La G@zette Nucléaire sur le Net! 
G@zette N°249/250
CULTURE DE SURETE: EDF DANS LE ROUGE !!!


2000 à 2007, bilans électriques français
Notes de lecture des bilans annuels publiés par le Gestionnaire du Réseau de transport d'électricité (RTE)
André Guillemette, juillet 2008



     1. Nucléaire et indépendance énergétique, part de l'électricité nucléaire dans la consommation d'énergie en France

     Selon la publication du CEA (CEA, 2006), la consommation totale d'énergie en France en 2005 a été de 276,5 Mtep (millions de tonnes équivalent pétrole), dont 117,5 Mtep en électricité. Sur ces 117,5 Mtep, 78,3% sont d'origine nucléaire, la part réelle du nucléaire est de 92 Mtep (117,5 x 78,3%) dans notre consommation d'électricité.
     La part du nucléaire dans le bilan consommation d'énergie française est donc de 33,27% (92 x 100 / 276,5).

suite:
     Si en 2007 les 58 réacteurs français ont produit 428,7 TWh d'électricité d'origine nucléaire (@ 7,2 TWh par réacteur):
     - Le transport de cette électricité a engendré 32,1 TWh des pertes en ligne (@ la production de 4,5 réacteurs).
     - Une partie de la surproduction, 7,4 TWh, est utilisée pour le pompage vers des réserves hydrauliques (@ la production de 1 réacteur).
     La perte en ligne d'énergie entre les lieux de production et les lieux de consommation est proportionnelle à la longueur de la ligne de transport, résistance «R» dépendant de la section du conducteur, de la résistivité du métal support et de la longueur de la ligne, et du carré de l'intensité du courant électrique «I2».
     C'est pour cette raison que les échanges d'électricité se font sur des lignes à très haute tension (440 kV) pour limiter les pertes en ligne:
     P = U.I, avec  U = R.I ou P = R. I2
p.27


     Lors du débat sur l'énergie organisé par le gouvernement français en 2003, l'association Global Chance partant des mêmes consommations de l'année 2000 que (CEA, 2001), mais prenant en compte toutes les données comptables (rendements, pertes en ligne, consommation d'auxiliaires,...), évaluait cette contribution de l'énergie nucléaire à 17%, alors que les données officielles situaient cette contribution à 28% pour cette même année 2000 (Global Chance 2003).

     2 La production d'énergie nucléaire et l'exportation d'électricité
     En 2007, les 58 réacteurs français ont produit 418,6 TWh (TWh = 1.000 milliards de Watt par heure). 56,7 TWh soldent le bilan positif des échanges d'électricité avec les pays limitrophes Italie, Suisse, Grande Bretagne, Espagne, Allemagne. En 2007, comme les dix années précédentes l'exportation était de l'ordre de 83 TWh.
     Nous avons exporté en 2007 une quantité d'électricité équivalente à la production de 8 (solde positif des échanges) à 11,5 (production en base, contractuellement exportée) réacteurs.
     Il nous a paru intéressant de remonter le temps à l'aide des documents publiés par le gestionnaire RTE depuis 2000 pour examiner si cette surproduction est incidentelle ou structurelle - schéma 1:

Schéma 1
Part des différentes énergies (%) en France en 2005

Source: Mémento sur l'énergie Energy daya book,
CEA, édition 2006, page 30

     2.1 Bilan détaillé des échanges - schéma 2:

Schéma 2
Électricité d'origine nucléaire et exportations d'électricité

Sources: EDF et RTE
Un solde positif des échanges d'électricité apparaît dès 1982, progresse rapidement jusqu'en 1990 pour rester relativement constant jusqu'à aujourd'hui.

suite:
     Dès 1984 apparaît une surcapacité équivalente à la production de 4 réacteurs. En part de la production d'origine nucléaire l'électricité exportée varie en 10 à 20% de cette production. Depuis 1991 le palier d'exportation varie entre l'équivalent production de 8 à 11 réacteurs.

     2.2 Solde des échanges  (un réacteur produit en moyenne 7,2 TWh/an - schéma 3):

Schéma 3
Historique du solde  des échanges d'électricité
rapporté au nombre de réacteurs

     Depuis 2004, la tendance est à l'exportation de la production d'environ 3 réacteurs vers la Suisse, 3 réacteurs vers l'Italie, 2 réacteurs vers la Belgique, et un réacteur vers la Grande-Bretagne et l'Espagne. Par contre, nous importons l'équivalent de la production d'un réacteur de l'Allemagne, pays connu pour son fort développement des énergies renouvelables... et l'engagement pour l'arrêt de son programme électronucléaire.

     3 Commentaires
     Depuis 1990, nous avons  une surcapacité  moyenne de 10 réacteurs nucléaires, sur les 48 dédiés à l'utilisation hexagonale, 3 réacteurs (sur les 4 du site de Tricastin) servent uniquement à l'enrichissement du combustible, combustible qui là encore n'est pas réservé au seul usage hexagonal: Tricastin fabrique plus du tiers de la production mondiale, l'équivalent du chargement de 100 réacteurs, soit encore presque 1,5 réacteurs dédiés à l'exportation. AREVA construit actuellement sur le site de Tricastin une nouvelle usine d'enrichissement par centrifugation (GB2), le procédé par centrifugation est nettement moins gourmand en électricité que le procédé actuel par diffusion gazeuse: 75 MW contre 3.000 MW. La nouvelle usine sera opérationnelle en 2009 (ASN, 2007)... et la production de 3 réacteurs de 900 MWe sera disponible sur le réseau en 2009, 2 ans avant la mise en service prévue (2011) de l'EPR en construction à Flamanville.
     Il est aussi notable qu'un réacteur sert en permanence à pomper de l'eau (environ 7 TWh/an) pour la monter dans des réserves d'eau dont l'énergie est restituée en conduite forcée, en fonction des besoins (méthode «shaddocks»)
     12 réacteurs sur 58, soit 20,7% du parc nucléaire français, sont utilisés à d'autres fins que les seuls besoins énergétiques des français depuis le début des années 1990.
     Quel que soit le scénario de consommation envisagé par nos prévisionnistes notre consommation d'électricité devrait rester stable durant les 20 prochaines années.

p.28

 

Schéma 3
Historique du solde des échanges d'électricité rapportés à  la production d'électricité d'origine nucléaire

Schéma 4
Exportations (et importation) d’électricité

Source: RTE

     De 2009 à 2011 la production de 4 réacteurs (3 x 900 MWe à Tricastin, 1 x 1.600 MWe à Flamanville) va être disponible sur le réseau électrique français sans que la consommation ait progressé notablement: elle a régressé entre 2006 et 2007 (RTE, 2006 et 2007). Que faire de ces 4.300 MWe disponibles en base, sinon signer là encore des contrats d'exportation pour assurer un débouché fiable à notre production nucléaire?
     Contrairement au discours convenu sur la réduction de l'effet de serre grâce au nucléaire dans les prochaines années, les prévisionnistes envisagent une stabilité de la consommation d'électricité et une progression de notre consommation de pétrole dans l'hypothèse maximaliste, ce qui est antinomique de la volonté affichée de réduction des gaz à effet de serre.

suite:
     Alors que la France est en surcapacité de 12 réacteurs, que les 58 réacteurs actuels ont une durée minimale d'activité prévue de 40 ans (60 ans - espérés - pour les mêmes réacteurs nucléaires aux Etats-Unis), soit un premier besoin de remplacement en 2017 au plus tôt, que la production de 3 réacteurs de Tricastin va être reversée sur le réseau français à partir de 2009, nous ne percevons toujours pas encore pourquoi il a fallu démarrer de toute urgence la construction d'un réacteur EPR à Flamanville, dont la production viendra s'ajouter en 2011 à notre surcapacité chronique.
     Rappelons que Flamanville est un des sites les plus éloignés des frontières suisse et italienne, limites de résidence des principaux clients d'EDF.
PS: Le 3 juillet 2008, Nicolas Sarkozy en visite aux ateliers du Creusot annonce la construction d'un 2ème EPR à partir de 2009, la fuite en avant continue.

4 Bibliographie
     ASN, 2007. Rapport annuel: La sûreté et la radioprotection en France en 2007
     CEA, 2006. Mémento sur l'énergie. CEA, édition 2006
     Global Chance, 2003. Les cahiers de Global Chance. Petit mémento énergétique. Eléments pour un débat sur l'énergie en France. Janvier 2003
     RTE, 2000 à 2007. Résultats techniques du secteur électrique en France. RTE, Gestionnaire du Réseau de Transport d'Electricité. Années 2000 à 2007


"Documents nucléaires importants"
p.29

Retour vers la G@zette N°249/250