La G@zette Nucléaire sur le Net! 
N°80/81
DES NOUVELLES DU PROGRAMME FRANCAIS

NOUVELLES EN VRAC


A. Extraits de Sûreté Nucléaire

     Extrait de SN, le bulletin que vous pouvez obtenir 101 rue de Grenelle 75007 Paris.

Construction des installations Centrales nucléaires
1. BELLEVILLE
· Tranche 1
     L'épreuve d'étanchéité de l'enceinte de confinement ayant donné un taux de fuite supérieur au critère retenu pour cet essai (voir bulletin SN n°54), Electricité de France a proposé d'appliquer un revêtement en résine en certains endroits du parement externe de l'enceinte interne. De plus, Electricité de France a proposé d'effectuer une nouvelle épreuve à la pression relative de 1 bar à l'issue des travaux. Ces mesures sont en cours d'analyse par le service central de sûreté des installations nucléaires et ses appuis techniques.
     Commentaire: Tout ceci est fort bien dit mais que se passe-t-il? L'enceinte est poreuse. Certes il y a une double enceinte mais tout de même. Pour ce type de centrale, inutile de mettre des filtres à sable ou filtre rustique, 1'enceinte est un filtre toute seule. La résine ne changera pas grand chose à la mauvaise qualité du béton.

II. TRICASTIN
· Tranches 1 et 2
     Le fonctionnement de ces tranches n'a été perturbé par aucun événement notable.
· Tranche 3
     La tranche a été mise à l'arrêt pour une durée de 8 semaines, le 14 février 1987, afin de procéder au renouvellement annuel du combustible ainsi qu'à des opérations de maintenance et de contrôles, notamment la visite quinquennale des circuits primaire et secondaire.
· Tranche 4
     Le vendredi 20 février 1987, une fissure a été décelée à l'amont d'une soupape située sur le circuit d'injection de sécurité (ce circuit, destiné à envoyer notamment de l'acide borique très concentré, permet, en cas de besoin, d'étouffer toute réaction nucléaire à l'intérieur du cœur). Alors que les spécifications techniques demandaient la mise à l'arrêt de la tranche, une réparation provisoire a été réalisée tranche en puissance (déplacement de la soupape du circuit, bouchage de la tuyauterie fissurée). Une visite de surveillance effectuée le 12 mars par des inspecteurs des installations nucléaires de base a permis de constater, d'une part le non respect de la spécification technique applicable, d'autre part l'absence de garanties démontrées sur l'efficacité de la réparation effectuée, les règles d'organisation de la qualité n'ayant pas été respectées.      Compte tenu des observations émises par le service central de sûreté des installations nucléaires, Electricité de France a pris immédiatement la décision d'arrêter la tranche pour effectuer une réparation définitive.

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     Des essais a posteriori ont montré une bonne tenue de la réparation provisoire, confirmant ainsi que la sûreté de la tranche n'avait pas été affectée. En résumé, cet événement a révélé une défaillance portant sur certaines méthodes de travail (respect des spécifications techniques, organisation de la qualité), dont les enseignements devront être tirés, et non pas une dégradation réelle de la sûreté de l'installation.
     Commentaire: Pas mal tout de même, une violation flagrante des règles de sûreté ne dégrade en rien la sûreté de l'installation. Peut-être envisage-t-on finalement de supprimer ces règles de sûreté, au fond elles compliquent tout et n'améliorent en rien la sûreté.

III. Le Bulletin sur la Sûreté des Installations Nucléaires de janvier-février 1987 nous parle du gel
     «Les nombreux incidents rencontrés en 1985 durant la période de gel (voir Bulletin SN n°43) ont pu, cette année, être en grande partie évités grâce à la mise en place de procédures «grand gel».
     Dans la récente Gazette N°75, nous demandions la mise en place d'une procédure H6 pour le gel. Nous ignorions qu'EDF avait déjà en place une procédure «grand gel» qui a failli tourner à la catastrophe. Nous hésitons à demander une nouvelle amélioration dite procédure «très grand gel», compte tenu de la conception qu'EDF a de l'amélioration des installations.

B. La centrale du Carnet

     EDF a en projet la construction d'une centrale nucléaire (2 x l.400 MWe) sur la rive gauche de l'estuaire de la Loire entre St Brévin et Nantes. La procédure de demande de déclaration d'utilité publique est en cours.
     En dehors des problèmes généraux que posent toutes les centrales nucléaires, nous évoquerons ici quelques aspects spécifiques de ce site.
1. Dépôt des rejets radioactifs dans les boues de l'estuaire
     L'eau de la Loire dans l'estuaire est très boueuse. Le bouchon vaseux oscille suivant les marées de part et d'autre du Carnet. La vitesse moyenne d'écoulement des eaux compte tenu de ce mouvement a une valeur apparente très faible. Il faut environ 6 jours pour que l'eau rejetée au niveau du Carnet soit évacuée dans l'estuaire externe. Si la description de ces phénomènes est correctement faite par EDF, leurs conséquences par contre ne sont pas du tout évoquées. Les rejets radioactifs resteront un temps très long dans l'estuaire. Ils pourront être absorbés par la boue du bouchon et se déposer sur le fond dans la crème de vase. On peut donc s'attendre à une concentration de la radioactivité dans l'estuaire. 

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2. Les rejets de sels dans l'atmosphère
     L'eau de l'estuaire a une salinité importante. Avec le système de réfrigération de type humide retenu par EDF, un panache de gouttelettes d'eau est rejeté des tours de refroidissement. Ces gouttelettes entraîneront avec elles des sels.
     Ce sera la première centrale française présentant cette caractéristique. Il y a très peu d'expérience dans le monde sur ce type de rejet. La législation qui s'est préoccupée des rejets de sel dans l'eau, n'a pas prévu de règlementer les rejets de sel dans l'atmosphère. Les prédictions d'EDF repose essentiellement sur des modèles mathématiques s'appuyant sur quelques observations faites sur une centrale américaine dont le fonctionnement est très différent de celui qui est prévu pour la centrale du Carnet. La taille des gouttelettes est un des paramètres importants qui joue sur l'entraînement des sels.
     EDF affirme à partir des résultats de ses études théoriques que les quantités de sel rejetées ne devraient pas dépasser les quantités observées au bord de l'océan. Au cas où le modèle mathématique retenu sous-estimerait les rejets, il n 'y aurait aucune possibilité d'améliorer le système.
     De toute façon les retombées de sel dans le voisinage constituent une gêne pour la population.

3. Le gel
     Le dossier présenté par EDF n'évoque pas les problèmes que le gel fait courir à la sûreté de l'installation. Pourtant l'expérience de l'hiver dernier a montré que les effets du gel avaient été très largement sous-estimés. La centrale thermique de Cordemais quasiment en face du Carnet sur la rive droite de l'estuaire a eu les filtres de ses capteurs d'eau obstrués sous l'effet conjugué de la marée basse, de la vase et des paillettes de glace en suspension. Cette situation pourrait se produire au Carnet et si l'insuffisance de la prise d'eau de refroidissement ne présente guère de danger dans une centrale thermique, cela pose des problèmes autrement plus complexes et dangereux dans une centrale nucléaire. EDF est-elle décidée à tenir compte de l'expérience même quand cela implique des dépenses supplémentaires pour la sûreté de ses centrales?

4. La sismicité
     Le BRGM (Bureau de Recherches Géologiques et Minières) a établi une carte de France de la sismicité: pour chaque région, il a déterminé l'intensité du séisme maximal historiquement vraisemblable. C'est à partir de cette intensité qu'on détermine le séisme majoré de sécurité.
     En appliquant au site du Carnet cette procédure, la centrale ne pouvait être du type standard. EDF a donc révisé en baisse les caractéristiques des séismes de référence fournies par les BRGM. Celui-ci n'a d'ailleurs pas été consulté sur cette révision.

suite:
     Les méthodes d'EDF sont tout à fait inacceptables et ne devraient pas être acceptées par les autorités de sûreté. Pour cela il faudrait qu'elles aient un véritable pouvoir de décision en matière de sûreté.

5. La proximité d'installations dangereuses
     EDF dans ses études de sûreté n'a pas tenu compte des installations industrielles de la rive droite de l'estuaire. A moins de 15 km du site il existe 6 installations classées dangereuses et soumises par la «Directive Post-Seveso» à des enquêtes de sûreté.
    Sur la rive droite:
    - Elf France et Elf Antargaz à Donges (10 km), un accident dans le terminal méthanier de Donges n'est pas pris en compte.
     - la Société Chimique de Grande Paroisse, la Société Gardiloire et Gaz de France à Montoir de Bretagne (15 km).
     Les importants stocks d'ammoniac de l'usine d'engrais chimiques Gardiloire sont situés à proximité immédiate de l'aéroport de St-Nazaire-Montoir, ce qui aggrave considérablement les dangers.
     Sur la rive gauche, la Société Octel-Kuhlman (Péchiney-Ugine-Kuhlman) à Paimbeuf est située à 5 km du Carnet. Cette usine est aussi sur la liste des usines dangereuses soumises à la Directive Post-Seveso.
     Signalons en addition deux gazoducs (pression de 67,7 bars) qui passent respectivement à 2,5 km et 5,5 km du site.
     L'ensemble de ces installations dangereuses auquel il faut ajouter l'important trafic maritime sur la Loire (de produits pétroliers en particulier), nécessite que soit examinée la sûreté globale de la région. La procédure qui consiste à exiger des études de sûreté individuelles relatives à chaque entreprise est totalement inadéquate et ne permet absolument pas d'appréhender correctement les dangers.
     Dans les différents ministères concernés, on se préoccupe des problèmes posés par les risques technologiques majeurs. Une loi va être proposée au parlement à ce sujet. Hélas, cela ne semble concerner que la gestion médiatique des risques majeurs. Il n'y a aucun indice d'un véritable changement vis-à-vis de l'étude de ces risques avant leur implantation. Signalons que la Directive Post-Seveso pour les installations dangereuses prévoit des études de sûreté mais elle ne donne aucune indication pour les cas où ces études montreraient des dangers importants. Pour les installations situées au voisinage du Carnet, elles devraient inclure la présence éventuelle de la centrale nucléaire dans leurs études et dans les plans d'urgence qui devraient en résulter.
     Les élus de la région qui soutiennent ce projet de centrale sont certainement totalement ignorants du dossier et se contentent des propos rassurants et lénifiants de l'EDF.

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C. Du combustible au plutonium (MOX) à St Laurent des Eaux

     Une partie du cœur de St Laurent des Eaux va être remplacée par un nouveau combustible appelé MOX (mixed oxides), mélange d'oxydes d'uranium et de plutonium.
     La justification qui est donnée de cette modification est que «l'état actuel du développement des réacteurs à neutrons rapides rend disponible un certain stock de plutonium issu du retraitement». Ce serait donc la conjoncture actuelle concernant l'avenir des surgénérateurs qui justifierait l'utilisation de MOX. Cependant cette modification était déjà envisagée avant 1977 car elle est évoquée dans les décrets d'autorisation de création des tranches B1 et B2 de St Laurent des Eaux ainsi que pour Tricastin, Gravelines, Blayais et Dampierre. Bien sûr il est possible qu'EDF savait déjà à cette époque que les surgénérateurs allaient vers une impasse.
     Ces décrets d'autorisation de création prévoyaient: «Le stockage sur le site et l'introduction dans un réacteur de combustible initialement enrichi en oxyde de plutonium ne pourront intervenir qu'après autorisation particulière du ministre de l'industrie, du commerce et de l'artisanat délivrée après avis du ministre de la santé et de la sécurité sociale
     Cette clause permettait d'effectuer une modification importante de l'installation et des risques sans qu'il soit nécessaire de procéder à une enquête publique. La légalité de cette procédure est douteuse car le dossier soumis à enquête locale lors de la demande de déclaration d'utilité publique (en 1972 pour St Laurent des Eaux) ne pouvait comporter d'indication concernant ce combustible: les études sur le comportement des réacteurs avec ce type de combustible n'étaient guère avancées.
     Normalement une modification des conditions de fonctionnement et des risques ne devrait être autorisée qu'après une enquête publique. Mais le petit paragraphe des décrets d'autorisation de création détourne l'esprit de la loi.
     Le Groupe de travail sur la gestion des combustibles irradiés, du Conseil Supérieur de la Sûreté Nucléaire (Commission Castaing => 1983: N°52, 1984: N°62/63, 1987: N°76/77 (p03), 1996: N°153/154), a évoqué le problème du recyclage du plutonium dans les réacteurs à eau pressurisée. Dans l'annexe 19 du rapport de cette Commission (1981-1982) il est dit:
     «La mise en œuvre du recyclage du plutonium dans les réacteurs à eau suppose néanmoins que l'on sache répondre à différentes questions:
     - combien de fois et dans quelles conditions le plutonium peut-il être recyclé dans les réacteurs?
     - quelles sont les conséquences sur le fonctionnement du réacteur de l'utilisation du plutonium comme combustible?
     - quelles servitudes apparaissent avec l'introduction du plutonium recyclé dans les chaînes de fabrication du combustible?»
     On voit bien qu'il ne s'agit pas du remplacement banal d'un combustible par un autre équivalent.
     Le fonctionnement du cœur avec ce combustible est notablement différent surtout si l'on dépasse 50% de la totalité du cœur. C'est le cas de St Laurent des Eaux car si cette année on remplace 1/3 du cœur, l'opération sera renouvelée les années suivantes. Il s'agit donc bien d'une modification majeure.  

suite:
     Le Bulletin sur la Sûreté des Installations Nucléaires du Ministère de l'Industrie (SN) de mai-juin 1986, donne quelques indications sur le comportement de ce type de combustible:
     «Les caractéristiques neutroniques des assemblages au plutonium contenant de l'oxyde mixte d'uranium et de plutonium se distinguent de celles des assemblages à base d'oxyde d'uranium principalement sur trois points:
     - l'absorption neutronique beaucoup plus élevée, due à la présence d'isotopes neutroniques, nécessite, pour une même quantité d'énergie produite, un flux de neutrons plus important, ce qui a conduit à la définition d'un assemblage hétérogène dans lequel la concentration en plutonium est croissante du bord vers le centre; ceci évite les problèmes d'interface avec des assemblages voisins à l'uranium, qui se traduiraient par des pics de puissance localement élevés;
     - les coefficients de température négatifs plus élevés en valeur absolue (Doppler, modérateur) induisent une moins bonne efficacité des absorbants neutroniques (grappes de contrôle, bore, xénon);
     - la proportion de neutrons retardés plus faible a une incidence sur la cinétique de réaction du cœur, en particulier dans certaines séquences accidentelles conduisant à une insertion de réactivité dans le cœur (rupture de tuyauterie de vapeur, éjection d'une grappe de commande...)
     Le cœur sera modifié progressivement par étapes au cours des rechargements futurs. EDF nous rassure. Dans le Bulletin SN il est dit:
     «Pour chacune des configurations prévues, Electricité de France a examiné les conséquences de la présence de ces assemblages sur le comportement du cœur, tant en fonctionnement normal qu'en situation accidentelle, de manière à vérifier que les critères de sûreté sont toujours respectés
     Ces modifications successives posent un problème qui n'a pas été mentionné. Le rapport définitif de sûreté pour les réacteurs à uranium faiblement enrichi ne peut évidemment pas couvrir le fonctionnement (en essai et en exploitation) de ce nouveau type de réacteur. Y a-t-il des rapports provisoires de sûreté pour les diverses étapes? Le Bulletin SN mentionne la fourniture par EDF d'un «dossier de faisabilité» et non pas d'un véritable rapport de sûreté. Si ces rapports existent, ont-ils été soumis pour examen aux diverses instances administratives prévues? Nous ne pouvons accepter qu'une simple «autorisation particulière du ministre de l'industrie» remplace toute la procédure qui doit régir les problèmes de sûreté nucléaire. Malgré les enseignements de Three Mile Island et de Tchernobyl on s'oriente en France vers une banalisation de l'industrie nucléaire, ce qui est particulièrement inquiétant.
     Certains aspects de l'utilisation du plutonium dans un PWR nous paraissent devoir être soulignés:
     1. Il n'est pas possible d'utiliser un combustible de composition uniforme car cela conduirait à des discontinuités au raccordement avec l'ancien combustible. Le taux de plutonium varie de 2,4% à 4%. Cette contrainte est loin d'être anodine car elle pose le problème de la gestion «humaine» des divers assemblages de combustible tous différents. Contrôle à la fabrication, repérage exact de la composition tout le long de la chaîne de fabrication du combustible, mise en place correcte des assemblages suivant leur composition, retraitement d'assemblages tous différents pour le combustible usé (criticité variable).
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     Le Bulletin SN signale à ce sujet:
     «L'organisation de la qualité de la fabrication des assemblages doit être telle que la probabilité d'inversion de crayons de teneur en plutonium différente soit suffisamment faible». 
     Ainsi la sûreté dépendrait d'une gestion particulièrement attentive des divers assemblages (différents les uns des autres) tout au long de la chaîne, de la fabrication du combustible au retraitement en passant par le réacteur. Tous les systèmes de sûreté essaient d'éviter de faire dépendre la sécurité de la gestion humaine. Parler de «probabilité» dans ce cas comme le fait SN n'a strictement aucun sens.
     Comment être assuré qu'au chargement aucune erreur géométrique ne sera faite? Quelle sera la stratégie d'EDF pour s'en assurer?
     Des erreurs de positionnement de certains éléments pourraient conduire à une configuration non dangereuse en opération normale, mais en cas d'accident les opérateurs devraient réagir sur un système dont ils ignoreraient la configuration exacte et dont le comportement n'aurait pas été envisagé et étudié. Ceci pourrait compliquer considérablement la gestion des incidents.
     Au moment où la tendance en matière de sûreté est à réduire le plus possible la composante humaine imprévisible, on utilise un combustible où cette composante humaine devient prépondérante.
     2. Le combustible à base de plutonium est plus fortement radioactif que le combustible à base d'uranium enrichi. La présence d'Américium 241 provenant de la désintégration du plutonium 241 (période 13 ans) présent dans le plutonium de retraitement, aggrave encore la situation.
     Ainsi tout au long de son élaboration ce combustible sera plus dangereux. En particulier le chargement du combustible se fera dans des conditions d'irradiation plus dures pour le personnel. Il serait normal, dans un but de radioprotection, que le chargement soit accéléré, ce qui complique les contrôles et multiplie les risques d'une mauvaise gestion (voir le paragraphe précédent).
     3. La gestion du plutonium est beaucoup plus contraignante que celle de l'uranium faiblement enrichi. Les risques de criticité (expression qui signifie explosion nucléaire) sont beaucoup plus grands. Le transport du combustible neuf est donc beaucoup plus dangereux. Evoquons en passant la tendance de vols terroristes, surtout si ce genre de combustible avait tendance à se généraliser comme cela semble être le cas.
suite:
     4. Le fonctionnement du réacteur avec ce type de combustible est délicat. Le Bulletin SN donne quelques indications à ce sujet mais il n'est pas possible, car cela n'est pas évoqué, de se rendre compte de la gravité des situations accidentelles possibles.
     L'accident de Tchernobyl a montré l'importance qu'il fallait attacher à la stabilité des réacteurs. Les experts français après l'accident russe ont beaucoup insisté sur la stabilité absolue des PWR (ce qui est loin d'être évident d'ailleurs) comme garantie d'une bonne sécurité. Mais avec MOX cet argument disparaît car le réacteur peut développer certaines instabilités contre lesquelles les systèmes de protection sont «moins efficaces».
     5. Les rejets d'effluents radioactifs de la centrale ainsi modifiée pourraient être notablement différents. En effet en cas de rupture de gaines (on considère la situation comme «normale» lorsqu'on n'a pas dépassé un taux de rupture de gaines réglementairement fixé!), la quantité des émetteurs a (les plutonium et leurs produits de filiation) susceptibles de contaminer le circuit primaire sera notamment plus importante. Cela implique évidemment des conditions d'exploitation plus dures pour le personnel de la centrale.
     6. Le plutonium est un des éléments les plus radiotoxiques. Toute augmentation des quantités de plutonium manipulés accroît les dangers (transport, manutention, etc ...).
     A titre indicatif, nous donnons ici les limites annuelles d'incorporation (LAI) maximales admissibles d'après les Directives Européennes de 1980 et 1984 (les valeurs sont en Becquerels):
Radioéléments 239 Pu 131 I 134 Cs 190 Sr
LAI par inhalation 20 20.000 400.000 10.000
LAI par ingestion 20.000 100.000 300.000 100.000

     Karl Morgan qui a longtemps présidé la Commission Internationale de Protection Radiologique d'où sont issues ces LAI a indiqué dans divers articles dès 1975 que le danger du plutonium serait sous-estimé d'un facteur pouvant atteindre 200.

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D. MAGNUC OU le tranquillisant sur Minitel

1. Commentaire

     Pour informer les Français, les ministres de l'Industrie et de la Santé ont mis en place un service Minitel, MAGNUC. Au chapitre «Rayonnement et Santé: effets aléatoires», vous pourrez trouver la perle suivante:
     «On part d'une constatation sûre, acquise en radiothérapie avec de très fortes doses, pour considérer (par extrapolation) qu'un patient théorique qui recevrait une dose thérapeutique de 100 grays (10.000 rads) en un temps très court, aurait une forte probabilité de présenter dans les 25 ans à venir, un nouveau cancer (pas forcément incurable) dû au traitement qui lui aurait sauvé la vie.
     Pour des raisons de prudence, en vue d'établir des limites très protectrices, on admet que ces 100 grays, donnés en une seule fois, provoqueraient alors à coup sûr un cancer chez ce patient dans les 25 ans à venir
     Admirons «la constatation sûre acquise» sur un «patient théorique»...
     Il est certain qu'un malade et aussi même un homme en très bonne santé recevant d'un seul coup 10.000 rads n'a aucune chance de mourir d'un cancer les 25 ans qui suivent car il mourra quasi instantanément. Aucun médecin ne délivre de telles doses à des malades. L'auteur a dû confondre dose efficace et dose à un organe, à moins que l'on ait affaire à un malade «théoriquement» résistant. Mais son cancer sera-t-il réel ou «théorique»?
     A-t-on le droit d'extrapoler des considérations réellement absurdes faites sur un patient théorique ayant un cancer réel qui a conduit un médecin (théorique ou réel? le texte ne le dit pas) à lui délivrer une dose (théorique peut-être?) de 10.000 rads, sur une population réelle qui recevrait réellement de telles doses?
     Ces considérations sont présentées comme les conclusions des organismes de radioprotection les plus respectés. On conçoit qu'avec de tels arguments Monsieur Pellerin ne soit pas convaincu que les faibles doses aient un effet quelconque à part l'angoisse que les alarmistes antinucléaires provoquent dans la population.
     On aimerait savoir si l'auteur de ce texte appartient à l'équipe qui a en charge au Ministère de la Santé la protection de la santé publique en cas de crise nucléaire. Si oui, on a de très fortes raisons d'être inquiet!

suite:
2. Analyse des informations
21 avril 87

     Creys-Malville
     Au niveau du dossier d'actualité de Creys-Malville, nulle part il n'est fait mention de la raison élémentaire qui permet de comprendre pourquoi on ne vidange pas le barillet: c'est-à-dire que les installations en aval ne sont pas disponibles car non finies de construire.
     C'est donc de l'information édulcorée à la limite de la désinformation. 

     SITE
     «Le site nucléaire de Tricastin comprend 5 installations nucléaires:
     - CPN EDF 
     - Eurodif 
     - Séparation isotopique uranium (COGEMA) 
     - FBFC (Franco Belge de Fabrication du Combustible) 
     - Commurhex 
     Il manque SOCATRI et quelques autres entreprises. 
     SOCATRI est une entreprise de maintenance de matériel nucléaire. Elle a donné quelques émotions au capitaine Salisson des Sapeurs Pompiers de Valence qui, intervenant lors de la fuite d'UF6 et étant comme il l'écrit dans son rapport «convaincu de ne pas relever de traces de pollution radioactive liées à cet accident», s'est trouvé confronté à des niveaux significatifs provenant de dépôts de matériaux et matériels usagers de la SOCATRI.
     Pas de chance pour MAGNUX, le contrôle des informations montre un lissage, une information édulcorée. 
     MAGNUC est-il un bulletin d'information ou un tranquillisant sur Minitel?
 

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