02/05/2018 •

Lettre d’information de l'EPR n°20 :
les points marquants de l’année 2017 et du début de l’année 2018
02/05/2018

L’ASN a poursuivi ses actions de contrôle du chantier de construction du réacteur EPR de Flamanville 3 et des différentes fabrications lui étant destinées. Les points marquants de l’année 2017 et du début de l’année 2018 sont détaillés ci-après ;

l’ASN a été particulièrement vigilante aux activités d’essais de démarrage, qui ont pris de l’ampleur durant l’année écoulée.

Le contrôle de l’ASN réalisé en 2017 a notamment mis en exergue plusieurs points de vigilance qui ont conduit le collège de l’ASN à auditionner, le 7 février 2018, les directions générales d’EDF et de Framatome sur le projet de réacteur EPR de Flamanville.

Lors de cette audition, le collège de l’ASN a plus particulièrement interrogé EDF et Framatome sur les anomalies affectant les équipements sous pression nucléaires, les essais de démarrage du réacteur et les instructions techniques en cours liées à la demande d’autorisation de mise en service de l’installation.

Écarts détectés lors de la réalisation et du contrôle des soudures des circuits secondaires principaux

Début 2017, l’ASN a été informée par EDF que des exigences renforcées, associées à une démarche dite « d’exclusion de rupture », n’avaient pas été retranscrites au sous-traitant chargé de la réalisation en usine de 8 soudures des lignes principales d’évacuation de la vapeur. Une inspection de l’ASN sur site le 21 février 2017 a révélé que ces exigences n’étaient également pas prises en compte pour les soudures réalisées dans l’installation. L’analyse de cet écart par EDF, effectuée à la demande de l’’ASN, a permis de détecter que plusieurs de ces soudures ne respectaient pas certaines de ces exigences. L’ASN poursuit actuellement l’instruction de ces écarts ; elle a notamment mené une nouvelle inspection sur site les 27 et 28 février 2018.

L’ASN considère que l’organisation définie et mise en œuvre par EDF pour la réalisation des lignes principales d’évacuation de la vapeur apparaît insuffisante.

En parallèle de cette instruction, l’ASN a été informée par EDF fin mars 2018 de la détection de défauts de réalisation de certaines soudures des circuits secondaires principaux, dont plusieurs soudures des lignes principales d’évacuation de la vapeur. Ces défauts n’avaient pas été identifiés par les contrôles de fin de fabrication. Le 10 avril 2018, l’ASN a mis en évidence, au cours d’une inspection, que l’organisation et les conditions de travail lors des contrôles de fin de fabrication ont globalement nui à la qualité de ces contrôles. Par ailleurs, une surveillance inadaptée de ces prestations par EDF et Framatome n’a pas permis d’identifier et de remédier aux difficultés rencontrées par les intervenants. L’ASN poursuivra l’instruction de ces écarts dans les mois qui viennent et sera notamment attentive à la qualité et aux résultats des nouveaux contrôles mis en œuvre par EDF sur les soudures concernées. L’ASN estime qu’EDF devra étendre ces contrôles à d’autres circuits.

Contrôle des essais de démarrage du réacteur EPR de Flamanville 3

L’ASN a poursuivi son contrôle de la préparation et de la réalisation des essais de démarrage du réacteur EPR, qui ont fait l’objet de sept inspections en 2017, dont cinq réalisées de manière inopinée. Ces activités se sont intensifiées, notamment avec le début des essais d’ensemble des systèmes. Les inspecteurs ont particulièrement examiné la rigueur de préparation et de réalisation des essais, la documentation et le traitement des écarts détectés, la surveillance exercée sur les intervenants extérieurs ainsi que l’organisation mise en œuvre par EDF pour décider de la poursuite du programme général des essais de démarrage.

Au vu de cet examen par sondage portant sur la documentation des essais et la réalisation des activités sur le chantier, l’ASN considère que l’organisation définie et mise en œuvre sur le site relative aux essais de démarrage est perfectible. EDF doit améliorer la rigueur de préparation et de réalisation des essais de démarrage en justifiant la représentativité des essais pour lesquels des adaptations de procédures sont mises en œuvre et en documentant en temps réel les écarts rencontrés. Par ailleurs, EDF doit améliorer l’information de l’ASN sur l’avancement de ces essais et les écarts détectés lors de leur déroulement. En ce sens, l’ASN a demandé à EDF un plan d’actions et contrôlera l’efficacité de ce plan d’actions.

Contrôle de la préparation des équipes d’EDF chargées de la future exploitation du réacteur de Flamanville 3

Dans le même temps, l’ASN contrôle la préparation des équipes chargées de la future exploitation du réacteur EPR de Flamanville 3. Les inspecteurs vérifient la définition et la mise en œuvre progressive des différentes organisations d’exploitation, la gestion des compétences des agents ainsi que les modalités d’élaboration de la future documentation d’exploitation afin de s’assurer que les équipes seront prêtes à exercer pleinement leurs responsabilités pour les étapes de mises en service partielles puis de mise en service du réacteur.

À ce titre, l’ASN a mené en 2017 six inspections dédiées à la préparation à l’exploitation de l’EPR. Au vu de cet examen par sondage, l’ASN considère que les organisations définies et mises en œuvre sur le site pour l’élaboration de la documentation d’exploitation des groupes électrogènes et des matériels de ventilation, le management de la sûreté, la radioprotection des travailleurs, la maîtrise des agressions et les transports sont satisfaisantes.

Toutefois, l’ASN considère que l’organisation définie et mise en œuvre sur le site pour préparer l’arrivée et l’entreposage du combustible neuf sur site (mise en service partielle de l’installation) n’est pas satisfaisante. En particulier, l’exploitant devra veiller à mettre en place :

-une planification rigoureuse, permettant de définir des jalons précis avec des objectifs à atteindre en vue de la mise en service et de l’exploitation de l’installation d’entreposage de matières nucléaires ;

-un plan d’actions pour mettre à jour la documentation associée à la demande de mise en service partielle associé en cours d’instruction par l’ASN.

Enfin, l’ASN considère qu’un travail conséquent reste à réaliser d’ici les mises en service partielles et la mise en service du réacteur pour la préparation des équipes chargées de la future exploitation du réacteur EPR de Flamanville 3. L’ASN poursuivra son contrôle dans ce domaine afin de s’assurer que les équipes chargées de la future exploitation du réacteur EPR de Flamanville 3 sont en capacité d’exercer pleinement leur responsabilité d’exploitant nucléaire lors de ces phases.

Découverte de déchets historiques

En mai 2016, sur la zone de chantier de l’EPR de Flamanville, des déchets enterrés ont été découverts lors de travaux liés à la réfection du réseau de collecte des eaux de pluie. D’après les premières observations d’EDF, il s’agissait de déchets non radioactifs et non dangereux au sens de la réglementation, constitués essentiellement de matériaux de construction (bétons, bois, tuyauteries métalliques, câbles). Les inscriptions trouvées sur certains déchets suggèrent qu’ils avaient été enfouis à l’époque de la construction des réacteurs 1 et 2 de Flamanville dans les années 1980.

Après en avoir informé l’ASN, EDF a engagé des opérations de retrait de ces déchets pour évacuation vers une filière adaptée aux déchets non dangereux. Au fil des évacuations, il est apparu que le volume de déchets était supérieur aux premières estimations et que certains déchets ne remplissaient pas les critères réglementaires actuels de définition des déchets non dangereux. EDF a donc dirigé ces déchets vers des filières adaptées. L’ASN a mené une inspection de contrôle des activités d’excavation en juillet 2016.

Début août 2017, EDF a informé l’ASN que des tenues de travail traditionnellement utilisées en zone nucléaire contrôlée, pour la plupart conditionnées dans des sacs, avaient été découvertes parmi les déchets. Les premiers contrôles radiologiques effectués avec des moyens mobiles se sont avérés négatifs. Des analyses approfondies ont ensuite révélé la présence de traces de cobalt 60 à la limite du seuil de détection des appareils de mesures. A la suite de cette découverte, qui a entraîné la déclaration d’un événement significatif par EDF en août 2017, les opérations d’évacuation de déchets ont été suspendues à la demande de l’ASN dans l’attente d’éléments complémentaires. EDF a ainsi réalisé un diagnostic de sols et établi un dossier de gestion des sols (déchets et terres). Ces éléments étaient nécessaires afin de répondre aux exigences de la réglementation et du guide 24 de l’ASN en matière de gestion des sols pollués en vue de la reprise des activités d’excavation, de tri et d’élimination des déchets. Cette dernière a été autorisée le 19 décembre 2017 par l’ASN.

Conservation des équipements depuis leur installation sur le chantier jusqu’à la mise en service du réacteur

Outre le contrôle de terrain réalisé lors des inspections sur site, l’ASN réalise un contrôle par sondage des écarts détectés par EDF et vérifie le traitement adéquat de ces écarts.

Au vu des délais annoncés par EDF pour la mise en service du réacteur et à la suite de la survenue d'écarts rencontrés sur des échangeurs de chaleur neufs installés sur le chantier, l’ASN a demandé à EDF de tirer pleinement le retour d’expérience des écarts liés à la conservation des équipements. EDF a analysé l’ensemble des éléments fournis par le fabricant des équipements pour identifier les causes profondes des phénomènes de corrosion relevés et définir des actions correctives appropriées. Ainsi, un programme de remise en conformité des échangeurs concernés a été défini. Un programme de contrôle d’équipements similaires lors de leur raccordement aux circuits est toujours en cours de déploiement. Enfin, EDF a précisé les modalités de conservation des équipements à l’issue des rinçages de circuit et les a mises en œuvre à travers la déclinaison d’une note de principe. L’ASN a procédé à un examen de ces modalités lors de l’inspection des 28 et 29 juin 2017 et poursuivra son contrôle sur le sujet en 2018.

L’ASN considère qu’EDF doit rester vigilante à la bonne conservation des équipements déjà installés.

Poursuite de l’instruction du dossier de demande d’autorisation de mise en service (DMES) et des dossiers de demande d’autorisation de mise en service partielle (DMESp) de Flamanville 3

L’ASN poursuit l’instruction du dossier de demande d’autorisation de mise en service déposé le 19 mars 2015. Conformément à l’article 20 du décret n°2007-1557, ce dossier contient un rapport de sûreté, les règles générales d’exploitation, une étude sur la gestion des déchets, un plan de démantèlement, un plan d’urgence interne et une mise à jour de l’étude d’impact. Ce dossier a été mis à jour le 30 juin 2017.

Les échanges techniques en cours donneront lieu à la tenue d’une réunion du Groupe Permanent d’experts en réacteurs (GPR) en juillet prochain afin de conclure sur les réponses apportées aux demandes formulées lors des précédents GPR relatifs à « l’organisation et les moyens de contrôle » (juin 2015), aux « accidents graves et études probabilistes de sûreté de niveau 2 » (octobre 2015), à la « sûreté de la manutention et de l’entreposage du combustible » (mars 2016), aux « études d’accident » (juin-juillet 2016) et aux « systèmes et agressions » (décembre 2016).

L’ASN mène également en parallèle l’instruction de deux dossiers de demandes d’autorisation de mises en service partielles :

-l’un relatif à la réalisation d’essais utilisant de la vapeur contenant du tritium dans le cadre de la préparation des essais à chaud,

-l’autre relatif à la réception des assemblages combustibles.