellement disponible et des approches différentes peuvent être envisagées.
     4.6. Le Groupe d'Experts de l'Article 31 a appliqué une méthodologie dosimétrique/métabolique. Le CDS considère cette approche raisonnable, mais a mis l'accent sur la nécessité de comparer les recommandations susmentionnées avec les résultats attendus d'approches plus complètes, particulièrement par le biais des modèles radioécologiques dynamiques, ceux-ci étant capables de déterminer l'évolution future de la contamination des aliments. Les différents types d'approche sont en cours de développement dans le programme de recherche de la Communauté.

suite:
     4.7. Les calculs faits par le Groupe d'Experts de l'Article 31 sont basés sur certaines hypothèses concernant l'importance de la contamination de la chaîne alimentaire. En vue de confirmer ces hypothèses, le CDS a recommandé d'entamer des études détaillées sur des situations particulières, y compris les habitudes alimentaires, qui peuvent identifier l'existence de problèmes locaux. Si de tels problèmes devaient exister, il serait nécessaire d'introduire des niveaux dérivés de référence à appliquer dans la région considérée, aussi bien en termes d'ingestion annuelle d'un radionucléide particulier, qu'en termes de concentration totale de radioactivité dans les aliments pour des contrôles dans la région concernée.
     4.8. Le CDS a également pris en considération le moment à partir duquel les limites de contamination des aliments, due à un accident, peuvent être supprimées. Il a conclu que ceci ne peut se faire avant que la dose extrapolée pour le groupe d'individus le plus exposés, après l'arrêt des règlementations communautaires, ne soit substantiellement réduite, notamment en dessous de la moitié du niveau inférieur de référence.

c. GROUPE D'ÉTUDE SUR LA «PROPOSITION D'UN RÈGLEMENT (EURATOM) DU CONSEIL FIXANT LES NIVEAUX MAXIMA ADMISSIBLES DE RADIOACTIVITÉ
POUR LES PRODUITS AGRICOLES ET L'EAU POTABLE»
Rapport COM 87-28 final 
Observations de l'expert CFDT auprès de ce groupe d'études 

1ère Partie: communication de la Commission

     1. Dans le texte de la communication de la Commission au Conseil, il est souvent fait référence au caractère «scientifique» de l'établissement des Normes. Il est cependant nécessaire de remarquer que ces normes sont fixées au moyen de deux paramètres:
     - la relation «dose-effet» qui résulte elle-même:
     · des données épidémiologiques portant sur des affections radio-induites
     · d'une hypothèse de linéarité entre la dose et les effets aléatoires, sans seuil; 
     - du «risque acceptable»
     Si la relation «dose-effet» se fonde sur des évaluations scientifiques, il n'en va pas de même pour le «risque acceptable» qui est de nature sociale et politique.
     La Norme n'est donc pas une frontière entre la protection absolue et l'apparition de risque grave.
     2. Ces considérations m'amènent à nuancer les recommandations des experts selon lesquelles (articles 3.1. et 3.2.) le niveau de 5 mSv doit être dépassé pour pouvoir justifier une action. En effet:
     a) il est nécessaire de recommander des précautions élémentaires d'hygiène pour la population en général et pour la population agricole en particulier;
     b) l'évaluation prévisionnelle de la dose résultant de l'irradiation externe et de la contamination interne, consécutive à une situation accidentelle survenue sur un territoire donné, n'est pas une tâche facile. La complexité des trajectoires de ce que l'on a appelé «Le nuage radioactif de Tchernobyl» en atteste largement;

p.18

     c) sur un même territoire national, les trajectoires du nuage, combinées avec les variations météorologiques locales (pluie notamment) et celles du relief géographique, peuvent conduire à des situations très diversifiées du point de vue de l'exposition aux rayonnements. Une règle unique fondée sur un seuil fixé à l'avance ne se prêtera guère à ce type de situations;
     d) une dose de 5 mSv délivrée à un million d'individus adultes induira un peu plus de 60 cancers mortels (si l'on se réfère à la valeur de la relation «dose-effet» proposée par la CIPR). Il est donc nécessaire de ne pas attendre ce niveau d'effet pour agir.
     3. La rédaction de l'article 3.3. introduit une confusion. Il est nécessaire de distinguer la cause qui est la gravité de l'accident, de l'effet constitué par l'impact radiologique. On peut imaginer un accident grave sans émission de matières radioactives dans l'environnement et un accident endommageant faiblement l'installation mais se traduisant par des rejets significatifs.
     4. L'article 3.6. suppose qu'en fixant une limite de dose à ne pas dépasser, la distribution réelle des doses est telle que la valeur moyenne, relative à un large groupe, est égale au dixième de la valeur maximale. Ce concept a été rapporté en 1977 par la CIPR dans sa publication n° 26. Elle concernait uniquement les personnes «professionnellement exposées». La CIPR avait supposé que ce constat, qui n'est d'ailleurs pas vérifié dans tous les cas (ex: mineurs d'uranium, centrales électronucléaires américaines, personnel des entreprises extérieures intervenant dans les centrales nucléaires) pouvait aussi s'appliquer pour le public. Cependant, aucune preuve n'a été apportée. Or le groupe de travail accepte cette donnée comme «suffisamment prudente». Je pense que cette considération manque de rigueur.
     Par ailleurs, à l'alinéa C, il est question du manque de données relatives à l'établissement de modèles dosimétriques pour l'enfant en bas âge et l'adolescent. Il faut cependant noter que le Comité II de la CIPR a déjà proposé quelques limites annuelles d'incorporation - LAI - pour l'enfant, et que des organismes, comme le NRPB au Royaume-Uni par exemple, ont calculé des LAI pour de nombreux radionucléides.
     5. La rédaction de l'article 3.7 est trop vague. Elle ne propose aucune règle claire pour la révision des recommandations. Ces dernières pourraient résulter, par exemple, de données techniques et scientifiques comme:
     a) la proposition par la CIPR de nouveaux modèles dosimétriques relatifs à l'incorporation par voie respiratoire ou digestive de produits radioactifs par des enfants;
     b) la révision de la valeur de la relation «dose-effet» résultant par exemple de nouvelles données épidémiologiques, du réexamen des doses délivrées à Hiroshima et Nagasaki, ou des données épidémiologiques relatives à l'exposition professionnelle.
     Il est nécessaire d'établir une règle du jeu. Dans le cas contraire, la révision sera frappée d'une suspicion légitime.
Remarque générale Gazette: Les articles 2 et 3 de cette communication comportent de nombreuses inexactitudes techniques et scientifiques. Leur rédaction devrait être entièrement revue. Même les unités du système international sont improprement utilisées (mille-sievert pour millisievert - article 2.5). 
suite:
2° Partie: proposition d'un règlement

     Article 2.1
     6. La possibilité d'adapter le règlement, «à chaud», lors d'un accident retire tout crédit au règlement applicable immédiatement. Un tel dispositif nous ramène nécessairement à «la case départ», qui est celle que l'Europe a connu avant Tchernobyl.
     7. Si le contenu de l'article 2.2 est clair, l'alinéa b doit être complété par la phrase suivante: «Cette adaptation ne peut consister qu'en une réduction des niveaux maxima admissibles retenus à l'alinéa a de l'article 2.1
     8. L'article 7 stipule que les produits agricoles contaminés au-dessus des normes ne doivent être ni commercialisés ni exploités. Cependant aucune recommandation n'est formulée relativement au stockage provisoire ou à la destruction éventuelle de certains produits, notamment ceux contaminés par des radionucléides à vie longue.
     9. Appendice 1
     - Note n°1: la protection du nourrisson jusqu'à l'âge de quatre à six mois est insuffisante.
     - Note n°3: je trouve que la disposition qui consiste à tolérer, pour les denrées secondaires, un niveau de contamination dix fois supérieure à celle des denrées principales est imprudente. En effet, si la fraction pondérale de ces produits représente 5 à 10% de l'alimentation générale, leur contribution reviendra à multiplier par un facteur 1,5 à 2 la dose reçue.

3° Partie: avant-projet d'avis du groupe d'étude

     10. Cette nouvelle proposition de règlement est plus claire dans son expression que celle qui a été présentée pour avis au groupe de travail.
     Elle présente par ailleurs plusieurs points positifs nouveaux avec notamment:
     a) la proposition d'élaborer des protocoles d'échantillonnage, de mesures, et de présentation des résultats.
     L'absence de ces dispositifs a fait cruellement défaut au lendemain de l'accident de Tchernobyl. De nombreux résultats n'ont pu être intégrés dans des travaux de synthèse car ils étaient peu interprétables ou incomplets.
     b ) la formation et l'information du public.
     c ) la nécessité d'établir un plan d'urgence communautaire.
     Ce dernier devrait cependant être précédé par l'établissement de plans d'urgence nationaux. La pertinence de ces dispositions nationales ne peut être validée que par des essais impliquant dans la pratique les acteurs du plan d'urgence.
     d) les mesures à prendre pour réduire la contamination du bétail.
     Ces mesures ne sont pas nécessairement très coûteuses, et plus généralement, les coûts qu'elles peuvent entraîner seront bien inférieurs à la perte sèche des produits (viande, lait). Il s'agit en effet de bannir la consommation d'eau de pluie, d'éviter la mise au pré du bétail, de retarder la collecte du foin, etc.
     e) le problème du stockage ou de la destruction des produits «hors-norme» est soulevé.

p.19

     Il est cependant inutile de faire état des «références aux scientifiques» - article 2.3 - qui ne constituent pas réellement un paramètre pertinent. En effet, de très nombreux pays ont adopté les «normes fondamentales de radioprotection» de la CIPR, ce qui ne les a pas empêché d'avoir arrêté, en matière de contamination radioactive des produits consommables, des normes variant dans un rapport variant de 1 à 100.
     Comme je l'ai expliqué au point l, ces normes sont arrêtées en fonction de deux paramètres:
     - paramètre scientifique: la relation «dose-effet»
     - paramètre sociopolitique: le «risque acceptable».
     Cette deuxième donnée constitue à l'évidence le paramètre le plus important. C'est donc un faux fuyant que d'évoquer le souci d'obtenir «les données scientifiques les plus récentes».
     12. L'article 3.4 appuie l'idée d'avoir une norme qui peut être modifiée par le caractère spécifique de l'accident.
     Cette disposition est à mon avis mauvaise, car elle aura pour effet de réduire le crédit apporté aux règlements communautaires. L'expérience de Tchernobyl a montré la difficulté qu'il y avait d'arrêter «à chaud» une norme. La révision peut nous ramener dans cette situation difficile.
     On pourrait cependant admettre que les règles relatives à l'exportation soient fixées mais qu'au niveau d'un Etat membre, touché par un accident nucléaire, une modulation des normes nationales puisse être apportée sous la responsabilité de l'Etat concerné.

d. LE PARLEMENT EUROPÉEN ET LES NORMES DE CONTAMINATION RADIOACTIVES  DES ALIMENTS

     Très peu de publicité a été faite en France au sujet de la proposition de la Commission des Communautés Européennes au Conseil concernant un règlement fixant les niveaux maximaux admissibles de radioactivité pour les denrées alimentaires. Cette proposition a été modifiée par un vote du Parlement Européen le 28 octobre dernier en faveur d'une diminution des valeurs maximales de radioactivité pour les denrées alimentaires, les aliments pour le bétail et l'eau potable en cas de niveaux anormaux de radioactivité ou d'accident nucléaire

suite:
     La modification du texte initial a suivi la proposition émanant de la Commission de l'Environnement, de la Santé publique et de la Protection des consommateurs (Rapporteur Madame Undine Bloch von Blotnitz). Les valeurs maximales demandées par le Parlement Européen sont données dans le tableau ci-dessous. Elles séparent l'iode 131 du strontium 90 et sont de 4 à 20 fois plus faibles que celles proposées par la Commission des Communautés Européennes: on comprend pourquoi cela s'est très peu su en France. Il va être intéressant de suivre le conflit qui ne va pas manquer de s'ensuivre entre le Parlement Européen et la Commission des Communautés Européennes. «Le vote sur le projet de résolution législative est reporté jusqu'à ce que cette position (de la Commission des CE) soit connue». Les arguties juridiques ont l'air très subtiles. Certains amendements au texte initial de la Commission des CE adoptés par le Parlement comportent des précisions intéressantes, les Etats membres sont tenus de maintenir, en prévision d'éventuelles catastrophes, des stocks de denrées alimentaires destinés à des groupes à risques comme les femmes enceintes, les enfants en bas âge et les malades. Le niveau maximal de contamination radioactive de ces denrées est fixé au 1/l0e des valeurs retenues dans la présente proposition.
     D'autres amendements intéressants:
     «étant admis que toute dose de rayonnements entraîne une augmentation du risque pour la santé humaine, toute fixation de niveaux limites en matière de doses ou en matière de contamination de produits agricoles et d'eau potable doit être considérée comme arbitraire; mais que aussi longtemps que l'on utilise la technique nucléaire et qu'il y a risque d'accident nucléaire il est nécessaire de fixer et d'appliquer de tels niveaux».
p.20
Valeurs maximales pour les denrées alimentaires, les aliments pour le bétail et l'eau potable (Bq/kg ou Bq/l)
 
Produits laitiers
Autres denrées alimentaires
Eau potable et liquides destinés à la consommation
Aliment pour bétail
I 131
130
1.300
110
*
Sr 90
  25
   150
 20
*
Isotopes de Pu et d'éléments tranplutoniens à émission a notamment Pu 239 et Am 241
    2
        8
  1
*
Tout autre radionucléide à période radioactive supérieure à 30 jours, notamment Cs 134 et Cs 137
  100
    125
  80
250
* pas de valeur d'application immédiate
     «ces niveaux doivent tenir compte des avis scientifiques les plus récents à l'échelle internationale tout en reflétant le point de vue selon lequel il est nécessaire d'accorder la priorité à la protection de la santé»
     «le respect des valeurs maximales doit être l'objet de contrôles appropriés; qu'à cet effet il convient de prescrire une procédure uniforme; que les résultats des contrôles doivent être documentés et être portés à la connaissance de l'opinion publique»
     Il a été précisé que «des normes de sécurité identique ne garantissent pas une sécurité identique, puisque les régimes alimentaires changent pour chaque groupe de population et pour chaque région»... que «pour les radiopathies stochastiques (leucémie, cancer, malformations génétiques) il n'existe pas en l'état actuel des connaissances scientifiques, de seuil en-dessous duquel la probabilité d'apparition d'une telle affection est nulle, il convient de maintenir la charge radioactive à un niveau aussi bas que possible afin de minimiser l'ampleur des dommages; que cet impératif vaut plus particulièrement pour les populations qui ont besoin d'être spécialement protégées»
     «considérant qu'il s'avère nécessaire d'établir un système permettant à la Communauté en cas d'accidents nucléaires ou d'autres événements entraînant une contamination radioactive de produits agricoles ou d'eau potable, de fixer les valeurs maximales en matière de contamination radioactive afin de protéger la population dans son ensemble et en particulier les groupes à risque».
     Il est même question que doivent participer «à égalité de droits, aux travaux du comité consultatif (qui doit faciliter la fixation de valeurs maximales) comme à ceux du Comité de gestion, des scientifiques travaillant en toute indépendance par rapport à l'industrie nucléaire et faisant preuve d'esprit critique à l'égard de l'énergie nucléaire»...

e. QUI SONT CES EXPERTS SCIENTIFIQUES QUI DOIVENT RECOMMANDER LES NORMES DE CONTAMINATION RADIOACTIVE DES ALIMENTS?

     Ce sont les mêmes experts qui étudient pour la Commission des Communautés Européennes les conséquences de l'accident de Tchernobyl. M. Alex Falconer, député britannique au Parlement Européen, a posé la question écrite suivante (9 juin 1986 86/C330/43):
Objet: Experts étudiant pour la Commission les conséquences de l'accident de Tchernobyl
     Lors de la réunion du 22 mai 1986 de la commission de l'environnement, de la santé publique et de la protection des consommateurs, le Commissaire Clinton-Davis a parlé d'un «groupe 31» d'experts chargés de conseiller la Commission au sujet de l'accident de Tchernobyl.

suite:
La Commission peut-elle indiquer:
     Qui sont les membres de ce «groupe 31»?
     Quelle est leur expérience dans le domaine de la radioactivité et quels emplois ont-ils occupés dans ce domaine?
     3. Comment ont-ils été nommés et par qui?

Réponse donnée par M. Clinton-Davis au nom de la Commission
(16 septembre 1986)

     1. Les experts visés à l'article 31 du Traité Euratom sont actuellement les suivants:
Belgique: Prof. Dr. A. Lafontaine, Prof. P. Recht;
Danemark: M.H.L. Gjorup, M. Per Grande;
République fédérale d'Allemagne: Dr. J. Mehl, Prof. Dr. A. Kaul, Prof. Dr. rer. nat. Dr. med E. Oberhausen;
Grèce: Dr. A. Hadjiantoniou, Prof. Ch. C. Proukakis;
France: Dr. H. Jammet, Prof. P. Pellerin, Prof. J. Chanteur;
Irlande: Mr l.R. McAulay, Dr. George J. Duffy;
 Italie: Prof. G. Campos Venuti, Prof. Dott. A. Farulla, Dott. A. Susanna; 
Luxembourg: M. Feider, Dr. P. Kayser;
Pays-Bas: Drs. J .A.G. Davids, Drs. J. Weber;
Royaume-Uni: Dr. K.P. Duncan, Mr H.J. Dunster, Mr E.A. Ryder.
     2. et 3. Comme le stipule l'article 31 du Traité d'Euratom ces experts sont désignés par le Comité Scientifique et Technique mentionné à l'article 134 du Traité d'Euratom, qui tient compte de leur qualification, leur compétence et leur expérience professionnelle dans le domaine de la Santé Publique, de la radiobiologie, de la radiologie médicale, de la biophysique, de la radioprotection, de la génétique et de l'hygiène du travail. La durée du mandat des experts visés à l'article 31 est de 5 années. Il est renouvelable. Le Comité Scientifique et Technique n'a pas encore désigné d'experts espagnols et portugais. 

Commentaire Gazette:
     Ainsi pour la France les experts scientifiques sont: - le Dr. Jammet, ancien employé du CEA et actuellement conseiller technique auprès du Haut Commissaire du CEA. Profitons de l'occasion pour mentionner que le Dr. Jammet est aussi membre de la Commission Principale de la CIPR
- le Pr. Pellerin qui a eu son moment de gloire en mai 1986 pour avoir arrêté net le nuage radioactif de Tchernobyl sur la ligne Maginot. Monsieur Pellerin est membre d'une des commissions spécialisées de la CIPR
- le Pr. Chanteur est l'adjoint du Pr. Pellerin au Service Central de Protection contre les Rayonnements Ionisants (SCPRI). Il a aidé le Pr. Pellerin à «gérer» la crise de Tchernobyl de la façon que l'on connaît bien.
     Il est bien compréhensible qu'avec de tels experts, la France bloque tout accord européen sur la contamination radioactive des aliments en proposant les limites les plus élevées afin de protéger... l'industrie nucléaire!

p.21

f. LA POSITION DU LUXEMBOURG ET CELLE DES 5 ACADÉMICIENS FRANÇAIS

     La lettre de 5 académiciens français au Président de la CEE, dont le Monde du 28 octobre s'est fait l'écho, au sujet des normes de contamination radioactive des aliments, indiquait que «les chiffres proposés par la Commission ne sont pas fondés sur les avis scientifiques des Comités Institutionnels Communautaires mais ont été arbitrairement abaissés» etc...
     Ceci laisse supposer aux lecteurs du Monde que les experts de ces Comités dont les noms sont indiqués précédemment sont unanimes à réclamer une augmentation des valeurs maximales de radioactivité pour les denrées alimentaires en cas d'accident nucléaire et qu'il s'agit là d'une vérité scientifiquement bien établie.
     Il n'en est rien comme le montrent les extraits d'une lettre du 24 novembre 1987 adressée au Dr. Michel Haag, secrétaire général du Groupement SAVOIR (18, rue Emile Duclaux 75015 Paris) par le Dr. P. Kayser, chef de la Division de Radioprotection du Grand Duché du Luxembourg. Le Dr. Kayser est l'un des experts officiels du Grand Duché du Luxembourg, désignés par le Comité Scientifique et Technique selon le Traité d'Euratom et chargés de recommander les normes de contamination radioactive des aliments.

Concerne: Limites de contaminations radioactives dans les aliments après un nouvel accident nucléaire/position luxembourgeoise

     Monsieur le Docteur,
     En réponse à votre lettre du 28 octobre 1987, j'ai l'honneur de vous faire parvenir les informations suivantes:
     Le projet de règlement qui est en discussion au niveau du Conseil des Ministres des Communautés Européennes est basé notamment sur les critères suivants en ce qui concerne les limites proposées:

     - En cas d'accident nucléaire seulement 10% des aliments consommés seraient contaminés. Le Luxembourg n'admet pas cette hypothèse, car dans certaines régions la proportion des aliments contaminés et consommés peut être beaucoup plus élevée. Il existe également des personnes qui consomment les produits de leur propre production, éventuellement complètement contaminée.
     - Le projet suppose que le régime alimentaire est le même dans la communauté européenne, ce qui n'est pas le cas. Le projet ne tient pas compte de groupes critiques de la population qui ont un régime alimentaire particulier. Le projet ne s'intéresse qu'à la dose moyenne par individu, or il n'existe pas d'Européen moyen.
     - Les valeurs des limites devraient diminuer lorsque 2 ou plusieurs groupes de radioéléments contaminent en même temps les aliments. Le projet ne prévoit pas de système de réduction dans ce cas.
     - Il n'y a pas de raisons scientifiques justifiant une augmentation des limites actuellement en vigueur pour le césium après l'accident de Tchernobyl (370 Bq/l dans le lait et 600 Bq/kg dans les autres aliments). Au contraire, les données récentes résultant de la recherche sur les effets stochastiques des rayonnements ionisants montrent que la relation dose/effet est probablement plus grande qu'on ne l'a supposé jusqu'à présent.

     Je vous prie d'agréer, Monsieur le Docteur, l'expression de mes sentiments très distingués.

P. Kayser
Chef de la Division de la Radioprotection
p.22

B. LA POSITION DU GSIEN

FRFR
FRA0118 4 GG 0313 FRA / AFP-EQ05 Radioactivité
Le GSIEN dénonce le projet d'augmentation des normes européennes de radioactivité

     PARIS, 17 oct. (AFP) - A la veille de la réunion ministérielle, le 19 octobre à Luxembourg, qui pourrait ratifier le projet d'augmentation des normes européennes de contamination des aliments, le GSIEN (groupement de scientifiques pour l'information sur l'énergie nucléaire) estime «inadmissible» toute modification en hausse des normes actuellement en vigueur.
     Le GSIEN rappelle, dans un communiqué, que les conclusions de la Commission Internationale de Protection Radiologique sur la réévaluation du risque cancérigène ne sont pas encore connues. «Devant l'absence d'estimation officielle du risque cancérigène par les experts internationaux il est totalement irresponsable, dit le groupement, que les normes européennes de contamination des aliments soient drastiquement révisées en hausse».
     Le GSIEN estime que, dans cette affaire, «les représentants français auprès des instances élaborant ces normes se comportent depuis des années comme d'ardents promoteurs de l'industrie nucléaire». Fondant son analyse sur de récentes études scientifiques, il demande, au contraire, une «diminution des limites tolérées de contamination des denrées alimentaires pour protéger la santé des populations et le patrimoine génétique».
     La CEE avait adopté en mai 1986, après l'accident de Tchernobyl, des normes transitoires de radioactivité des aliments: 370 Becquerels par litre de lait et 600 Becquerels par kilo pour les autres aliments. La Commission européenne propose des valeurs plus élevées, comprises entre 800 et 1.250 Bq/kg. Ce sont ces valeurs qui seront discutées et définies lundi à Luxembourg par les ministres européens des Affaires Etrangères. Elles devraient rencontrer l'opposition des allemands qui demandent le maintien de normes faibles de radioactivité.

FP/HM
AFP 171210 OCT 87

Bien sûr, ce communiqué de l'AFP n'a été publié par aucun journal.

Paris le 20 novembre 1987
à Monsieur André FONTAINE,
Directeur du journal «Le Monde»
     Monsieur,
     Les douze ministres des Affaires Etrangères doivent reprendre ce 24 novembre les discussions sur les normes de radioactivité des denrées alimentaires.
     Sous le titre: «Cinq scientifiques français contestent les normes européennes de radioactivité» vous vous êtes fait l'écho de la position de ces cinq académiciens critiquant la proposition de la Commission au sujet des normes.
suite:
     En ce qui concerne le Césium, ils indiquent: «les chiffres proposés par la Commission ne sont pas fondés sur les avis scientifiques des Comités Institutionnels Communautaires mais ont été arbitrairement abaissés etc...». Ils ont omis de dire que les experts français auprès de ces Comités sont: le Dr. Jammet, ancien chef du Département de Protection de l'Institut de Protection et Sûreté Nucléaire (lPSN-CEA) actuellement Conseiller auprès du Haut Commissaire du CEA, et deux membres du Service Central de Protection contre les Rayonnements lonisants, le Pr. Chanteur et le Directeur du SCPRI le Pr. Pellerin, bien connu depuis la catastrophe de Tchernobyl. Voilà qui devrait rassurer vos lecteurs.
      Jusqu'à présent, ces experts se sont comportés comme des défenseurs inconditionnels de l'énergie nucléaire et non comme des médecins chargés de protéger les populations contre les rayonnements ionisants.
      S'il est vrai qu'il y a actuellement, dans l'établissement des normes, des composantes à la fois scientifiques et socio-économiques, celles-ci sont à la base même des Recommandations de la Commission Internationale de Protection Radiologique (CIPR). Ainsi peut-on lire dans les Recommandations de 1977 (CIPR 26) : «la plupart des décisions concernant les activités humaines sont fondées sur un bilan implicite des coûts et des avantages qui permet de conclure que la mise en œuvre d'une pratique déterminée en "vaut la peine"»... C'est ce bilan, ignoré de la quasi-totalité des citoyens, qui conditionne l'«acceptabilité» de l'énergie nucléaire.
     Dans le «coût» intervient l'évaluation des détriments liés aux facteurs de risque des rayonnements ionisants. Ceux-ci s'expriment par une relation du type Effet/dose: nombre de morts par cancer induits par unité de dose de rayonnement reçu, nombre de morts génétiques, morbidité etc... Cette évaluation est une des composantes scientifiques du bilan. Elle est loin de susciter l'unanimité dans les milieux scientifiques et est l'objet d'une vive controverse (voir par exemple les récents numéros de New Scientist et de Nature). L'«acceptabilité» dépend du prix que l'on est prêt à payer. Certains pays préfèrent indemniser les agriculteurs en ayant des normes basses et éviter ainsi des cancers et un fardeau génétique supplémentaires. Bien sûr, si l'on pense a priori qu'il n 'y a aucun risque, on ne s'embarrasse pas de tels problèmes.
     Les scientifiques du GSIEN (Groupement de Scientifiques pour l'Information sur l'Energie Nucléaire) sont opposés à toute augmentation des normes de radioactivité des denrées alimentaires sur la base d'études récentes qui indiquent que les risques auraient été sous-estimés (notre communiqué à l'AFP du 16 octobre 1987). En ce qui concerne les concepts à la base de la protection radiologique des travailleurs et de la population, le GSIEN a fait parvenir aux membres de la CIPR réunis en session à Côme en septembre dernier une lettre insistant sur la nécessité d'un réexamen du système de radioprotection et d'une réduction des doses «admissibles». Plus de 50 scientifiques français se sont déjà associés à ce texte.
     Nous espérons que dans le souci de susciter un débat véritable sur cet important sujet concernant la santé publique vous voudrez bien en faire part à vos lecteurs.
     Veuillez croire, Monsieur, à mes meilleurs sentiments.
p.23a

C. INFORMATION DU PUBLIC ET DES MÉDIAS SUR LA PROTECTION SANITAIRE ET LA SÉCURITÉ
CONCERNANT LES ACTIVITÉS NUCLÉAIRES
      Un premier colloque de la Commission des Communautés Européennes s'est tenu à Luxembourg (5-7 oct.1987) dans le cadre d'une Conférence permanente sur «La santé et la sécurité à l'ère nucléaire». Cette première réunion avait pour thème «Information du public et des médias sur la protection sanitaire et la sécurité concernant les activités nucléaires».
     Il est toujours difficile de prévoir dans quel but sont organisés de tels colloques et si, en tant que GSIEN on doit, par notre présence, servir d'alibi et rendre ainsi plus crédibles les discours officiels. Nous avons su par hasard que cette réunion avait lieu et avons décidé d'y participer. Nous pensions pouvoir présenter le texte qui suit, mais n'y avons pas été autorisés car «il avait été communiqué trop tard aux organisateurs». Nous avons pu cependant le distiller par «tranches» au fur et à mesure des discussions.
     Ce colloque a été relativement ouvert et contradictoire.
     Suite aux interventions du GSIEN et de la CRIIRAD, les participants ne peuvent plus ignorer que la crise de Tchernobyl a été lamentablement gérée en France par les autorités sanitaires et qu'il y a eu une contamination importante en Corse dans le Sud-Est et l'Est.
LE POINT DE VUE DU GSIEN CONCERNANT LES PROBLÈMES DE L'INFORMATION EN FRANCE SUR LES QUESTIONS
POSÉES PAR L'ÉNERGIE NUCLÉAIRE 

     Le problème de l'information est particulièrement aigu en France où aucun débat démocratique n'a précédé le lancement du programme électronucléaire en 1974. Rappelons que c'est pour cette raison que le GSIEN s'est créé et qu'il continue son action.
     C'est en tant que scientifiques que nous analyserons succintement quelques points particuliers relatifs à l'information concernant les problèmes posés par l'énergie nucléaire et qui nous paraissent indispensables pour que l'information ne soit pas biaisée.

     I. L'information donnée par les pouvoirs publics concernant l'énergie nucléaire devrait avoir uné valeur scientifique
     1. La crédibilité de l'activité scientifique est fondée sur l'accessibilité des données pour tout scientifique qui désire vérifier les résultats publiés
     Au GSIEN, nous pensons donc que tous les rapports de sûreté relatifs aux installations nucléaires, tous les rapports des experts aux réunions européennes et internationales doivent être rendus publics afin de pouvoir être examinés par des scientifiques indépendants des instances gouvernementales.

p.23b

     Les réunions d'experts ne devraient pas se tenir à huis clos. Leur date devrait ètre connue et les droits d'inscription non dissuasifs. Tout scientifique qui en fait la demande devrait pouvoir y assister, toute association de citoyens devrait pouvoir se faire représenter par ses propres experts.
     Sinon que se passe-t-il? Nous prendrons comme exemple la Conférence de Vienne du 25-28 août 1986 sur «L'accident du réacteur nucléaire de Tchernobyl et ses conséquences» où les experts soviétiques ont fourni un rapport détaillé de l'accident et de ses conséquences devant la communauté des experts internationaux. En ce qui concerne la France, ce rapport n'a pas été remis dans son intégralité aux membres du Conseil Supérieur de Sûreté Nucléaire. Dans la partie qui n'a pas été diffusée figure l'Annexe 7 relative aux problèmes médico-biologiques liés à l'accident. C'est dans cette Annexe qu'est faite l'évaluation des conséquences à long terme de l'accident en particulier du nombre de morts par cancers dans les décennies à venir.
     Par les contacts avec nos collègues étrangers, nous savons que ce document est très peu connu. Les autorités françaises ne sont donc pas les seules à avoir exercé un acte de censure intolérable vis-à-vis de ce rapport très important pour la population mondiale, censure qui permet ensuite la manipulation de l'information.
     C'est dans cet esprit d'accessibilité aux données que nous demandons que soit établi au niveau européen un Répertoire des Rapports concernant entre autres: la sûreté nucléaire, la surveillance des territoires, les données épidémiologiques, les rapports issus des réunions d'experts, etc...
     Il nous paraît urgent que toutes les grandes villes disposent de bibliothèques spécialisées où ces rapports seraient disponibles.
     Rappelons qu'en France certains de ces rapports sont inaccessibles. A titre d'exemple, nous n'avons pas pu obtenir une étude sur «L'évaluation des doses reçues par le personnel non EDF» (personnel intérimaire) réalisée par le CEPN (Centre d'études sur l'évaluation de la protection dans le domaine nucléaire) car ce rapport est confidentiel*.

2. Les résultats des mesures de surveillance de l'environnement devraient être publiés sous forme de véritables rapports scientifiques
     La surveillance radiologique du territoire est particulièrement importante non seulement pour la population française mais également pour les habitants des pays frontaliers et pour l'ensemble de la Communauté.

suite:
Nous demandons que les résultats des mesures correspondant à cette surveillance soient publiés dans de véritables rapports répondant aux critères scientifiques habituels dont le contenu corresponde à une information réelle. La pratique actuelle des Autorités sanitaires françaises ne répond pas à ces critères.
     Nous prendrons par exemple les Bulletins mensuels du SCPRI (Service Central de Protection contre les Rayonnements lonisants, qui est le service technique du Ministère de la santé et du Ministère du Travail). Ces Bulletins consistent actuellement en des listings de chiffres difficiles à exploiter. Il serait important que la totalité des mesures relatives à l'environnement autour de chaque site nucléaire soit rendue publique dans des rapports mensuels qui ne soient pas que des catalogues. Ces rapports devraient permettre l'identification des lieux de mesure, indiquer les procédures de prélèvement d'échantillons, l'origine et l'importance des marges d'erreur (bruit de fond du laboratoire d'analyse, temps de comptage affecté à la mesure, etc... ). Ils devraient indiquer également les mesures effectuées à titre exceptionnel en cas d'incident ou d'accident. Ceci permettrait de suivre avec précision l'évolution radiologique autour d'un site. Il peut paraître anodin d'indiquer si les résultats sont rapportés à la date du prélèvement ou à la date de la mesure mais ce n'est pas du tout négligeable s'il s'agit par exemple d'une mesure de contamination par l'iode 131. Si l'interprétation des résultats est délicate, les Conseils municipaux et régionaux pourraient se faire aider par les experts de leur choix.

3. Il est d'usage dans la communauté scientifique d'avoir la possibilité d'analyser et de critiquer les résultats obtenus et les hypothèses de calcul, de vérifier les résultats publiés en refaisant les mesures
     C'est dans cet esprit d'ouverture qu'il est indispensable que se développent des laboratoires indépendants et que s'instaure entre laboratoires indépendants et officiels une pratique de confiance mutuelle conforme à la déontologie scientifique: échange de matériel, d'étalons de mesure, formation de stagiaires, etc... Nous pensons que les attaques sournoises des pouvoirs publics contre les rares laboratoires (et experts) indépendants qui existent aujourd'hui en France sapent les fondements mêmes de la crédibilité scientifique des laboratoires officiels.

p.24
* Qui donc a rendu ce rapport confidentiel? Le CEA? L'EDF? ou M. Pellerin du SCPRI? Un abonnement gratuit à la Gazette à qui nous apportera la preuve décisive!
II. L'information donnée par les pouvoirs publics devraient avoir un contenu réel et ne pas comporter d'omissions essentielles
     Nous donnerons deux exemples «d'omission».

l. L'exemple des enquêtes publiques
     Les dossiers d'enquêtes publiques avant la mise en route d'une installation nucléaire n'informent aucunement la population sur les dangers qu'elles peuvent courir en cas d'accident majeur et sur les mesures envisagées par les Autorités: l'accident majeur n'est même pas mentionné dans les dossiers d'enquête publique. Ils ne comportent donc aucune indication sur les zones de confinement, les problèmes de l'évacuation éventuelle, etc...
     Les enquêtes publiques relatives à la centrale nucléaire de Nogent sur Seine qui vient de démarrer en amont de Paris à moins de 100 km n'ont pas mentionné la possibilité de contamination de l'eau potable pour l'ensemble de la population de la région parisienne (plus de 10 millions d'habitants) en cas d'accident grave sur les réacteurs.
     D'une façon générale, aucune information n'a été fournie par les autorités sanitaires sur les modèles utilisés pour déterminer les limites d'intervention en ce qui concerne la contamination des aliments et de l'eau.
     Ainsi les principes démocratiques sont biaisés à la base par omission de l'information et on ne voit pas comment les citoyens français peuvent donner un avis valable sur les installations dont on leur demande d'apprécier l'utilité.

2. L'exemple des démantèlements
     Des démantèlements d'installations nucléaires ont lieu sans enquête publique préalable. Ces démantèlements posent le problème du recyclage des matériaux irradiés dans le domaine public.
     Nous attirons l'attention sur le fait que l'introduction de matériaux radioactifs dans les produits de consommation courante suite à ce recyclage est un problème important au niveau européen que ne semblent pas avoir abordé les Commissions spécialisées de la Communauté.

III. Quel rôle devraient jouer les médias dans l'information du public?

     Le rôle difficile des médias devrait être de situer les événements dans un contexte plus général qui seul permet à l'information de rester compréhensible du grand public. Cette information ne devrait pas se traduire par la disparition du contenu informatif véritable. Donnons quelques exemples:
     Lorsque la presse annonce que le réacteur de CHOOZ n'est pas autorisé à démarrer avant que l'exploitant ait fourni au Service Central de Sûreté des Installations Nucléaires un rapport sur l'évolution éventuelle des fissures de la cuve, il est impossible à partir de cette information de se rendre compte de la gravité de la situation: En quoi les fissures observées actuellement sont-elles différentes de celles observées antérieurement? Leur évolution au cours du temps coïncide-t-elle ou non avec les modèles développés par les organismes techniques de la Sûreté nucléaire? S'agit-il de fissures pouvant donner lieu à une rupture franche de la cuve, ce qui serait catastrophique? Seules des réponses à ces questions seraient une véritable information sur la situation du réacteur de Chooz.
     Deuxième exemple: lorsqu'à FESSENHEIM on rapporte une légère fuite de contamination dans le circuit secondaire n'ayant conduit à aucune incidence à l'extérieur du réacteur, il peut sembler que cet incident est complètement mineur. En réalité, il s'agit d'une fissuration de tubes sur un des générateurs de vapeur qui met en évidence la fragilité de ces tubes dont la rupture peut conduire à un accident pouvant avoir des conséquences graves sur l'environnement.
     En somme, malgré la multiplication des informations sur les incidents dans les réacteurs nucléaires, le niveau réel d'information du public est toujours aussi faible. Il est totalement impossible aux citoyens de porter un jugement sur les décisions prises en leurs noms par le gouvernement sur les problèmes de l'énergie nucléaire.

suite:
IV. Un exemple flagrant de non-crédibilité scientifique: la gestion de la crise nucléaire en France suite à la catastrophe de Tchernobyl

     Nous tenons à protester publiquement et à alerter la Communauté Européenne sur le fait que les Autorités sanitaires françaises n'ont pas fourni les données réelles de la contamination en France suite à la catastrophe de Tchernobyl. En voici deux exemples:

Le rapport de l'organisation mondiale de la santé (6 mai 1986)
     Il ne mentionne aucune mesure de radioactivité sur le territoire français (malgré la présence de deux experts français à cette réunion) avec seulement l'indication «low» (faible) alors que la quasi totalité des pays européens ont fourni des résultats de mesures. Il ne faut pas s'en étonner puisque les Bulletins mensuels du SCPRI déjà cités antérieurement indiquent que les résultats des mesures de contamination atmosphérique ne sont connus que 5 jours après la date de prélèvement. Dans ces conditions comment expliquer que les autorités sanitaires françaises aient pu fournir une indication qualitative sur la contamination du territoire en disant qu'elle était faible?

Le Journal Officiel des communautés européennes
     En date du 9 mars 1987, on lit que la contamination maximale du lait en iode 131 au cours des trois semaines qui ont suivi Tchernobyl a été en France de 360 Bq/l (le 7 mai 1986). Or ceci est démenti par les valeurs relevées dans les Bulletins mêmes du SCPRI. On trouve en effet pour le lait de brebis 4.400 Bq/l le 12 mai 1986 en Corse et pour le département de l'Hérault 1.700 Bq/l le 9 mai. D'après M. Cogné, Directeur de l'Institut de Protection et Sûreté Nucléaire (lPSN) la contamination du lait en Corse a pu être de 15.000 Bq/l au 1er mai en Corse.
     Il y a donc là un exemple flagrant d'information fausse. La Corse et le Sud Est de la France ont été sévèrement touchés par les retombées de Tchernobyl.
     Ainsi non seulement les autorités françaises n'ont pas suivi les recommandations de la Communauté en ce qui concerne les normes alimentaires et ont déclaré consommables des aliments qui n'étaient pas acceptés par les autres pays (thym de la Drôme, noisettes de Turquie par exemple) mais a induit la Communauté en erreur en ce qui concerne la situation réelle en France.
     Nous signalons aux pays membres de la Communauté que pour le GSIEN (Groupement de Scientifiques pour l'Information sur l'Energie Nucléaire) la surveillance radiologique du territoire français exercée par le Service Central de Protection contre les Rayonnements lonisants (SCPRI) est actuellement insuffisante: trop peu de stations de prélèvement: 130 pour tout le territoire. La Corse qui s'étend sur plus de 150 km n'a qu'une station à Ajaccio. Parmi ces 130 stations seuls les résultats de 10% d'entre elles ont été rapportés dans les Bulletins du SCPRI pendant la crise de Tchernobyl.
     Il n'y a pas de mesure en continu de radioactivité atmosphérique. Il ne faut donc pas s'étonner si au mois de mars 1987 le SCPRI n'a pas relevé d'augmentation de radioactivité dans l'atmosphère signalée par des laboratoires étrangers. Ce qui est étrange c'est l'interprétation donnée par le SCPRI dans son communiqué du 15 mars: Cette augmentation aurait été liée aux retombées des tests de bombes des années 60. Or l'analyse des éléments radioactifs effectuée par les laboratoires européens indiquait la présence de radioéléments à vie courte tels que l'iode 131 (demi-vie 8 jours), le xénon 133 (demi-vie 5 jours),  le xénon 135 (demi-vie 9 heures)...
     Le Service du Ministère de la Santé qui a en charge la protection radiologique des Français s'est encore une fois complètement discrédité.
     Le GSIEN déclare qu'il est impossible de faire un bilan en France suite à la catastrophe de Tchernobyl à partir des informations officielles.
     Les autorités sanitaires françaises ont eu davantage le souci de ne pas angoisser la population plutôt que de donner des informations véritables qui auraient permis aux citoyens d'apprécier la façon dont les pouvoirs publics assurent leur protection sanitaire. Il est regrettable que la crise de Tchernobyl n'ait pas suffisamment alerté ces autorités pour que se mette en place un système permettant le suivi sanitaire des populations.

Luxembourg, le 5 octobre 1987
p.25

Commentaire Gazette
     Le passage sur l'accessibilité des données a entraîné dans les couloirs des réactions vives (mais courtoises) de la part d'une personne de l'establishment nucléaire français: «Vous mettez en cause les autorités françaises, or les autres pays en ont fait autant. Il faut laver son linge sale en famille».
     Il est vrai que les autres pays en ont fait autant. Nous le savons et d'ailleurs c'est indiqué dans le texte. Nous avons pu le vérifier de visu puisqu'un participant italien avait la version officielle italienne du rapport soviétique. Elle ressemble comme deux gouttes d'eau à la version distribuée en France aux membres du Conseil Supérieur de Sûreté: seule la 1ère partie a été traduite. Pour les Italiens, la 2e partie comporte, au lieu des 7 Annexes, une liste de références bibliographiques. Ce qui se passe est extrêmement grave. Avec un système «d'information» un peu plus au point des différentes autorités étatiques, ce document aurait pu complètement échapper à notre connaissance! Une complicité d'un cercle limité d'officiels à haut niveau peut permettre la manipulation de l'information. Nous avons lieu de penser que c'est ce qui se développe depuis l'an dernier afin de minimiser la catastrophe de Tchernobyl et rendre «acceptable» un éventuel accident sur nos réacteurs. Comment expliquer autrement l'empressement des experts occidentaux à diviser par 2 l'estimation soviétique du nombre de morts, dès la conférence de Vienne? Peu de temps après le facteur de réduction passait à 10 car il y aurait eu surestimation par les experts soviétiques de la contamination par le césium, les contre-mesures d'intervention sur la nourriture aurait été suffisamment efficaces pour réduire la contamination, donc la dose engagée. Telles sont les thèses actuellement admises officiellement.
     Or, près de la moitié de la population composant les 75 millions d'Ukrainiens et de Biélorusses est rurale et les contre-mesures quand elles sont prises sont certainement moins efficaces dans les régions rurales que dans les zones urbaines. Hors d'Ukraine et de Biélorussie, à Moscou même, ont été vendues des viandes notablement contaminées. Le bulletin du SCPRI de juin 1986 (2e partie) donne la contamination de certains «Produits alimentaires destinés à la communauté française de Moscou» (analyses faites à la demande du Ministère des Affaires Etrangères).
suite:
Origine et nature
Date d'achat
Contamination Bq/kg
 
 
131I
134I
137Cs
Marché central
(veau)
26/5/86
90
3.100
6.000
Marché Vavilova
(veau)
10/6/86
non mesuré
non mesuré
3.900
2.800
7.800
5.900
Berozka
(porc)
17/6/86
non mesuré
1.400
2.900

     Il est raisonnable de penser que c'est à Moscou que les contrôles sont les plus stricts. Les niveaux de contamination de certaines viandes à 10.000 Bq/kg étaient donc plus élevés que ceux indiqués au mois d'août 86 dans l'annexe 7 du rapport soviétique: «à la mi-mai, seuls les isotopes du Césium et 131I ont été trouvés dans la viande et à la fin mai et en juin quasiment que les Cs 137 et 134 (dans le rapport 2:1) étaient détectés. Cependant la teneur en césium radioactif dans la viande (bœuf) était passablement élevée, 10-8 à 10-7 Ci/kg» soit 370 à 3.700 Bq/kg.
     Nous aimerions avoir, pour le césium, des détails beaucoup plus fournis que ceux du mois d'août 1986. Les affirmations contenues dans un papier de 4 pages de M. Moïesseev (l'expert soviétique à la CIPR) présenté lors d'une réunion à l'OMS relative à l'accident de Tchernobyl (Copenhague 13-14 mai 1987) ne nous satisfont pas et n'expliquent pas du tout comment les Soviétiques ont réduit les doses liées aux césium. Si c'est vrai, tant mieux, mais nous voulons des preuves. Sinon ce n'est que de la propagande qui arrange tous les nucléocrates du monde. Nous pensons que ce sont les experts occidentaux qui ont exigé que leurs collègues soviétiques fassent leur autocritique. Nous ignorons si en plus ils ont exigé que des sanctions pénales soient prises envers les auteurs de l'annexe 7 du rapport soviétique à Vienne.

p.26

DERNIÈRES NOUVELLES DU CONSEIL DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
(d'après le JO des Communautés Européennes du 22 décembre 1987)
1. Règlement (Euratom) n° 3954/87 du Conseil fixant les niveaux maximaux admissibles de contamination radioactive pour les denrées alimentaires et les aliments pour bétail après un accident nucléaire ou dans toute autre situation d'urgence radiologique

Article 2
     1. Si la Commission reçoit, notamment conformément soit au système communautaire d'échange rapide d'informations dans une situation d'urgence radiologique ou en cas d'accident nucléaire, soit en vertu de la convention de l'Agence internationale de l'énergie atomique du 26 septembre 1986 sur la notification rapide d'un accident nucléaire, des informations officielles sur des accidents ou toute autre situation d'urgence radiologique, lesquelles indiquent que les taux maximaux admissibles figurant à l'annexe sont susceptibles d'être atteints ou ont été atteints, elle adopte immédiatement, si les circonstances l'exigent, un réglement rendant applicables ces niveaux maximaux admissibles.
     2. La durée de validité de tout réglement tel que visé au paragraphe 1 doit être brève autant que possible et ne doit pas dépasser trois mois, sous réserve de l'article 3 paragraphe 4.

Article 3
     1. Après avoir consulté des experts, et notamment le groupe d'experts de l'article 31, la Commission présente au Conseil une proposition de règlement adaptant ou confirmant les dispositions du règlement visé à l'article 2 paragraphe 1 dans un délai d'un mois suivant son adoption.
     2. Lorsqu'elle soumet la proposition de règlement visée au paragraphe l, la Commission tient compte des normes de base fixées conformément aux articles 30 et 31 du traité, y compris le principe selon lequel toute exposition doit être maintenue au niveau le plus bas qu'il est raisonnablement possible d'obtenir eu égard à la nécessité de la protection de la santé publique ainsi qu'aux facteurs économiques et sociaux.

Article 5
     1. Pour garantir que les niveaux maximaux admissibles indiqués à l'annexe tiennent compte de toutes les nouvelles données scientifiques disponibles, la Commission consulte de temps en temps des experts, et notamment le groupe d'experts de l'article 31.
     2. A la demande d'un Etat membre ou de la Commission, les niveaux maximaux admissibles figurant à l'annexe peuvent être révisés ou complétés sur proposition présentée au Conseil par la Commission, selon la procédure prévue à l'article 31 du traité.

Article 8
     Le présent règlement entre en vigueur le troisième jour suivant celui de sa publication au Journal officiel des Communautés européennes.

2. Règlement (CEE) n° 3955/87 du Conseil du 22 décembre 1987 
relatif aux conditions d'importation de produits agricoles originaires
des pays tiers à la suite de l'accident survenu à la centrale nucléaire de Tchernobyl 

LE CONSEIL DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,
vu le traité instituant la Communauté économique européenne, et notamment son article 113,
vu la proposition de la Commission,
considérant que, à la suite de l'accident survenu à la centrale nucléaire de Tchernobyl le 26 avril 1986, des quantités considérables d'éléments radioactifs ont été dispersées dans l'atmosphère;

A ARRÊTÉ LE PRÉSENT RÈGLEMENT:
(...)
Article 3 
Les tolérances maximales visées à l'article 2 sont les suivantes:
     la radioactivité maximale cumulée de cesium 134 et 137 ne doit pas dépasser:
     - 370 becquerels par kilogramme pour le lait relevant des positions 04.01 et 04.02 du tarif douanier commun ainsi que pour les denrées alimentaires destinées à l'alimentation particulière des nourrissons pendant les quatre à six premiers mois de leur vie, répondant à elles seules aux besoins nutritionnels de cette catégorie de personnes et conditionnées au détail en emballage clairement identifiés et étiquetés en tant que «préparations pour nourrissons»,
     - 600 becquerels par kilogramme pour tous les autres produits concernés.

Article 7
Le présent règlement expire deux ans après son entrée en vigueur.

Article 8
Le présent règlement entre en vigueur le jour de sa publication au Journal officiel des Communautés européennes.

p.27
ANNEXE
Niveaux maximaux admissibles pour les denrées alimentaires et les aliments pour bétail
 (Bq/kg ou Bq/l)
 
Aliments pour nourrissons[1]
Produits laitiers[2]
Autres denrées alimentaires à l'exception de celles de moindre importance[4]
Liquides destinés à la consommation[5]
Aliments pour bétail[6]
Isotopes de strontium, notamment Sr 90
 
125
  750
 
 
Isotopes d'iode, notamment I 131
 
500
2.000
 
 
Isotopes de plutonium et d'éléments transplutoniens à émission a, notamment Pu 239 et Am 241
 
  20
    80
 
 
Tout aitre radionucléaide à période radioactive supérieure à 10 jours, notamment Cs 134 et Cs 137[7]
 
1.000
1.250
 
 
1. (On considère comme aliments pour nourrissons les denrées alimentaires destinées à l'alimentation des nourrissons pendant les quatre à six premiers mois, qui satisfont elles mêmes aux besoins alimentaires de cette catégorie de personnes et sont présentés pour la vente au détail dans des emballages aisément reconnaissables et munis de l'étiquette «préparation alimentaire pour  nourrissons». Valeur à fixer.
2. On considère comme produits laitier: le lait relevant des positions 04.01 et 04.02 du tarif douanier commun et à partir du 1er Janvier 1988, aux positions correspondantes à la nomenclature combinée
3. Le niveau applicable aux produits concentrés ou séchés est calculé sur la base du produit reconstitué prêt à la consommation
4. les denrées alimentaires de moindre importance et les niveaux correspondants qui doivent leur être appliqués seront ceux qui seront déterminés conformément à l'article 7.
5. Liquides destinés à l'alimentation tels que définis aux chapitres 20 et 22 du tarif douanier commun et à partir du 1er janvier 1988 aux chapitres correspondants de la nomenclature combinée. Les valeurs sont calculées compte tenu de la consommation d'eau courante et les mêmes valeurs devraient être appliquées  à l'approvisionnement en eau potable suivant l'appréciation des autorités compétentes des Etats membres. Valeurs à fixer.
6. Valeurs à fixer.
7. le carbone 14 et le tritium ne sont pas compris dans ce groupe

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