9 octobre 2017 •

Centrale nucléaire de Cruas-Meysse (INB n 111 et n 112)
Inspection n° INSSN-LYO-2017-0711 du 9 octobre 2017
Thème : R.1.2 – Management de la sûreté

Référence :
[1] Code de l’environnement
[2] Arrêté du 7 février 2012 fixant les règles générales relatives aux installations nucléaires de base (arrêté INB)
[3] Courrier de l’ASN CODEP-LYO-2016-006614 du 03/03/2016

Dans le cadre des attributions de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) concernant le contrôle des installations nucléaires de base en références, une inspection a eu lieu le 9 octobre 2017 à la centrale nucléaire (CNPE) de Cruas-Meysse, sur le thème du management de la sûreté.

Je vous communique ci-dessous la synthèse de l’inspection ainsi que les principales demandes et observations qui résultent des constatations faites, à cette occasion, par les inspecteurs.

Synthèse de l’inspection

L’inspection du 9 octobre 2017 portait sur le management de la sûreté. Précisément, les inspecteurs ont examiné les revues des processus du système de management intégré qui concourent à la protection des intérêts ainsi que les plans d’action mis en œuvre dans l’objectif de l’amélioration continue de la sûreté des installations.

A l’issue de l’inspection, il s’avère que les plans d’actions sont suivis et déclinés correctement pour améliorer la sûreté. Les différentes revues réalisées annuellement dans cet objectif permettent d’obtenir l’appréciation nécessaire au pilotage et aux orientations définies dans la politique « sûreté » du site.

Néanmoins, les risques majeurs identifiés dans ces revues doivent faire l’objet d’un contrôle dédié permettant de démontrer leur maîtrise et leur prise en compte

A. Demandes d’actions correctives

Sans objet.

B. Complément d’information

Prise en compte des résultats de l’analyse de risques des revues de processus

Les revues de processus, réalisées annuellement en plusieurs étapes, permettent de faire remonter dans la revue stratégique d’unité (RSU) les risques et cibles identifiés, d’abord dans les sous-processus puis dans les macro-processus. La RSU permet ensuite d’aboutir au contrat annuel de performance (CAP) qui fixe un objectif général à l’échelle du site.

Il existe sur le site un dispositif de contrôle interne destiné à maîtriser les risques de toute nature(1).

Chaque année, à partir des données issues des revues de processus, de la RSU et du CAP, le plan de contrôle interne (PCI) est élaboré permettant de « maîtriser les risques majeurs du site qui constituent le noyau dur du plan de contrôle interne » (2).

Les inspecteurs ont noté, dans la revue du macro-processus « MP3 – améliorer la sûreté », que vous identifiez 11 risques majeurs dans l’analyse de risques afférente à ce macro-processus. Pourtant, dans le PCI, les inspecteurs ont constaté que les risques majeurs 3, 6, 7, 8 et 10, identifiés dans la revue de processus, ne faisaient pas l’objet d’action de contrôle.

Demande B1 : je vous demande de m’indiquer la raison pour laquelle ces risques ne sont pas intégrés dans le plan de contrôle interne de l’année 2017.

Vos représentants ont indiqué aux inspecteurs que certains risques identifiés peuvent faire l’objet d’un contrôle prévu dans un autre processus.

Demande B2 : je vous demande de me présenter une analyse exhaustive de la prise en compte, sur le site, de tous les risques identifiés dans le macro-processus «MP3 – améliorer la sûreté».

Robustesse de la source froide vis-à-vis du colmatage

Les inspecteurs ont constaté que la revue du macro-processus «MP3 – améliorer la sûreté » fait état d’un risque sous contrôle à surveiller relatif au manque de robustesse de la source froide vis-à-vis du colmatage. Celui-ci n’est pas intégré dans le plan d’action MP3, ni dans le plan d’action «MP8 –préparer l’avenir» qui est pourtant le porteur de cette thématique.

Demande B3 : je vous demande de me démontrer la prise en compte du risque relatif au manque de robustesse de la source froide vis-à-vis du colmatage dans le macro-processus «MP8 – préparer l’avenir» et dans les améliorations à mettre en œuvre à la charge de ce macro-processus.

A cet égard, à la suite de l’événement significatif classé au niveau 2 sur l’échelle INES survenu le 1er décembre 2009 et qui concernait la perte totale de la source froide du réacteur n°4 en raison d’un colmatage des grilles d’aspiration par des végétaux charriés par le Rhône, EDF avait défini un plan d’action pour renforcer la robustesse de la source froide du site. Un programme de modifications avait été défini par EDF pour se prémunir du risque d’obturation de la prise d’eau. Ces modifications concernaient à la fois des optimisations matérielles et organisationnelles.

Ce plan d’action a été suivi et contrôlé par l’ASN, notamment à l’occasion de son inspection du 11 septembre 2012 (3) : les inspecteurs n’avaient pas relevé d’écart significatif dans la déclinaison de ce plan d’action.

Dans ces conditions, il est surprenant de constater que la source froide continue, en 2017, de présenter des risques significatifs de colmatage alors que les parades issues de l’analyse du retour d’expérience de l’événement significatif de 2009 ont bien été intégrées.

Demande B4 : je vous demande de me présenter un panorama complet du plan d’actions déployé dans le cadre l’événement significatif du 1er décembre 2009 et de dresser un bilan de réalisation de ces actions.

La question de la robustesse des sources froides des centrales nucléaires d’EDF fait l’objet depuis plusieurs années d’un suivi rapproché qui s’est décliné, dans le référentiel interne d’EDF, au travers de l’affaire parc 0503, puis des dispositions transitoires n° 222, 303 et 326.

Demande B5 : je vous demande de m’indiquer quel est l’état actuel de la robustesse de la source froide de la centrale nucléaire de Cruas au titre du référentiel interne d’EDF. Je vous demande également de m’indiquer les marges gagnées sur ce sujet après la mise en œuvre du plan d’action défini en 2009.

C. Observations

C1. Les inspecteurs notent positivement la mise en place de critères de sélection pour les arbitrages des demandes d’événement significatif à l’initiative de la filière indépendante de sûreté.

C2. La protection des intérêts repose, selon le SMI, sur les seuls macro-processus :

- MP3 : améliorer la sûreté ;
- MP4 : maîtriser les risques (partie radioprotection uniquement) ;
- MP5 : prévenir les impacts sur l’environnement.

Or, la protection des intérêts ne peut être portée que par l’ensemble des macro-processus décrits dans le SMI qui sont susceptibles d’affecter les intérêts protégés ; elle ne peut pas être assurée par les seuls MP3, MP4 et MP5.

C3. Les inspecteurs ont constaté que le taux d’écoute de la FIS s’établit, pour l’année 2017, à 30%. Il avait été relevé à 80% lors de l’inspection réalisée en 2016 (Cf. lettre de l’ASN en référence [3]).

C4. Les risques identifiés dans chaque revue de macro-processus font l’objet d’une identification et d’une détermination de leur niveau de risque. La méthodologie de détermination du niveau de risque a été modifiée et doit être déclinée à l’occasion des revues de processus de cette année. Elle conduit à déterminer d’une part une criticité sur la base de l’impact et la probabilité et d’autre part un niveau de maîtrise de ce risque appelé niveau de contrôle. Le risque est ensuite positionné dans une matrice en fonction de sa criticité et de son niveau de contrôle.

Le niveau de contrôle peut, lorsqu’il est considéré comme « élevé ou satisfaisant », conduire au positionnement du risque final dans une case « risque sous contrôle à surveiller » plutôt que dans une case « risque majeur ». Dans ces conditions, il apparaît nécessaire de s’assurer, par le biais d’évaluation dont la fréquence et les modalités sont à définir, de la fiabilité et de la pérennité de ce niveau de contrôle, garant du niveau de risque déterminé.

Vous voudrez bien me faire part sous deux mois, à l’exception des demandes pour lesquelles un délai différent est identifié, de vos remarques et observations, ainsi que des dispositions que vous prendrez pour remédier aux constatations susmentionnées. Pour les engagements que vous seriez amenés à prendre, je vous demande de bien vouloir les identifier clairement et d’en préciser, pour chacun, l’échéance de réalisation. Dans le cas où vous seriez contraint par la suite de modifier l'une de ces échéances, je vous demande également de m’en informer.

Enfin, conformément à la démarche de transparence et d’information du public instituée par les dispositions de l’article L. 125-13 du code de l’environnement, je vous informe que le présent courrier sera mis en ligne sur le site Internet de l’ASN (adresse URL : www.asn.fr).

L’adjoint à la cheffe de division de Lyon de l’ASN
signé par Olivier VEYRET

Notes

1) Sûreté, industriel, financier, image ...

2) Cf. note transverse relative au dispositif de contrôle interne référencée D5180/NE/DR/08116 indice 2.

3) Inspection référencée INSSN-LYO-2012-0810 dont la lettre de suite est disponible sur le site internet de l’ASN (www.asn.fr)