La G@zette Nucléaire sur le Net!
N°131/132, janvier 1994
LE CENTRE MANCHE ET SES FUITES

Editorial / SOMMAIRE


    On cite parfois les Etats-Unis comme l'endroit où le nucléaire a subi un blocage. Mais ce que viennent de révéler (au grand public bien sûr) les documents "déclassifiés" des années 50 suffit à faire comprendre bien des choses. On a irradié des êtres humains de surcroît handicapés pour vérifier les véritables effets des radiations? Justification: la guerre froide mais comme on a tué personne (semble-t-il) instantanément, on a arrêté et comble d'ironie, on n'a fait aucun sulvi des irradiés. Alors n'insistons pas sur les justifications. Des scientifiques ont, une fois de plus accepté un contrat juteux. Il n'y a aucune éthique là-dedans. Espérons que le gouvernement américain sera enfin contraint de reconnaître l'inanité des essais sur cobayes humains et publiera enfin les résultats. Force est de constater que cette attitude a induit une telle défiance des citoyens que le nucléaire civil est en panne et que même le militaire bat de l'aile. Attendons les "déclassifications" françaises, on ne sera peut-être pas déçu. On peut même penser que la manie du secret, bien française mais surtout bien militaire, explique certaines prises de positions de nos autorités. Le SCPRI, par exemple, en a pris à son aise avec cette fameuse nécessité de tout cacher, il est maintenant démontré qu'une telle attitude produit l'inverse de l'effet cherché. Tous les "heureux possesseurs de la bombe" ont probablement procédé à des expérimentations, la France fait certainement partie du lot nous attendons la vérité sur le sujet. Il n'est plus de mise de se dérober, qu'un bilan soit fait.
     Ce qui me surprend toujours c'est notre manque d'imagination, on est toujours pris de court par l'ignominie jusqu'où on peut aller pour l'amour de son pays ou plus simplement pour faire comme les bien pensants. Soyons mal pensants on peut se regarder dans une glace tous les matins!!
     Suite du roman de l'ANDRA:
     S'il est vrai que la société Bayard était signalée page 58 de l'inventaire National, en revanche Radiacontrôle à Pierrelatte n'apparaît pas.
     Se pose la question, inventaire certes, mais à quoi sert-il si les sites sans propriétaire peuvent être transformés en lotissement sans grand émoi des officiels?
     La fiche est explicite, le site est contaminé par du radium 226 et du tritium mais qui prend à sa charge la décontamination, qui avertit? Personne sauf les quelques écologistes qui ont fait appel à l'ACRO. Bravo et souhaitons que tout se continue bien. Sur la fiche est signalé un autre lieu, Couaillet Mauranne, précédemment occupé par la même société Bayard. Où en est-on sur ce site? Les mesures déjà faites ont conduit à l'interdiction de 3 pièces pour le personnel mais à l'extérieur qu'a-t-on mesuré?
     Quant à Pierrelatte, c'est encore mieux l'inventaire s'enrichit car ce site n'était pas recensé. La question de la CRI I-RAD est plus que pertinente:
     "Combien de déchets contaminés échappent ainsi aux circuits de récupération de l'ANDRA et sont disséminés sur le territoire, à l'insu des autorités et des populations, et dans des conditions de stockage dangereuses pour l'environnement?"
suite:
          La CRII-RAD souligne également:
     "La contamination relevée sur le site et ses abords témoigne de graves carences dans la surveillance des déchets radioactifs entreposés sur le site: conditionnements défectueux, défaut de contrôle d'étanchéité sur les fûts et les caissons, absence de suivi radiologique au niveau des bâtiments et de ses abords, etc. La pollution remonte certainement à plusieurs mois, peut-être même beaucoup plus. Les nouveaux dirigeants de l'agence - en place depuis juillet dernier - ne disposent d'aucune information sur l'origine de la contamination.
     On peut s'interroger sur la présence de déchets radioactifs dans une installation de ce type: la société Radiacontrôle gère du personnel spécialisé dans le démantèlement. Ces opérations sont effectuées sur les sites nucléaires et non au siège de Pierrelatte. Pour les responsables, la présence de fûts et de caissons contenant des déchets radioactifs s'expliquerait par des activités annexes, pratiquées dans le passé."
     Prodigieux: cette société a en toute illégalité traficoté avec des déchets et ce sans prévenir personne et sans autorisation!!! Forbach, tu n'es pas loin.
     Enfin l'année se finit bien tout de même puisque c'est l'exploitant voisin qui s'est inquiété et qui a téléphoné pour prévenir. C'est la preuve que tout le travail que nous faisons ensemble porte ses fruits.
     Grâce à l'ACRO et la CRII-RAD ainsi qu'à des voisins vigilants une pollution est débusquée, félicitations!!
     La chasse aux sites pour laboratoires est ouverte. C'est vrai il y a des déchets et il faut s'en préoccuper mais il faut d'abord assainir la situation.
     D'abord il faut sérieusement s'occuper de l'inventaire de l'ANDRA, le compléter et l'exploiter. Nos instances doivent résoudre les problèmes des "sites-qui-n'appartiennent-plus-à-personne". Et elles doivent aussi débusquer les sites "ICPE" (Installation Classée au titre de la Protection de l'Environnement) où rien ne devrait se trouver mais est-ce toujours le cas?
     A partir de cette capacité à prendre en main le passé on pourra être plus confiant. Lisez bien le dossier ACRO sur le centre Manche et vous serez convaincu qu'il y a encore beaucoup à faire.

N'OUBLIEZ PAS DE VOUS RÉABONNER.
CECI EST LE PREMIER NUMÉRO DE 1994.
BONNE ANNÉE À TOUS.

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DERNIÈRES NOUVELLES

A - 05-01-1994
LES SITES NOUVEAUX SONT ARRIVÉS

     La consultation de la carte des zones potentiellement favorables de 1983 publié dans le rapport Bataille de 1990 n'aurait guidé personne (voir la Gazette 107/108, page 30). Les 4 sites qui viennent de sortir du chapeau n'avaient pas eu l'honneur d'y figurer.:
      · Gard, secteur de Marcoule présente sous 250 m d'argile, une alternance argile/sable "favorable en principe à l'implantation d'un laboratoire". Un hic: c'est une zone sismique mais les experts affirment "...les effets d'un séisme sont très atténués en profondeur". Ce qui est sûr c'est que Marcoule-CEA est déjà là!!
      · La Haute Marne toujours l'argile à "des profondeurs favorables".
      · La Meuse sous-sol prospecté pour le pétrole, "pourrait se prêter à l'implantation d'un laboratoire", et pour finir le site attendu compte tenu de l'expérience française.
      · La Vienne et son granite "la prolongation du massif de Hiesse semble bien adaptée".
     Dans l'état du dossier, comme il ne serait pas raisonnable de choisir 2 sites argile, on s'oriente donc vers un argile sur 3 et un granite sur 1; sans beaucoup s'avancer, ce pourrait être le Gard et la Vienne.

     L'ANDRA va être aux premières loges mais elle a intérêt à montrer sa capacité à gérer correctement le passé sinon le slogan sera: L'ANDRA est bardée de bonnes intentions mais l'enfer aussi en est pavé.
B - Libération du 06/01/1994:

      · Gard: L'implantation est envisagée sur le canton de Bagnols sur-Cèze, sur la rive droite du Rhône, au nord-est de Nîmes. Le sol est argileux. Cette région, où est déjà implanté le centre d'expérimentation et de retraitement de Marcoule, est considérée comme à risque sismique mais, selon le rapport Bataille, les effets des séismes sont très atténués en profondeur.

      · Vienne: L'implantation est envisagée sur les cantons de Charroux et Civray, au 
sud de Poitiers. Le sol est granitique. Concernant la stabilité, aucun  risque de mouvements récents n'a été répertorié.

      · Haute-Marne: L'implantation est envisagée sur les cantons de Chevillon, Poissons, Joinville, Doulaincourt-Saucourt et Saint-Blin-Semilly, sur la rive gauche de la Marne au nord-ouest de Chaumont. Le sol est à dominante argileuse. Le département, selon le rapport, est relativement peu sismique malgré les failles répertoriées.
      · Meuse: L'implantation n'est pas localisée et les recherches géologiques se feront sur la presque totalité du département déjà sondé par de nombreux forages pétroliers. Le sol est argileux. La région apparaît comme particulièrement stable à l'échelle de la France.


C - 10/01/1994

     I - Le SCPRI n'a rien trouvé d'anormal à Radiacontrôle. "La radioactivité mesurée est inférieure en moyenne à celle habituellement relevée dans le sol de la région". En moyenne peut-être mais les points chauds repérés par le CMIR existent bel et bien!! Le SCPRI est égal à lui-même, c'est bien ce qui gêne le plus.     II - Les habitants de Chatain (Vienne) sont favorables à 60% au laboratoire. Le granite a donc ses chances. Attendons les choix sur des bases scientifiques!

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SOMMAIRE
EDITO
Une Basse-Loire sans nucléaire. Déversement par la Russie de déchets radioactifs. Projet de loi pour une commission d'enquête sur les centrales
Superphénix: la lutte doit s'intensifier. Enquête publique
Phébus: la fuite non concertée. Revue de presse. Programme IPSN
Le centre de stockage de la Manche: dossier ACRO
Principe du retraitement
Mission de médiation sur l'implantation de laboratoires; Questions/réponses; ACRO et la presse

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