La G@zette Nucléaire sur le Net! 
N°61
NUCLEAIRE, quand tu nous tiens...

Rapport annuel du CEA


     Quelques extraits intéressants:

PRODUCTION D'URANIUM NATUREL

Exploration
     En raison de la conjoncture défavorable qui affecte le marché de l'uranium, l'effort financier consenti, en 1983, par l'ensemble des sociétés minières françaises pour l'exploration de ce métal, a régressé sensiblement, par rapport à celui de 1982. Il demeure toutefois très important.
     En France, cette exploration reste très intense (350 millions de francs environ). Elle est surtout localisée dans les Massifs Central et Armoricain et dans le centre nord du Bassin d'Aquitaine. La surface totale des permis de recherches, accordés et demandés, atteignait 12.917 km2 le 1er janvier 1984. Les résultats des travaux d'exploitation ont compensé les tonnages extraits et ainsi les ressources connues en uranium sont restées à peu près stables, voisines de 120.000 tonnes.
     A l'étranger, les sociétés françaises maintiennent une activité très diversifiée, mais leurs dépenses en 1983 (200 millions de francs) ont diminué de près de 30% par rapport à celles de 1982. (...) 

Exploitation
     En France, la production pour 1983 s'élève à 3.271 tonnes d'uranium contenu dans les concentrés (2.859 tonnes en 1982). (...)
     A l'étranger, les opérateurs miniers français détiennent des participations dans de nombreuses sociétés:
· au Niger, dans la Société des Mines de l'Aïr (Somaïr) et dans la Compagnie Minière d'Akouta (Cominak) qui ont respectivement produit 1.400 et 2.000 tonnes d'uranium;
· au Gabon, dans la Compagnie des Mines d'Uranium de Franceville (COMUF) dont la production a atteint 1.042 tonnes;
· au Canada, en Saskatchewan, où Cliff Mining a fourni 700 tonnes à partir des minerais du gisement à forte teneur de Cliff D;
· aux États-Unis, Pathfinder, filiale de Cogéma lncorporated, a produit 800 tonnes. 
L'approvisionnement français en uranium à partir de ces sociétés s'est élevé en 1983 à 4.160 tonnes.

suite:
LES REACTEURS

(...)
Les réacteurs à neutrons rapides
     En France, les grands programmes engagés dans cette filière sont essentiellement consacrés à la poursuite de la construction, à Creys Malville, de la centrale Superphénix et à la préparation de l'étape suivante. (...)
     Pour l'étape suivante, baptisée "Projet Rapide 1500", EDF a, au mois de juillet 1983, passé un contrat à Novatome pour l'établissement d'un avant-projet détaillé, au terme duquel, en 1986, EDF disposera de tous les éléments lui permettant de passer commande d'une ou plusieurs tranches de 1.500 MWe, en même temps que seront engagées les installations associées du cycle du combustible.
     Dans cette perspective, le CEA et Novatome ont défini l'ensemble des actions de recherche et de développement nécessaires et leurs échéances, et ils ont mis en place, avec EDF, les structures de concertation et de coordination en vue d'une harmonisation d'ensemble des travaux et des rôles respectifs des trois organismes.
     Parallèlement, au mois de septembre, le Service Central de Sûreté des Installations Nucléaires a émis ses directives concernant la sûreté des futures centrales comportant un réacteur intégré à neutrons rapides refroidi au sodium. (...)
     Le CEA et EDF avaient créé, fin 1982, avec la participation de quelques ingénieurs de Novatome et Cogema, une "équipe de conception des réacteurs rapides avancés" (E.C.R.A.), chargée d'examiner et de proposer des modifications ou des innovations profondes, voire un concept différent, qui permettraient, à plus long terme, d'abaisser le coût du kWh pour le cas où l'objectif économique de la filière n'aurait pas été atteint par des réacteurs situés dans la continuité technique du projet rapide 1500. La première phase d'étude de cette équipe a conduit à l'élaboration, en octobre 1983, d'un important rapport de synthèse proposant de nombreuses solutions génératrices d'économie, pouvant aboutir Soit à moyen terme (5 à 10 ans), soit à long terme (15 à 20 ans), suivant l'ampleur des travaux de recherche et développement nécessaires pour les valider. (...)

p.14

ANDRA
(...)
Information du public
     (...) L'opération majeure a été la création, au centre de la Manche, d'un bâtiment d'accueil et d'information du public. (...)

FRAMATOME
     (...) Le nouveau modèle N4 de 1.400 MWe fait l'objet de négociations délicates, avec EDF, en raison du faible nombre d'unités demandées. (...)
     En collaboration avec le CEA, des études de nouveaux modèles et des études préliminaires pour les centrales de petite puissance (399 MWe). (...)
     Afin de se prémunir contre les conséquences prévisibles de la baisse du programme nucléaire français et contre la morosité du marché à l'exportation, Framatome a lancé des réflexions sur la diversification de ses activités. L'une d'elles a abouti, dans le domaine de l'intelligence artificielle et des systèmes experts, par une prise de participation dans la société américaine Teknowledge et la création d'une filiale commune européenne, Framentec.

APPLICATIONS MILITAIRES
(...)
Les programmes de recherches scientifiques et techniques
     La réalisation d'un armement de plus en plus performant nécessite un effort de recherche scientifique et technique soutenu.
     En 1983, la D.A.M. a poursuivi ses travaux dans les nombreuses disciplines qui sont associées à la physique et à la technologie des armes où l'expérience est rare et chère et où les phénomènes sont à la fois très complexes, extrêmement brefs et caractérisés par des états inhabituels de la matière. Pour ces études, il est fait appel, en plus des expérimentations nucléaires, à des modèles théoriques et à des méthodes de simulation numérique basées sur des moyens très performants comme l 'ordinateur de grande puissance «Cray One» et le laser Octal 82, utilisé pour les études de plasmas denses. Bien qu'entrés en service depuis peu, ces équipements ont déjà permis d'obtenir des résultats très prometteurs. Le potentiel de calcul de la DAM. vient d'être renforcé par l'acquisition de deux nouveaux ordinateurs dont un second «Cray One».
     Par ailleurs. la construction du laser de grande puissance Phébus est en cours.
     Citons quelques exemples de travaux ayant donné lieu à des réalisations:
     - en physique nucléaire, un dispositif expérimental «Casimir» (chambre associée à un système d'identification et de mesure d'ions de réaction) a été conçu pour être utilisé auprès des accélérateurs Ganil, à Caen et Sara, à Grenoble, afin d'étudier les mécanismes de réaction mis en jeu au cours de collisions entre ions lourds; il comporte des détecteurs de grandes dimensions (chambre d'ionisation, compteur à plaques, détecteur à galette de microcanaux, hodoscope...) s'adaptant à une chambre à réactions, réalisés, pour certains, en collaboration avec des équipes de l'I.R.F. à Saclay; les premières expériences, effectuées en 1983, avec ce dispositif associé aux accélérateurs ont conduit à des interprétations intéressantes;
     - un équipement de pressage isostatique à chaud, unique en France par ses performances, a été mis en service; il peut atteindre la tempéraure de 2.000 °C et la pression de 300 MPa permettant ainsi la mise en forme et le traitement de certains matériaux, irréalisables par les procédés classiques, en faisant des économies importantes de matière première;

suite:
     - dans le cadre des études de durcissement de certains sites et équipements contre les effets de l'impulsion électromagnétique créée par une explosion nucléaire aérienne, la DA.M. a conçu et développé des générateurs capables de produire des impulsions haute tension à front de montée rapide; ces appareils permettent de simuler les effets induits sur les lignes d'énergie alimentant les installations à protéger et de qualifier des équipements spécifiques de protection (composants et cellules d'écrétage et de filtrage);
     - un système de surveillance automatique et de pilotage hiérarchisé d'installations de recherche "Sahir" a été développé dans le but d'assurer la surveillance rapide et la téléconduite d'installations industrielles évolutives de moyenne importance (500 capteurs ou actionneurs); il comporte deux microcalculateurs (8086/8087) capables d'exploitation multitâches et d'assurer, en particulier, la mise en œuvre d'un graphe de commande, l'enchaînement de séquences automatiques préprogrammées ainsi que la gestion de périphériques de «controle-commande opérateur».
     Par ailleurs, la D.A.M. conduit également des actions de valorisation industrielle.
     Des essais effectués au Centre d'Etudes Scientltiques et Techniques d'Aquitaine, relatifs à l'évaluation de l'effet des ondes de surpression aérienne, produites par la détonation et la déflagration d'enveloppes gazeuses de volume important sur des structures ou éléments de structures, ont permis de recaler les codes de calcul en vue de valider le comportement d'une centrale nucléaire à ce type d'agression.
     Le Laboratoire de Détection et de Géophysique de 13 DAM. a réalisé les chaînes de mesure séismologique de sécurité, destinées à provoquer l'arrêt d'urgence du réacteur de la centrale Superphénix dès la détection d'ondes sismiques dangereuses pour son fonctionnement; ces chaînes devraient être mises en service sur le site dans le courant de l'année 1984.
     Des conteneurs spéciaux ont été conçus et réalisés pour le transport routier ou aérien de matières dangereuses (nucléaires, pyrotechniques ou toxiques). Leurs caractéristiques doivent leur permettre de résister à des accidents aériens et à l'incendie.
     La D.A.M. poursuit également la promotion des maténaux composites pour ses besoins propres et a participé à la création du nouvel Institut des Matériaux Composites en Aquitaine.
     Dans le cadre des économies d'énergie, le Centre d'Etudes de Bruyères-le-Châte! a réalisé une installation de géothermie basse température, s'intégrant aux réseaux de chauffage existants. Elle fonctionne avec de l'eau captée à 34°C, entre 650 et 735 mètres de profondeur, dans une nappe aquifère du néocomien très peu connue avant cette opération. La mise en évidence des caractéristiques de ce réservoir présente un intérêt évident pour la région.

Commentaires de la Gazette Nucléaire
· Uranium
     12.917 km2 sur les 551.255 km2 français, soit 2,3% globalement, mais pour les Massifs Armoricain et central beaucoup plus (environ 130.000 km2, soit 10% de la superficie).
     Notre territoire avec réacteurs, mines, centre de stockage et silos de bombes est un sanctuaire nucléaire. Le moins qu'on puisse en dire, c'est qu'il y aura assez d'endroits avec rejets pour que, si on ne se décide pas à globaliser les études d'impacts, chacun puisse à bon droit dire qu'il ne rejette que les quantités permises. Reste que l'ensemble peut faire un total qui mérite plus que l'ignorance.

p.15

· Superphénix
     Groupons-nous car nos adversaires, eux, se sont déjà concertés et nous allons une fois de plus nous, trouver devant une décision irréversible.

· Applications militaires
     Eh bien ça marche la coopération. Qui ne travaille pas pour les militaires? Apparemment peut-être les historiens ou les linguistes, mais ce n'est pas si sûr.
     Si les militaires adoptent la géothermie et le solaire, alors ça, ce n'est pas bon signe. Enfin, il faut vivre avec puisque nous sommes incapables de définir des programmes sans leur apport.

A PROPOS DU STOCKAGE DES DÉCHETS

     Nous vous livrons la partie relative aux stockages profonds du «Programme concernant la gestion et le stockage des déchets radioactifs (1985-1989)» de la Commission des Communautés Européennes (COM (84) 231:

PARTIE B.
Construction et/ou exploitation d'installations souterraines ouvertes à des actions conjointes de la communauté
     Les projets spécifiques de cette partie du programme sont ouverts à la coopération communautaire par les organismes responsables des pays membres sur le territoire desquels les installations seront construites. Ils concernent des installations expérimentales et pilotes sans usage industriel. Ces installations permettront de confirmer sur place les valeurs numériques des paramètres à prendre en compte pour la réalisation d'installations industrielles de confinement et de développer les techniques de mise en place des déchets radioactifs.
     Les déchets ou matériaux radioactifs qui seront utilisés dans certains projets pour étudier les conditions d'exploitation d'une installation industrielle seront récupérables.
     La coopération vise en particulier la participation de chercheurs d'autres pays membres aux projets en cause, notamment par le détachement de personnel, et la possibilité de compléter les programmes par des activités propres, suivant des modalités à définir cas par cas.
     La direction et la responsabilité des projets seront assurés par les organismes d'accueil.
     En addition aux 3 projets ci-dessous, d'autres projets pourront être ajoutés en cours de programme.

Projet n°1:
Installation pilote souterraine dans la mine de sel de Asse*
     Le projet débutera en 1984 et l'installation devrait être opérationnelle vers 1986. Les travaux couverts par le programme communautaire 1985-89 seront les suivants:
     - Creusement au niveau -800 m et équipement d'une galerie ayant les dimensions et caractéristiques envisagées pour une future installation industrielle de dépôt de déchets hautement radioactifs;
     - Acquisition et mise en place de verres borosilicatés enrichis en Cs-137 et Sr-90 permettant d'atteindre la production de chaleur et le flux de rayonnements b et g exigés;
     - Étude de l'effet conjoint de la chaleur et des rayonnements sur le sel pour ce qui concerne:
     - - la détermination qualitative et quantitative de l'eau et des gaz libérés,
     - - l'interaction de ces éléments avec la roche hôte et l'enceinte de confinement,
     - - le comportement contrainte-déformation d'un piller de sel dans des conditions de dépôt;

suite:
     - Essai des moyens de transport, manutention et mise en place de déchets de haute activité, dans l'environnement minier et radioactif de la galerie, en vue de l'utilisation de ces moyens dans une installation industrielle future;
     - Démonstration du fonctionnement de l'ensemble du système d'évacuation. 
Contribution communautaire: 8,4 MECU sur 5 ans.

Projet n°2:
Installation pilote souterraine dans la couche d'argile située sous le site nucléaire de Mol **
     Le projet débutera vers 1984 et l'installation sera opérationnelle en 1995. Les travaux couverts par le programme communautaire 1985-1989 seront les suivants:
     - Définition du projet: nombre et caractéristiques des galeries et nature des déchets (déchets de haute activité vitrifiés, déchets a enrobés dans du bitume, etc.) puis étude détaillée: ingénlérie minière, manutention, radioprotection.
     - Creusement, au niveau -230 m à partir du puits d'accès existant, d'une ou plusieurs galeries représentative(s) d'une future installation industrielle de dépôt.
     - Éventuellement, et au vu des résultats du programme de R & D en cours, développement et construction d'une machine de creusement spécialement adaptée aux milieux argileux.
     - Commande et réalisation d'équipements de manutention et de radioprotection.
     Contribution communautaire: 7,4 MECU sur 5 ans.

Projet n°3:
Installation expérimentale souterraine en France dans un milieu géologique de nature complémentaire ***
     Le projet devrait débuter avec l'obtention de l'autorisation gouvernementale en 1984: l'installation serait opérationnelle en 1989. Les travaux couverts par le programme communautaire 1985-1989 seraient les suivants:
     - Conception détaillée de l'installation souterraine (types d'excavations, dimensions des galeries) et définition du programme expérimental (en particulier sources de chaleur et rayonnement employés);
     - Construction des puits, galeries et chambre expérimentale;
     - Mise en service et début d'exploitation de l'installation: détermination qualitative et quantitative du comportement de la roche hôte (à l'état non perturbé et dans les zones perturbées par les travaux miniers), détermination des paramètres caractéristiques du transfert des radioéléments et des produits de corrosion, essais in situ des composants d'une future installation industrielle.
     Contribution communautaire: 9,2 MECU sur 5 ans.

Commentaires

     Il est par aiIleurs signalé que Auriat en France et Altnabreac en Angleterre ont permis une meilleure connaissance des formations géologiques profondes. Il est d'ailleurs ajouté:
     «(...) Il convient de noter à ce propos la difficulté de planifier de semblables campagnes en raison des obstacles non techniques qui surgissent souvent dans les États membres concernés. (...)»
     Il s'agit donc d'un programme communautaire qui devrait permettre de tester les stockages profonds. Souhaitons que tout se passe correctement, c'est-à-dire après explication et consultation des populations, sinon «des obstacles non techniques» surgiront une fois de plus.

p.16
* Présenté par les autorités de la République Fédérale d'Allemagne.
**  Présenté par le CEN/SCK avec le soutien des autorités belges.
•••  Présenté par le CEA avec le soutien des autorités françaises. Le choix du milieu géologique fera l'objet d'une décision gouvernementale ultérieure.
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