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N°31

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    Survol rapide d'un article de M. P. Tanguy (Directeur de l'Institut de Protection et de Sûreté Nucléaires) paru dans le numéro 5 (septembre-octobre 1979) de la Revue Générale du Nucléaire.
    Cet article donne une description de l'accident et fournit quelques commentaires sur ce qui s'est passé. Pour l'essentiel, il n'y a pas de divergences entre la description de l'accident et celle qu'en avait fait la Gazette Nucléaire 26/27. Nous ne reprendrons donc ici que les points particulièrement significatifs de ce texte en ce qui concerne les enseignements pour la sécurité, en renvoyant le lecteur intéressé à la revue elle-même.

     Parmi les enseignements à retirer de l'accident, qui méritent de faire l'objet d'un rapport spécial, nous nous bornerons aux thèmes généraux suivants:
     a) Il n'est pas bon pour la sûreté de poursuivre le fonctionnement d'une installation qui n'est pas en excellent état. A Three Mile Island-2, avant l'accident, il y avait des défectuosités variées; du côté secondaire: avec les bouchages des lignes de transfert de condensats, du côté primaire: avec la fuite de la vanne de décharge, et un problème d'hétérogénéité de concentration en bore du côté traitement des effluents: avec un réservoir non étanche dont la réparation avait été repoussée.
     b) Il faut tenir compte des incidents précurseurs observés sur les centrales de même type qui, bien analysés, permettent de prévenir un nouvel incident qui pourrait dégénérer. Nous avons parlé de l'incident de Davis Besse en septembre 1977; il y avait eu également d'autres incidents sur des réacteurs B & W, telles les vannes ASG trouvées fermées en une occasion, qui auraient pu permettre d'éviter TMI·2
     c) Il faut améliorer la flabliite de certains équipements, et notamment des vannes; des essais représentatifs doivent être faits et les concepts doivent être modifiés si l'on ne peut avoir pleine confiance dans le bon fonctionnement des matériels.
     d) Il faut analyser les séquences accidentelles plausibles de manière aussi réaliste que possible, en tenant compte notamment des phénomènes physiques qui peuvent se produire: circulation en double phase, refroidissement en bouillotte, etc,
     e) Il faut prévoir les contaminations qui pourraient se produire en cas d'accident, et s'assurer de l'étanchéité des circuits et des bâtiments correspondants, et vérifier que des capacités de stockage suffisantes existent.
     f) Il faut enfin, et c'est sans doute de loin le plus important, étudier la sûreté des installations en se mettant à la place des exploitants:
     - vérifier que les consignes dont ils disposent sont cohérentes avec les études d'accident et le comportement des systèmes;
     - analyser tous les cas ou l'exploitant peut inhiber une action de sécurité et s'assurer qu'il procède aux vérifications préalables nécessaires;
     - founir à l'exploitant des informations claires et non ambiguës qui lui permettent à tout instant de connaître l'état réel de son installation;
     - s'assurer que ie programme de formation des exploitants est adapté aux actions qu'ils auront à exécuter en cas d'événement imprévu.
     Il n'est pas certain que ces réflexions débouchent sur de grandes modifications des installations: peut-être une Instrumentation complémentaire, ou des modifications de la logique de commande. A terme, il faut sans doute engager une recherche plus fondamentale sur les problèmes d'interface homme-machine, la conception des salIes de commande, les dispositifs de diagnostic et d'aide à la décision, etc.
     Il n'est pas exclu que finalement l'accident d'Harrisburg ne se révèle être une excellente chose pour la sûreté nucléaire, en lui permettant d'affirmer sa maturité. Ceci ne pourra se faire que dans un contexte d'étroite coopération internationale. Harrisburg a déjà eu pour conséquence de renforcer les échanges, déjà très nombreux, entre tous les organismes de sûreté. Les discussions sur les leçons tirées d'Harrisburg ont déjà commencé et vont se poursuivre pendant plusieurs mois, et peut-être plusieurs années, Partout les problèmes sont discutés avec toutes les parties intéressées, au sein de différents groupes de travail ou commissions d'enquête. La crédibilité de la sûreté nucléaire doit pouvoir en sortir renforcée.
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    Dans le corps du même article, on trouve l'encart suivant que nous reproduisons intégralement:

Nouvelles actions techniques entreprises par le Service Central de Sûreté
des Installations Nucléaires auprès d'Electricité de France à la suite de l'accident de TMI

 
     Compte tenu des enseignements qui ont été tirés de l'accident, de nouvelles actions concernant les tranches nucléaires à eau pressurisée ont été demandées à Electricité de France par le SCSIN.

     Les principales sont les suivantes:
     - Réexamen approfondi des informations mises à la disposition des opérateurs en ce qui concerne l'état des installations et des règles générales d'exploitation.
     - Réflexion sur la formation et la qualification du personnel.
     - Approfondissement de l'analyse systématique des incidents survenus au cours de l'exploitalion ou des essais effectués sur les tranches nucléaires en vue des enseignements à en tirer.
     -- Poursuite active d'études précédemment demandées correspondant à des situations hautement hypothétiques.
     - Etudes relatives au comportement de l'installation et des manœuvres à effectuer dans les situations post-accidentelles.
     - Poursuite de la qualification systématique des matériels dans l'hypothèse où ils sont placés dans des conditions exceptionelles.

     - Etude de la mise en œuvre dans les enceintes de matériels de mesures d'activité susceptibles de fourmr des indications sur les conditions d'ambiance en cas d'accident.
     D'autres actions particulières qui, sans remettre a priori en cause les règles utilisées pour la conception, la réalisatIon ou l'exploitation des tranches nucléaires, néanmoins peuvent conduire à des améliorations significatives pour la sûreté ont aussi été demandées à Electricité de France. Ces actions sont nombreuses et nous n'indiquons ici que les plus importantes:
     - Approfondissement du programme d'études permettant d'acquérir une meilleure connaissance des principaux modes de refroidissement du cœur du réacteur dans les diverses situations de fonctionnement envisageables, et notamment en cas de brèche de différentes sections sur le circuit primaire principal et sur le circuit de refroidissement à l'arrêt.
     - Etude des dispositions qui pourraient être envisagées pour évacuer les gaz incondensables qui se seraient formés dans le circuit primaire.
     - Bilan des essais de la robinetterie servant à l'isolement du circuit primaire des tranches nucléaires en exploitation et en cours de construction.
     - Etudes sur les systèmes de sauvegarde permettant de mettre en evidence les événements initiateurs d'incidents sur ces systèmes.
     - Evaluation de l'intérêt pour la sûreté de la possibilité d'effectuer un isolement automatique des ventilations de l'enceinte de confinement à partir des mesures d'activité effectuées à l'intérieur de celle-ci.
     - Etudes des cheminements d'une contamination éventuelle dans les divers locaux du bâtiment des auxiliaires nucléaires et du bâtiment de stockage des éléments combustibles.
     - Etude de faisabilité de la télécommande de mise en œuvre des pièges à iode installés sur la ventilation du bâtiment des auxiliaires nucléaires.
     - Poursuite des études déjà entreprises sur la possibilité de stocker les effluents fortement contaminés à l'intérieur du bâtiment réacteur dans des circonstances exceptionnelles.
     - Etudes relatives à l'instrumentation du contrôle commande et à la présentation des informations en salle de contrôle susceptibles d'améliorer les moyens mis à la disposition des opérateurs.
     Nous aimerions savoir où nous en sommes de toutes les études demandées? Ces observations rejoignent d'ailleurs l'avis du groupe permanent chargé des réacteurs nucléaires (au Ministère de 1'Industriel. A ce niveau, il serait très intéressant que le rapport des réunions des 14 et 21 juin soit publié. En particulier le chapitre III indique les «Mesures particulières à prendre vis-à-vis des PWR en France». Parmi celles-ci, signalons par exemple:
     - toute une série d'études et de modifications sur le bâtiment des auxiliaires nucléaires, ainsi que sur le transfert des effluents radioactifs,
     - la robinetterie de décharge du pressuriseur pour laquelle le comité écrit:
     «Robinetterie de décharge du pressuriseur
     a) Le groupe permanent ayant été tenu informé des positions sur ce sujet de la section permanente nucléaire, appelle l'attention du Chef du Service Central sur l'importance de la fiabilité de la robinetterie d'isolement du circuit primaire, et en particulier de la robinetterie des lignes de décharge du pressuriseur. "constate à cet égard, d'une part que les vannes de décharge n'ont pas fait l'objet - à ce jour - d'essais de validation et d'autre part que les essais effectués à BUGEY sur les vannes d'isolement se sont révélés non concluants.
     b) Le groupe permanent a pris note qu'Électricité de France s'est engagé à effectuer des essais de validation sur les vannes de décharge du pressuriseur à l'automne 1979.
    c) Le groupe permanent a pris note des résultats partiels, rapportés par le Service de l'Industrie et des Mines de Bourgogne-Franche-Comté, des essais effectués par Éleétricité de France et au cours desquels il a été observé un grippage d'une vanne d'isolement après 15 cycles. Il ne tire aujourd'hui aucune conclusion de ces résultats, mais demande que soient transmis aux autorités de sûreté, les procès-verbaux détaillés de ces essais.
suite:
     Le groupe permanent a aussi noté que des essais de fermeture sous pleine pression (5 cycles) de la vanne d'isolement seront effectués très prochainement sur la première tranche de DAMPIERRE-en-BURLY. Il demande que les résultats de ces essais lui soient transmis.
     Il estime qu'un essai de fermeture des vannes d'isolement sous pleine pression doit être effectué sur chaque tranche avant démarrage et que l'autorisation de chargement doit être subordonnée aux résultats satisfaisants de celui-ci. En tout état de cause, le groupe permanent considère que ces essais ne constituent qu'une première étape qui devra, à terme, être complétée par des essais permettant d'apprécier le nombre de cycles à plein débit, que peuvent supporter - sans dommage - les vannes d'isolement.»
     - qualification des matériels aux conditions accidentelles:
     «Ayant pris note du planning des essais de qualification des matériels aux conditions accidentelles, le groupe permanent estime que l'échéance de fin 1981 est trop tardive, compte tenu du nombre de tranches dont la mise en service est prévue avant cette date.
     - conception de la salle de commande:
     «Le groupe permanent souhaite qu'Électricité de France entreprenne un examen de la conception des salles de commande des centrales PWR, en vue d'une part d'améliorer la synthétisation et la hiérarchisation des informations à la disposition du personnel de conduite et d'autre part, de compléter l'automatisation de certaines opérations de conduite.Il souhaite examiner l'état d'avancement de cette réflexion avant la fin de l'annégaze 1979.»
     etc., etc.
     Voilà quelques aperçus. On aimerait savoir où on en est sur tous ces points. A notre connaissance, pas très loin...
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